Les Puces de Paris-Saint-Ouen - Marché aux puces de Saint-Ouen

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Les Puces de Paris-Saint-Ouen - Marché aux puces de Saint-Ouen
Les Puces de Paris-Saint-Ouen
Entretien avec leur directeur, Serge Malik
A l’Est de Paris on trouve, depuis une centaine d’années, l’un des plus importants marchés d’antiquités
du monde. Bon an mal an, le commerce y est relativement florissant, même si un vent nouveau, plus
dynamique y souffle désormais. COLLECT a rencontré le directeur des Puces, Serge Malik, membre de
l’une des deux familles à l’origine de la création, au début du XXe siècle, de cette truculente facette
du patrimoine français.
texte : Els Bracke
“Ce marché constitue un lieu de rencontre et de convivialité pour tous les
amoureux de l’art et
des antiquités.”
Votre nom est Serge Malik, vous devez donc être l’héritier de la famille Malik, venue ici vers 1925. De
quelle génération êtes-vous ? Pouvez-vous nous parler de votre famille et de leur commerce ? Pourquoi
avez-vous fait le choix de faire ce travail ? Comment
voyez-vous évoluer la situation après vous ?
Je ne suis pas ‘l’héritier de la famille Malik’ car j’ai
une sœur, un demi-frère, des nièces et des neveux,
mon frère ainé étant décédé. Mon grand-père a
construit le marché Malik. Je fais donc partie de
la 3ème génération, au même titre que ma sœur.
Mon grand-père tenait le café Picolo, tout en gérant le marché Malik, puis il a tenu une boutique
de chaussures, rue Jean-Henri Fabre. Ma mère et
ma tante vendaient de la fripe rue Jules Vallès. Ma
sœur a acquis les murs du Picolo où elle dirige
maintenant une compagnie de théâtre. Mon activité commerciale s’est bornée à aider ma mère et
ma sœur dans les boutiques. Je suis producteur
de musique et ce choix de passion m’a comblé.
Mon lien avec les Puces est très affectif et je crois
qu’elles ne sont pas près de disparaître malgré
l’adversité. On trouve ici une volonté farouche de
défendre son pré-carré.
Les clients
Certains visiteurs viennent le samedi, le dimanche
et le lundi mais, par ailleurs, un marché de professionnels fonctionne toute la semaine. Quels sont
les clients les plus importants ? D’où viennent-ils ?
D’où viennent les professionnels ? Les choses ontelles changé ces dernières années ?
On compte d’importants clients professionnels
de l’étranger (USA, Russie, Chine…). Depuis
le 11 septembre 2001, les professionnels américains sont plus frileux. Il s’agit plus de particuliers en provenance des USA. Les acheteurs les
plus ‘aisés’ semblent être les Russes, qui achètent
des pièces plutôt ‘voyantes’ et les Chinois qui,
phénomène étonnant, rachètent des meubles…
chinois !
Les marchés
Naguère, les différents marchés possédaient leurs
propres orientations ? Vernaison et Jules Vallès
étaient spécialisés dans les objets en leur état d’origine, non restauré. Vernaison s’ornait de boutiques
avec une offre spécifique. Usine était plutôt réservé
aux professionnels tandis que Vallès se concentrait
sur les nouveaux et jeunes marchands. Quelle est la
situation aujourd›hui ? Pourquoi y a-t-il cette répartition en 14 marchés et non un seul ensemble ?
Le style de chaque marché est consécutif à sa
propre histoire. La répartition des tâches est restée à peu près la même. Les marchés sont ainsi
répartis car ils furent créés par des propriétaires
indépendants qui possédaient des terrains épars
et décidèrent, de manière spontanée ou vénale,
d’en faire des marchés. C’est là tout le charme des
Puces : ne pas être structuré comme à Disneyland !
Les marchands
Aux Pays-Bas et en Belgique, on voit de moins en
moins de jeunes antiquaires. Je suppose que cela
est également le cas ici. Comment tente-t-on de résoudre cette équation ? De nouveaux commerçants
viennent-ils s’installer ici ? Qui sont ces aventuriers ?
Comment se passe l’entente avec leurs aînés ?
Il y a un turn-over d’environ 20 % par an au
profit de jeunes marchands. Tout ne se passe pas
toujours bien car le nouveau-venu à tendance à
vouloir bouger les lignes. C’est un point positif
et motivant mais cette énergie, ce sang neuf, gêne
certains anciens. De plus, en cooptant des jeunes,
il faut aussi parfois accepter un nouveau type de
marchandise.
La marchandise
La marchandise va et vient. A quel rythme ? Quelle
est la chance de retrouver ici des objets repérés plusieurs
années auparavant ? Les ventes aux enchères constituent-elles une source d’approvisionnement importante pour le renouvellement du stock ?
Il arrive que certains objets ‘voyagent’ mais c’est assez anecdotique. Le prix de ces objets, majoré avec
le temps, fait parfois sourire, surtout si le vendeur
revient au même endroit ! Les antiquaires s’achalandent aussi dans les ventes aux enchères mais
savent distinguer le bon grain de l’ivraie. Ce qui
n’est pas toujours le cas de l’acheteur amateur.
Le patrimoine
La différence entre le reste de Paris et ce quartier, c’est
que le patrimoine s’ est forgé par le travail de marchands plutôt que par un réseau d’architecture. Qu’estce que la commune de Paris fait pour le quartier ?
Ce marché est le plus grand marché d’antiquités du
monde et c’est par sa dimension, son histoire, sa
diversité qu’il constitue un patrimoine culturel et
commercial. Il a d’ailleurs été classé pour son ambiance, fait unique dans les annales. La Ville de Paris en général, la mairie du XVIIIème en particulier
et surtout la mairie de Saint-Ouen, sont de fidèles
partenaires des Puces. Par ailleurs, les événements
que nous mettons en place bénéficient de soutiens
du département, de la région et de l’Etat.
peut, il répond présent à nos sollicitations. Enfin,
n’oublions pas le ‘vrai’ patron, Philippe Amzallak,
qui s’est de suite intégré à l’esprit des Puces et reçoit
une clientèle abondante.
Quid de la sécurité ?
Dans ce genre d’endroit, la fortune est à portée de
main. Que faites-vous pour garantir la sécurité ?
Beaucoup mais pas assez… Il faudra, tôt ou tard,
que le Préfet mette en place une présence policière
permanente aux points chauds. Il faudra aussi que
la mairie modernise un peu sa réflexion quant à la
nécessité d’une vidéo-surveillance sur un tel site. Il
est, en effet, aberrant que le 4ème site touristique de
France ne dispose d’aucune surveillance ad hoc dans
ses allées et ruelles.
Quelle est votre vie quotidienne ? Pouvez-vous me
décrire une journée-type ou cela n’existe pas ?
Ça n’existe pas car chacun fait ce qui lui plait et
chaque jour est un nouveau jour. Le seul rituel
immuable est l’heure du déjeuner où chacun a ses
petites habitudes. Les restaurants des Puces, souvent excellents, sont des lieux de rencontre entre
professionnels et de convivialité pour les visiteurs.
Il ne faut pas avoir peur du petit bistro qui ne paye
pas de mine !
Des clients, des marchands
et des anecdotes…
On disait que Picasso était client ici, tout comme
d’autres grands peintres ? Quelles sont les personnalités qui fréquentent les lieux aujourd’hui ?
La liste est trop longue et je ne citerais que celle
non exhaustive des six derniers mois : Madonna,
Pierce Brosnan, Rod Stewart, Julia Roberts, Woody Allen, Gérard Depardieu, Woopy Goldberg,
Juliette, Thomas Dutronc,… Des politiques aussi : Dominique de Villepin, Julien Dray, Bruno
Leroux, Daniel Vaillant… et… Philippe Starck !
e n s av o i r p lu s
Visiter
Marché aux Puces de Saint-Ouen
Porte de Clignancourt
Paris
www.marcheauxpuces-saintouen.
com
Malgré la renommée de Philippe
Starck, liée à ‘Ma Cocotte’, les
avis sont plutôt mitigés. Nous
invitons donc les lecteurs à lui
préférer le ‘Bistrot Paul Bert’, 18
rue Paul Bert, qui sert avec le
sourire une nourriture excellente
et authentique...
‘Ma Cocotte’
Le restaurant construit par Philippe Almzalak et Philippe Starck est ouvert depuis octobre. Comment cela
a-t-il changé l’atmosphère ici ?
L’arrivée de Philippe Starck fut un gros coup de pub
pour les Puces. D’autant qu’il a joué le jeu et continue de contribuer activement au rayonnement d’un
lieu qu’il visitait régulièrement depuis longtemps.
Nous sommes souvent en contact et, dès qu’il le
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