L`immobilier comme solutionderechange
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L`immobilier comme solutionderechange
L’immobilier comme solutionderechange Malgré ses gains des trois dernières années, le marché immobilier n’a toujours pas perdu de son lustre. Présenté comme une solution de rechange à un marché obligataire que d’aucuns voient à un sommet, l’immobilier, de même que sa forme la plus dynamique (les «REIT»), demeure attrayant, quoique la sélectivité soit plus que jamais de rigueur. GÉRARD BÉRUBÉ R odrigue Julien, ex-président de Courvie, a vendu sa firme en mars 2000, au sommet du marché boursier. Pour lui, la contrepartie du marché boursier atteignant un sommet était l’immobilier. Il admet qu’une entrée dans ce marché, aujourd’hui, peut apparaître quelque peu tardive, compte tenu des plus-values de 40 % et des rendements annuels de 10 % obtenus depuis trois ans. Il croit cependant que l’immobilier résidentiel, ou les fonds d’investissement misant sur le multirésidentiel, s’appuie encore sur une conjoncture favorable, avec la faiblesse des taux d’intérêt et des taux d’inoccupation. «Certes la meilleure période pour entrer dans ce marché, c’était il y a trois ou quatre ans. Mais je suis encore acheteur aujourd’hui», analyse M. Julien. Pas à n’importe quel prix toutefois, et dans des créneaux plus spécifiques. Il pense à l’immobilier locatif résidentiel, davantage qu’au commercial et qu’aux immeubles à bureaux, en raison du faible taux d’inoccupation. Il pense aussi au multirésidentiel et aux résidences pour FÉVRIER 2002 17 L’immobilier comme solutionderechange personnes âgées. «Les anticipations de plus-value sont encore très élevées dans l’immobilier résidentiel existant, même si l’environnement demeure non inflationniste, surtout qu’il n’est toujours pas rentable de construire du neuf», met-il en exergue. Pierre Brunette, consultant financier, croit également que le pouvoir d’attraction des valeurs mobilières associées au marché immobilier demeure réel. Il pense moins aux fonds hypothécaires qu’aux fonds immobiliers, avec un intérêt plus soutenu pour les fonds accordant une prédominance aux centres commerciaux, aux immeubles à bureaux et aux résidences pour personnes âgées. Les fonds hypothécaires ont offert un rendement annuel médian de 6,6 % sur un an, de 4,5 % sur trois ans, de 5 % sur cinq ans et de 6,6 % sur dix ans, des résultats qui se comparent avantageusement à ceux offerts par les dépôts à terme. Même constat pour les fonds immobiliers, qui ont affiché un rendement annuel médian de 11,4 % sur un an, de 4,4 % sur trois ans, de 7,3 % sur cinq ans et de 2 % sur dix ans. Pierre Brunette retient cependant davantage les parts de fiducie immobilière négociées en Bourse. Connus sous le nom anglais de Real Estate Investment Trust (REIT), ces produits ont gagné en popularité depuis trois ans et se présentent comme un excellent compromis au marché obligataire qui, selon l’avis de plusieurs experts, évolue présentement à son sommet. Ils sont particulièrement appréciés pour leur capacité à générer et à distribuer du revenu auquel, rappelle Rodrigue Julien, est généralement relié un adoucissement fiscal découlant d’une récupération d’amortissement (lorsque le REIT est détenu hors REER). Sans compter le potentiel d’appréciation du prix des parts, plus faible cependant, associé à l’évolution de la valorisation des propriétés sous-jacentes. «Depuis trois ans, les REIT sont hautement attrayants au point de vue génération de revenus», a ajouté M. Brunette. Il donne l’exemple du H&R REIT, dont le taux de distribution atteint 9 % sur une base annuelle, payable mensuellement. Et c’est du vrai revenu, insiste-t-il. Ce n’est pas comme les fiducies pétrolières, dont une partie du versement comprend un remboursement de capital. On compte 14 REIT inscrits à la Bourse de Toronto, pour une capitalisation boursière cumulée de 7,2 G$ au 30 novembre dernier. Leur rendement annuel moyen en 2000 et en 2001, sous forme de distribution en espèces, oscille autour de 10 %. L’indice représentatif du secteur, le CIBC World Markets Canadian REIT, était, au 30 novembre, en hausse de 22,4 % depuis le début de l’année, à son sommet des 52 dernières semaines de 322,66. Un sommet venant signaler que le meilleur est déjà derrière nous? «Le marché immobilier s’est grandement amélioré et certains segments sont à maturité. Il faut donc s’attarder davantage à l’actif sous-jacent. Je vais également apprécier le REIT qui va conserver des flux autogénérés dans le but de solidifier sa base de capital», indique Pierre Brunette. En 2001, les trois REIT engagés dans le segment hôtelier ont été particulièrement touchés par le ralentissement économique et les événements du 11 septembre. Les Royal Host, Canadian Hotel Income Properties et Legacy Hotels ont affiché des rendements négatifs de 6,3, de 8,9 et de 8,4 % respectivement au cours des 11 premiers mois. Par contre, en tenant compte de la redistribution des revenus, seul le Legacy affichait une performance globale négative, à -0,8 %. À l’opposé, les REIT spécialisés dans le segment résidences pour personnes âgées, dans le multirésidentiel et dans les édifices à bureaux ont progressé entre 15 et 20 % dans l’intervalle. Pour Pierre Brunette, la conjoncture actuelle, dominée par la faiblesse des taux d’intérêt et du taux d’inoccupation, est encore propice à ce type de produit de placement. Avec le recul du loyer de l’argent à son niveau le plus bas en 41 ans, le refinancement hypothécaire peut venir assurer une distribution de revenus intéressante au cours des prochaines années. En revanche, un prolongement de la récession pourrait entraîner des pertes de revenus locatifs, notamment dans les immeubles à bureaux et les centres commerciaux. «Les deux points à surveiller sont une brusque remontée des taux d’intérêt et une récession plus longue que prévue.» En Bourse, l’analyste Michael Smith, de la Financière Banque Nationale, présente, dans son survol de novembre, un graphique démontrant une forte corrélation entre le rendement relatif du segment immobilier et l’indice TSE 300 au cours de la décennie. Ce mimétisme l’amène à accoler une recommandation «acheter» ou «conserver» sur la quasi-totalité des titres suivis. Parmi les immobilières inscrites, il retient essentiellement Boardwalk et sélectionne spécialement Brookfield Properties. Dans la famille des REIT, il appose sa recommandation d’achat sur Cominar et CAP, tout en mettant les projecteurs sur RioCan. Il s’est notamment réjoui que l’agence Standard & Poor’s ait décidé de reconnaître l’admissibilité des sociétés de placement immobilier à ses indices boursiers. «S&P avait jusque-là exclu les REIT, considérés comme des instruments de placement passifs. Élément charnière du changement de position, S&P reconnaît que la plupart des REIT sont aujourd’hui des sociétés d’exploitation activement gérées.» L’analyste croit que l’admissibilité de ces produits au TSE 300 n’est qu’une question de temps. Et, à ses yeux, RioCan devrait être la première à en bénéficier. Au 30 novembre dernier, elle dominait la liste des REIT avec une capitalisation boursière de 1,73 milliard. FÉVRIER 2002 19