Lien entre dénomination rapide et lecture chez les enfants dyslexiques
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Lien entre dénomination rapide et lecture chez les enfants dyslexiques
01_Castel.fm Page 395 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 Lien entre dénomination rapide et lecture chez les enfants dyslexiques Caroline Castel1,2, Catherine Pech-Georgel1,3, Florence George1,3 et Johannes C. Ziegler1,2* 2 1 Aix-Marseille Université CNRS, Laboratoire de Psychologie Cognitive 3 CHU de la Timone RÉSUMÉ Cette étude vise à mieux comprendre le lien entre dénomination rapide (RAN ou Rapid Automatized Naming) et lecture. Une expérience a été réalisée auprès d’enfants dyslexiques, dans laquelle nous avons comparé deux versions du RAN : une version continue et une version discrète. Dans la version continue, tous les items à dénommer sont présentés en même temps sur papier (version classique), tandis que dans la version discrète, les items sont présentés successivement sur ordinateur, réduisant ainsi l’implication des facteurs visuo-attentionels (par exemple, contrôle oculaire). Pour chaque version, nous avons comparé trois types de stimuli variant dans leur degré d’automaticité (i.e., des chiffres, des lettres et des objets). Nos résultats montrent que les enfants dyslexiques ont des déficits comparables dans les deux versions de la tâche ce qui suggère que les facteurs visuo-attentionels ne peuvent expliquer à eux seuls le déficit obtenu dans RAN. Par ailleurs, la comparaison des différents types de stimuli ne permet pas de conclure en faveur d’un déficit général lié à l’automatisation des processus cognitifs. En revanche, nos résultats suggèrent que les enfants dyslexiques ont des problèmes pour accéder de façon rapide et automatique aux représentations phonologiques, une capacité fondamentale pour l’apprentissage de la lecture. Link between rapid automatized naming and reading in dyslexic children ABSTRACT In this study, we attempt to clarify the link between rapid automatized naming (RAN) and reading. We performed an experiment with dyslexic children in which we compared two * Correspondance : Johannes Ziegler, Laboratoire de Psychologie Cognitive, CNRS et Université Provence, Case D, 3 place Victor Hugo, 13331 MARSEILLE Cedex 3. E-mail : johannes.ziegler@ univ-provence.fr Notes des auteurs : Cette recherche a été financée par une bourse doctorale allouée à Caroline Castel par la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et un contrat ANR (Jeunes chercheurs et jeunes chercheuses) à Johannes Ziegler (n° JC05-44765). Nous remercions Liliane Sprenger-Charolles ainsi qu’un expert anonyme pour leurs précieux commentaires et suggestions. L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 396 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 396 Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler versions of the RAN task: a continuous versus a discrete version. In the continuous version, all items to be named were presented simultaneously on a sheet of paper (classic RAN), whereas in the discrete version items were presented successively on a computer screen. The discrete version reduces the involvement of visuo-attentional processes (e.g., eye movement control). In each version of the task, three types of stimuli were compared. Stimuli were more or less automatized (i.e., digits, letters and objects). The results showed that dyslexic children had comparable deficits in both versions of the task suggesting that visuoattentional factors cannot by themselves explain the deficits observed in RAN. Moreover, the comparison of the three types of stimuli was not in favour of an hypothesis according to which a general deficit in skill automatization underlies dyslexia. Instead, our results suggest that children with dyslexia have problems accessing phonological representations rapidly and automatically, which is a fundamental skill required for learning to read. INTRODUCTION La dénomination rapide est un très bon prédicteur du niveau de lecture. Par exemple, lorsqu’on demande à des personnes de dénommer rapidement et à voix haute une série de chiffres (e.g., Wolf & Obregón, 1992), les personnes qui présentent de mauvaises performances dans ce type de tâche présentent souvent en parallèle des difficultés de lecture (Bowers & Wolf, 1993 ; Wolf, 1991). Ce lien a été mis en évidence pour la première fois par Denckla et Rudel (1976a ; 1976b). Ces auteurs ont développé une tâche de dénomination rapide, le RAN (pour Rapid Automatized Naming), dans laquelle la consigne est de dénommer le plus rapidement possible une série d’items présentés sur une feuille de papier. Les items peuvent être des couleurs, des chiffres, des lettres ou des images. Les auteurs ont montré que la dénomination de lettres et de chiffres est plus rapide que la dénomination de couleurs ou d’objets. Quel que soit le type de stimulus, la latence de dénomination prédit fortement le niveau de lecture. Wolf, Bally et Morris (1986) ont trouvé le même résultat pour des enfants de maternelle, mais pas pour des enfants de primaire. Chez ces enfants plus âgés, seuls les chiffres et les lettres continuaient de prédire le décodage. Badian (1993) a quant à lui montré que la dénomination rapide de lettres est un bon prédicteur de la reconnaissance de mots, tandis que la dénomination rapide d’objets est un bon prédicteur de la compréhension de texte. Si le lien entre le RAN et la lecture a été démontré dans de nombreuses études, il reste néanmoins à expliquer pourquoi la dénomination rapide est un si bon prédicteur du niveau de lecture. Différentes hypothèses ont été proposées pour expliquer ce lien : la mise en jeu de facteurs articulatoires, visuo-attentionnels, phonologiques ou liés à l’automatisation. L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 397 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 Lien entre dénomination rapide et lecture 397 Rôle des facteurs articulatoires Une première explication du lien entre lecture et dénomination rapide met en cause les processus articulatoires impliqués dans la tâche de RAN. De nombreux auteurs ont testé cette idée en étudiant si la variabilité dans la tâche de RAN est due à l’articulation même ou plutôt aux processus d’accès au lexique phonologique. Certains auteurs ont montré que ce qui différencie les participants les plus rapides des participants les plus lents dans la tâche de RAN est le temps de pause entre la dénomination de chaque item, et pas le temps d’articulation des items (voir par exemple Wolf & Obregón, 1992). Neuhaus, Foorman, Francis et Carbon (2001) ont également montré que les temps de pause entre items corrèlent avec le niveau de lecture alors que la durée d’articulation n’est que rarement liée à la lecture. Similairement, Di Filippo, Brizzolara, Chilosi, De Luca, Judica, Pecini, Spinelli et Zoccolotti (2005) ont réalisé une expérience en italien avec des enfants en école primaire. Les auteurs ont montré qu’il n’y a aucune corrélation entre les performances des enfants dans la tâche de RAN et une tâche d’articulation (i.e., compter de 101 à 110, par pas de 1). Rôle des facteurs visuo-attentionnels Une deuxième explication pour l’existence du lien entre RAN et lecture repose sur l’idée que le RAN et la lecture partagent certains processus visuo-attentionnels. En effet, la tâche de RAN, qui consiste à dénommer un ensemble d’objets, de chiffres ou de lettres, met en jeu des processus de balayage visuel, de contrôle oculaire ou encore d’attention focalisée. La dénomination d’un élément parmi d’autres est également soumise à des phénomènes de masquage latéral et d’encombrement perceptif (Pelli, Palomares & Majaj, 2004 ; Pernet, Valdois, Celsis & Démonet, 2006). Il est évident que tous ces processus sont également impliqués lorsqu’un enfant lit un texte. Il est donc possible que le fort lien existant entre dénomination rapide et lecture soit dû à ces facteurs visuo-attentionnels. Une manière de tester l’implication de ces facteurs visuo-attentionnels est de comparer la version classique continue du RAN à une version discrète de la tâche dans laquelle les items sont présentés individuellement (voir par exemple Ferrand, 1997). La mise en œuvre des processus visuoattentionnels requis dans la version classique sur papier est ainsi évitée. Cependant, à la différence de la version classique continue, pour laquelle les résultats sont clairs et homogènes, les résultats obtenus avec la version discrète diffèrent d’une étude à l’autre, que ce soit en ce qui concerne la capacité de discrimination entre bons et mauvais lecteurs (Bowers, 1989 ; L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 398 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 398 Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler Bowers, Steffy & Tate, 1988 ; Wolf et al., 1986) ou en ce qui concerne son lien avec le niveau de lecture. En effet, certains chercheurs ont montré un lien entre dénomination rapide et lecture dans la version discrète (e.g. Bowers & Swanson, 1991) alors que d’autres n’ont pas mis en évidence un tel effet (Perfetti, Finger & Hogoboam, 1978 ; Stanovich, 1981). Rôle des facteurs phonologiques Une troisième explication pour l’existence du lien entre RAN et lecture repose sur l’idée que tous les deux sont basés sur les capacités phonologiques. En effet, pour certains auteurs, le RAN ne serait qu’une sous-composante phonologique (Vellutino et al., 1996 ; Wagner, Torgesen, Laughon, Simmons & Rashotte, 1993). Selon Swan et Goswami (1997), le RAN mesurerait l’accès aux représentations phonologiques. Le fait que les enfants dyslexiques, dont le trouble phonologique est fort bien connu (eg., Bradley & Bryant, 1983, Ramus, 2001 ; Sprenger-Charolles & Colé, 2003), présentent également un déficit dans la tâche de dénomination rapide va dans le sens d’une explication phonologique. Selon la théorie du « double déficit » de Wolf et Bowers (1999), le déficit en dénomination rapide, bien que phonologique par nature, serait différent du déficit phonologique classique obtenu dans des tâches de conscience phonologique. En appliquant la logique des doubledissociations, les auteurs ont montré que des enfants dyslexiques pouvaient être subdivisés en trois groupes distincts selon leurs performances dans des tâches de conscience phonologique et de RAN : 1) ceux qui présentent un déficit dans la tâche de conscience phonologique, 2) ceux qui présentent un déficit dans la tâche de RAN, et 3) ceux qui présentent à la fois un déficit dans la tâche de conscience phonologique et dans la tâche de RAN. D’autres auteurs ont également montré que la contribution du RAN dans la prédiction du niveau de lecture est indépendante d’autres prédicteurs tels que la conscience ou la mémoire phonologique (e.g., Blachman, 1984 ; McBride-Chang & Manis, 1996). Rôle de l’automatisation Enfin, il existe une dernière hypothèse pouvant expliquer le lien entre RAN et lecture. Celle-ci met en jeu des processus relatifs à l’automatisation des compétences cognitives. En effet, la lecture est une habileté qui nécessite que ses sous-composantes soient automatisées (Laberge & Samuels, 1974). L’un des concepts clés de l’acquisition d’habiletés, quelles soient motrices ou cognitives, est l’automatisation. En d’autres termes, L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 399 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 Lien entre dénomination rapide et lecture 399 l’automatisation est le processus grâce auquel une habileté demande de moins en moins d’effort pour être réalisée à la suite d’une pratique régulière (Fitts & Posner, 1967 ; Shiffrin & Schneider, 1977). Pour Nicolson et Fawcett (1990), les troubles d’identification des mots écrits rencontrés par les enfants dyslexiques seraient dus à un déficit général d’automatisation. Pour eux, les enfants dyslexiques ne seraient pas en mesure d’automatiser certaines habiletés, ce qui expliquerait le lien entre RAN et lecture. Une manière de tester le rôle de l’automatisation dans la tâche de RAN est de soumettre les enfants à différents types de stimuli, plus ou moins automatisés, tels que des chiffres, des lettres et des objets, les chiffres étant les stimuli les plus automatisés. Les chiffres de 1 à 9 sont considérés comme des stimuli très automatisés dans la mesure où ils sont en nombre limités et parce que le lien entre leur forme et leur nom est sur-appris au cours du développement. Il en est de même pour les lettres isolées, bien que leur nombre soit plus important. Par contre, les objets sont des stimuli moins automatisés, puisque leur forme est plus variable et parce qu’il existe souvent plusieurs noms pour le même objet. En résumé, s’il est clair que le lien entre lecture et dénomination rapide ne s’explique pas par l’implication des mécanismes articulatoires, il reste à clarifier dans quelle mesure des processus visuo-attentionnels, phonologiques ou d’automatisation sont responsables de ce lien. BUT DE L’ÉTUDE Le but de l’étude est d’étudier le lien entre la dénomination rapide et la lecture chez les enfants dyslexiques. Nous avons donc réalisé une expérience dans laquelle nous nous sommes intéressés à l’importance des facteurs visuo-attentionnels et des facteurs d’automatisation dans le paradigme du RAN. Dans un premier temps, nous avons comparé les performances d’enfants dyslexiques et normo-lecteurs dans une version continue et une version discrète de la tâche de RAN. Dans la version continue, tous les items à dénommer sont présentés en même temps sur papier (version classique), tandis que dans la version discrète, les items sont présentés successivement sur ordinateur. Si les enfants dyslexiques et normo-lecteurs se différencient dans la version classique du RAN mais pas dans sa version discrète, nous pourrons alors dire que ce sont les demandes visuo-attentionnelles de la tâche de RAN qui font émerger les déficits des enfants dyslexiques typiquement observés dans RAN. Si au L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 400 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 400 Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler contraire le trouble persiste dans la version discrète du RAN, nous pourrons alors dire que ce sont les processus phonologiques liés à l’accès aux représentations phonologiques qui sont à l’origine du déficit dans la tâche de RAN. Par ailleurs, nous avons comparé la dénomination rapide de trois stimuli : des chiffres, des lettres et des objets. Si nous observons que la taille du déficit varie en fonction du degré d’automatisation des stimuli, cela signifiera que l’automatisation est un facteur important dans l’explication du lien entre RAN et lecture. Si au contraire nous n’observons pas de différence en fonction du type de stimuli, nous pourrons conclure que l’automatisation ne peut expliquer à elle seule le déficit des enfants dyslexiques dans RAN. MATÉRIEL ET MÉTHODE a – Participants Cette étude a été réalisée auprès d’une population de 24 enfants dyslexiques (9 filles, 15 garçons) à l’hôpital d’enfants de la Timone de Marseille, au sein du service de Neuropédiatrie. Les enfants étaient âgés en moyenne de 9 ans et 10 mois (étendue : 8 ; 6 – 11 ; 4). Aucun des enfants dyslexiques ne présentait de pathologie neurologique ou psychologique. Leur quotient intellectuel (QI) a été évalué grâce au WISC-III (Wechsler Intelligence Scale for Children, 3e édition, 1996). Tous ont obtenu un score à ce test supérieur à 85. Ils étaient inclus dans l’étude s’ils présentaient un retard de lecture d’au moins 18 mois au test standardisé l’Alouette (Lefavrais, 1967). 24 enfants normo-lecteurs (15 filles, 15 garçons) recrutés dans diverses écoles primaires de Marseille constituaient le groupe contrôle. Les deux groupes étaient appariés sur l’âge chronologique (étendue : 8 ; 6 – 10 ; 11). L’expérience s’est déroulée avec le consentement écrit de chaque participant. b – Procédure Les enfants dyslexiques ont été testés au sein du service de neuropédiatrie. Les enfants du groupe contrôle ont été testés dans leur école. Une session durait approximativement 45 minutes. L’ordre de passation des tâches était contrebalancé entre les participants. Les différentes épreuves étaient séparées par de petites pauses. L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 401 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 Lien entre dénomination rapide et lecture 401 c – Tâches Les enfants réalisaient 4 tâches. Le matériel des tâches de conscience phonologique et de RAN (version continue et version discrète) est présenté en annexes A et B. Lecture à voix haute. Les enfants devaient lire 10 mots réguliers, 10 mots irréguliers et 20 pseudo-mots le plus vite possible et en faisant le moins d’erreurs possible. Les items sont issus d’un test standardisé de lecture (L2MA, Chevrie-Muller, Simon & Fournier, 1997), Les stimuli ont été appariés pour le nombre de lettres (en moyenne 5.45 lettres). La fréquence des mots était de 617 par million pour les mots réguliers et de 338 par million pour les mots irréguliers selon une base de données fréquentielle récente (MANULEX, Lété, Sprenger-Charolles & Colé, 2004)1. Sur les 20 pseudo-mots, 10 ont été formés par changement ou ajout d’une lettre par rapport aux mots réguliers. Les 10 autres ont été créés sans référence à des mots existants. Tous les pseudo-mots avaient une prononciation régulière et non ambiguë. Cette tâche a été implémentée sur ordinateur de manière à obtenir les latences précises pour chaque item. La présentation des stimuli se faisait dans le même ordre que dans la tâche originale sur papier. Les réponses et les temps de réponses étaient enregistrés grâce à une clé vocale. Conscience phonologique. La tâche que nous avons utilisée était similaire à celle de Bradley et Bryant (1978, 1985). Les participants devaient détecter un intrus dans un triplet de mots présentés auditivement. Un des mots différait des deux autres soit par l’attaque (ex. seize, sac, tir), soit par la rime (ex. lard, page, mage). Le nombre de bonnes réponses a été noté (maximum 36). RAN – Version Continue (RANc). Cette tâche a été élaborée à partir de la tâche de RAN (Denckla & Rudel, 1976). On présentait à l’enfant une planche de 50 stimuli que l’enfant devait dénommer le plus rapidement possible et sans faire d’erreur. Les 50 stimuli étaient constitués de 5 dessins d’objets, lettres ou chiffres répétés 10 fois. On mesurait le temps mis pour dénommer les 50 stimuli et le nombre d’erreurs. Au total, chaque enfant voyait 4 planches de stimuli différents : une planche de lettres (A, D, O, P, S), une planche de chiffres (2, 4, 6, 7, 9) et deux planches de dessins (jupe, lampe, singe, tasse, vase pour le premier set ; bague, mouche, cage, bol, pelle pour le deuxième set). Toutes les images ont été sélectionnées dans la base de données de dénomination 1 Au moment de la réalisation de notre étude, le L2MA était la référence dans le domaine de la lecture des mots isolés. Depuis, il existe de nouveaux tests, comme par exemple l’EVALEC (Sprenger-Charolles, Colé, Bechennec & Kipffer-Piquard, 2005), dans lesquels les stimuli sont mieux appariés que dans le L2MA. L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 402 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 402 Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler d’images en français développée par Alario et Ferrand (1999, voir aussi Ferrand & Alario, 1998). Tous les noms d’objets avaient une structure consonne-voyelle-consonne. Il n’y avait pas de recouvrement phonologique entre les mots d’un même set. Pour le premier set de stimuli, l’accord sur le nom de l’objet était en moyenne de 98 % et la familiarité, mesurée sur une échelle en 5 points, était en moyenne de 3.2 (voir Alario & Ferrand, 1999 ; Ferrand & Alario, 1998). Pour le second set de stimuli, l’accord sur le nom de l’objet était en moyenne de 97 % et la familiarité était en moyenne de 3.4. RAN – Version Discrète (RANd). Nous avons implémenté la tâche classique (sur papier) de RAN sur ordinateur. Les 50 objets, chiffres ou lettres défilaient cette fois-ci sur l’écran de l’ordinateur, l’un après l’autre, dans le même ordre de présentation que celui des planches papier. Dans un premier temps une croix de fixation apparaissait, puis le dessin à nommer. Dès que l’enfant donnait sa réponse, le programme continuait et présentait l’item suivant. L’enfant devait dénommer tous les stimuli le plus vite possible sans faire d’erreur. d – Équipement Les tâches sur ordinateur étaient programmées grâce au logiciel DmDX (Forster & Forster, 2003) sur un portable DELL LATITUDE. Les réponses orales étaient enregistrées grâce à une clé vocale. RÉSULTATS a – Performances générales Le tableau I regroupe les résultats obtenus par les dyslexiques et les normo-lecteurs dans les tâches de lecture, de conscience phonologique, de dénomination rapide continue (RANc) et de dénomination rapide discrète (RANd)2 pour chaque type de stimulus. 2 Les pourcentages d’erreurs pour la tâche de dénomination rapide en version continue sont minimes (< 2 %). Dans la version discrète, des problèmes techniques ne nous permettent pas de prendre en compte le nombre d’erreurs avec confiance. Pour ces raisons, les résultats de la dénomination rapide exploités dans cette étude (performances générales, analyses corrélationnelles et classification) représentent le temps de réponse uniquement. L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 403 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 Lien entre dénomination rapide et lecture 403 Tableau I. Performances des enfants dyslexiques et normo-lecteurs dans les tâches de lecture, de conscience phonologique et de dénomination rapide (versions continue et discrète). Table I. Performance of dyslexics and controls in the reading, phonological awareness and RAN tasks (continuous and discrete formats). Dyslexiques M DS Lecture % erreurs temps en ms / item Mots réguliers Normo lecteurs M DS Déficit score z dys. p 2.92 876 5.50 235 0.83 700 2.82 143 0.74 ns 1.22 ** Mots irréguliers 31.25 1124 28.02 335 7.50 812 7.94 159 2.99 *** 1.96 *** Pseudo mots 21.46 1186 17.48 333 3.75 938 5.76 188 3.08 *** 1.32 ** début fin 27.32 21.76 17.71 12.89 8.33 3.47 7.33 4.86 2.59 *** 3.76 *** Moyenne 24.54 13.50 5.90 5.33 3.50 *** RANc temps en ms / item chiffres lettres objets 581 637 1297 114 196 375 521 491 962 98 105 201 0.62 ns 1.40 ** 1.66 *** Moyenne 838 183 658 120 1.50 *** RANd temps en ms / item chiffres lettres objets 560 628 839 125 108 145 468 508 726 46 67 107 1.99 ** 1.80 *** 1.05 ** Moyenne 672 114 566 56 1.88 *** Détection d'intrus % erreurs L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 404 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 404 Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler Notes. M = moyenne (mean) ; DS = déviation standard (standard deviation) ; % erreurs = pourcentage d’erreurs (percentage of incorrect response) ; ms / item = milliseconde par item (millisecond by item). Le déficit est représenté par le score z des dyslexiques (Z scores represent the dyslexics’deficit). z = (Xi – X nl) / SDnl, où Xi = moyenne d’un dyslexique (mean of a dyslexic participant), X nl = moyenne de tous les normolecteurs (global average of controls) et SDnl = écart-type de tous les enfants normo-lecteurs (standard deviations of controls). * p < .05, ** p < .005, *** p < .001. Lecture En lecture de mots réguliers, les enfants dyslexiques ne font pas plus d’erreurs que les enfants normo-lecteurs (t (46) = – 1.65, p = .106) mais ils sont significativement plus lents (t (46) = – 3.12, p = .003). Pour la lecture de mots irréguliers, la différence entre les deux groupes de participants est significative pour la précision de la lecture (t (46) = – 3.99, p < .001) et pour la vitesse de la lecture (t (46) = – 4.11, p < .001). Enfin, le pattern est identique pour la lecture de pseudo-mots : différence significative entre les deux groupes pour la précision (t (46) = – 4.72, p < .001) et la vitesse de lecture (t (46) = – 3.18, p = .003). Conscience phonologique Dans la tâche de conscience phonologique, on observe une forte différence entre les deux groupes, que ce soit pour détecter un intrus par le début (t (46) = – 4.85, p < .001) ou par la fin du mot (t (46) = – 6.50, p < .001). Les enfants dyslexiques font plus d’erreurs que les enfants normo-lecteurs, et cette différence est hautement significative (t (46)= – 6.29, p < .001 pour la moyenne entre début et fin). Une analyse de variance (ANOVA) à mesures répétées a permis de montrer que la différence entre les normo-lecteurs et les dyslexiques est identique pour les deux loci de détection d’intrus. En effet, l’interaction entre les facteurs groupe (normo-lecteurs vs. dyslexiques) et locus (attaque vs. rime) est non significative (F (1, 46) = .083, p = .838). Dénomination rapide La figure 1 illustre le déficit des enfants dyslexiques par rapport aux normo-lecteurs en fonction de la version de la tâche et du type de stimulus. Une analyse de variance (ANOVA) a été réalisée sur les données des 48 participants avec les facteurs groupe (dyslexiques versus normolecteurs), version de la tâche (continue versus discrète) et type de stimulus (chiffres versus lettres versus objets). Le facteur groupe a un effet hautement significatif (F (1, 41) = 17.014, p < .001). Les enfants normolecteurs réalisent plus rapidement la tâche de dénomination que les enfants dyslexiques. Le facteur version de la tâche a un effet très signifi- L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 405 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 Lien entre dénomination rapide et lecture 405 RANc RANd chiffres lettres objets 0 50 100 150 200 250 300 350 400 0 20 40 60 80 100 120 140 Déficit des enfants dyslexiques (en ms) Figure 1. Taille du déficit des enfants dyslexiques (en ms) en dénomination rapide en fonction du type de stimulus et de la version de la tâche. Figure 1. Dyslexics’deficit size (in ms) for RAN as a function of the type of stimulus and task format. catif (F (1, 41) = 44.767, p < .001). Les temps de dénomination sont plus longs dans la version discrète du RAN que dans sa version continue. L’effet du facteur type de stimulus est hautement significatif (F (2, 82) = 223.969, p < .001). Il est plus rapide de dénommer des chiffres et des lettres que des objets. L’interaction entre les facteurs version de la tâche et type de stimulus est hautement significative (F (2, 82) = 70.892, p < .001). Plus précisément, on observe une différence entre les versions continue et discrète de la tâche uniquement quand les stimuli présentés sont des objets (t (91) = – 6.301, p < .001), mais pas lorsqu’il s’agit de lettres (t (90) = .141, p = .888) ou de chiffres (t (93) = – 1.638, p = .105). L’interaction entre les facteurs groupe et version de la tâche est marginalement significative (F (1, 41) = 3.883, p = .056), ce qui semble indiquer que le déficit est plus stable dans la version continue que dans la version discrète. Toutefois, la différence entre dyslexiques et normo-lecteurs est significative, que ce soit dans la version continue ou discrète du RAN (t (46) = – 4.042, p < .001 ; t (45) = – 3.999, p < .001, respectivement). L’interaction entre les facteurs groupe et type de stimulus est significative (F (2, 82) = 5.130, p = .008). Cette interaction reflète le fait que la taille du déficit varie en fonction du type de stimulus. Toutefois, la double interaction est spécifiée par une triple interaction entre les facteurs groupe, type de stimulus et version de la tâche (F (2, 82) = 8.293, p = .001). La triple interaction indique que la taille du déficit L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 406 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 406 Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler varie en fonction du type de stimulus dans la version continue mais pas dans la version discrète (voir Figure 1). En effet, dans la version continue du RAN, nous observons une différence entre les deux groupes de participants pour les lettres (t (46) = – 3.22, p = .002) et les objets (t (46) = – 3.851, p < 001), mais pas pour les chiffres (t (46) = – 1.985, p = .053), tandis que, dans la version discrète de la tâche, une différence significative est obtenue pour les chiffres, les lettres et les objets (t (45) = – 3.325, p = .002 ; t (42) = – 4.468, p < .001 ; t (43) = – 2.952, p = .005, respectivement). b – Corrélations Des corrélations de Pearson ont été réalisées sur les données entre le niveau de lecture (vitesse et précision), la tâche de conscience phonologique et la tâche de RAN (versions continue et discrète ; chiffres, lettres et objets). Ces corrélations sont faites sur les données de tous les sujets. Les corrélations entre conscience phonologique et dénomination rapide, et entre dénomination rapide continue et dénomination rapide discrète sont présentées dans le tableau IIa. Pour plus de clarté, les résultats des corrélations entre niveau de lecture et conscience phonologique et entre niveau de lecture et RAN sont présentés dans un tableau séparé (voir Tableau IIb). En ce qui concerne la prédiction du niveau de lecture, comme l’ont montré Denckla et Rudel (1976a et 1976b), on s’attend à ce que la dénomination rapide continue de lettres, de chiffres et d’objets prédise bien la vitesse de lecture des mots réguliers, irréguliers et des pseudo-mots. Par ailleurs, si ce qui est mesuré par le RAN est bien l’accès rapide et automatique aux représentations phonologiques, alors le fait que les stimuli soient présentés dans une version discrète ne devrait pas avoir d’incidence sur la prédiction du niveau de lecture. On s’attend donc à ce que la dénomination rapide discrète de chiffres, lettres et objets prédise également bien la vitesse de lecture des mots réguliers, irréguliers et des pseudo-mots. Si par contre ce que mesure le RAN est plus lié à des facteurs visuo-attentionnels, alors on devrait observer de faibles prédictions de la dénomination rapide discrète sur le niveau de lecture. On s’attend également, et ce quelle que soit la version de la tâche, à ce que la dénomination rapide prédise moins bien la précision de la lecture que la vitesse de lecture. En ce qui concerne les différents types de stimuli, si le lien entre RAN et lecture s’explique par le niveau d’automatisation, on s’attend à ce que les stimuli les plus automatisés prédisent mieux le niveau de lecture que les stimuli moins automatisés. Pour la conscience phonologique, on s’attend à ce que cette variable prédise mieux le niveau de lecture des pseudo-mots et des mots réguliers que celui des mots irréguliers. L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 chiffres lettres objets total chiffres lettres objets total attaque rime total .353 ** .326 * .316 * .325 * .099 ns .188 ns .348 ** .304 * 1.000 .720 ** .942 ** .560 ** .552 ** .484 ** .590 ** .306 * .334 * .466 ** .468 ** 1.000 .911 ** .482 ** .467 ** .424 ** .479 ** .207 ns .273 * .432 ** .407 ** 1.000 .596 ** .570 ** .501 ** .656 ** 1.000 .738 ** .575 ** .777 ** chiffres .655 ** .652 ** .547 ** .603 ** 1.000 .475 ** .810 ** .503 ** .482 ** .706 ** .598 ** 1.000 .911 ** RANc (TR) lettres objets Notes. Conscience phono. = conscience phonologique (phonological awareness) ; * p < .05; ** p < .01. RANd (TR) RANc (TR) Conscience phono. (err.) Conscience phonologique (err.) total attaque rime .655 ** .635 ** .722 ** .717 ** 1.000 total 1.000 .832 ** .582 ** .867 ** chiffres 1.000 .875 ** RANd (TR) lettres objets 1.000 .700 ** .916 ** Table IIa. Pearson correlations (R values) between phonological awareness, RANc and RANd. Tableau IIa. Corrélations de Pearson (valeurs de R) entre la conscience phonologique, RANc et RANd. 1.000 total 01_Castel.fm Page 407 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 Lien entre dénomination rapide et lecture 407 L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 408 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 408 Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler Dans l’épreuve de conscience phonologique, nous avons distingué la détection d’intrus par l’attaque de la détection d’intrus par la rime. La corrélation entre ces deux variantes de la tâche est forte (r = .720). La détection d’intrus par l’attaque corrèle également assez bien avec la dénomination rapide (RANc : .304 < r < .348 ; RANd : .316 < r < .353), excepté pour la dénomination rapide continue de lettres (r = .188) et de chiffres (r = .099). La détection d’intrus par la rime corrèle bien avec toutes les variables de la dénomination rapide considérées (RANc : .306 < r < .468; RANd : .484 < r < .590). Pour la dénomination rapide, on observe de fortes corrélations entre les stimuli d’une même version de la tâche de RAN (RANc : .475 < r < .911 ; RANd : .582 < r < .916), et entre les deux versions de la tâche de RAN (.482 < r < .722). La conscience phonologique prédit bien (.131 < r < .607) la lecture de mots réguliers (vitesse), et de pseudo-mots (vitesse et précision). Il est également surprenant de voir que la conscience phonologique et la lecture de mots irréguliers sont fortement corrélées (vitesse : r = .557, précision : r = .607). On peut globalement voir que la détection de l’intrus par la rime prédit mieux le niveau de lecture que la détection d’intrus par l’attaque. Plus particulièrement, la détection d’intrus par l’attaque prédit toutes les variables de lecture (.256 < r < .511), exceptées la précision de la lecture de mots réguliers (r = .034) et la vitesse de lecture de pseudo-mots (r = .175). La détection d’intrus par la rime prédit toutes les variables de lecture considérées (.379 < r < .628), exceptée la précision de la lecture de mots réguliers (r = .230). Le RAN continu corrèle bien avec le niveau de lecture (.439 < r < .732), que ce soit pour la lecture de mots réguliers, de mots irréguliers ou de pseudo-mots. Le RAN discret corrèle également bien avec le niveau de lecture (.220 < r < .701), que ce soit pour la lecture de mots réguliers, de mots irréguliers ou de pseudo-mots. Si l’on regarde plus dans le détail ces corrélations entre performances dans la tâche de RAN et performances en lecture, on peut voir que, globalement, les stimuli très automatisés comme les lettres et les chiffres prédisent mieux le niveau de lecture que les objets (lettres c / d : .140 < r < .685 ; chiffres c / d : .088 < r < 662 ; objets c / d : – .048 < r < .514). Afin de voir la part unique de chaque variable (conscience phonologique et dénomination rapide) dans la prédiction du niveau de lecture, nous avons réalisé des régressions hiérarchiques (voir Tableau III). Dans ces régressions, l’âge chronologique était pris en compte dans le premier pas de la régression. Pour la conscience phonologique, la valeur entrée dans la régression hiérarchique correspondait à la moyenne entre les L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 chiffres lettres objets total chiffres lettres objets total .649 ** .640 ** .514 ** .701 ** .542 ** .601 ** .381 ** .621 ** .256 * .487 ** .387 * .088 ns .140 ns -.048 ns .220 ns .104 ns .352 * .192 ns .439 * .034 ns .230 ns .131 ns .497 ** .470 ** .491 ** .548 ** .451 ** .436 ** .392 ** .509 ** .568 ** .465 ** .557 ** .662 ** .579 ** .442 ** .691 ** .441 ** .568 ** .432 ** .598 ** .511 ** .628 ** .607 ** Mots irréguliers Vitesse Précision Notes. err. = erreurs (incorrect responses) ; TR = temps de réaction (reaction time). * p < .05, ** p < .01. RANd (TR) RANc (TR) Conscience Phonologique (err.) attaque rime total Mots réguliers Vitesse Précision .521 ** .519 ** .440 ** .553 ** .444 ** .598 ** .263 ns .599 ** .175 ns .379 ** .287 * .601 ** .636 ** .351 * .678 ** .470 ** .685 ** .470 ** .715 ** .418 ** .529 ** .504 ** Pseudo mots Vitesse Précision Table IIb. Pearson correlations (R values) between phonological awareness, RAN and reading level (speed and accuracy). Tableau IIb. Corrélations de Pearson (valeurs de R) entre la conscience phonologique, RAN et le niveau de lecture (vitesse et précision). .625 ** .604 ** .538 ** .664 ** .548 ** .621 ** .391 ** .638 ** .357 ** .495 ** .451 ** .669 ** .638 ** .404 ** .700 ** .492 ** .699 ** .495 ** .732 ** .486 ** .622 ** .589 ** Total Vitesse Précision 01_Castel.fm Page 409 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 Lien entre dénomination rapide et lecture 409 L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 410 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 410 Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler données obtenues pour la détection d’intrus par l’attaque et la détection d’intrus par la rime. Dans la première régression, toutes les valeurs de la variable RAN (version continue et discrète ; lettres, chiffres et objets) ont été regroupées pour l’analyse (RAN c + d). Si la dénomination rapide d’une part et la conscience phonologique d’autre part prédisent une part unique de la variance des performances de lecture, cela traduira une indépendance entre ces deux tâches. Tableau III. Résultats d’une régression hiérarchique montrant le pourcentage de variance expliquée (ΔR2) par l’âge, la conscience phonologique et la dénomination rapide. Table III. Results of a stepwise regression showing the amount of variance (ΔR2) explained by age, phonological awareness and RAN. Mots réguliers Vitesse Précision Mots irréguliers Vitesse Précision Pseudo mots Vitesse Précision Vitesse Total Précision 1. Age 2. RAN c + d 3. Cons. phono .004 ns .450 *** .007 ns .087 * .115 ns .000 ns .000 ns .299 *** .107 * .042 ns .420 *** .091 * .018 ns .002 ns .317 *** .399 *** .000 ns .061 * .001 ns .439 *** .023 ns .020 ns .466 *** .081 * 1. Age 2. Cons. phono 3. RAN c 4. RAN d .004 ns .163 ** .170 ** .124 ** .087 * .007 ns .074 ns .034 ns .000 ns .322 *** .067 * .017 ns .042 ns .342 *** .124 ** .045 * .018 ns .082 ns .144 * .091 * .002 ns .256 *** .203 *** .001 ns .001 ns .213 *** .167 *** .082 * .020 ns .332 *** .206 *** .009 ns 1. Age 2. Cons. phono 3. RAN d 4. RAN c .004 ns .163 ** .286 *** .008 ns .087 * .007 ns .001 ns .107 * .000 ns .322 *** .065 * .019 ns .042 ns .342 *** .152 *** .017 ns .018 ns .082 ns .226 *** .009 ns .002 ns .256 *** .098 * .106 * .001 ns .213 *** .233 *** .016 ns .020 ns .332 *** .135 ** .080 * TOTAL (R²) .461 *** .202 * .406 *** .553 *** .335 ** .462 *** .463 *** .567 *** Pas Notes. Cons.phono. = conscience phonologique (phonological awareness). Les valeurs apparaissant dans le tableau correspondent aux ΔR2. (Values in the table are ΔR2). * p < .05, ** p < .005, *** p < .001. Une fois la contribution de RAN statistiquement prise en compte, la conscience phonologique continue de prédire de manière significative la lecture de mots irréguliers (vitesse et précision), ainsi que la précision de la lecture des pseudo-mots. Une fois la contribution de la conscience phonologique et la contribution du RANc statistiquement prises en compte, le RANd continue de prédire la précision de la lecture des mots irréguliers ainsi que la vitesse de la lecture des mots réguliers et des pseudo-mots. Une fois la contribution de la conscience phonologique et la contribution du RANd statistiquement prises en compte, le RANc L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 411 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 Lien entre dénomination rapide et lecture 411 prédit encore la précision de la lecture des mots réguliers et des pseudomots. À la fois la conscience phonologique et la dénomination rapide expliquent une part unique de la variance des données sur la lecture. Les troisièmes pas de chacune des régressions reportées dans le tableau III permettent de voir que la dénomination rapide prédit toutefois mieux la lecture que la conscience phonologique. c – Classification selon l’hypothèse du Double Déficit (Wolf & Bowers, 1999) La population des 24 enfants dyslexiques a été subdivisée en plusieurs groupes sur la base de leurs performances dans les tâches de conscience phonologique et de RAN3. Le critère indiquant un déficit était situé à 1.65 écart-types en dessous de la moyenne des normo-lecteurs. Selon ce critère, 54 % (n = 13) des enfants présentent un déficit à la fois en conscience phonologique et en dénomination rapide (double déficit). Un quart de la population présente un déficit unique : 17 % (n = 4) ont un déficit en conscience phonologique, et 8 % (n = 2) ont un déficit dans RAN. Enfin, 21 % (n = 5) de notre population d’enfants dyslexiques ne présentent pas de déficit selon ce critère. DISCUSSION Dans cette expérience, des enfants normo-lecteurs et dyslexiques étaient évalués sur des tâches de conscience phonologique et de dénomination rapide. Comme dans de très nombreuses études, nos résultats suggèrent que les enfants dyslexiques présentent un fort déficit phonologique (e.g., Muneaux, Ziegler, Truc, Thomson & Goswami, 2004 ; Serniclaes, Sprenger-Charolles, Carré & Démonet, 2001 ; pour une revue, voir Sprenger-Charolles & Colé, 2003). En effet, le pourcentage d’enfants présentant un déficit phonologique, unique ou couplé à un déficit de dénomination rapide, s’élève à 71 %. Par ailleurs, et contrairement à nos attentes, la conscience phonologique s’est révélée être un bon prédicteur de la lecture des mots irréguliers. Cela constitue un résultat surprenant dans la mesure où la conscience phonologique est typiquement moins 3 Si un enfant présentait un déficit sur la version continue de RAN mais pas sur la version discrète, il était tout de même considéré comme ayant un déficit en dénomination rapide (et vice et versa). L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 412 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 412 Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler fortement liée à la lecture de mots irréguliers qu’à la lecture de pseudomots. Nous avons également montré que la tâche de RAN permettait de discriminer les enfants dyslexiques des enfants normo-lecteurs. Dans notre étude en effet, 62 % des enfants dyslexiques présentent un déficit en dénomination rapide. Plus précisément, les enfants dyslexiques étaient plus lents que les enfants normo-lecteurs pour dénommer les 50 items, et ce quels que soient le type de stimulus ou la version de la tâche utilisés, excepté pour la dénomination rapide de chiffres dans la version continue du RAN. Dans cette condition, en effet, nous n’avons pas observé de différence entre enfants dyslexiques et enfants normo-lecteurs. Par ailleurs, les deux versions du RAN corrèlent également très fortement avec le niveau de lecture. Ce résultat est un résultat classique pour la version continue du RAN, mais l’est moins pour la version discrète (eg., Perfetti et al., 1978). Dans notre étude, les deux versions de RAN se sont révélées être de bons prédicteurs de la précision de la lecture, et pas seulement de la vitesse de la lecture. À l’intérieur de chaque tâche, comme l’ont montré Denkla et Rudel (1976a ; 1976b), les trois types de stimuli corrèlent fortement avec le niveau de lecture (excepté pour la précision de la lecture des mots réguliers). DISCUSSION GÉNÉRALE Le but de cette étude était de déterminer quelle était la nature du lien entre la lecture et le RAN. La comparaison des deux versions de la tâche de RAN (continue versus discrète) nous a permis de tester l’implication des processus visuo-attentionnels. La comparaison de trois types de stimulus (i.e., chiffres, lettres et objets) nous a permis de tester les processus d’automatisation. Processus visuo-attentionnels Nos résultats montrent que le déficit des enfants dyslexiques est identique quelle que soit la version de la tâche, excepté pour les chiffres, où ce déficit est plus important dans la version discrète que dans la version continue de RAN. Les facteurs visuo-attentionnels du type contrôle des mouvements oculaires ou attention focalisée semblent donc ne pas être à la base de ce déficit. Ces résultats vont dans le sens de ceux rapportés par Hutzler, Kronbichler, Jacobs et Wimmer (2006). Dans leur étude, les participants devaient rechercher dans une chaîne de consonnes L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 413 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 Lien entre dénomination rapide et lecture 413 deux lettres identiques adjacentes. Le pattern des mouvements oculaires des enfants dyslexiques est le même que celui observé pour des enfants normo-lecteurs. Les auteurs concluent que les enfants dyslexiques ne semblent pas avoir de difficulté dans la perception de lettres et dans le contrôle des mouvements oculomoteurs. Pour autant, cela ne veut pas dire que les enfants dyslexiques ne présentent pas de déficit pour certains processus visuo-attentionnels. Facoetti, Zorzi, Cestnick, Lorusso, Molteni, Paganoni, Ulmità et Mascetti (2006) ont par exemple montré dans une tâche de détection de cible indicée que certains enfants dyslexiques ont des difficultés à inhiber leur attention pour des cibles non indicées – et donc non pertinentes – situées dans leur champ visuel droit. Un décalage vers la droite de la fenêtre attentionnelle de ces enfants serait responsable de leurs difficultés à traiter les informations graphémiques. Similairement, il a été montré récemment qu’un déficit de l’empan visuoattentionnel pouvait être présent chez des enfants dyslexiques, indépendamment de déficits phonologiques (Bosse & Valdois, 2003 ; Valdois, Bosse & Tainturier, 2004 ; Valdois, Bosse, Ans, Zorman, Carbonnel, David & Pellat, 2003). L’empan visuo-attentionnel représente le nombre d’éléments visuels distincts qui peuvent être traités en parallèle. Chez les enfants dyslexiques, ce nombre serait limité. L’empan visuo-attentionnel est également un bon prédicteur du niveau de lecture (Bosse, Tainturier & Valdois, 2007). Dans une expérience où la tâche des sujets était de reconnaître des chiffres indicés à l’intérieur de rangées de 2, 4 ou 6 éléments, Hawelka et Wimmer (2005) ont également montré que le traitement visuel en parallèle de plusieurs éléments restait problématique pour certains enfants dyslexiques. Processus d’automatisation Nos résultats montrent que dans l’absolu, la dénomination rapide de stimuli très automatisés, tels que des chiffres ou des lettres, est plus facile que la dénomination rapide de stimuli moins automatisés comme les objets. Plus précisément, dans la version continue de la tâche, le déficit des enfants dyslexiques est proportionnel au niveau d’automatisation du stimulus : au moins le stimulus est automatisé, au plus le déficit est grand. Ce résultat va dans le sens d’une implication des processus d’automatisation dans le RAN (voir Nicolson & Fawcett, 1990). Or, pour la version discrète de la tâche, le pattern de résultats n’est pas le même. En effet, lorsqu’il s’agit de dénommer rapidement des stimuli présentés un à un, le déficit des enfants dyslexiques est identique quel que soit le type de stimulus. Autrement dit, nous observons un déficit d’automatisation uniquement dans la tâche nécessitant la sélection d’un objet parmi d’autres. L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 414 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 414 Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler Ce résultat suggère que le niveau d’automatisation joue un rôle surtout lorsque le sujet doit inhiber les informations non pertinentes (les stimuli voisins) afin de sélectionner le bon item. En effet, moins les items sont automatisés, plus les informations non pertinentes peuvent interférer avec le processus de dénomination. En revanche, ces processus d’inhibition latérale sont éliminés dans la tâche discrète ce qui expliquerait l’absence de modulation du déficit par leur degré d’automatisation. En résumé, s’il existe un déficit d’automatisation, il est davantage présent dans les processus de sélection et d’inhibition latérale qu’au niveau de l’accès aux représentations phonologiques. Processus phonologiques Le résultat clé de cette recherche est la persistance du déficit des enfants dyslexiques par rapport aux enfants normo-lecteurs dans la version discrète du RAN. Etant donné que, par rapport à la version continue, la version discrète mesure de façon plus pure l’accès aux représentations phonologiques, ce résultat est donc clairement en faveur de l’hypothèse phonologique de la dyslexie. De plus, le degré d’automatisation des stimuli n’a pas d’influence dans la version discrète, ce qui suggère à nouveau que le RAN discret mesure de façon relativement pure les déficits liés à l’accès rapide des représentations phonologiques. Notons également que la taille du déficit dans la tâche discrète est au moins aussi importante, voire plus importante que celle de la tâche continue. De même, les corrélations avec la lecture sont au moins aussi importantes, voire plus importante, pour la tâche discrète que pour la tâche continue. Cette recherche montre donc que la force du RAN comme prédicteur de la lecture réside avant tout dans sa capacité à mesurer l’accès rapide aux représentations phonologiques. Il est donc logique que la tâche de RAN soit partiellement indépendante de la conscience phonologique comme le montrent nos analyses de régression. En effet, chacune de ces deux variables prédit de manière unique le niveau de lecture. La classification faite selon l’hypothèse du double déficit (Wolf & Bowers, 1999) atteste également d’une indépendance entre RAN et conscience phonologique dans la mesure où environ un quart de la population d’enfants dyslexiques testés présentait un déficit unique. De nombreuses études (voir métaanalyse de Ehri, Nunes, Stahl & Willows, 2001) rapportent des résultats concernant un entraînement spécifique de la conscience phonologique dès la maternelle. Ces entraînements sont bénéfiques pour les enfants, du moins pour une certaine période. Il serait donc également intéressant de voir si un entraînement dans des tâches de dénomination rapide pourrait aboutir au même résultat. L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 415 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 Lien entre dénomination rapide et lecture 415 Lien entre RAN et lecture Quel est donc le lien entre RAN et lecture ? Tout d’abord, il est évident que la lecture et la dénomination rapide impliquent toutes les deux une mise en relation rapide et automatique entre un domaine symbolique (lettres d’un côté, objets, chiffres et lettres de l’autre) et le domaine phonologique. En effet, les recherches sur l’apprentissage de la lecture s’accordent aujourd’hui sur l’importance des processus phonologiques (Share, 1995 ; Sprenger-Charolles, Siegel, Bechennec & Serniclaes, 2003 ; Ziegler & Goswami, 2005, 2006). Avant de savoir lire, l’enfant connaît, avec l’acquisition du langage parlé, la forme phonologique et la signification d’un grand nombre de mots. Pour apprendre la lecture, l’enfant va par la suite automatiser le lien entre les lettres et les représentations phonologiques. Ce processus de décodage phonologique est le mécanisme essentiel pour apprendre la lecture dans toutes les langues (Share, 1995 ; Ziegler & Goswami, 2005 ; 2006). RAN et lecture partagent donc un mécanisme fondamental : la mise en relation et l’automatisation du couplage entre les représentations visuelles et phonologiques4. Pour mieux comprendre le lien entre RAN et lecture, nous avons récemment entrepris un travail de modélisation à l’aide du modèle à double voie (Coltheart, Rastle, Perry, Langdon & Ziegler, 2001 ; pour une version française du modèle voir Ziegler, Perry et Coltheart, 2003). Dans le contexte de ce modèle, nous avons fait l’hypothèse simple que les déficits dans RAN reflètent des difficultés d’accès au lexique phonologique. Cette hypothèse a été simulée en rajoutant du bruit au niveau du lexique phonologique proportionnellement à la taille du déficit de chaque enfant : plus le déficit dans RAN était important pour un enfant donné, plus le niveau de bruit augmentait. Ensuite, différentes versions du modèle, avec des déficits phonologiques plus au moins importants selon la taille du déficit de chaque enfant, ont été confrontées aux mêmes mots que ceux lus par les enfants dyslexiques. Les résultats ont montré des erreurs de lecture remarquablement similaires à ceux des enfants dyslexiques (pour plus de détail, voir Ziegler, Castel, Pech-Georgel, George, Alario & Perry, 2008). Ces résultats suggèrent que rendre compte de la partie phonologique du RAN est suffisante pour simuler les déficits de lecture des enfants dyslexiques. Enfin, les études récentes en imagerie cérébrale confirment également l’importance du couplage entre représentations visuelles et phonologiques dans le lien entre RAN et lecture. En effet, Misra, Katzir, Wolf et Poldrack 4 Même chez le lecteur expert, la computation automatique et rapide de l’information phonologique continue à jouer un rôle essentiel dans la lecture (Ferrand, 1995 ; Ziegler, Ferrand, Jacobs, Rey & Grainger, 2000). L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 416 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 416 Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler (2004) ont réalisé une expérience en Imagerie par Résonance Magnétique fonctionnelle (IRMf) dans laquelle des lecteurs experts réalisaient une tâche de RAN. Les résultats de cette expérience montrent que lors de la réalisation d’une tâche de dénomination rapide, les aires cérébrales et circuits neuronaux activés sont les mêmes que ceux activés lors de la lecture de mots. De même, McCrory, Mechelli, Frith et Price (2005) ont réalisé une expérience en utilisant la technique de Tomographie par Emission de Positons (TEP) dans laquelle les performances en lecture et dénomination d’images par des adultes dyslexiques étaient comparées à celles de lecteurs experts. Par rapport au groupe contrôle, les participants dyslexiques montrent à la fois pour la lecture et la dénomination d’images une diminution de l’activation dans la même aire cérébrale, le cortex occipitotemporal gauche. Les auteurs concluent que la sous-activation dans cette région semble refléter un déficit dans l’intégration de l’information visuelle et de la phonologie, un processus nécessaire et pour la lecture et pour la dénomination d’objets. BIBLIOGRAPHIE Alario, F.-X., & Ferrand, L. (1999). A set of 400 pictures standardized for French: Norms for name agreement, image agreement, familiarity, visual complexity, image variability and age of acquisition. 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Ziegler ANNEXE A Items conscience phonologique (détection d’intrus) attaque : rime : char – chèque – vite moule – poule – four gène – bourg – bac lard – page – mage boule – jute – bêche laine – sec – peine seize – sac – tir bête – fête – nerf choc – forte – face note – moche – poche code – panne – couche biche – ville – fiche messe – mousse – jatte pire – rire – fils touche – pile – peur touche – mousse – douce vigne – seul – vote bulle – cure – mule jeune – juge – signe rare – gare – femme tasse – cube – quinze louve – goutte – route lave – chasse – langue soupe – rouge – loupe monde – mauve – chance bande – lande – genre lac – niche – nulle raide – neige – beige robe – gauche – rêve digne – chic – ligne sauf – songe –coude mince – pince – dinde rose – singe – sud rive – fine – mine vague – terre – veuf bûche – cuve – ruche L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 421 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13 Lien entre dénomination rapide et lecture 421 ANNEXE B Items dénomination rapide (RAN) – Version continue D P O S O P O S P A S D D D D A A A O S O S P A P A O S O D D D A P P O A O A O P P P S S S S D D A RAN lettres 4 7 6 9 6 7 6 9 7 2 9 4 4 4 4 2 2 2 6 9 RAN objets 1 6 9 7 2 7 9 6 9 6 4 2 4 2 7 7 7 2 6 2 6 4 7 7 9 9 6 9 4 4 2 RAN chiffres RAN objets 2 Items dénomination rapide (RAN) – Version discrète D P S … Exemple pour les lettres L’année psychologique, 2008, 108, 395-422 01_Castel.fm Page 422 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13