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J Maroc Urol 2010 ; 19 : 5-7 MISE AU POINT DIAGNOSTIC DE LA DYSFONCTION SEXUELLE FEMININE R. RABII, A. HEDDAT, MA. KHEILIL, F. BENLAMSOUHI, M. EL BAGHOULI, F. MEZIANE Service d’Urologie, CHU Ibn Rochd, Casablanca, Maroc 3. La sexualité actuelle Dans la réponse sexuelle féminine, des mécanismes psychologiques et somatiques interviennent conjointement, il est donc important d’explorer les différents aspects du trouble, afin de trouver la réponse thérapeutique la plus adéquate [1]. Il est important de préciser les symptômes sexuels. S’agit-il d’un trouble du désir, d’un trouble de l’excitation, d’une dyspareunie, d’un trouble de l’orgasme ou d’une autre pathologie mal formulée ou niée ? [5, 6, 7, 8]. Les troubles sexuels chez la femme sont souvent sousestimés et restent encore masqués par les patientes et négligés par les praticiens. Une plainte somatique peut parfois révéler un dysfonctionnement de la sexualité, c’est souvent un symptôme urologique ou gynécologique qui apparaît en premier, et c’est au cours de l’interrogatoire qu’il faudra orienter l’entretien vers la sexualité proprement dite [2, 3]. 4. Le mode d’installation de la dysfonction Le fait que la dysfonction soit apparue brutalement suggère qu’un environnement extérieur inattendu soit venu bousculer la vie sexuelle ou qu’un événement intérieur tel qu’un problème vasculaire soit produit. Alors qu’un début progressif oriente vers une pathologie chronique [5, 6, 8]. Le diagnostic clinique repose sur deux éléments : l’interrogatoire et l’examen clinique [2, 4]. 5. Les symptômes associés I. L’INTERROGATOIRE Il convient de rechercher des troubles du bas appareil urinaire, une symptomatologie ano-rectale associée, la présence de leucorrhées ou d’hémorragies génitales [6, 8, 9]. Il doit évaluer les éléments suivants : 1. L’âge et la période de la vie génitale L’âge de la patiente est un facteur essentiel, permettant une distinction entre une dysfonction primaire et secondaire. La période de la vie génitale est également importante à préciser (période d’activité génitale, périménopause, ménopause spontanée ou chirurgicale) [5, 6, 7]. 6. Les facteurs déclenchants Il faut s’enquérir des circonstances de vie, qu’elles soient négatives ou positives, survenues dans la période de 3 à 6 mois qui a précédé l’apparition du trouble. Il faut aussi s’informer sur l’attitude du partenaire, et l’existence chez lui de troubles de la sexualité. Un problème de communication dans le couple, voire une véritable conjugopathie sont des éléments importants à prendre en compte [6, 7, 8]. 2. L’histoire sexuelle de la patiente Il convient de se renseigner de la vie sexuelle antérieure de la patiente, et l’existence d’éventuelles difficultés sexuelles lors des premières expériences, ou d’agression sexuelle, notamment dans l’enfance. 7. Les antécédents Une description détaillée et complète des antécédents sexuels devrait inclure une évaluation du désir sexuel, de l’excitation et de l’orgasme [6, 7, 8]. a. Médicaux Les antécédents médicaux doivent être recherchés : pathologies endocriniennes, maladies neurologiques, insuffisance rénale, facteurs de risque d’athérosclérose et antécédents psychiatriques. Correspondance : Pr. R. RABII. Service d’Urologie, CHU Ibn Rochd, Casablanca, Maroc. E-mail : [email protected] -5- Diagnostic de la dysfonction sexuelle féminine R. RABII et coll. rétrécissement de l’orifice vaginal, des signes de vulvovaginite ou d’autres lésions vulvo-vaginales. Des séquelles de déchirure périnéale ou d’épisiotomie doivent également être notées. La recherche de certaines classes de médicaments avec effets secondaires sur la fonction sexuelle est i n d i s p e n s a b l e ( a n t i hy p e r t e n s e u r s , a g e n t s chimiothérapiques, psychotropes, antiépileptiques, antagonistes H2...) [6, 8, 10]. b. Examen au spéculum b. Chirurgicaux Il doit toujours être pratiqué avant le toucher vaginal, à la recherche de signes de cervicite, d’une hypertrophie, ou des cicatrices de déchirure obstétricale. Les antécédents de chirurgie pelvienne ou génitale, ou toute autre intervention chirurgicale uro-génitale ou périnéale doivent être notés [7, 9]. La présence d’un vaginisme qui peut empêcher l’introduction du speculum est à noter également. c. Gynéco-obstétricaux c. Touchers pelviens Doivent préciser les caractères du cycle menstruel, les modalités de la contraception, la gestité, la parité et le déroulement des grossesses et des accouchements antérieurs, afin d’évaluer leurs conséquences sur le tractus uro-génital [7, 9]. Ils permettent une évaluation de la musculature pelvienne qui peut être appréciée par la force de contraction, ainsi qu’un examen des organes pelviens à la recherche d’une sensibilité ou d’une éventuelle masse. 8. Les antécédents toxiques 3. L’examen cardiovasculaire La recherche d’une intoxication tabagique est essentielle, vu le retentissement de tabagisme chronique sur la fonction sexuelle par le biais de l’atteinte artérielle. L’inspection au niveau des membres inférieurs permettra de relever un livedo, une pâleur tégumentaire, une perte de la pilosité, voire une amyotrophie discrète. L’intoxication éthylique doit être également recherchée; une intoxication chronique peut être responsable d’un trouble sexuel par neuropathie ou par baisse de la testostéronémie circulante [6, 8, 9]. L’examen est complété par la palpation des pouls et l’auscultation des grands axes vasculaires à la recherche d’une sténose des artères (souffle artériel) [1, 11]. II. EXAMEN CLINIQUE 4. L’examen neurologique L’examen neurologique comporte, entre autres, l’examen de la sensibilité périnéale, l’appréciation du tonus du sphincter anal, la recherche d’une faiblesse musculaire, et l’examen des réflexes génitaux, ostéotendineux et cutanés plantaires [1, 8, 11]. 1. L’examen général Il comprend : * La prise de la tension artérielle. * L’examen des seins à la recherche d’une galactorrhée. * La recherche des signes endocriniens en faveur d’un hypogonadisme ou d’une dysthyroïdie, d’hypo ou d’hypercorticisme. 5. L’examen abdominal L’inspection fait un inventaire des cicatrices faisant préciser les interventions correspondantes. * L’inspection des caractères sexuels secondaires: hirsutisme, calvitie de type masculin, hypertrophie clitoridienne, qui traduisent une virilisation en rapport avec un excès d’androgènes [9, 11]. La palpation comporte la recherche d’un syndrome tumoral abdomino-pelvien, ou une douleur abdominopelvienne ou lombaire [8, 11]. III. EXAMENS PARACLINIQUES 2. L’examen uro-génital [8, 9, 11, 12] Il doit être doux, progressif et méthodique, il comprend : a. Examen des organes génitaux A. Bilan biologique Une attention particulière devrait être accordée à l’examen des organes génitaux externes, y compris le clitoris et les glandes vestibulaires. Les examens biologiques doivent être orientés par les données de l’interrogatoire et de l’examen clinique [5, 6, 7]. La vulve doit être examinée avec minutie et délicatesse pour déployer et observer le vestibule (orifices des glandes de Bartholin), l’orifice vaginal, l’hymen et le bas vagin à la recherche d’une béance vulvaire, d’un Un bilan biologique minimal est souvent indiqué à la recherche des facteurs de risque cardio-vasculaires, hormonaux et urologiques, il permet d’étudier les paramètres métaboliques et hormonaux [8, 13]. -6- J Maroc Urol 2010 ; 19 : 5-7 • Bilan métabolique urinaire, et/ou de prolapsus génito-urinaire peut être demandé. - Glycémie à jeun si la patiente n’en a pas eu dans les douze mois précédents, avec hémoglobine glycosylée (HbA1C) uniquement si la patiente est connue diabétique. - Une exploration uro-dynamique est utile pour apprécier l’étiopathogénie d’une incontinence urinaire au cours des rapports sexuels. Une électromyographie peut être indiquée en cas d’existence de troubles sensitifs au niveau périnéal, et/ou disparition du réflexe bulbo-caverneux, à la recherche d’une latence distale du nerf pudendal [4, 7]. - Bilan lipidique, s’il n’y en a pas eu dans les douze mois précédents : cholestérol total, HDL et triglycérides. - NFS, ionogramme, créatinémie, bilan hépatique s’il n’y a pas eu de bilan depuis 5 ans. - Dosage de la TSH. REFERENCES • Bilan hormonal Un bilan hormonal doit être effectué si un déficit hormonal est suspecté (taux de FSH, LH, œstradiol). Un dosage de la prolactine peut être indiqué en cas de suspicion d’un adénome hypophysaire. La mesure des concentrations de testostérone sérique totale peut aider à détecter un déficit en androgènes [4, 14]. D’autres examens peuvent être demandés en fonction de l’orientation clinique : un examen cytobactériologique des urines, des prélèvements urétraux, chlamydia, herpès), une mesure du pH vaginal. En l’absence d’autres orientations à l’anamnèse ou lors de l’examen clinique, il n’y a pas lieu d’envisager un autre bilan de principe. B. Examens spécialisés D’autres examens spécialisés peuvent être indiqués, mais ils ne sont pas disponibles en routine et nécessitent des équipements onéreux ; ils sont réservés pour la recherche, et ne sont pas indispensables pour le diagnostic et l’évaluation de la dysfonction sexuelle féminine [5, 7]. 1. Berman LA, Berman JR, Chhabra S, Goldstein I. Novel approaches to female sexual dysfunction. Expert Opin Investig Drugs 2001 ; 10 : 85-95. 2. Buffat J. Motifs de consultations sexologiques féminines: approche pour les médecins praticiens. Rev Med Suisse 2005 ; 1 : 754-61. 3. Wyllie MG. The female sexual dysfunction (FSD) revolution reverts to evolution. BJU Int 2007 ; 100 : 697-8. 4. Phillips Nancy A. Female sexual dysfunction : evaluation and treatment. Am Fam Physician 2000 ; 62 : 127-36, 141-2. 5. DeUgarte CA, Berman L, Berman J. Female sexual dysfunction, from diagnosis to treatment. Sexuality Reproduction and Menopause 2004 ; 2 : 139-45. 6. Meston CM, Bradford A. Sexual dysfunctions in women. Annu Rev Clin Psychol 2007 ; 3 : 233-56. 7. Aslan E, Fynes M. Female sexual dysfunction. Int Urogynecol J Pelvic Floor Dysfunct 2008 ; 19 : 293-305. 8. Lue TF, Basson R, Rosen R, Giuliano F, Khoury S, Montorsi F. Sexual medicine-sexual dysfunctions in men and women. Paris : Health Publications 2004 : 991. 9. Berman JR, Berman LA, Werbin TJ, Goldstein I. Female sexual dysfunction : anatomy, physiology, evaluation and treatment options. Curr Opin Urol 1999 ; 9 : 563-8. 10. Hatzichristou D, Rosen RC, Derogatis LR, Low WY, Meuleman EJ, Sadovsky R, Symonds T. Recommendations for the clinical evaluation of men and women with sexual dysfunction. J Sex Med 2010 ; 7 : 337-48. L’échographie doppler et la photopléthysmographie vaginale permettent de mesurer le débit sanguin des organes génitaux, et l’évaluation de la concentration en oxygène au niveau clitoridien, vaginal et labial. 11. Frank JE, Mistretta P, Will J. Diagnosis and treatment of female sexual dysfunction. Am Fam Physician 2008 ; 77: 635-42. La température du vagin, des lèvres et du clitoris, et le seuil de sensation vibratoire peuvent être mesurés par un analyseur thermique couplé à un analyseur des vibrations sensorielles, et comparés avec des nomogrammes validés disponibles actuellement. Ce moyen de diagnostic non invasif peut être utile pour la prise en charge des femmes avec dysfonction sexuelle [16]. 12. Ben ZI, Bronner G, Shtarkshall R. Sexual function and dysfunction : from theory to practice. Harefuah 2009; 148 : 592-4, 658. 13. Graham CA. Medicalization of women’s sexual problems: a different story ? J Sex Marital Ther 2007 ; 33 : 443-7. 14. Clayton AH, Hamilton DV. Female sexual dysfunction. Psychiatr Clin North Am 2010 ; 33 : 323-38. 15. Laine H, Jones KP. Hypoactive sexual dysfunction in a young woman. Obstet Gynecol 2007 ; 109 : 415-8. C. Autres examens 16. Kingsberg SA, Janata JW. Female sexual disorders : assessment, diagnosis, and treatment. Urol Clin North Am 2007 ; 34 : 497-506. D’autres examens non spécifiques peuvent être indiqués en fonction de l’orientation : - En cas de pathologie associée, un bilan radiologique identique à celui demandé en cas d’incontinence -7-