Mon père, ce héros : un rêve fracassé

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Mon père, ce héros : un rêve fracassé
12 novembre 2012
Le Soir Lundi 12 novembre 2012
LACULTURE 31
Mon père, ce héros : un rêve fracassé
SCÈNES « Heroes (just for one day) », par Vincent Hennebicq, mêle théâtre et concert rock au Théâtre National
l’entrée de la salle, le coméA
dien Jean-Pierre Baudson
accueille le public, seulement vê-
tu d’une blouse d’hôpital. Tandis
que l’on s’installe, il papote, saute
de gauche à droite, promet une
belle soirée…
Un peu plus tard, il se présente
sous son nom avant de nous révéler qu’il se nomme en fait Popi Jones et qu’il est une star du rock…
L’arrivée inopinée d’une infirmière écervelée (irrésistible Olivia
Carrère) lui posant les classiques
questions que l’on pose aux malades, remet les pendules à l’heure.
Si Popi Jones est un héros, il ne
l’est que dans sa tête. Et pourquoi pas ? Le voici donc qui enfile sa tenue de rock star et qui se
plante derrière le micro, entouré
LESBRÈVES
Au Fifi
de Bruxelles
par un band aux costumes pour
le moins délirants (créés par Emilie Jonet, également responsable
de la scénographie).
Au premier rang de son étrange entourage, voici son doudou
(Greg Rémy) qui s’installe derrière la batterie. Retour en enfance
sitôt suivi d’un basculement dans
l’âge adulte : les années d’ajusteur, le chômage, la lente descente en enfer… Popi raconte sa vie,
réelle ou rêvée.
Derrière lui, son groupe assure
dans un style rappelant notamment les B52’s (sans oublier un final parfait ramenant au titre de
Bowie). Mais chacun de ses membres est aussi un fantasme, un rêve ou un élément de la vie de Popi
comme ce violoniste qui incarne
également sa conscience (excellent François Sauveur).
Jean-Pierre Baudson est excellent dans le rôle d’un Popi Jones tour à tour héroïque, indigné ou geignard. © CICI OLSSON.
Déception et colère
Popi se lance dans une petite
danse avec une de ses choristes
(la convaincante Lucie Debay),
salive devant une autre qui se
transforme en vamp (Laura Sepul, parfaite de bout en bout) et
continue à débiter ses jérémiades
qui finissent par lasser. On commence à se dire que tout cela tourne en rond quand le spectacle bascule avec un coup de fil…
Un autre visage de Popi apparaît alors avec l’arrivée d’un jeune
homme campé par Raven Rüell.
C’est là que le spectacle décolle
pour de bon. Grâce à l’interprétation époustouflante de Raven
Rüell, débordant de déception et
de colère. Mais aussi grâce au
questionnement sur l’enfance,
les rêves brisés, les ratages quotidiens, l’aptitude que nous avons
à nous plaindre en oubliant ceux
et celles qui nous voyaient plus
grand, plus beau, plus juste que
nous ne l’avons jamais été.
« Mon père, ce héros » : l’idée est
belle. Mais que se passe-t-il
quand les rêves d’enfant viennent se fracasser sur la réalité ?
Dans une forme originale et gonflée, Vincent Hennebicq parvient
finalement à assembler tout cela
et à toucher en plein cœur. ■
JEAN-MARIE WYNANTS
Jusqu’au 17 novembre au Théâtre National, www.theatrenational.be.

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