Frédéric Poupaud (1961

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Frédéric Poupaud (1961
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C. BARDOS
Frédéric Poupaud (1961-2004)
Claude Bardos1
La disparition de Frédéric Poupaud a
été pour nous tous une grande peine et
une lourde perte.
J’ai eu la chance de l’avoir comme
collègue au Centre de mathématiques
appliquées de l’ÉNS Ulm en 1985-1988
alors qu’il était assistant normalien
doctorant à Paris VI et qu’il préparait
sa thèse. Dès le début il s’est révélé un
collaborateur exceptionnel.
Il m’a paru d’abord discret et modeste
mais d’une extrême gentillesse et toujours d’une merveilleuse bonne humeur.
Il a tout de suite fait preuve à la fois de
sérieuses compétences mathématiques
et d’un très bon goût dans le choix de
ses domaines de recherches.
Ces tendances n’ont cessé de se
confirmer par la suite. Il a très vite acquis une grande maturité scientifique. Il
a résolu des problèmes de modélisation vraiment appliqués dans des domaines variés
(gaz raréfiés et semi-conducteurs entre autres) et en même temps il a su très bien
développer l’outil mathématique. Il avait une vision juste et profonde de l’interaction entre cet outil et les applications et ainsi a su apporter des idées nouvelles
qui sont vites devenues des classiques . Je cite deux exemples qui me semblent
particulièrement pertinents.
1) Son programme de travail sur la définition et l’utilisation des mesures de
Wigner mené en collaboration avec Patrick Gérard, Peter Markowich et Norbert
Mauser, avec lequel il a developpé les séries de Wigner-Bloch , un outil avancé
pour l’homogénéisation des structures périodiques. Cela a conduit à un nouvel aspect de l’analyse microlocale particulièrement bien adapté aux problèmes concrets,
comme la dérivation des équations semiclassiques pour la modélisation quantique des semiconducteurs.
2) La justification, en collaboration avec A. Vasseur, de l’approximation de la
diffusion pour des phénomènes de propagation dont la structure varie aléatoirement
en espace et aussi en fonction du temps . Il s’agit d’un sujet chaud qui a suscité
des contributions de quelques géants comme G. Papanicolaou ou H. T. Yau.
On peut ici aussi observer que le point de vue de Frédéric colle au mieux aux
applications (par exemple propagation d’ondes en acoustique sous marine).
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Université Paris VII
SMF – Gazette – 103, Janvier 2005
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Notre communauté a bien su apprécier à la fois ses travaux scientifiques
(Médaille de Bronze du CNRS en 1992) et son dévouement pour les tâches
collectives : gestion de l’enseignement et de la recherche.
Entre autre il avait pris en charge en 1999 la direction du laboratoire JeanAlexandre Dieudonné de l’université de Nice. Cette direction n’a suscité que des
éloges et il me semble juste de constater que les dix ans où Frédéric a été professeur
à Nice ont été des facteurs clé pour une remontée en puissance assez remarquable
de ce laboratoire (où j’avais travaillé moi-même quelques années).
Frédéric a été très reconnu au niveau européen. Ses collaborateurs, par exemple
en Autriche, en Espagne et en Italie étaient devenus de vrais amis. Avec eux il a
joué un rôle essentiel dans la réalisation de réseaux européens qui se sont révélés de
nouveaux instruments pour la recherche, la communication et l’accueil des jeunes,
notamment le réseau HYKE sur les équations hyperboliques et cinétiques, coordonné par son collaborateur Norbert Mauser.
Dans sa courte vie avec sa gentillesse et ses réalisations il aura profondément
marqué notre communauté et aura suscité de profondes amitiés. Je tâche de m’en
faire l’interprète pour témoigner aussi à sa famille notre solidarité dans sa douleur.
SMF – Gazette – 103, Janvier 2005