La Serpenta Canta - Media Cité de la Musique
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La Serpenta Canta - Media Cité de la Musique
Roch-Olivier Maistre, Président du Conseil d’administration Laurent Bayle, Directeur général mardi 15 avril – 20h Salle des Concerts La Serpenta Canta Diamanda Galás, piano et chant Fin du concert vers 21h15. Vous avez la possibilité de consulter les notes de programme en ligne, 2 jours avant chaque concert, à l’adresse suivante : www.cite-musique.fr Le chant des damnés Née de parents anatoliens et grecs l’ayant encouragée dès son plus jeune âge à la pratique du piano, « La » Galás est une artiste dont l’univers oscillant entre jazz et classique a épousé les contours d’une singularité totale, après avoir connu dans le San Diego des années soixante-dix l’expérience de l’improvisation aux côtés de Bobby Bradford ou David Murray. Dans sa voix, il y a tout. Le murmure, le cri, la violence d’une humanité dont elle explore les recoins honteux ; la torture (l’expérimental et difficile Schrei X en 1996), l’amour meurtrier (le nouveau Guilty Guilty Guilty), la maladie aussi. Assassine, cette dernière fournit en substrat le soufre aux psaumes de Plague Mass (1991), chef-d’œuvre en rouge, glaçant requiem en mémoire des victimes du sida. Diamanda Galás, c’est aussi le souvenir de ces génocides du début du XXe siècle et dont la négation, en son esprit, fait affront à l’Histoire. Ils motivent le double album Defixiones Will and Testament, sorti en 2003 concurremment à La Serpenta Canta. À travers des prises hantées et sur d’anguleux canevas de piano, les horreurs collectives instrumentalisent la vibration. La voix, véritable médium, recrache les douleurs de tous les opprimés au visage d’un monde qui cherche refuge dans les cocons de l’amnésie. Diamanda ne cédera rien. Sur scène, elle est seule, aux rênes d’une virtuosité expiatoire. Pas d’artifice, jamais. Face au piano, Galás se fait violence depuis sa première apparition solo au Festival d’Avignon, en 1979. Suivant le fil d’un exploit lyrique sur lequel rares se font les funambules, elle s’assume, n’ayant joué qu’à titre exceptionnel la carte duale (en 1994, l’album The Sporting Life avec John Paul Jones, de Led Zeppelin). Sur scène, elle ira jusqu’au bout. Ses disques, majoritairement enregistrés en concert, visent tous l’absolu. Cette femme est une éponge, un vampire des genres. Son prisme méditerranéen offre un ailleurs, un nouveau sang aux musiques noires. Ainsi, la performance pour piano et voix La Serpenta Canta forme le menu de nouvelles beautés qui saisissent dans leur essence même jazz, blues et gospel. Plusieurs fois jouée en Europe, c’est un immense chantier ; une réappropriation de standards dont les flots harmoniques courent le long des rives de l’exil, la mort, la résurrection. Diamanda Galás se substitue ici aux pairs fondateurs, son exceptionnelle tessiture de presque quatre octaves libérant les âmes de John Lee Hooker (reprise de « Burning Hell »), Hank Williams (« I’m so Lonesome I could Cry ») ou Screamin’ Jay Hawkins (« Frenzy, I Put a Spell on You »). Diamanda sculpte sa voix, électrique, dans l’exorcisme. C’est le corps en souffrance, l’art en action. Emmanuel Hennequin