Le shopping dominical en France donne des

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Le shopping dominical en France donne des
commerce Jeudi9 juillet 2009
Le shopping dominical en France donne des
sueurs froides à Genève
Par Margaux Fritschy
Travailler le dimanche? La question donne du fil à retordre au
président Sarkozy. De ce côté-ci de la frontière, on craint la
concurrence, et on se prépare à contre-attaquer
Le débat français sur le travail dominical est plus brûlant que jamais. Le vote est attendu
vraisemblablement pour la semaine prochaine au parlement français, qui a repris mardi pour la
quatrième fois l’examen de la proposition de loi du député UMP Richard Maillé. Ce projet controversé
et émotionnel propose d’ouvrir très largement les commerces le dimanche. Pas partout tout de même.
Les métropoles et les zones touristiques et thermales sont concernées.
La question de savoir dans quelles communes les nouvelles dispositions pourront s’appliquer n’est pas
encore réglée. Mais, de toute évidence, Genève sera fortement touché, notamment de par sa proximité
avec le département de Haute-Savoie. Il faut savoir que sur les 500 communes ou zones répondant
actuellement aux critères de zones touristiques selon le code du travail, pas moins de 31 se situent
dans ce département.
Le phénomène des Genevois et des autres Romands allant faire leurs courses en France est bien
connu. Après avoir crû de manière forte, les dépenses des ménages suisses vers la France ont baissé
ces dernières années. De 13% en 2001 à 5% en 2007, selon une étude publiée en 2008 et portant sur
des consommateurs de Genève, Nyon, Vevey et du Chablais.
Mais cette tendance négative serait en train de s’inverser. «Depuis quelques mois, on constate une
augmentation du tourisme commercial, confie le directeur de Migros Genève, Guy Vibourel. Le taux de
change en faveur des Suisses est une explication. L’accessibilité difficile du centre de Genève du fait
de ses lourds travaux en est une autre», explique-t-il. Pour Guy Vibourel, il est clair que si la loi
française venait à être appliquée, le risque d’un nouvel exode des consommateurs serait grand.
Une crainte que partage également Fabienne Gautier, présidente de la Fédération du commerce
genevois. «On le voit chaque année pendant les fêtes de fin d’année. Les Genevois profitent des
magasins ouverts en France pour compléter leurs listes de cadeaux de Noël.»
Projet de loi à Genève
Egalement députée libérale, elle met en exergue l’influence commerciale que cette décision pourrait
avoir sur Genève. Si elle refuse l’idée selon laquelle l’ouverture dominicale généralisée serait une
bonne solution pour le canton, elle souhaiterait tout de même que les commerces puissent ouvrir leurs
portes lors des grandes occasions. Elle a d’ailleurs déposé, avec ses collègues de la droite, un projet de
loi cantonal qui modifie celle sur les heures de fermeture des magasins (LHFM).
Concrètement, le projet genevois demande de pouvoir ouvrir les magasins quatre dimanches dans
l’année et d’harmoniser les horaires de fermeture en semaine à 20h. «L’idée serait de pouvoir ouvrir
deux dimanches avant Noël et un pendant les Fêtes de Genève, le grand rendez-vous touristique de
l’année. Pour le quatrième, nous souhaiterions que le 31 décembre soit compté comme tel», annoncet-elle.
Le projet a été accepté en commission et sera soumis au vote à l’automne au parlement. On reste
cependant réaliste du côté du patronat genevois. Il faudra compter sur un référendum mené par les
syndicats. «Cette modification de loi amènera un effet de chaîne», explique Valérie Balleys, secrétaire
syndicale au Syndicat interprofessionnel des travailleuses et travailleur (SIT). «Nous partageons les
craintes de nos collègues français. Les conditions de travail des salariés vont être encore plus
prétéritées», déplore-t-elle. De l’autre côté de la frontière, Jean-Paul Larese, secrétaire général de la
CGT de Haute-Savoie, souligne que selon le projet de loi français, les salariés ne pourront pas compter
sur des compensations salariales dans les zones touristiques.
Les yeux pour pleurer…
Ce projet de loi ne plaît pas forcément non plus aux commerces des 500 communes qui bénéficient
déjà de dérogations au repos dominical. A Chamonix par exemple, les commerçants craignent déjà la
concurrence qui ne manquerait pas de s’installer si les communes voisines décrochaient des conditions
identiques.
Guy Vibourel, qui est également à la tête des Migros de France voisine, n’est pas tout à fait certain que
cette loi prouvera son efficacité pour les zones strictement limitrophes de la Suisse. Selon lui, elle le
fera toutefois certainement pour des villes comme Annecy, Evian ou Thonon. C’est là que l’impact sur
Genève sera particulièrement visible. «Le client se rend où il peut faire les meilleures affaires, rappelle
Isabelle Fatton, secrétaire patronale du commerce genevois. Si la France voisine propose quelque
chose de plus attractif aux consommateurs, nous n’aurons que nos yeux pour pleurer.»
© 2009 Le Temps SA