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PROLOGUES ET CULTURES MÉDIATIONS LITTÉRAIRES ET ARTISTIQUES Interroger le discours prologal aujourd’hui poursuit un vieux débat : le prologue ou tout autre texte introducteur à la lecture d’une œuvre littéraire ou artistique est-il un simple « appendice ou un corps d’écriture »1 ? Songeons à l’ouvrage de Miguel de Unamuno, Trois Nouvelles exemplaires & un prologue traduit par Jean Cassou et Mathilde Pomès, précédée d’une introduction de Valéry Larbaud datant de 1925. Nous y retrouvons le prologue d’Unamuno introducteur d’une fiction littéraire et, le péritexte de Larbaud impliqué dans la relation critique du transfert interculturel. Entre l’hier et l’aujourd’hui, l’universalité d’un auteur mort repris par un auteur vivant étranger est à son tour sujet d’écriture chez le poète contemporain espagnol Luis Antonio de Villena préfaçant en 2011 la traduction de Les chroniques (1927) de Marcel Proust ( Los salones y la vida ) aux éditions Espuela de plata. Que s’opère-t-il ? Sommes-nous face à un simple rapport de séduction littéraire ou plutôt devant un transfert interculturel qui favorisera la lecture d’un nouvel acte créateur ? En préfacier de Proust, Villena semble interpréter les chroniques de salons comme un prologue à la lecture de À la Recherche du Temps perdu. Par ailleurs, l’écriture de la préface écrite par Villena ne laisse-t-elle pas entendre la propre voix du poète espagnol à travers le portait du Proust chroniqueur ? Cette préface ne concourt-elle pas à insinuer le temps retrouvé, celui qui remet au goût du lecteur contemporain une vision sociétale caduque et un usage littéraire oublié, celui des chroniques de salons en vogue au XIX e siècle? Dans ce cas précis, le prologue voisine avec le genre autobiographique et celui de la chronique mais il peut aussi relever de l’essai littéraire, comme par exemple, dans les traductions des Nouvelles complètes de Conrad préfacées par le poète français Jacques Darras et publiées chez Gallimard en 2003. Le prologue semble réinventer des tonalités de genres. De fait, les préfaces ne sont pas de simples présentations, elles conduisent au questionnement de la lecture littéraire et artistique au cœur même de la transmission de l’œuvre et interrogent l’édition d’un texte d’auteur et son passage au domaine public. Le professeur de littérature française, Michel Jarrety, spécialiste de Paul Valéry, dans l’ouvrage collectif, L’œuvre et son ombre publiée en 2000, précise que la relation prologale pose la question du « souci de vulgarisation » et qu’elle marque même le passage entre « les siècles aristocratiques et les sociétés démocratiques ». Ainsi, au Siècle d’Or, les prologues de Cervantes ou la publication des prologues de Gonzalez de Salas au Parnaso Español de Quevedo de 1648 permettront d’aborder à la fois le prologue d’auteur et celui écrit par l’éditeur coauteur de Quevedo. Nous porterons donc une attention particulière aux préfaces d’auteurs, de traducteurs, d’éditeurs et de cinéastes dans leurs passages d’écritures séculaires et sociétales. Nos recherches s’efforceront de mettre à jour les relations prologales liées à leurs écritures, leurs lectures, leurs montages (pour le générique de film) dans la culture d’origine ou à leur transfert dans une culture étrangère européenne, latino-américaine, américaine et asiatique. Si une large part de l’investigation sera accordée à la lecture et l’écriture du prologue aux multiples transferts culturels, nous n’écarterons pas de notre étude le transfert formel du prologue au cinéma, en interrogeant les génériques de film de cultures étrangères. Comment se joue le souci de vulgarisation à travers le générique ? Dans un éventail de cultures, nous déterminerons l’usage du prologue ou du générique de film et pourrons l’élargir aux œuvres de théâtre préfacées par des metteurs en scène ou des acteurs. 1 Michel Jarrety, “ Le souci de vulgarisation”, L’œuvre et son ombre, Que peut la littérature secondaire?, Éditions de fallois, paris, 2002, p. 35. Nous pourrons nous tourner vers la culture japonaise et, nous découvrirons que l’œuvre n’est jamais porteuse de prologue. De ce fait, le prologue n’est pas toujours un seuil à la lecture mais un deuil, une séparation cependant incluse en postface. La rencontre de chercheurs internationaux permettra de dépasser un comportement fréquent de lecteur qui néglige la lecture du prologue. Lors de notre rencontre, nous nous efforcerons de conduire dans un concert interculturel, les enjeux littéraires que sous-tendent les prologues d’hier et d’aujourd’hui. Gardons présente à l’esprit la formulation de l’écrivain argentin Borges qui dans son Livre de préfaces déclare : « Une préface, quand elle est réussie, n’est pas une manière de toast ; c’est une forme latérale de la critique ».2 Chemin faisant, il nous faudra investiguer sur les multiples sillons tracés par la relation prologale dans la culture d’origine ou dans le passage à la culture étrangère. 2 Cf. citation de Borges reprise par Michel Jarrety dans L’œuvre et son ombre, Que peut la littérature secondaire?, Éditions de Fallois, Paris, 2002, p. 42.