Lien entre dénomination rapide et lecture chez les enfants dyslexiques

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Lien entre dénomination rapide et lecture chez les enfants dyslexiques
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Lien entre dénomination rapide
et lecture chez les enfants dyslexiques
Caroline Castel1,2, Catherine Pech-Georgel1,3,
Florence George1,3 et Johannes C. Ziegler1,2*
2
1
Aix-Marseille Université
CNRS, Laboratoire de Psychologie Cognitive
3
CHU de la Timone
RÉSUMÉ
Cette étude vise à mieux comprendre le lien entre dénomination rapide
(RAN ou Rapid Automatized Naming) et lecture. Une expérience a été
réalisée auprès d’enfants dyslexiques, dans laquelle nous avons comparé
deux versions du RAN : une version continue et une version discrète. Dans
la version continue, tous les items à dénommer sont présentés en même
temps sur papier (version classique), tandis que dans la version discrète, les
items sont présentés successivement sur ordinateur, réduisant ainsi l’implication des facteurs visuo-attentionels (par exemple, contrôle oculaire). Pour
chaque version, nous avons comparé trois types de stimuli variant dans leur
degré d’automaticité (i.e., des chiffres, des lettres et des objets). Nos résultats
montrent que les enfants dyslexiques ont des déficits comparables dans les
deux versions de la tâche ce qui suggère que les facteurs visuo-attentionels
ne peuvent expliquer à eux seuls le déficit obtenu dans RAN. Par ailleurs, la
comparaison des différents types de stimuli ne permet pas de conclure en
faveur d’un déficit général lié à l’automatisation des processus cognitifs.
En revanche, nos résultats suggèrent que les enfants dyslexiques ont des
problèmes pour accéder de façon rapide et automatique aux représentations
phonologiques, une capacité fondamentale pour l’apprentissage de la lecture.
Link between rapid automatized naming and reading in dyslexic children
ABSTRACT
In this study, we attempt to clarify the link between rapid automatized naming (RAN) and
reading. We performed an experiment with dyslexic children in which we compared two
* Correspondance : Johannes Ziegler, Laboratoire de Psychologie Cognitive, CNRS et Université Provence,
Case D, 3 place Victor Hugo, 13331 MARSEILLE Cedex 3. E-mail : johannes.ziegler@ univ-provence.fr
Notes des auteurs : Cette recherche a été financée par une bourse doctorale allouée à Caroline Castel par la
région Provence-Alpes-Côte d’Azur et un contrat ANR (Jeunes chercheurs et jeunes chercheuses) à Johannes
Ziegler (n° JC05-44765). Nous remercions Liliane Sprenger-Charolles ainsi qu’un expert anonyme pour leurs
précieux commentaires et suggestions.
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versions of the RAN task: a continuous versus a discrete version. In the continuous version,
all items to be named were presented simultaneously on a sheet of paper (classic RAN),
whereas in the discrete version items were presented successively on a computer screen. The
discrete version reduces the involvement of visuo-attentional processes (e.g., eye movement
control). In each version of the task, three types of stimuli were compared. Stimuli were
more or less automatized (i.e., digits, letters and objects). The results showed that dyslexic
children had comparable deficits in both versions of the task suggesting that visuoattentional factors cannot by themselves explain the deficits observed in RAN. Moreover, the
comparison of the three types of stimuli was not in favour of an hypothesis according to
which a general deficit in skill automatization underlies dyslexia. Instead, our results suggest
that children with dyslexia have problems accessing phonological representations rapidly
and automatically, which is a fundamental skill required for learning to read.
INTRODUCTION
La dénomination rapide est un très bon prédicteur du niveau de
lecture. Par exemple, lorsqu’on demande à des personnes de dénommer
rapidement et à voix haute une série de chiffres (e.g., Wolf & Obregón,
1992), les personnes qui présentent de mauvaises performances dans ce
type de tâche présentent souvent en parallèle des difficultés de lecture
(Bowers & Wolf, 1993 ; Wolf, 1991). Ce lien a été mis en évidence pour la
première fois par Denckla et Rudel (1976a ; 1976b). Ces auteurs ont
développé une tâche de dénomination rapide, le RAN (pour Rapid
Automatized Naming), dans laquelle la consigne est de dénommer le plus
rapidement possible une série d’items présentés sur une feuille de papier.
Les items peuvent être des couleurs, des chiffres, des lettres ou des images.
Les auteurs ont montré que la dénomination de lettres et de chiffres
est plus rapide que la dénomination de couleurs ou d’objets. Quel que
soit le type de stimulus, la latence de dénomination prédit fortement le
niveau de lecture. Wolf, Bally et Morris (1986) ont trouvé le même
résultat pour des enfants de maternelle, mais pas pour des enfants de
primaire. Chez ces enfants plus âgés, seuls les chiffres et les lettres continuaient de prédire le décodage. Badian (1993) a quant à lui montré que la
dénomination rapide de lettres est un bon prédicteur de la reconnaissance
de mots, tandis que la dénomination rapide d’objets est un bon prédicteur de la compréhension de texte. Si le lien entre le RAN et la lecture a
été démontré dans de nombreuses études, il reste néanmoins à expliquer
pourquoi la dénomination rapide est un si bon prédicteur du niveau de
lecture. Différentes hypothèses ont été proposées pour expliquer ce lien :
la mise en jeu de facteurs articulatoires, visuo-attentionnels, phonologiques ou liés à l’automatisation.
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Rôle des facteurs articulatoires
Une première explication du lien entre lecture et dénomination rapide
met en cause les processus articulatoires impliqués dans la tâche de RAN.
De nombreux auteurs ont testé cette idée en étudiant si la variabilité dans
la tâche de RAN est due à l’articulation même ou plutôt aux processus
d’accès au lexique phonologique. Certains auteurs ont montré que ce qui
différencie les participants les plus rapides des participants les plus lents
dans la tâche de RAN est le temps de pause entre la dénomination de
chaque item, et pas le temps d’articulation des items (voir par exemple
Wolf & Obregón, 1992). Neuhaus, Foorman, Francis et Carbon (2001)
ont également montré que les temps de pause entre items corrèlent avec
le niveau de lecture alors que la durée d’articulation n’est que rarement
liée à la lecture. Similairement, Di Filippo, Brizzolara, Chilosi, De Luca,
Judica, Pecini, Spinelli et Zoccolotti (2005) ont réalisé une expérience en
italien avec des enfants en école primaire. Les auteurs ont montré qu’il n’y
a aucune corrélation entre les performances des enfants dans la tâche de
RAN et une tâche d’articulation (i.e., compter de 101 à 110, par pas de 1).
Rôle des facteurs visuo-attentionnels
Une deuxième explication pour l’existence du lien entre RAN et lecture
repose sur l’idée que le RAN et la lecture partagent certains processus
visuo-attentionnels. En effet, la tâche de RAN, qui consiste à dénommer
un ensemble d’objets, de chiffres ou de lettres, met en jeu des processus de
balayage visuel, de contrôle oculaire ou encore d’attention focalisée. La
dénomination d’un élément parmi d’autres est également soumise à des
phénomènes de masquage latéral et d’encombrement perceptif (Pelli,
Palomares & Majaj, 2004 ; Pernet, Valdois, Celsis & Démonet, 2006). Il est
évident que tous ces processus sont également impliqués lorsqu’un enfant
lit un texte. Il est donc possible que le fort lien existant entre dénomination rapide et lecture soit dû à ces facteurs visuo-attentionnels.
Une manière de tester l’implication de ces facteurs visuo-attentionnels
est de comparer la version classique continue du RAN à une version discrète de la tâche dans laquelle les items sont présentés individuellement
(voir par exemple Ferrand, 1997). La mise en œuvre des processus visuoattentionnels requis dans la version classique sur papier est ainsi évitée.
Cependant, à la différence de la version classique continue, pour laquelle
les résultats sont clairs et homogènes, les résultats obtenus avec la version
discrète diffèrent d’une étude à l’autre, que ce soit en ce qui concerne la
capacité de discrimination entre bons et mauvais lecteurs (Bowers, 1989 ;
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Bowers, Steffy & Tate, 1988 ; Wolf et al., 1986) ou en ce qui concerne son
lien avec le niveau de lecture. En effet, certains chercheurs ont montré un
lien entre dénomination rapide et lecture dans la version discrète (e.g.
Bowers & Swanson, 1991) alors que d’autres n’ont pas mis en évidence un
tel effet (Perfetti, Finger & Hogoboam, 1978 ; Stanovich, 1981).
Rôle des facteurs phonologiques
Une troisième explication pour l’existence du lien entre RAN et
lecture repose sur l’idée que tous les deux sont basés sur les capacités
phonologiques. En effet, pour certains auteurs, le RAN ne serait qu’une
sous-composante phonologique (Vellutino et al., 1996 ; Wagner, Torgesen,
Laughon, Simmons & Rashotte, 1993). Selon Swan et Goswami (1997), le
RAN mesurerait l’accès aux représentations phonologiques. Le fait que
les enfants dyslexiques, dont le trouble phonologique est fort bien connu
(eg., Bradley & Bryant, 1983, Ramus, 2001 ; Sprenger-Charolles & Colé,
2003), présentent également un déficit dans la tâche de dénomination
rapide va dans le sens d’une explication phonologique.
Selon la théorie du « double déficit » de Wolf et Bowers (1999), le
déficit en dénomination rapide, bien que phonologique par nature,
serait différent du déficit phonologique classique obtenu dans des tâches
de conscience phonologique. En appliquant la logique des doubledissociations, les auteurs ont montré que des enfants dyslexiques pouvaient être subdivisés en trois groupes distincts selon leurs performances
dans des tâches de conscience phonologique et de RAN : 1) ceux qui
présentent un déficit dans la tâche de conscience phonologique, 2) ceux
qui présentent un déficit dans la tâche de RAN, et 3) ceux qui présentent
à la fois un déficit dans la tâche de conscience phonologique et dans la
tâche de RAN. D’autres auteurs ont également montré que la contribution du RAN dans la prédiction du niveau de lecture est indépendante
d’autres prédicteurs tels que la conscience ou la mémoire phonologique
(e.g., Blachman, 1984 ; McBride-Chang & Manis, 1996).
Rôle de l’automatisation
Enfin, il existe une dernière hypothèse pouvant expliquer le lien entre
RAN et lecture. Celle-ci met en jeu des processus relatifs à l’automatisation des compétences cognitives. En effet, la lecture est une habileté qui
nécessite que ses sous-composantes soient automatisées (Laberge &
Samuels, 1974). L’un des concepts clés de l’acquisition d’habiletés, quelles
soient motrices ou cognitives, est l’automatisation. En d’autres termes,
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l’automatisation est le processus grâce auquel une habileté demande de
moins en moins d’effort pour être réalisée à la suite d’une pratique régulière (Fitts & Posner, 1967 ; Shiffrin & Schneider, 1977). Pour Nicolson et
Fawcett (1990), les troubles d’identification des mots écrits rencontrés par
les enfants dyslexiques seraient dus à un déficit général d’automatisation.
Pour eux, les enfants dyslexiques ne seraient pas en mesure d’automatiser
certaines habiletés, ce qui expliquerait le lien entre RAN et lecture.
Une manière de tester le rôle de l’automatisation dans la tâche de
RAN est de soumettre les enfants à différents types de stimuli, plus ou
moins automatisés, tels que des chiffres, des lettres et des objets, les
chiffres étant les stimuli les plus automatisés. Les chiffres de 1 à 9 sont
considérés comme des stimuli très automatisés dans la mesure où ils sont
en nombre limités et parce que le lien entre leur forme et leur nom est
sur-appris au cours du développement. Il en est de même pour les lettres
isolées, bien que leur nombre soit plus important. Par contre, les objets
sont des stimuli moins automatisés, puisque leur forme est plus variable
et parce qu’il existe souvent plusieurs noms pour le même objet.
En résumé, s’il est clair que le lien entre lecture et dénomination
rapide ne s’explique pas par l’implication des mécanismes articulatoires, il
reste à clarifier dans quelle mesure des processus visuo-attentionnels,
phonologiques ou d’automatisation sont responsables de ce lien.
BUT DE L’ÉTUDE
Le but de l’étude est d’étudier le lien entre la dénomination rapide et
la lecture chez les enfants dyslexiques. Nous avons donc réalisé une expérience dans laquelle nous nous sommes intéressés à l’importance des
facteurs visuo-attentionnels et des facteurs d’automatisation dans le
paradigme du RAN. Dans un premier temps, nous avons comparé les
performances d’enfants dyslexiques et normo-lecteurs dans une version
continue et une version discrète de la tâche de RAN. Dans la version
continue, tous les items à dénommer sont présentés en même temps sur
papier (version classique), tandis que dans la version discrète, les items
sont présentés successivement sur ordinateur. Si les enfants dyslexiques et
normo-lecteurs se différencient dans la version classique du RAN mais
pas dans sa version discrète, nous pourrons alors dire que ce sont les
demandes visuo-attentionnelles de la tâche de RAN qui font émerger les
déficits des enfants dyslexiques typiquement observés dans RAN. Si au
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contraire le trouble persiste dans la version discrète du RAN, nous
pourrons alors dire que ce sont les processus phonologiques liés à l’accès
aux représentations phonologiques qui sont à l’origine du déficit dans la
tâche de RAN. Par ailleurs, nous avons comparé la dénomination rapide
de trois stimuli : des chiffres, des lettres et des objets. Si nous observons
que la taille du déficit varie en fonction du degré d’automatisation des
stimuli, cela signifiera que l’automatisation est un facteur important dans
l’explication du lien entre RAN et lecture. Si au contraire nous n’observons
pas de différence en fonction du type de stimuli, nous pourrons conclure
que l’automatisation ne peut expliquer à elle seule le déficit des enfants
dyslexiques dans RAN.
MATÉRIEL ET MÉTHODE
a – Participants
Cette étude a été réalisée auprès d’une population de 24 enfants dyslexiques (9 filles, 15 garçons) à l’hôpital d’enfants de la Timone de Marseille,
au sein du service de Neuropédiatrie. Les enfants étaient âgés en moyenne
de 9 ans et 10 mois (étendue : 8 ; 6 – 11 ; 4). Aucun des enfants dyslexiques
ne présentait de pathologie neurologique ou psychologique. Leur quotient
intellectuel (QI) a été évalué grâce au WISC-III (Wechsler Intelligence
Scale for Children, 3e édition, 1996). Tous ont obtenu un score à ce test
supérieur à 85. Ils étaient inclus dans l’étude s’ils présentaient un retard de
lecture d’au moins 18 mois au test standardisé l’Alouette (Lefavrais, 1967).
24 enfants normo-lecteurs (15 filles, 15 garçons) recrutés dans diverses
écoles primaires de Marseille constituaient le groupe contrôle. Les deux
groupes étaient appariés sur l’âge chronologique (étendue : 8 ; 6 – 10 ; 11).
L’expérience s’est déroulée avec le consentement écrit de chaque
participant.
b – Procédure
Les enfants dyslexiques ont été testés au sein du service de neuropédiatrie. Les enfants du groupe contrôle ont été testés dans leur école.
Une session durait approximativement 45 minutes. L’ordre de passation
des tâches était contrebalancé entre les participants. Les différentes
épreuves étaient séparées par de petites pauses.
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c – Tâches
Les enfants réalisaient 4 tâches. Le matériel des tâches de conscience
phonologique et de RAN (version continue et version discrète) est présenté
en annexes A et B.
Lecture à voix haute. Les enfants devaient lire 10 mots réguliers,
10 mots irréguliers et 20 pseudo-mots le plus vite possible et en faisant le
moins d’erreurs possible. Les items sont issus d’un test standardisé de
lecture (L2MA, Chevrie-Muller, Simon & Fournier, 1997), Les stimuli ont
été appariés pour le nombre de lettres (en moyenne 5.45 lettres). La
fréquence des mots était de 617 par million pour les mots réguliers et de
338 par million pour les mots irréguliers selon une base de données
fréquentielle récente (MANULEX, Lété, Sprenger-Charolles & Colé,
2004)1. Sur les 20 pseudo-mots, 10 ont été formés par changement ou
ajout d’une lettre par rapport aux mots réguliers. Les 10 autres ont été
créés sans référence à des mots existants. Tous les pseudo-mots avaient
une prononciation régulière et non ambiguë. Cette tâche a été implémentée sur ordinateur de manière à obtenir les latences précises pour
chaque item. La présentation des stimuli se faisait dans le même ordre
que dans la tâche originale sur papier. Les réponses et les temps de
réponses étaient enregistrés grâce à une clé vocale.
Conscience phonologique. La tâche que nous avons utilisée était similaire à celle de Bradley et Bryant (1978, 1985). Les participants devaient
détecter un intrus dans un triplet de mots présentés auditivement. Un des
mots différait des deux autres soit par l’attaque (ex. seize, sac, tir), soit par
la rime (ex. lard, page, mage). Le nombre de bonnes réponses a été noté
(maximum 36).
RAN – Version Continue (RANc). Cette tâche a été élaborée à partir
de la tâche de RAN (Denckla & Rudel, 1976). On présentait à l’enfant une
planche de 50 stimuli que l’enfant devait dénommer le plus rapidement
possible et sans faire d’erreur. Les 50 stimuli étaient constitués de 5 dessins
d’objets, lettres ou chiffres répétés 10 fois. On mesurait le temps mis pour
dénommer les 50 stimuli et le nombre d’erreurs.
Au total, chaque enfant voyait 4 planches de stimuli différents : une
planche de lettres (A, D, O, P, S), une planche de chiffres (2, 4, 6, 7, 9) et
deux planches de dessins (jupe, lampe, singe, tasse, vase pour le premier
set ; bague, mouche, cage, bol, pelle pour le deuxième set). Toutes les
images ont été sélectionnées dans la base de données de dénomination
1
Au moment de la réalisation de notre étude, le L2MA était la référence dans le domaine de la lecture des mots
isolés. Depuis, il existe de nouveaux tests, comme par exemple l’EVALEC (Sprenger-Charolles, Colé, Bechennec
& Kipffer-Piquard, 2005), dans lesquels les stimuli sont mieux appariés que dans le L2MA.
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d’images en français développée par Alario et Ferrand (1999, voir aussi
Ferrand & Alario, 1998). Tous les noms d’objets avaient une structure
consonne-voyelle-consonne. Il n’y avait pas de recouvrement phonologique entre les mots d’un même set. Pour le premier set de stimuli,
l’accord sur le nom de l’objet était en moyenne de 98 % et la familiarité,
mesurée sur une échelle en 5 points, était en moyenne de 3.2 (voir Alario
& Ferrand, 1999 ; Ferrand & Alario, 1998). Pour le second set de stimuli,
l’accord sur le nom de l’objet était en moyenne de 97 % et la familiarité
était en moyenne de 3.4.
RAN – Version Discrète (RANd). Nous avons implémenté la tâche
classique (sur papier) de RAN sur ordinateur. Les 50 objets, chiffres ou
lettres défilaient cette fois-ci sur l’écran de l’ordinateur, l’un après l’autre,
dans le même ordre de présentation que celui des planches papier. Dans
un premier temps une croix de fixation apparaissait, puis le dessin à
nommer. Dès que l’enfant donnait sa réponse, le programme continuait
et présentait l’item suivant. L’enfant devait dénommer tous les stimuli le
plus vite possible sans faire d’erreur.
d – Équipement
Les tâches sur ordinateur étaient programmées grâce au logiciel
DmDX (Forster & Forster, 2003) sur un portable DELL LATITUDE. Les
réponses orales étaient enregistrées grâce à une clé vocale.
RÉSULTATS
a – Performances générales
Le tableau I regroupe les résultats obtenus par les dyslexiques et les
normo-lecteurs dans les tâches de lecture, de conscience phonologique,
de dénomination rapide continue (RANc) et de dénomination rapide
discrète (RANd)2 pour chaque type de stimulus.
2
Les pourcentages d’erreurs pour la tâche de dénomination rapide en version continue sont minimes (< 2 %).
Dans la version discrète, des problèmes techniques ne nous permettent pas de prendre en compte le nombre
d’erreurs avec confiance. Pour ces raisons, les résultats de la dénomination rapide exploités dans cette étude
(performances générales, analyses corrélationnelles et classification) représentent le temps de réponse
uniquement.
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Tableau I. Performances des enfants dyslexiques et normo-lecteurs
dans les tâches de lecture, de conscience phonologique
et de dénomination rapide (versions continue et discrète).
Table I. Performance of dyslexics and controls in the reading, phonological
awareness and RAN tasks (continuous and discrete formats).
Dyslexiques
M
DS
Lecture
% erreurs
temps en ms / item
Mots réguliers
Normo lecteurs
M
DS
Déficit
score z dys. p
2.92
876
5.50
235
0.83
700
2.82
143
0.74 ns
1.22 **
Mots irréguliers
31.25
1124
28.02
335
7.50
812
7.94
159
2.99 ***
1.96 ***
Pseudo mots
21.46
1186
17.48
333
3.75
938
5.76
188
3.08 ***
1.32 **
début
fin
27.32
21.76
17.71
12.89
8.33
3.47
7.33
4.86
2.59 ***
3.76 ***
Moyenne
24.54
13.50
5.90
5.33
3.50 ***
RANc
temps en ms / item
chiffres
lettres
objets
581
637
1297
114
196
375
521
491
962
98
105
201
0.62 ns
1.40 **
1.66 ***
Moyenne
838
183
658
120
1.50 ***
RANd
temps en ms / item
chiffres
lettres
objets
560
628
839
125
108
145
468
508
726
46
67
107
1.99 **
1.80 ***
1.05 **
Moyenne
672
114
566
56
1.88 ***
Détection d'intrus
% erreurs
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Notes. M = moyenne (mean) ; DS = déviation standard (standard deviation) ; % erreurs = pourcentage
d’erreurs (percentage of incorrect response) ; ms / item = milliseconde par item (millisecond by item).
Le déficit est représenté par le score z des dyslexiques (Z scores represent the dyslexics’deficit). z = (Xi – X nl) /
SDnl, où Xi = moyenne d’un dyslexique (mean of a dyslexic participant), X nl = moyenne de tous les normolecteurs (global average of controls) et SDnl = écart-type de tous les enfants normo-lecteurs
(standard deviations of controls).
* p < .05, ** p < .005, *** p < .001.
Lecture
En lecture de mots réguliers, les enfants dyslexiques ne font pas plus
d’erreurs que les enfants normo-lecteurs (t (46) = – 1.65, p = .106) mais ils
sont significativement plus lents (t (46) = – 3.12, p = .003). Pour la lecture
de mots irréguliers, la différence entre les deux groupes de participants est
significative pour la précision de la lecture (t (46) = – 3.99, p < .001) et
pour la vitesse de la lecture (t (46) = – 4.11, p < .001). Enfin, le pattern est
identique pour la lecture de pseudo-mots : différence significative entre
les deux groupes pour la précision (t (46) = – 4.72, p < .001) et la vitesse de
lecture (t (46) = – 3.18, p = .003).
Conscience phonologique
Dans la tâche de conscience phonologique, on observe une forte
différence entre les deux groupes, que ce soit pour détecter un intrus par
le début (t (46) = – 4.85, p < .001) ou par la fin du mot (t (46) = – 6.50,
p < .001). Les enfants dyslexiques font plus d’erreurs que les enfants
normo-lecteurs, et cette différence est hautement significative (t (46)= – 6.29,
p < .001 pour la moyenne entre début et fin). Une analyse de variance
(ANOVA) à mesures répétées a permis de montrer que la différence entre
les normo-lecteurs et les dyslexiques est identique pour les deux loci de
détection d’intrus. En effet, l’interaction entre les facteurs groupe
(normo-lecteurs vs. dyslexiques) et locus (attaque vs. rime) est non
significative (F (1, 46) = .083, p = .838).
Dénomination rapide
La figure 1 illustre le déficit des enfants dyslexiques par rapport aux
normo-lecteurs en fonction de la version de la tâche et du type de stimulus.
Une analyse de variance (ANOVA) a été réalisée sur les données des
48 participants avec les facteurs groupe (dyslexiques versus normolecteurs), version de la tâche (continue versus discrète) et type de stimulus
(chiffres versus lettres versus objets). Le facteur groupe a un effet hautement significatif (F (1, 41) = 17.014, p < .001). Les enfants normolecteurs réalisent plus rapidement la tâche de dénomination que les
enfants dyslexiques. Le facteur version de la tâche a un effet très signifi-
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RANc
RANd
chiffres
lettres
objets
0
50
100
150
200
250
300
350
400
0
20
40
60
80
100
120
140
Déficit des enfants dyslexiques (en ms)
Figure 1. Taille du déficit des enfants dyslexiques (en ms) en dénomination
rapide en fonction du type de stimulus et de la version de la tâche.
Figure 1. Dyslexics’deficit size (in ms) for RAN as a function of the type of stimulus
and task format.
catif (F (1, 41) = 44.767, p < .001). Les temps de dénomination sont plus
longs dans la version discrète du RAN que dans sa version continue.
L’effet du facteur type de stimulus est hautement significatif (F (2, 82) =
223.969, p < .001). Il est plus rapide de dénommer des chiffres et des
lettres que des objets.
L’interaction entre les facteurs version de la tâche et type de stimulus est
hautement significative (F (2, 82) = 70.892, p < .001). Plus précisément, on
observe une différence entre les versions continue et discrète de la tâche
uniquement quand les stimuli présentés sont des objets (t (91) = – 6.301,
p < .001), mais pas lorsqu’il s’agit de lettres (t (90) = .141, p = .888) ou de
chiffres (t (93) = – 1.638, p = .105). L’interaction entre les facteurs groupe et
version de la tâche est marginalement significative (F (1, 41) = 3.883,
p = .056), ce qui semble indiquer que le déficit est plus stable dans la
version continue que dans la version discrète. Toutefois, la différence entre
dyslexiques et normo-lecteurs est significative, que ce soit dans la version
continue ou discrète du RAN (t (46) = – 4.042, p < .001 ; t (45) = – 3.999,
p < .001, respectivement). L’interaction entre les facteurs groupe et type de
stimulus est significative (F (2, 82) = 5.130, p = .008). Cette interaction
reflète le fait que la taille du déficit varie en fonction du type de stimulus.
Toutefois, la double interaction est spécifiée par une triple interaction
entre les facteurs groupe, type de stimulus et version de la tâche (F (2, 82)
= 8.293, p = .001). La triple interaction indique que la taille du déficit
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406
Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler
varie en fonction du type de stimulus dans la version continue mais pas
dans la version discrète (voir Figure 1). En effet, dans la version continue
du RAN, nous observons une différence entre les deux groupes de participants pour les lettres (t (46) = – 3.22, p = .002) et les objets (t (46) = – 3.851,
p < 001), mais pas pour les chiffres (t (46) = – 1.985, p = .053), tandis que,
dans la version discrète de la tâche, une différence significative est
obtenue pour les chiffres, les lettres et les objets (t (45) = – 3.325, p = .002 ;
t (42) = – 4.468, p < .001 ; t (43) = – 2.952, p = .005, respectivement).
b – Corrélations
Des corrélations de Pearson ont été réalisées sur les données entre le
niveau de lecture (vitesse et précision), la tâche de conscience phonologique et la tâche de RAN (versions continue et discrète ; chiffres, lettres et
objets). Ces corrélations sont faites sur les données de tous les sujets. Les
corrélations entre conscience phonologique et dénomination rapide, et
entre dénomination rapide continue et dénomination rapide discrète sont
présentées dans le tableau IIa. Pour plus de clarté, les résultats des corrélations entre niveau de lecture et conscience phonologique et entre niveau de
lecture et RAN sont présentés dans un tableau séparé (voir Tableau IIb).
En ce qui concerne la prédiction du niveau de lecture, comme l’ont
montré Denckla et Rudel (1976a et 1976b), on s’attend à ce que la dénomination rapide continue de lettres, de chiffres et d’objets prédise bien la vitesse
de lecture des mots réguliers, irréguliers et des pseudo-mots. Par ailleurs, si
ce qui est mesuré par le RAN est bien l’accès rapide et automatique aux
représentations phonologiques, alors le fait que les stimuli soient présentés
dans une version discrète ne devrait pas avoir d’incidence sur la prédiction
du niveau de lecture. On s’attend donc à ce que la dénomination rapide discrète de chiffres, lettres et objets prédise également bien la vitesse de lecture
des mots réguliers, irréguliers et des pseudo-mots. Si par contre ce que
mesure le RAN est plus lié à des facteurs visuo-attentionnels, alors on devrait
observer de faibles prédictions de la dénomination rapide discrète sur le
niveau de lecture. On s’attend également, et ce quelle que soit la version de la
tâche, à ce que la dénomination rapide prédise moins bien la précision de la
lecture que la vitesse de lecture. En ce qui concerne les différents types de
stimuli, si le lien entre RAN et lecture s’explique par le niveau d’automatisation, on s’attend à ce que les stimuli les plus automatisés prédisent mieux le
niveau de lecture que les stimuli moins automatisés.
Pour la conscience phonologique, on s’attend à ce que cette variable
prédise mieux le niveau de lecture des pseudo-mots et des mots réguliers
que celui des mots irréguliers.
L’année psychologique, 2008, 108, 395-422
chiffres
lettres
objets
total
chiffres
lettres
objets
total
attaque
rime
total
.353 **
.326 *
.316 *
.325 *
.099 ns
.188 ns
.348 **
.304 *
1.000
.720 **
.942 **
.560 **
.552 **
.484 **
.590 **
.306 *
.334 *
.466 **
.468 **
1.000
.911 **
.482 **
.467 **
.424 **
.479 **
.207 ns
.273 *
.432 **
.407 **
1.000
.596 **
.570 **
.501 **
.656 **
1.000
.738 **
.575 **
.777 **
chiffres
.655 **
.652 **
.547 **
.603 **
1.000
.475 **
.810 **
.503 **
.482 **
.706 **
.598 **
1.000
.911 **
RANc (TR)
lettres
objets
Notes. Conscience phono. = conscience phonologique (phonological awareness) ; * p < .05; ** p < .01.
RANd (TR)
RANc (TR)
Conscience phono. (err.)
Conscience phonologique (err.)
total
attaque
rime
.655 **
.635 **
.722 **
.717 **
1.000
total
1.000
.832 **
.582 **
.867 **
chiffres
1.000
.875 **
RANd (TR)
lettres
objets
1.000
.700 **
.916 **
Table IIa. Pearson correlations (R values) between phonological awareness,
RANc and RANd.
Tableau IIa. Corrélations de Pearson (valeurs de R)
entre la conscience phonologique, RANc et RANd.
1.000
total
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Lien entre dénomination rapide et lecture
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408
Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler
Dans l’épreuve de conscience phonologique, nous avons distingué
la détection d’intrus par l’attaque de la détection d’intrus par la rime. La
corrélation entre ces deux variantes de la tâche est forte (r = .720). La
détection d’intrus par l’attaque corrèle également assez bien avec la
dénomination rapide (RANc : .304 < r < .348 ; RANd : .316 < r < .353),
excepté pour la dénomination rapide continue de lettres (r = .188) et de
chiffres (r = .099). La détection d’intrus par la rime corrèle bien avec
toutes les variables de la dénomination rapide considérées (RANc :
.306 < r < .468; RANd : .484 < r < .590).
Pour la dénomination rapide, on observe de fortes corrélations entre
les stimuli d’une même version de la tâche de RAN (RANc : .475 < r < .911 ;
RANd : .582 < r < .916), et entre les deux versions de la tâche de RAN
(.482 < r < .722).
La conscience phonologique prédit bien (.131 < r < .607) la lecture de
mots réguliers (vitesse), et de pseudo-mots (vitesse et précision). Il est
également surprenant de voir que la conscience phonologique et la
lecture de mots irréguliers sont fortement corrélées (vitesse : r = .557,
précision : r = .607). On peut globalement voir que la détection de
l’intrus par la rime prédit mieux le niveau de lecture que la détection
d’intrus par l’attaque. Plus particulièrement, la détection d’intrus par
l’attaque prédit toutes les variables de lecture (.256 < r < .511), exceptées
la précision de la lecture de mots réguliers (r = .034) et la vitesse de
lecture de pseudo-mots (r = .175). La détection d’intrus par la rime prédit
toutes les variables de lecture considérées (.379 < r < .628), exceptée la
précision de la lecture de mots réguliers (r = .230). Le RAN continu
corrèle bien avec le niveau de lecture (.439 < r < .732), que ce soit pour la
lecture de mots réguliers, de mots irréguliers ou de pseudo-mots. Le RAN
discret corrèle également bien avec le niveau de lecture (.220 < r < .701),
que ce soit pour la lecture de mots réguliers, de mots irréguliers ou de
pseudo-mots. Si l’on regarde plus dans le détail ces corrélations entre
performances dans la tâche de RAN et performances en lecture, on
peut voir que, globalement, les stimuli très automatisés comme les
lettres et les chiffres prédisent mieux le niveau de lecture que les objets
(lettres c / d : .140 < r < .685 ; chiffres c / d : .088 < r < 662 ; objets c / d :
– .048 < r < .514).
Afin de voir la part unique de chaque variable (conscience phonologique et dénomination rapide) dans la prédiction du niveau de lecture,
nous avons réalisé des régressions hiérarchiques (voir Tableau III). Dans
ces régressions, l’âge chronologique était pris en compte dans le premier
pas de la régression. Pour la conscience phonologique, la valeur entrée
dans la régression hiérarchique correspondait à la moyenne entre les
L’année psychologique, 2008, 108, 395-422
chiffres
lettres
objets
total
chiffres
lettres
objets
total
.649 **
.640 **
.514 **
.701 **
.542 **
.601 **
.381 **
.621 **
.256 *
.487 **
.387 *
.088 ns
.140 ns
-.048 ns
.220 ns
.104 ns
.352 *
.192 ns
.439 *
.034 ns
.230 ns
.131 ns
.497 **
.470 **
.491 **
.548 **
.451 **
.436 **
.392 **
.509 **
.568 **
.465 **
.557 **
.662 **
.579 **
.442 **
.691 **
.441 **
.568 **
.432 **
.598 **
.511 **
.628 **
.607 **
Mots irréguliers
Vitesse Précision
Notes. err. = erreurs (incorrect responses) ; TR = temps de réaction (reaction time).
* p < .05, ** p < .01.
RANd (TR)
RANc (TR)
Conscience Phonologique (err.)
attaque
rime
total
Mots réguliers
Vitesse Précision
.521 **
.519 **
.440 **
.553 **
.444 **
.598 **
.263 ns
.599 **
.175 ns
.379 **
.287 *
.601 **
.636 **
.351 *
.678 **
.470 **
.685 **
.470 **
.715 **
.418 **
.529 **
.504 **
Pseudo mots
Vitesse Précision
Table IIb. Pearson correlations (R values) between phonological awareness,
RAN and reading level (speed and accuracy).
Tableau IIb. Corrélations de Pearson (valeurs de R)
entre la conscience phonologique, RAN et le niveau de lecture
(vitesse et précision).
.625 **
.604 **
.538 **
.664 **
.548 **
.621 **
.391 **
.638 **
.357 **
.495 **
.451 **
.669 **
.638 **
.404 **
.700 **
.492 **
.699 **
.495 **
.732 **
.486 **
.622 **
.589 **
Total
Vitesse Précision
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Lien entre dénomination rapide et lecture
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données obtenues pour la détection d’intrus par l’attaque et la détection
d’intrus par la rime. Dans la première régression, toutes les valeurs de la
variable RAN (version continue et discrète ; lettres, chiffres et objets) ont
été regroupées pour l’analyse (RAN c + d). Si la dénomination rapide
d’une part et la conscience phonologique d’autre part prédisent une part
unique de la variance des performances de lecture, cela traduira une
indépendance entre ces deux tâches.
Tableau III. Résultats d’une régression hiérarchique
montrant le pourcentage de variance expliquée (ΔR2) par l’âge,
la conscience phonologique et la dénomination rapide.
Table III. Results of a stepwise regression showing the amount of variance (ΔR2)
explained by age, phonological awareness and RAN.
Mots réguliers
Vitesse
Précision
Mots irréguliers
Vitesse
Précision
Pseudo mots
Vitesse Précision
Vitesse
Total
Précision
1. Age
2. RAN c + d
3. Cons. phono
.004 ns
.450 ***
.007 ns
.087 *
.115 ns
.000 ns
.000 ns
.299 ***
.107 *
.042 ns
.420 ***
.091 *
.018 ns .002 ns
.317 *** .399 ***
.000 ns .061 *
.001 ns
.439 ***
.023 ns
.020 ns
.466 ***
.081 *
1. Age
2. Cons. phono
3. RAN c
4. RAN d
.004 ns
.163 **
.170 **
.124 **
.087 *
.007 ns
.074 ns
.034 ns
.000 ns
.322 ***
.067 *
.017 ns
.042 ns
.342 ***
.124 **
.045 *
.018 ns
.082 ns
.144 *
.091 *
.002 ns
.256 ***
.203 ***
.001 ns
.001 ns
.213 ***
.167 ***
.082 *
.020 ns
.332 ***
.206 ***
.009 ns
1. Age
2. Cons. phono
3. RAN d
4. RAN c
.004 ns
.163 **
.286 ***
.008 ns
.087 *
.007 ns
.001 ns
.107 *
.000 ns
.322 ***
.065 *
.019 ns
.042 ns
.342 ***
.152 ***
.017 ns
.018 ns
.082 ns
.226 ***
.009 ns
.002 ns
.256 ***
.098 *
.106 *
.001 ns
.213 ***
.233 ***
.016 ns
.020 ns
.332 ***
.135 **
.080 *
TOTAL (R²)
.461 ***
.202 *
.406 ***
.553 ***
.335 **
.462 ***
.463 ***
.567 ***
Pas
Notes. Cons.phono. = conscience phonologique (phonological awareness).
Les valeurs apparaissant dans le tableau correspondent aux ΔR2. (Values in the table are ΔR2).
* p < .05, ** p < .005, *** p < .001.
Une fois la contribution de RAN statistiquement prise en compte, la
conscience phonologique continue de prédire de manière significative la
lecture de mots irréguliers (vitesse et précision), ainsi que la précision de
la lecture des pseudo-mots. Une fois la contribution de la conscience
phonologique et la contribution du RANc statistiquement prises en
compte, le RANd continue de prédire la précision de la lecture des mots
irréguliers ainsi que la vitesse de la lecture des mots réguliers et des
pseudo-mots. Une fois la contribution de la conscience phonologique et
la contribution du RANd statistiquement prises en compte, le RANc
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Lien entre dénomination rapide et lecture
411
prédit encore la précision de la lecture des mots réguliers et des pseudomots. À la fois la conscience phonologique et la dénomination rapide
expliquent une part unique de la variance des données sur la lecture. Les
troisièmes pas de chacune des régressions reportées dans le tableau III
permettent de voir que la dénomination rapide prédit toutefois mieux la
lecture que la conscience phonologique.
c – Classification selon l’hypothèse du Double Déficit
(Wolf & Bowers, 1999)
La population des 24 enfants dyslexiques a été subdivisée en plusieurs
groupes sur la base de leurs performances dans les tâches de conscience
phonologique et de RAN3. Le critère indiquant un déficit était situé à
1.65 écart-types en dessous de la moyenne des normo-lecteurs. Selon ce
critère, 54 % (n = 13) des enfants présentent un déficit à la fois en
conscience phonologique et en dénomination rapide (double déficit).
Un quart de la population présente un déficit unique : 17 % (n = 4) ont
un déficit en conscience phonologique, et 8 % (n = 2) ont un déficit dans
RAN. Enfin, 21 % (n = 5) de notre population d’enfants dyslexiques ne
présentent pas de déficit selon ce critère.
DISCUSSION
Dans cette expérience, des enfants normo-lecteurs et dyslexiques
étaient évalués sur des tâches de conscience phonologique et de dénomination rapide. Comme dans de très nombreuses études, nos résultats
suggèrent que les enfants dyslexiques présentent un fort déficit phonologique (e.g., Muneaux, Ziegler, Truc, Thomson & Goswami, 2004 ;
Serniclaes, Sprenger-Charolles, Carré & Démonet, 2001 ; pour une revue,
voir Sprenger-Charolles & Colé, 2003). En effet, le pourcentage d’enfants
présentant un déficit phonologique, unique ou couplé à un déficit de
dénomination rapide, s’élève à 71 %. Par ailleurs, et contrairement à nos
attentes, la conscience phonologique s’est révélée être un bon prédicteur
de la lecture des mots irréguliers. Cela constitue un résultat surprenant
dans la mesure où la conscience phonologique est typiquement moins
3
Si un enfant présentait un déficit sur la version continue de RAN mais pas sur la version discrète, il était tout de
même considéré comme ayant un déficit en dénomination rapide (et vice et versa).
L’année psychologique, 2008, 108, 395-422
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Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler
fortement liée à la lecture de mots irréguliers qu’à la lecture de pseudomots. Nous avons également montré que la tâche de RAN permettait de
discriminer les enfants dyslexiques des enfants normo-lecteurs. Dans
notre étude en effet, 62 % des enfants dyslexiques présentent un déficit en
dénomination rapide. Plus précisément, les enfants dyslexiques étaient
plus lents que les enfants normo-lecteurs pour dénommer les 50 items, et
ce quels que soient le type de stimulus ou la version de la tâche utilisés,
excepté pour la dénomination rapide de chiffres dans la version continue
du RAN. Dans cette condition, en effet, nous n’avons pas observé de
différence entre enfants dyslexiques et enfants normo-lecteurs.
Par ailleurs, les deux versions du RAN corrèlent également très fortement avec le niveau de lecture. Ce résultat est un résultat classique pour la
version continue du RAN, mais l’est moins pour la version discrète (eg.,
Perfetti et al., 1978). Dans notre étude, les deux versions de RAN se sont
révélées être de bons prédicteurs de la précision de la lecture, et pas
seulement de la vitesse de la lecture. À l’intérieur de chaque tâche, comme
l’ont montré Denkla et Rudel (1976a ; 1976b), les trois types de stimuli
corrèlent fortement avec le niveau de lecture (excepté pour la précision de
la lecture des mots réguliers).
DISCUSSION GÉNÉRALE
Le but de cette étude était de déterminer quelle était la nature du lien
entre la lecture et le RAN. La comparaison des deux versions de la tâche
de RAN (continue versus discrète) nous a permis de tester l’implication
des processus visuo-attentionnels. La comparaison de trois types de stimulus (i.e., chiffres, lettres et objets) nous a permis de tester les processus
d’automatisation.
Processus visuo-attentionnels
Nos résultats montrent que le déficit des enfants dyslexiques est
identique quelle que soit la version de la tâche, excepté pour les chiffres,
où ce déficit est plus important dans la version discrète que dans la
version continue de RAN. Les facteurs visuo-attentionnels du type
contrôle des mouvements oculaires ou attention focalisée semblent donc
ne pas être à la base de ce déficit. Ces résultats vont dans le sens de ceux
rapportés par Hutzler, Kronbichler, Jacobs et Wimmer (2006). Dans leur
étude, les participants devaient rechercher dans une chaîne de consonnes
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Lien entre dénomination rapide et lecture
413
deux lettres identiques adjacentes. Le pattern des mouvements oculaires
des enfants dyslexiques est le même que celui observé pour des enfants
normo-lecteurs. Les auteurs concluent que les enfants dyslexiques ne
semblent pas avoir de difficulté dans la perception de lettres et dans le
contrôle des mouvements oculomoteurs. Pour autant, cela ne veut pas
dire que les enfants dyslexiques ne présentent pas de déficit pour certains
processus visuo-attentionnels. Facoetti, Zorzi, Cestnick, Lorusso, Molteni,
Paganoni, Ulmità et Mascetti (2006) ont par exemple montré dans une
tâche de détection de cible indicée que certains enfants dyslexiques ont
des difficultés à inhiber leur attention pour des cibles non indicées – et
donc non pertinentes – situées dans leur champ visuel droit. Un décalage
vers la droite de la fenêtre attentionnelle de ces enfants serait responsable
de leurs difficultés à traiter les informations graphémiques. Similairement, il a été montré récemment qu’un déficit de l’empan visuoattentionnel pouvait être présent chez des enfants dyslexiques, indépendamment de déficits phonologiques (Bosse & Valdois, 2003 ; Valdois,
Bosse & Tainturier, 2004 ; Valdois, Bosse, Ans, Zorman, Carbonnel,
David & Pellat, 2003). L’empan visuo-attentionnel représente le nombre
d’éléments visuels distincts qui peuvent être traités en parallèle. Chez les
enfants dyslexiques, ce nombre serait limité. L’empan visuo-attentionnel
est également un bon prédicteur du niveau de lecture (Bosse, Tainturier
& Valdois, 2007). Dans une expérience où la tâche des sujets était de
reconnaître des chiffres indicés à l’intérieur de rangées de 2, 4 ou
6 éléments, Hawelka et Wimmer (2005) ont également montré que le
traitement visuel en parallèle de plusieurs éléments restait problématique
pour certains enfants dyslexiques.
Processus d’automatisation
Nos résultats montrent que dans l’absolu, la dénomination rapide de
stimuli très automatisés, tels que des chiffres ou des lettres, est plus facile
que la dénomination rapide de stimuli moins automatisés comme les
objets. Plus précisément, dans la version continue de la tâche, le déficit
des enfants dyslexiques est proportionnel au niveau d’automatisation du
stimulus : au moins le stimulus est automatisé, au plus le déficit est grand.
Ce résultat va dans le sens d’une implication des processus d’automatisation dans le RAN (voir Nicolson & Fawcett, 1990). Or, pour la version
discrète de la tâche, le pattern de résultats n’est pas le même. En effet,
lorsqu’il s’agit de dénommer rapidement des stimuli présentés un à un,
le déficit des enfants dyslexiques est identique quel que soit le type de
stimulus. Autrement dit, nous observons un déficit d’automatisation uniquement dans la tâche nécessitant la sélection d’un objet parmi d’autres.
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414
Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler
Ce résultat suggère que le niveau d’automatisation joue un rôle surtout
lorsque le sujet doit inhiber les informations non pertinentes (les stimuli
voisins) afin de sélectionner le bon item. En effet, moins les items sont
automatisés, plus les informations non pertinentes peuvent interférer avec
le processus de dénomination. En revanche, ces processus d’inhibition
latérale sont éliminés dans la tâche discrète ce qui expliquerait l’absence
de modulation du déficit par leur degré d’automatisation. En résumé,
s’il existe un déficit d’automatisation, il est davantage présent dans les
processus de sélection et d’inhibition latérale qu’au niveau de l’accès aux
représentations phonologiques.
Processus phonologiques
Le résultat clé de cette recherche est la persistance du déficit des
enfants dyslexiques par rapport aux enfants normo-lecteurs dans la
version discrète du RAN. Etant donné que, par rapport à la version
continue, la version discrète mesure de façon plus pure l’accès aux représentations phonologiques, ce résultat est donc clairement en faveur de
l’hypothèse phonologique de la dyslexie. De plus, le degré d’automatisation des stimuli n’a pas d’influence dans la version discrète, ce qui suggère
à nouveau que le RAN discret mesure de façon relativement pure les
déficits liés à l’accès rapide des représentations phonologiques. Notons
également que la taille du déficit dans la tâche discrète est au moins aussi
importante, voire plus importante que celle de la tâche continue. De
même, les corrélations avec la lecture sont au moins aussi importantes,
voire plus importante, pour la tâche discrète que pour la tâche continue.
Cette recherche montre donc que la force du RAN comme prédicteur de
la lecture réside avant tout dans sa capacité à mesurer l’accès rapide aux
représentations phonologiques. Il est donc logique que la tâche de RAN
soit partiellement indépendante de la conscience phonologique comme
le montrent nos analyses de régression. En effet, chacune de ces deux
variables prédit de manière unique le niveau de lecture. La classification
faite selon l’hypothèse du double déficit (Wolf & Bowers, 1999) atteste
également d’une indépendance entre RAN et conscience phonologique
dans la mesure où environ un quart de la population d’enfants dyslexiques
testés présentait un déficit unique. De nombreuses études (voir métaanalyse de Ehri, Nunes, Stahl & Willows, 2001) rapportent des résultats
concernant un entraînement spécifique de la conscience phonologique
dès la maternelle. Ces entraînements sont bénéfiques pour les enfants, du
moins pour une certaine période. Il serait donc également intéressant de
voir si un entraînement dans des tâches de dénomination rapide pourrait
aboutir au même résultat.
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Lien entre dénomination rapide et lecture
415
Lien entre RAN et lecture
Quel est donc le lien entre RAN et lecture ? Tout d’abord, il est
évident que la lecture et la dénomination rapide impliquent toutes les
deux une mise en relation rapide et automatique entre un domaine
symbolique (lettres d’un côté, objets, chiffres et lettres de l’autre) et le
domaine phonologique. En effet, les recherches sur l’apprentissage de la
lecture s’accordent aujourd’hui sur l’importance des processus phonologiques (Share, 1995 ; Sprenger-Charolles, Siegel, Bechennec & Serniclaes,
2003 ; Ziegler & Goswami, 2005, 2006). Avant de savoir lire, l’enfant
connaît, avec l’acquisition du langage parlé, la forme phonologique et la
signification d’un grand nombre de mots. Pour apprendre la lecture,
l’enfant va par la suite automatiser le lien entre les lettres et les représentations phonologiques. Ce processus de décodage phonologique est le
mécanisme essentiel pour apprendre la lecture dans toutes les langues
(Share, 1995 ; Ziegler & Goswami, 2005 ; 2006). RAN et lecture partagent
donc un mécanisme fondamental : la mise en relation et l’automatisation
du couplage entre les représentations visuelles et phonologiques4.
Pour mieux comprendre le lien entre RAN et lecture, nous avons
récemment entrepris un travail de modélisation à l’aide du modèle à
double voie (Coltheart, Rastle, Perry, Langdon & Ziegler, 2001 ; pour une
version française du modèle voir Ziegler, Perry et Coltheart, 2003). Dans
le contexte de ce modèle, nous avons fait l’hypothèse simple que les déficits dans RAN reflètent des difficultés d’accès au lexique phonologique.
Cette hypothèse a été simulée en rajoutant du bruit au niveau du lexique
phonologique proportionnellement à la taille du déficit de chaque
enfant : plus le déficit dans RAN était important pour un enfant donné,
plus le niveau de bruit augmentait. Ensuite, différentes versions du
modèle, avec des déficits phonologiques plus au moins importants selon
la taille du déficit de chaque enfant, ont été confrontées aux mêmes
mots que ceux lus par les enfants dyslexiques. Les résultats ont montré
des erreurs de lecture remarquablement similaires à ceux des enfants
dyslexiques (pour plus de détail, voir Ziegler, Castel, Pech-Georgel,
George, Alario & Perry, 2008). Ces résultats suggèrent que rendre compte
de la partie phonologique du RAN est suffisante pour simuler les déficits
de lecture des enfants dyslexiques.
Enfin, les études récentes en imagerie cérébrale confirment également
l’importance du couplage entre représentations visuelles et phonologiques
dans le lien entre RAN et lecture. En effet, Misra, Katzir, Wolf et Poldrack
4
Même chez le lecteur expert, la computation automatique et rapide de l’information phonologique continue à
jouer un rôle essentiel dans la lecture (Ferrand, 1995 ; Ziegler, Ferrand, Jacobs, Rey & Grainger, 2000).
L’année psychologique, 2008, 108, 395-422
01_Castel.fm Page 416 Jeudi, 14. août 2008 1:40 13
416
Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler
(2004) ont réalisé une expérience en Imagerie par Résonance Magnétique
fonctionnelle (IRMf) dans laquelle des lecteurs experts réalisaient une
tâche de RAN. Les résultats de cette expérience montrent que lors de la
réalisation d’une tâche de dénomination rapide, les aires cérébrales et
circuits neuronaux activés sont les mêmes que ceux activés lors de la
lecture de mots. De même, McCrory, Mechelli, Frith et Price (2005) ont
réalisé une expérience en utilisant la technique de Tomographie par
Emission de Positons (TEP) dans laquelle les performances en lecture et
dénomination d’images par des adultes dyslexiques étaient comparées à
celles de lecteurs experts. Par rapport au groupe contrôle, les participants
dyslexiques montrent à la fois pour la lecture et la dénomination d’images
une diminution de l’activation dans la même aire cérébrale, le cortex
occipitotemporal gauche. Les auteurs concluent que la sous-activation
dans cette région semble refléter un déficit dans l’intégration de l’information visuelle et de la phonologie, un processus nécessaire et pour la
lecture et pour la dénomination d’objets.
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Caroline Castel • Catherine Pech-Georgel • Florence George • Johannes C. Ziegler
ANNEXE A
Items conscience phonologique (détection d’intrus)
attaque :
rime :
char – chèque – vite
moule – poule – four
gène – bourg – bac
lard – page – mage
boule – jute – bêche
laine – sec – peine
seize – sac – tir
bête – fête – nerf
choc – forte – face
note – moche – poche
code – panne – couche
biche – ville – fiche
messe – mousse – jatte
pire – rire – fils
touche – pile – peur
touche – mousse – douce
vigne – seul – vote
bulle – cure – mule
jeune – juge – signe
rare – gare – femme
tasse – cube – quinze
louve – goutte – route
lave – chasse – langue
soupe – rouge – loupe
monde – mauve – chance
bande – lande – genre
lac – niche – nulle
raide – neige – beige
robe – gauche – rêve
digne – chic – ligne
sauf – songe –coude
mince – pince – dinde
rose – singe – sud
rive – fine – mine
vague – terre – veuf
bûche – cuve – ruche
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Lien entre dénomination rapide et lecture
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ANNEXE B
Items dénomination rapide (RAN) – Version continue
D
P
O
S
O
P
O
S
P
A
S
D
D
D
D
A
A
A
O
S
O
S
P
A
P
A
O
S
O
D
D
D
A
P
P
O
A
O
A
O
P
P
P
S
S
S
S
D
D
A
RAN lettres
4
7
6
9
6
7
6
9
7
2
9
4
4
4
4
2
2
2
6
9
RAN objets 1
6
9
7
2
7
9
6
9
6
4
2
4
2
7
7
7
2
6
2
6
4
7
7
9
9
6
9
4
4
2
RAN chiffres
RAN objets 2
Items dénomination rapide (RAN) – Version discrète
D
P
S
…
Exemple pour les lettres
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