G.4r6.1So2.VII G./Liberia/ 15 (1)- Genève, le 20 liai 1932. LA D£,.lt

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G./Liberia/ 15 (1)-
Genève, le 20 liai 1932.
LA D£,.lt^' i-E D 'ASSISTANCE DU GOUVERNE! LJT DU LIBERIA
Note, du Secrétaire général.
]_ 'j
Se référant au rappçrt
'du Comité mentionné ci-dessus,
qui a été présenté au Conseil ce matin, le Secrétaire général
a 1 ’honneur de transmettre la communication suivante, en date
du 13 mars, des meacres américain, britannique et français dudit
Comité.
Genève, le 13 mai 1932.
LIBERIA
Monsieur le Secrétaire général,
Un mémorandum
2)
, en date du 10 mars, émanant du Gou­
vernement de Sa Majesté dans le Royaume-Uni et qui a été communi­
qué au Comité du Libéria, a relaté que les représentants diplo­
matiques des Etats-Unis, du Royaume-Uni et de la France, à Mon­
rovia , agissant sur les instructions de leurs gouvernements
respectifs, avaient adressé des représentations au sujet des
violences qui auraient été commises par la "Frontier Force”
libérienne sur la côte des Krous, pendant 1 ’automne de 1931.
1 ) Document C .465.^.236.I932.VII.
2 ) Document C/ Libéria/ 9•
-2
-
Ce Memorandum relatait également la réponse
faite par le Président Barclay à ces représentations, et si‘^gnalait que le représentant de Sa Majesté à Monrovia, d ’accord
avec ses collègues français et américain, se proposait d ’en­
voyer dans le pays des Krous •an agent spécial chargé de se
rendre compte de la situation réelle.
Le vice-consul de Sa Majesté britannique à
Monrovia, M. Rydings, a été choisi pour cette mission. Il a
quitté Monrovia le 14 mars, accompagné de serviteurs indigènes
et d ’interprètes, et est revenu le 14 avril. Il a non seule­
ment questionné les officiers de la 11Front 1er Force” , des mis­
sionnaires et des commerçants, mais il a également visité
toute la région dévastée et l ’a traversée pour s ’entretenir
avec les Chefs des tribus dissidentes. Le rapport ci-joint
résume les renseignements obtenus par lui.
(signé)
”
"
CECIL
Samuel REBER Jr.
PANA FI EU.
LIBERIA
SITUATION EXISTANT SUR LA COTE DES KROUS.
Rapport concernant l ’enquête menée, s u r les instructions des
représentants diplomatiques des Gouvernements britannique,
français et américain . (14 mars - 14 avril 1933).
I. Origine des troubles.
1. Les troubles qui se sont produits sur la côte des
Krous, après la visite de la Commission d ’enquête de la Société
des Nations en 1930, étaient dûs au mécontentement déjà ancien
des indigènes en raison des actes d ’oppression et de l ’exploi­
tation amtquelles ils avaient été soumis, ainsi qu’à la mise
en circulation de rumeurs qui les ont incités à croire qu’un
changement du régime administratif était imminent.
-
2.
3
-
Ces rumeurs ont été principalement propagées p a r i m aven­
turier sans scrupule3 , un Libérien dénommé Üohn Stuart, qui, sous
les pseudonymes de- Major Frank et |$ajor Ford, allait de lieu en
lieu pour exciter les iddigènes en leur racontant que les blancs
venaient prendre la direction du pays, que la ’'Frontier Force”
libérienne allait être dissoute, qu'ils n*auraient plus d Timpôts
à payer, et autres mensonges analogues.
Ces rumeurs se répandaient
de village en village et, bien quTon ne leur fît pas entièrement
crédit, elles exerçaient tout au moins une influence perinirbatrice.
Il semble que les fonctionnaires libériens locaux aient manifes­
té peu d factivité pour combattre cec agissements ou pour rétablir
leur autorité et se soient mis à l 1abri sans chercher à faire
échec aux événements»
C ’est ainsi que le Commissaire du District de Sasstcvm, M.
Dickerson, a permis à Stuart de résider avec lui dans le "Govern­
ment Compound" et, bien qu ’il connût la propagande à laquelle se
livrait Stuart, h* a pris audtine mesure pour réfuter les déclarations
de celui-ci ou pour faire échec à son action, paraissant ainsi la
sanctionner par son abstention»
On ne saurait dire si le Commissaire de District ajoutait
foi lui-même, aux dé olara tiens en question ou s1!! était seulement
tr-»p faible pour agir.
3.
Toutefois, peu après le départ de Stuart, le Commissaire
de district quitta lui-même précipitaient Sasstown et, depuis
cette date, (juillet 1930}, jusqu’à l'arrivée du Major Grant
de la "Frontier Force" libérienne, en octobre 1931, aucun fonc­
tionnaire administratif, responsable, n ’a résidé à Sasstown.
Il semble que, pendant cette période, les fonctions de Commissaire
de district aient été déléguées à des indigènes à moitié ins­
truits qui abusèrent de leur situation et contii-buèrent ainsi
à développer l’état de désordre*
4.
L ’autre événement important, qui a contribué au mé­
contenter. ent des tribus, a eu lieu à lîana-Krou où se produi­
sirent des désordres au cours desquels les autorités libérien­
nes firent subir aux indigènes un traitement brutal et opprespour
sif. Ces troubles avaient/origine un différend entre les auto­
rités libériennes de Sinoe et les autorités de tribu du "Chiefdom
des Kra au sujet de l ’élection d ’un ’’Paramount- Chief".
Pyne Eyokan, le candidat des autorités libér.' ^nnes, mais
que la majorité des indigènes ne voulait pas accepter, fut
chassé de Mana-Krou et on détruisit ses biens. Pyne ïfyckan fit
appel aux autorités de Sinoe, et un Commissaire de district,
accompagné d ’un capitaine et d ’environ 70 hommes de la "Frontier
Force" libérienne, se rendit à Ïïana-Krou dans le but mânifeste
de procéder à une enquête et de rétablir l'ordre.
A
leur arrivée, un certain nombre de notables des tribus
et leurs femmes furent immédiatement enchaînés et emprisonnés.
Des femmes furent violées par les soldats sans que les fonc­
tionnaires essayassent d ’intervenir et les hommes faits prison­
niers furent cruellement battus. Hana-xùrou et les villages
voisins furent pillés et on réquisitionna des bestiaux, des
moutons, du riz, de l ’huile et de la volaille sans aucune in­
demnité ou règlement ultérieurs.
5.
Les événements sus-mentionnés se déroulèrent à îîana-
Krou pendant l ’automne de 1930 et, pendant les mois qui suivirent
le désordre augmenta dans la région et il semblerait que le
Gouvernement n'ait exercé qu’une autorité faible ou nulle sur
la région côtière de Sana-Krou à Sasstown.
-
5
-
II se manifesta une tendance croissante à Ignorer l ’autorité
du Gouverne.nent, à retourner
à la règle et aux coutumes des
tribus et à différer le paiement des impôts.
Les querelles
entre tribus et les haines de clans se développèrent sans obsta­
cle et sans que le Gouvernement libérien agisse effectivement
pour rétablir l ’ordre.
Si le Gouvernement libérien avait dis­
posé de fonctionnaires ayant le courage et les capacités admi­
nistratives nécessaires, il aurait dû être à même de faire face
à la situation sans recourir à un déploiement de force et, fina­
lement, à une action militaire énergique.
6.
Vers la fin d ’avril 1951, on procéda à Monrovia à une
enquête administrative sur les événements de Nena-Krou.
7.
En mai 1951, le Colonel Davis fut détaché par le Prési­
dent pour se rendre sur la côte des Krous et sur les territoires
contigus avec un détachement de la "Frontier Force1’ libérienne,
afin de procéder à une enquête sur l ’agitation signalée dans
cette région e% de rétablir l ’ordre.
Dans ses instructions au
Colonel Davis, le Président insistait sur le but pacificateur
de 1*expédition et recommandait d ’user de modération et de clé­
mence envers les tribus.
8.
Une fois arrivé à Cape Palmas, le Colonel Davis se
dirigea vers l ’intérieur du Comté de Sinoe et se heurta, à Tiempoh
aux indigènes armée;
à la suite de cett^rencontre, cinq villages
indigènes furent attaqués et incendiés.
Il semblerait que le Colonel Davis n ’ait pas réussi à enta­
mer des négociations pacifiques avec les tribus de cette région
qui se replièrent à son approche et il fut contraint de se retirer
sans avoir accompli sa mission.
-
9.
6
-
Le Colonel Davis se rendit ensuite 4 Sinoé et établit
ultérieurement,en août 1931, ses quartiers à N<ina-Krou où il fit
arrêter une cinquantaine d ’indigènes accusés de propagande sédi­
tieuse; il les fit enfermer jusqu’à son départ de Nana-Kéou, en
novembre. Cette propagande séditieuse consistait en une tendance ^
discuter l ’intervention possible de la Société des Nations dans
l’administration du Libéria et à exprimer ouvertement une préféren­
ce pour la domination des blancs.
Les indigènes qui émettaient de
tels avis étaient considérés coupables de pratiques séditieuses.
En dehors des sentiments d ’amertume et de haine qui
existent parmi les indigènes de Nana-Krou et qui ont été provoqués
par les mauvais traitements et les cruautés quo leur avaient in­
fligées en 19-30 les fonctionnâtes et les soldats libériens, lo
rétablissement par le Colonel Davis
ïïyckan,
du ”P s ramount C :-ief" Pyne
destitué, provoqua beaucoup de trouble et un ressentiment
profond.
10.
On signale que, pendant que le Colonel Dàvis se trouvait
à Nana-Krou, une razzia a été effectué® à minuit par un contingent
de la ^Frontier Foree” libérienne sur le village de Payetaye, dont
on savait que les habitants sympathisaient avec les tribus mécon­
tentes;
un grand nombre d ’hommes et de femmes ont été arrêtéoç
ligotés
et conduits à Nana-Krou. On signale également qu’avant
d’atteindre Nena-Krou, ces prisonniers ont été enfermés dans une
cabane et enfumés avec des vapeurs de poivre; ensuite, quelquesunes des femmes ont été violées par des soldats. On ajoute toutefois
que le Colonel Davis a pris des mesures disciplinaires contre les
coupables,
11.
La nouvelle des événements 6e Tirempoh et de Payetaye étant
parvenue à la connaissance des indigènes, certaines des tribus du
littoral entre Nana-Krou et Sasstown, alarmées et redoutant un trai­
tement analogue tant pour leurs hommes que pour leurs femmes, mirent
trêve à leurs luttes intestines pour s ’unir en vue d ’empêcher le
Colonel
Davis et' ses trcupes do se rendre à Sasstownn
Le Président, in­
formé de la/ situation, envoya le Major Grant et une délégation de
notables Krous de la colonie krou de Monrovia pour essayer d ’apai­
ser les tribus,
Cette démarche fut couronnée de succès et les
tribus, après avoir reçu l ’assurance qu’elles ne seraient soumises
à aucun traitement cruel ou oppressif, permirent au Colonel Davis
d 1atteindre Sasstbwn.
12.
Il n ’empêche que l ’atmosphère était tendue et chargée de
susvj^j.on, de méfiance et de crainte réciproque.
Le 9 novembre eut lieu, entre le Colonel Davis et les
chefs des tribus, une conférence où, au cours de la séance de
l ’après-midi, le Major Grant, alarmé par la présence à Old
Sasstown d ’un grand nombre d'hommes des tribus, interrompit les
débats d ’une manière -irritée et violente, accusant le ’’Paramount
Chief" Juah Nimley d ’avoir armé des guerriers dans la ville,
puis se précipita h^rs du ’’Palaver House” dans l ’intention d ’aller
chercher des soldats,
Cet acte précipité et irréfléchi du Major Grant semble
avoir été la cause directe de la rupture et du conflit armé qui
s’ensuivirent»
^e fait que, depuis le matin, la séance de la
(Conférence s ’était déroulée dans le calme est une indication que
les Indigènes ne songeaient pas à une trahison.
La séanoe fut interrompue dans le désordre; les fonc­
tionnaires libériens se retirèrent dans le camp db New Sasstown,
les suspicions des indigènes prirent un regain de force et, à
partir de ce moment, les hostilités étaient inévitables.
Des
demandes adressées au ’’Paramount Chief” Juah Nimley pour q u ’il
livrât un nombre déterminé de fusils et de couteaux indigènes ne
reçurent pas satisfaction et un dernier ultimatum, exigeant sa
reddition,
sans condition, le lendemain matin avant dix heures,
resta sans réponse.
-
8
-
II. Opérations militaires.
13. Les hostilités éclatèrent dans la matinée du 1G novenbre,
à la suite d ’une altercation entre un groupe d ’indigènes qui vou­
laient puiser de l ’eau et un contingent de la ’’frontier force” li­
bérienne aligné le long du cours d ’eau.
Old Sasstown, village de quatre à cinq cents huttès, fut
pillé et brûlé par la ” frontier force” libérienne et les indigènes
cherchèrent refuge dans 1 ’intérieur.
( voir photo).
14. Au cours des mois suivants, des opérations rudimentaires
furent dirigées contre les tribus dissidentes menées d ’une, façon
impitoyable, inhumaine et brutale, sans égards pour la vie des
femmes et enfants innocents . Ces opérations, qui se traduisirent
(x)
par la destruction d ’une quarantaine de villages
et par la
mort de soixante-douze femmes et enfants et de soixante-neuf hom­
mes , furent effectuées en exécution des nouvelles instructions du
Président de ’’subjuguer les tribus”. ( voir photos }¥.
Des villages furent attaqués la nuit à 1 ’improviste ; des
femmes et des enfants furent impitoyablement
tués dans la confu­
sion et la panique, des invalides et des enfants, brûlés vifs,
dans les huttes auxquelles les troupes avaient mis le feu.
15.
ï'oute la région de Sas s town fut ravagée et toutes les
villes, sauf New Sasst^vm, furent brûlées et pillées par la "fron­
tier force" libérienne. De ce qui était auparavant une région
peuplée de villages prospères, il ne reste que quelques poutres
carbonisées, des cendres et des ustensiles brisés. Les aliments
et les effets personnels ont été détruits par le feu ou pillés
par les soldats, et le bétail a été abattu par les troupes peur
servir à leur consommation.
ixîvoir l ’annexe) .
-
9
~
Les troupes revenaient de leurs razzias dans les villages,
chargées des tetes et des membres coupés de leurs victimes, qu"
el3.es promenaient au bout de piquas et de coutelas,
tandis que les
officiers contemplaient ce spectacle. Les orêne£5 sont restés expo­
sés en permanence dans le camp au moins jusqu’en avril 1932,
Situation actuelle (Avril 1932)
1Ç0
A 1 ’heure actuelle, quelque douze mille indigènes, giotimes
de pillages et de razzie,3 punitives pendant une période de plusieurs
mois, se sont réfugiés dans la brousse où ils se trouvent sans
abri, mal nourris et dans des corditions de souffrance et de misère
extrêmes.
Ils ne paraissent pas prêts à se rendre et n ’ont aucune
confiance dejis les assurances que leur donnent les fonctionnaires
libériens qu’en cas de reddition aucune peine de mort ou d ’empri­
sonnement ne sera infligée et que l ’on n ’aura recours à aucune
autre mesura sévère.
Les événements de 1916, c?<t, dans des circons­
tances analogues, leurs chefs et leurs notables furent pendus sans
jugement ni enquete, sont encore tout frais dans leur mémoire.
17„
Ii’ensoicble de la ceinture côtière, des frontières sep­
tentrionales du littoral Krou à la limite franco-libérienne, est
dans un état d ’effervescence et d ’hostilité -ouverte ou cachée contre
le Gouvernement du Libéria, En fait, aucun contrôle effectif n ’est
exercé actuellement sur cette région par les autorités libériennes,
la seule force de police dent disposent ces autorités est consti­
tuée par une force militaire,Celle-même recrutée parmi des tribus
sauvages* La ’’Frontier Force" libérienne est loin d ’avoir une disci-*
pline parfaite; elle est mol commandée et, dans l ’action, elle a
recours à des méthodes d ’una sauvagerie primitivec II est particu­
lièrement difficile de réfréner de tels hommes, servant au milieu
d'une population au même stade d révolution qu’eux et les faits e x ­
posés plus haut indiquent que, sous bien des rapports, une telle
discipline n ’a pas été exercée,
le 12 mai 1932
Pièce jointe : 1 annexe.
-
10
-
Annexe au paragraphe 14A u cours de 1 ’enquête , des détails ont pu être obtenus au
sujet des villages suivants qui ont été détruits, parmi les
40
villages mentionnés dans le caps du présent rapport:
Tribu de Sasstown
Old Sasstown
2 villages de pêcheurs
Jrugbikpo
Dajokpo
Wolokri
Kittiaye
Jubor
Kraediah
Kunnieh
Nonokwia
Dorbiokpo
¥essah
ville de Paleh'Wiah
Ebakieh
Sloyen
Fortiayekpo
Tribu Rolloh.
Tienkpo
Bellikpo
Gbiekpo
Baforwin
Toyan
Joprokpo
ICattakpo
Wakpo
Tribu Dioh»
Sanprokoh
Makunkpo
Eaelakpo
Yenekondro
Tri'ou WissapOo
Kavrrokpo
Flalah