La filature Deffrenne

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La filature Deffrenne
La filature Deffrenne
La filature Deffrenne se situe rue Dampierre à Roubaix et fait partie du groupe textile
alsacien dirigé par la famille Schlumpf. A l’image de l’entreprise Motte-Bossut, elle
est, elle aussi le symbole de l’entreprise paternaliste des usines textiles de Roubaix.
En raison de gros investissements en machines de 1971 à 1975, Deffrenne
commence à licencier dès 1975. En juin 1976, le groupe Schlumpf retire ses intérêts
industriels de la filature Deffrene, la lutte commence. L'entreprise est maintenue très
difficilement par son patron, Jean Deffrenne. Après le dépôt de bilan des filatures
alsaciennes du groupe Schlumpf, Deffrenne annonce lui aussi la fermeture de
l'entreprise, le 28 octobre 1976. Les actions vont alors se multiplier afin de montrer à
tous le « refus de la fatalité » (titre du livre écrit par les ouvriers en lutte1).
Après le barrage du centre ville de Roubaix, des semaines de grèves et des
manifestations, les salariés refusent le plan de relance proposé par la COGEFI qui
suppose 50 % de licenciements. Ils continuent donc la lutte en axant leurs actions
sur la popularisation du conflit par des événements symboliques : participation à
l'arrivée de la course cycliste du Paris-Roubaix avec pour dossard leur fiche de
licenciement ; refus, en mars 1977, de l'autorité de la COGEFI et décision de
contrôler la production ; occupation des locaux nuit et jour et week-end. Le 8 juin
1977, un « pique-nique » et une occupation sont organisés dans la propriété de Jean
Deffrenne qui les fait expulser par les forces de l'ordre. La même année, les salariés
sont assignés en justice pour occupation des locaux. La décision du tribunal affirme
leurs torts et ils doivent être expulsés de l'usine le 22 août 1977. Ils s'organisent en
forteresse et, en avril 1978, ils rebaptisent la rue Dampierre, « rue des Travailleurs
en lutte ». C'est le symbole le plus fort du conflit mais aussi de l'ensemble des
conflits de la région. Pourtant, par un rebondissement tout à fait inattendu, le 22 août
au matin, les salariés ne seront pas expulsés. En effet, Jean Deffrenne est incarcéré
pour infraction à la loi des sociétés, entrave au fonctionnement du comité
d'entreprise de 2 millions de francs. L'inculpation a eu lieu après la découverte par
les salariés de documents compromettants trouvés dans les bureaux de l'usine. Le
tribunal décrète donc que l'expulsion n'est plus « une nécessité urgente ».
De plus, le 1er mars 1978, la filature Deffrenne est décrétée viable à la suite d'une
étude montrant que le dépôt de bilan n'aurait pas du être annoncé en octobre 1976.
En avril 1978, la création d'une société anonyme dirigée par un directoire de cinq
membres est annoncée. C'est la création de l'entreprise Dampierre S.A.
1
Le refus de la fatalité, la vie ouvrière à cœur ouvert : conflit Deffrenne, Liévin,
imprimerie artésienne, 1978, 177p.