La santé au travail, état des lieux et perspectives

Transcription

La santé au travail, état des lieux et perspectives
Retour sommaire
Conferencerégionalede santéde Haute-Normandie
Pages précédentes
DRASS Haute-Normandie
La santé au travail, état des lieux et
perspectives
Dr Christophe PARIS, CHU de ROUEN
Jean-Claude BODARD, CRAM Normandie
Christophe
PARIS
ourquoi aborde-t-on le thème de
la santé au travail aujourd’hui ?
il
Premièrement,
bénéficie
du
questionnement
de la problématique
.environnementale, notamment concernant
l’air. Deuxièmement,
la question
de
l’amiante,
très
médiatisée,
avec la
publication du rapport de I’INSERM et du
rapport GOT, a attiré l’attention sur le
sujet.
En Haute-Normandie,
nous ne
possédons pas beaucoup d’éléments sur
l’impact du travail sur la santé publique.
P
,
Bureau
Cet
été,
un rapport
du
International
du Travail a été publié sur
une estimation du coût de la santé au
travail.
II
conclut
à
un défaut
d’identification
sur ce sujet. Le constat
est assez accablant : on dénombre 1,l
million de décès et 160 millions de
nouveaux cas de maladies professionnelles
par an. Le coût est estimé à 171 milliards
Contrairement
à notre
de dollars.
le problème
perception
quotidienne,
apparaît comme majeur. Les pathologies
liées aux expositions professionnelles sont
bien les premières causes de mortalité au
travail
(cancers et maladies cardiovasculaires), et non pas les accidents.
Rouen,le 23 novembre 1999
1 - Données sur la santé au
travail en France et en
Haute-Normandie
II existe deux grands types d’approches.
Ses sources sont très parcellaires.
Les employeurs évaluent les risques pour
leur propre compte, partiellement.
De
n’ont
entreprises
nombreuses petites
d’ailleurs pas les moyens de le faire.
Les enquêtes réalisées par les organismes
de recherche
ont pour objectif
de
rechercher les causes des pathologies.
Les médecins du travail et les institutions
ont également des approches internes.
Il existe peu de sources. Les
statistiques de maladies professionnelles
constituent l’unique source off icielle, qui
est donc passée par le filtre
de
reconnaissance de la Sécurité Sociale.
57
Conférencerégionalede santéde Haute-Normandie
Elles ne reflètent
réalité.
donc absolument pas la
II - Les travailleurs
exDosés à
certains acmts cancériaènes
Deux études ont été publiées en
France sur ce sujet, en 1994 et en 1999.
Certains
risques
sont en voie de
disparition, tels que le chlorure de vinyle
ou les amines aromatiques. Des expositions
à des cancérigènes, dont l’amiante, sont
conséquentes et concernent
plus de
100 000 personnes. Plusieurs centaines de
milliers de personnes sont exposées à des
cancérigènes que l’on ne mentionne jamais,
tels que le bois ou les acides forts.
Les statistiques
officielles
du régime
général de la Sécurité Sociale offrent un
constat assez accablant. En 1994, aucun
mésotéliome * (* cancer lié à l’amiante)
n’était reconnu en .France. En 1996, après
la publication du rapport de I’INSERM, on
estime à environ 700 le nombre de décès
par mésotdiome survenant chaque année
en France.
Il n’existe pas de données fiables.
Nous faisons donc des extrapolations à
partir des données nationales. On obtient
ainsi le nombre de 150 000 personnes
exposées à des cancérigènes, sans tenir
compte de l’importance de notre tissu
industriel régional. II s’agit donc d’un ordre
de grandeur. On ne sait donc pas quelle
Rouen,le 23 novembre 1999
DRASS Haute-Normandie
est la part du facteur professionnel dans
la surmortalité par cancer bronchique.
Chaque année, on compte environ 50
déclarations de cancers professionnels en
Haute-Normandie. Par extrapolation des
résultats nationaux, on devrait dénombrer
180 cancers, chiffre pourtant sous-estimé.
II existe d’autres facteurs de risques
contraintes
professionnels :
les
articulaires, par exemple, pour lesquels on
ne possède aucune statistique fiable. Par
extrapolation
par rapport aux données
nationales, 180 000 personnes seraient
exposées à un risque de pathologies ostéoarticulaires, avec un risque d’apparition de
la maladie de 50 %.
Les facteurs liés au stress ont un lien avec
les maladies cardio-vasculaires. En 1991,
une étude suédoise estimait la part des
d’origine
risques
cardio-vasculaires
professionnelle entre 16 % et 20 %. Nous
ne savons pas l’estimer en France.
l’impact
de
sous-estime
On
l’environnement professionnel. L’amiante a
été le fer de lance de cette révélation,
mais elle n’est pas l’unique facteur
déclenchant des maladies professionnelles.
Dans les statistiques
off icielles, aussi
faussées, soient-elles, la Haute-Normandie
région
apparaît
comme la première
française pour les maladies du tableau 30,
liées à l’amiante pour la période 1985-1995.
Même si les statistiques
ne sont pas
la
moitié
des
maladies
satisfaisantes,
58
_-
_
*
_
4
Y
4
-
Conférencerégionalede santéde Haute-Normandie
professionnelles
l’amiante.
DRASS Haute-Normandie
de la région est due à
Jean-Claude BODARD
Nous possédons donc un grand
nombre de chiffres peu significatifs.
Je
vais
essayer
de
pointer
quelques
insuffisances et difficultés
du système
actuel.
Les médecins des différentes
structures,
généralistes, hospitaliers et
médecins du travail ne communiquent pas
entre eux. Le manque de communication se
retrouve
les
entre
également
institutionnels,
les chercheurs
et les
acteurs de terrain.
IV - Les difficultés
-..
III - Les insuffisances
Les médecins généralistes sont très peu
au
pathologies
courant
des
professionnelles.
.
Les techniciens dans les entreprises ne
sont pas concernés par le risque santé.
Les écoles d’ingénieur ne les forment en
rien sur ce sujet.
0
Les employeurs, notamment les soustraitants, ne connaissent pas toujours
les risques encourus par leurs employés.
Le système de Sécurité Sociale actuel
est si complexe que personne ne
comprend son fonctionnement.
C’est le cas par rapport aux coûts
réels, et des situations de santé réelles,
les psychopathologies, par exemple, ne sont
pratiquement
jamais
reliées
à des
situations de travail.
Rouen,le 23 novembre 1999
Le caractère “plurifactoriel”
des
maladies professionnelles pose problème ;
elles
ne sont
que très
rarement
spécifiques. Elles apparaissent parfois très
longtemps après la fin de l’exposition,
comme dans le cas des cancers. Les
approches
connaissances
liées
aux
épidémiologiques et expérimentales ne sont
pas d’un accès aisé. La rapidité
de
l’évolution technologique, le nombre de
nouveaux produits ou procédés contribuent
à accroître la complexité du sujet.
Notre système de Sécurité Sociale
est
particulièrement
complexe.
Les
statistiques publiées ne prennent le plus
souvent en compte que les maladies du
régime général : elles sont donc très
limitées. Des acteurs nombreux participent
à ce système, ce qui renforce son manque
de clarté.
59
Confërencerégionalede santéde Haute-Normandie
DR4SS Haute-Normandie
spécifiques et en utilisant
mis en place.
l
l
Le secret médical peut-être un obstacle
Q l’échange d’information
entre les
professionnels. Le secret de fabrication
peut constituer
un obstacle à la
diffusion d’information sur les produits
utilisés.
Les employés hésitent à déclarer les
maladies professionnelles par peur de
perdre leur emploi. Les employeurs
craignent les coûts induits.
V - Les objectifs
prévention
de
les réseaux
VI - Conclusion
A court terme, la santé au travail en
Haute-Normandie
peut progresser
en
intégrant un volet travail au PRS cancer.
Cela nous semble justifié
par les
caractéristiques régionales et l’importance
de la question. A long terme, la région
pourrait se doter d’un PRS spécifique
santé et travail.
-
-
II est nécessaire pour mener une
politique de prévention de connaître les
dangers, les facteurs de risques, leur
localisation d’une part et d’autre part, les
effets avérés ou potentiels de ceux-ci sur
la santé ensuite pour agir, chacun à son
niveau de compétence ou de responsabilité.
La région nous semble le bon niveau pour
créer
les
éléments
de
synergies
nécessaires. Nous avons listé 3 pistes de
travail :
l
l
développer
la
communication
en
direction des professionnels de santé,
des salariés et des employeurs par
différents fichiers et revues ;
mettre
en réseaux
acteurs potentiels ;
ces
différents
0 améliorer les connaissances après la
diffusion de l’information, en évaluant le
sur
le plan régional,
en
risque
constituant des bases de données, en
créant
des registres
de cancers
Rouen,le 23 novembre 1999
60
-
Conférencerégionalede santéde Haute-Normandie
DRASS Haute-Normandie
Interventions
de la salle
Anne MANSOURET
Bertrand
Je suis consciente que les risques
liés à la climatisation
et au travail
informatiques
ne provoquent
pas de
pathologies graves. Cependant, existe-t-il
des évaluations sur les risques qui leur
sont liés ?
Les
sujets
d’inquiétude
sont
nombreux. Pour progresser sur le sujet,
nous devons nous appuyer sur des bases
solides. Cela explique l’ampleur du travail
de structuration
des connaissances à
fournir.
Christophe
PARIS
TIERCE
De la salle
II existe des études sur ces sujets.
Les études concernant le travail sur écran
se sont avérées décevantes. On ne sait pas
combien de personnes sont exposées à ce
type de risques. II existe une surveillance
médicale, mais nous n’avons pas de
perspectives régionales à ce sujet.
Vous évoquiez la communication
entre
les
professionnels.
Comment
envisagez-vous de diffuser les documents
papiers ? Souvent, ils n’atteignent pas leur
but. Il faudrait
élaborer un plan de
communication.
Jean-Claude BODARD
Jean-Claude BODARD
Ce type de problème
nécessité de mise en réseau.
justifie
la
De la salle
II existe de nombreux problèmes
concernant la santé au travail. Les produits
phytosanitaires seraient ainsi à l’origine de
syndromes
L’aluminium
parkinsoniens.
causerait des problèmes cérébraux et il ne
faut pas oublier de nombreux autres
produits toxiques.
Rouen,le 23 novembre 1999
est
Un
plan
de
communication
précisément
en train
de débuter.
Concernant les fiches guides sur les
cancérogènes professionnels, nous n’avons
effectivement
pas souhaité effectuer un
médecins
envoi
à
des
l’ensemble
généralistes, qui reçoivent déjà beaucoup
de papiers. Nous prévoyons 3 types de
diffusion :
l
l
par. le biais d’informations
presse spécialisée ;
lors de réunions
généralistes ;
dans la
avec les médecins
61
Conférencerégionalede santt5de Haute-Normandie
l
par information directe de la part de
certaines caisses primaires.
De la salle
Un sujet n’a pas encore été abordé :
le problème de l’alimentation, qui est le
principal facteur de déclenchement de
certaines pathologies. Peu d’agriculteurs
sont présents dans cette salle. II me
semble que le public n’est pas bien informé
sur ce problème.
DRASS Haute-Normandie
Bertrand TIERCE
La lutte contre les inégalités de
santé constitue un thème national commun
à toutes les conférences régionales de
santé. Nous allons traiter
de deux
approches : les inégalités infra régionales
et les inégalités interrégionales.
_-
L’encouragement
d’une
agriculture
productiviste
a été dangereux : des
produits chimiques nocifs ont été utilisés
en excès pendant les dernières décennies.
Les consommateurs ne devraient
pas
hésiter à payer plus cher pour obtenir des
produits naturels, de meilleure qualité. Je
rappellerai à ce sujet la phrase de SaintExupéry : ’ Nous n’héritons pas de la Terre
de nos ancêtres, nous l’empruntons à nos
enfants >I.
De la salle
Concernant
certains
problèmes,
l’amiante, par exemple, les entreprises ne
fournissent
pas toutes
les données
nécessaires
les
maladies
sur
professionnelles. Les médecins du travail
rentrent d’ailleurs parfois dans leur jeu, et
je ne pense pas exagérer en affirmant
cela. Dans notre région, mais sans doute
dans d’autres, le patronat déguise des
maladies
professionnelles
et
refuse
ses
systématiquement
de
prendre
responsabilités
en la matière. Il veut
éviter le coût, mais il est normal qu’il le
paie puisqu’il est responsable.
Rouen,le 23 novembre 1999
Pages suivantes
62
-