Ambassadeur

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Ambassadeur
RENCONTRES
AMBASSADEUR
Nathalie Cardone
S
ouvenez-vous : la France fredonnait
« Hasta Siempre, Comandante », le texte
de Carlos Puebla dédié à Ernesto Che
Guevara. À Pau, un vent de fierté soufflait sur
la ville, car l’interprète talentueuse n’était
autre que Nathalie Cardone, une enfant du
pays. Et puis, un long silence. Qu’est-elle
devenue ? Nous avons retrouvé l’impétueuse,
un peu sauvageonne, et elle a accepté de nous
répondre. Ouf !
Nathalie a la timidité et la poésie des artistes. Ses
phrases sont moulées dans une mélodie personnelle, et rien n’est anodin de ses mots choisis. Une
personnalité hors du commun qui ne triche pas.
Quand on lui dit « Pau », elle s’anime : « Pau est
magique, je la trimballe dans mon paletot partout
dans le monde, et ne cesse de la chercher dans
chaque être que je rencontre. Mais je n’y reviendrai qu’après avoir gagné toutes mes batailles ».
Elle jure revenir au Sud comme on revient à
l’amour. Normal avec un père sicilien, qui a grandi
au Maroc, et lui a transmis les variations et déclinaisons autour de ce thème. Mais on brûle de lui
poser la question, et ne résistons pas longtemps.
À quand le grand retour sur scène ? Et la réponse
réchauffe comme un soleil d’été : « j’ai une grande
tournée en préparation pour la rentrée, ainsi
qu’un album qui sortira courant 2007 », avec un
nuage d’amertume : « j’espère que cette
fois-ci, je ne disparaîtrai pas comme je suis
venue ». Côté cinéma, après son apparition
remarquée dans « Drôle d’endroit pour une
rencontre », elle attend de trouver son rôle.
Cette adepte des plats familiaux qui réunissent, tels la paella, le couscous, le ragoût ou
les « migas de pan » adore « le livre des
secrets » de Osho Bhagwan Schree
Rajineesh, et s’investit dans
« les valeurs vraies dans lesquelles j’ai été élevée », et
que l’on retrouvera, à coup
sûr, imprimées dans son
retour artistique. Et puis, il
y a Jimmy, son petit garçon, dont elle dit joliment : « Il est mon seul
maître, le meilleur de
moi-même ».
Alors Jimmy, on t’en supplie : prête-nous un peu
ta belle maman, que la
poésie et la magie réapparaissent dans nos vies.
Par Gracianne Hastoy
Nathalie, véritable ambassadrice avec le béret et le cigare
de Navarrenx.
BILLET D’HUMEUR
de Gracianne Hastoy
L’étrange deuxième chance.
l était une fois une société dont les repères fondamentaux fuyaient à vau-l’eau.
Le lendemain angoissait. Il était difficile
de trouver un travail, de le garder.Tout aussi
délicat était de boucler son mois sans avoir
recours au crédit, avec le spectre lointain de
l’affreux surendettement. Dans tout cela,
faire des enfants inquiétait et les femmes préféraient se battre dans la cour
des entreprises que pouponner. Les êtres étaient fatigués, stressés, dépassés,
et soumis à des contrôles et des interdits de toutes parts. Les seuls à se
réjouir de tout ce marasme étaient les chirurgiens esthétiques qui passaient
leur journée à dessiner au bistouri la jouvence éternelle.
Quand vint soudain le nouveau monde.
C’était une seconde chance, une deuxième vie. C’était merveilleux. Les
êtres étaient beaux, intelligents, portaient des vêtements magnifiques. Les
femmes se paraient de bijoux hors du commun.Tous pouvaient choisir le
métier dont ils rêvaient, et développer leur entreprise. Le monde était à
bâtir, et chacun y apportait sa pierre d’achoppement. Les uns achetaient des
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rues, les autres des îles où ils construisaient de superbes complexes hôteliers
pour que chacun puisse se détendre le week-end. Il n’y avait ni réchauffement de la planète, ni Sida, ni maladies horribles. Il n’y avait même pas
la mort en conclusion. Mieux, les prix étaient dérisoires, et l’argent ne commandait plus tout. Ramené à sa valeur première de bout de papier. C’était
un monde où l’on chantait, où l’on dansait, où l’on créait…
Comment ? Je suis bonne pour l’asile ou pour vous pondre un délicieux
roman de science-fiction ? Non ! Le monde que je viens de vous décrire
existe, et contre toute-attente, il fait peur. Il s’agit du drôle de jeu « Second
Life » sur Internet. Des milliers de personnes ont déjà basculé dans ce
monde virtuel, et le confondent dès à présent avec la vie réelle. Les partis
politiques y ont même installé leur siège pour la campagne des
Présidentielles. En France, à l’heure où je vous écris, une police cybernétique traque des jeunes, hagards, ayant perdu toute conscience de la réalité,
et qui ont choisi de fuir, loin, dans ce monde qui n’existe pas.
Une seule question, est-ce vraiment ce dont nous rêvions, laisser aux prochaines générations les leurres d’une réincarnation cybernétique ? Je crois
que je préfère ne pas avoir la réponse…