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61 Convaincre, persuader et délibérer
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! page 325 du manuel
Le Chevalier, la Jeune Fille et la Mort,
e
XVI
s.,
Hans Baldung Grien (1484-1545),
35,5 x 29,6 cm, musée du Louvre, Paris
Le peintre
• Son œuvre, qui groupe un catalogue abondant de tableaux, de gravures et de
dessins, est l'expression d’une personnalité tout à fait particulière. Hans Baldung
Grien, sensible aux orientations intellectuelles de l’Humanisme et de la Réforme,
révèle dans des œuvres religieuses, profanes, mythologiques et allégoriques,
remarquables par la finesse du dessin et le raffinement du coloris, un tempérament violent en même temps qu’une spiritualité très sereine.
• Hans Baldung est né en Souabe en 1484. Il appartient à une famille d’érudits.
Après un apprentissage dans sa ville natale chez un peintre qui venait probablement de l’école de Martin Schongauer (on admet qu’il reçut le surnom de Grien,
« vert », à cette époque), il se rendit vers 1503 à Nuremberg où il entra dans
l’atelier d’Albrecht Dürer. Les années passées chez ce peintre furent décisives
pour le développement du jeune artiste que Dürer semble avoir occupé surtout
comme dessinateur de vitraux. Les dessins des années 1503-1504 révèlent ses
dons et annoncent ses talents de graveur. En 1505, il réalisa, aux côtés de Dürer,
la partie la plus considérable des gravures sur bois du livre d’Ulrich Pinder, le
Beschlossen Gart, et, après le départ du maître pour l’Italie en 1505, les illustrations du Speculum Passionis du même auteur.
• En 1509, Baldung s’établit à Strasbourg. En peu de temps, il s’est fait un nom
comme peintre ; estimé comme citoyen, il devint même plus tard membre du
conseil de la ville.
• Son tempérament fougueux, sa fantaisie et son imagination sont inépuisables.
Presque chaque année, il exécute des gravures sur bois et des illustrations de livres.
À côté des sujets religieux, son attention se concentre de plus en plus sur des
thèmes profanes. Les allégories, pleines de spiritualité ainsi que de diabolisme,
révèlent le cercle d’Humanistes avec lequel il était lié. Les Trois Âges de la femme
et la Mort (Musée d’Art et d’Histoire, Vienne), vers 1510, en est un exemple. La
beauté du corps humain y est confrontée avec l’image effroyable de la Mort,
représentée comme un cadavre qui rappelle l’allégorie de la Vanitas, inspirée des
danses macabres du Moyen Âge.
Le tableau
• Le chapitre 6 traite dans le groupement de textes 3 de l’apologue et à la page
367 les élèves pourront lire que l’apologue se présente sous la forme d’un récit et
constitue un genre attractif. Il cherche à intéresser son lectorat, il vise également
à l’instruire… On peut aborder ce tableau en quatre étapes :
IMAGE D’OUVERTURE – 6. Convaincre, persuader et délibérer 1
Première approche : les différents plans.
• L’os du premier plan ; le cheval, le chevalier, la jeune fille de dos occupant les
trois quarts du tableau ; le squelette au corps en lambeaux tirant avec ses dents
la robe devant les troncs d’arbre et l’arrière plan bleu vert représentant une
colline (scène classique) et un ciel bleu moutonné.
Deuxième approche : les couleurs
• Couleurs froides au premier plan : herbes et fougères. Couleurs chaudes au
deuxième plan : rouge des vêtements au centre avec le rappel de la couleur verte
pour la collerette du chevalier. Couleurs froides à l’arrière-plan : bleu vert des
collines et du ciel. La profondeur est ainsi créée et le rouge ressort sur un fond
froid, mettant en valeur la troisième dimension. Le rouge, c’est la vie et la passion qui recouvrent ces deux amants enlacés, s’accrochant l’un à l’autre, essayant
de lutter contre la mort qui elle-même prend appui sur un tronc d’arbre pour
tirer avec sa mâchoire sur la robe.
• Le rouge ressort de deux façons : grâce au liseret noir de la jaquette du chevalier et du décolleté de la robe et grâce à la blancheur de la peau et de la coiffe de
la jeune fille. Avec cette carnation blanche, Baldung suit une convention. La plupart du temps, son maître Dürer et ses contemporains Altdorfer et Cranach
peignent aussi le corps des femmes dans des tons plus clairs que les hommes, et
les jeunes corps sont plus pâles que les vieux. Seules les joues se teintent de rouge,
marquant l’effort fourni pour résister !
• La robe est d’un rouge moins intense que l’habit du chevalier, les plis sont mis
en valeur par des reflets blancs. La robe nous conduit à la mort.
Troisième approche : la composition
• Ce tableau, où les protagonistes sont au centre, est composé de toute une série
de diagonales créant ainsi une scène en mouvement. Les diagonales opposées
formées par le corps de la jeune fille, les pattes arrières du cheval et la jambe de
la mort soulignent l’intensité de la lutte. Le cheval lui-même est suspendu dans
son élan, ses pattes avant sont en l’air.
• On assiste à une composition en triangle classique en remontant de la tête de
la mort vers la tête du chevalier, ligne doublée par la position au sol du linceul,
pour redescendre vers les pattes avant du cheval.
• Ce triangle est doublé par la place occupée par les taches blanches présentes
dans le tableau : au pied de la mort, sorte de champignon pourri, sur le ventre
du cheval, sur son postérieur, les dents et le faciès de la mort, remontant vers la
coiffe de la jeune fille et les plumes du chevalier.
• On retrouve ces taches sur le sol, les troncs, le ciel, jeu sur les contrastes blanc
sombre.
Quatrième approche : le personnage de la mort.
• Elle est disloquée, ayant perdu sa jambe droite. Sa chair est en lambeaux, pendant à son bras gauche, des boyaux sortent de son corps tels des serpents ; son
corps aux tons bruns contraste avec le linceul blanc aux reflets bleus dont les plis
rappellent ceux de la robe de la jeune fille.
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• Cette représentation nous fait penser à celle des danses macabres, où la mort,
plutôt un « mal-mort », une âme sans repos venait chercher les vivants. À
l’époque, on pensait que les revenants étaient des personnes que la mort avait
fauchées prématurément et qui, n’ayant pas reçu les derniers sacrements, erraient
sur terre.
• Baldung, ici comme dans Les Âges de la Vie (vers 1510), peint la mort non pas
en squelette, mais en cadavre desséché (voir également le tableau de Grien reproduit p. 42 du manuel).
En conclusion, Baldung nous raconte l’histoire d’une jeune fille progressivement
arrachée à l’amour et emportée par la mort. L’os du premier plan était bien une
menace. Cette peinture a donc bien une visée éducative.
Pour aller plus loin
Cette analyse peut être prolongée en montrant d’autres tableaux de Baldung. Par
trois fois, il peignit la mort avec une jeune fille ou une jeune femme :
• Les sept âges de la vie,
• Les trois âges de la femme et la mort (p. 42 du manuel - Madrid),
• Les âges de la vie (déjà cité - Vienne).
Dans ces tableaux, il représente toujours des femmes nues.
On pense aussi à Dürer et son tableau Ritter, Tod und Teufel (Cavalier, mort et
diable) où la mort avec son sablier rappelle au vivant que la vie est éphémère.
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