La grande misère de la culture belge
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La grande misère de la culture belge
MERCREDI 10 février 2016 / Edition Liège / Quotidien / No 34 / 1,50 € / 02 225 55 55 INSCRIPTIONS EN SECONDAIRE, MODE D’EMPLOI P. 4 SCIENCES Une théorie d’Einstein enfin prouvée ? ZOOTOPIE Le nouveau Disney P. 8 Le marché des opérateurs TV bientôt bouleversé ’interminable saga du câble touche à sa fin. La Commission européenne ne s’opposera finalement pas aux nouveaux tarifs d’ouverture du câble, concoctés dans la douleur par les régulateurs belges des télécoms et de l’audiovisuel. Ce qui signifie concrètement que Mobistar pourra présenter sa nouvelle offre de télé et d’internet, le 15 février. Décidée il y a plus de cinq ans, cette mise en concurrence du câble de télédistribution a longtemps tardé à se concrétiser tant les recours se sont multipliés. A ce stade, seul Mobistar a annoncé son intention de « monter » sur le câble. Les câblo-opérateurs sont cependant parvenus à limiter la casse. La Commission a épinglé la décision belge sur plusieurs points. Elle s’étonne notamment de plusieurs aspects qui favoriseront Mobistar par rapport à ses concurrents déjà établis. Par exemple, le privilège dont bénéficieront les nouveaux entrants durant les deux premières années, un prix de gros très favorable qui doit leur permettre de faire l’acquisition de clients grâce à des promotions attractives. Clairement, l’Europe semble d’autant plus perplexe que Mobistar est loin d’être un perdreau de l’année, pouvant compter, avec sa maison mère Orange, sur le soutien d’un grand groupe international. ■ POLÉMIQUE Hanouna dépasse les bornes L P. 15 NOS INFORMATIONS P. 29 La grande misère de la culture belge PIERRE SERVENT « Une guerre de trente ans contre Daesh » P. 19 © HATHIM KAGHAT. STYLE Après les tunnels, après le RER, au tour des musées de se déglinguer faute d’une gestion correcte des infrastructures. l pleut sur la culture belge. Eh non, ceci n’est pas une métaphore. Les toitures percées des Musées royaux d’art et d’histoire laissent s’infiltrer pluie, poussière et… pigeons dans les salles renfermant les trésors du patrimoine. « Au Musée des instruments de musique, il arrive régulièrement que la porte d’entrée ne s’ouvre plus ou ne se ferme I plus. A la Porte de Hal, c’est l’ascenseur qui est en panne. A Laeken, la Tour japonaise, le Pavillon chinois et le Musée d’art japonais sont fermés depuis deux ans. Le site est donc abandonné, il a déjà été vandalisé… », énumère Alexandra De Poorter, directrice générale ad interim. La déglingue des bâtiments n’est pas neuve, mais le délabre- ment s’est aggravé au fil du temps. Au point qu’aujourd’hui, il y a urgence. A bien des étages, on pointe la responsabilité de la Régie des bâtiments. L’administration veille au patrimoine immobilier de l’Etat sur l’ensemble du territoire : bureaux, prisons, musées, palais de justice… Elle est débordée. En coulisses, certains s’inter- rogent sur la dimension politique de la situation, fruit de longues années de sous-investissement. « Pendant très longtemps, les Musées bruxellois n’intéressaient personne. D’où la situation pourrie. Et maintenant, la N-VA va s’en saisir pour les asphyxier. Et puis les démanteler. » ■ P. 2 & 3 NOTRE DOSSIER Ces parfums qui nous manipulent P. 22 FOOTBALL Batshuayi n’est plus que l’ombre de lui-même P. 24 & 25 En Allemagne, la piste d’une erreur humaine ’est tout un pays qui s’interroge après la collision de deux trains en Bavière, qui a fait au moins dix morts et plus de quatre-vingts blessés mardi matin. Selon les premiers éléments de l’enquête, les voies étaient équipées d’un système de freinage anticollision qui avait été révisé à cet endroit même la C semaine dernière et n’avait pas révélé d’anomalies. Mardi, en soirée, plusieurs médias ont affirmé que la collision était due à une erreur humaine. Selon certains, un employé du poste d’aiguillage de Bad Aibling a désactivé le système automatique de signalisation. « Les deux boîtes noires des ca- bines de conduite qui ont été retrouvées, devraient permettre d’éclaircir toutes ces questions. Mais nous devons attendre les analyses avant de nous lancer dans des spéculations », a insisté le ministre fédéral des Transports, Alexander Dobrindt. ■ P. 6 NOTRE DOSSIER Au moins dix personnes sont mortes dans la collision.© AFP L’ÉDITO Béatrice Delvaux ÉDITORIALISTE EN CHEF EN BELGIQUE, MÊME LES PIGEONS VONT AU MUSÉE agritte aurait adoré : un pays qui n’aurait plus beM soin de peintres, car les musées eux-mêmes seraient devenus des tableaux. Avec des trous dans le toit pour y voir les nuages, des 06 5 413635 006302 momies posées sur l’eau, des sols qui changent de couleur, des pigeons dans leur nid et la pluie comme maître d’une scénographie qui change selon le temps qu’il fait. Ceci n’est pas une politique muséale, mais ce sont les Musées royaux à Bruxelles en 2016, dans un pays où plutôt que de réparer les toitures, on ferme les salles. On croyait le traitement réservé aux tunnels ou au RER, mais non, des pans de Belgique montrent les limites de l’absence de fixation de priorités, de la pauvreté des budgets, de l’éclatement des compétences et de la dilution de vision/volonté commune. Eh oui, il pleut dans le Cinquantenaire. Le côté rassurant est que MARCHÉS RÉGIONS TÉLÉVISIONS 13 20 28-29 les employés sont désormais des pros du sauve-qui-pleut, formés aux déplacements de seaux, à l’évitement de gouttes et à la prise de température : « Nous sommes très bien préparés, après toutes ces années. » Ô misère… Il serait tentant de désigner la Les employés sont désormais des pros du sauve-qui-pleut N-VA qui profiterait de cet état des lieux pour dépecer les collections fédérales existantes et transférer ce qui prend l’eau, vers des terres régionales plus abritées. On pourrait également subodorer que les Wallons, qui multiplient leurs propres musées LOTERIE NÉCROLOGIE PETITES ANNONCES 29 30 30 (parfois concurrents !), ne sont pas les premiers à vouloir mettre la main au seau fédéralo-bruxellois : le musée « de proximité » est tellement plus rentable économiquement et électoralement. Mais l’objectivité force à dire que la situation – scandaleuse – à gérer par le gouvernement fédéral date d’avant-hier. D’études de faisabilité en masterplan, on a surtout réussi au fil des années à reporter le problème. Et pour cause – même si cela n’excuse rien –, restaurer des bâtiments publics, classés, vieux et aux surfaces énormes, coûte très cher. Quel ministre serait assez fou pour s’emparer de la chose ? Un ministre de la Culture ? Oui, mais en Belgique il n’y en a pas, ou MÉTÉO MOTS CROISÉS SUDOKU 31 31 31 plus, ou trop : un par communauté et neuf « compétents » pour Bruxelles. Quelle politique des musées pour la Belgique, quel budget, quelles restaurations et priorités ? C’est la secrétaire d’Etat à la Politique scientifique qui est chargée d’apporter des solutions à une problématique qui la dépasse, vu l’ampleur des problèmes, l’enjeu global culturel et la structure du pays où ils sont posés. Un pays digne de ce nom se doit d’y répondre, mais la Belgique a-t-elle encore cette volonté et ce luxe ? Les conservateurs n’y croient plus. Quand le politique avouerat-il que lui non plus ? Il y a pire que prendre l’eau : être seul à croire qu’on peut être sauvé. BANDE DESSINÉE BON À DÉCOUPER PETITE GAZETTE 31 31 32 lesoir.be Pourquoi la culture à Bruxelles part-elle à vau-l’eau ? On en parle avec Daniel Couvreur. Retrouvez la carte des dégradations des tunnels bruxellois. Notre carte interactive des carnavals à ne pas manquer. 1