Traité sur les armes, ça tiraille La mort en direct pour deux
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Traité sur les armes, ça tiraille La mort en direct pour deux
Le Soir Jeudi 27 août 2015 LEMONDE 13 ’accueil La mort en direct pour deux journalistes ÉTATS-UNIS Le geste fou d’un ancien collègue des victimes relance le débat sur les armes NEW YORK DE NOTRE CORRESPONDANT EN BELGIQUE Les centres d’accueil se remplissent vite L’afflux de demandeurs d’asile devant les portes de l’Office des étrangers continue. Mercredi, 268 personnes ont vu leur demande d’asile introduite. Parmi elles, 203 s’étaient déjà présentées mardi mais n’avaient pu être reçues. Elles avaient donc reçu un reconvocation. « Le reste des demandeurs reçus hier a été sélectionné selon qu’ils ont des profils de personnes vulnérables. Comme des familles, des femmes enceintes ou des mineurs nonaccompagnés », explique Dominique Ernould, porte parole de l’office. « 93 reconvocations pour jeudi ont en outre été distribuées et ils seront accueillis prioritairement ». Depuis plusieurs semaines, le centre est contraint de ne pouvoir répondre à toutes les sollicitations. De nombreux migrants passent la nuit dehors dans le parc qui fait face au bâtiment avec l’espoir de bien se placer dans la file. Les centres d’accueil de Fedasil doivent eux aussi répondre à une demande accrue. Hier, 273 personnes ont été placées dans un d’entre eux. Mais difficile pour Fedasil de planifier les besoins autrement qu’au jour le jour. « Chaque jour, on avise en fonction de l’afflux de demandeurs d’asile », constate Mieke Candaele, porte-parole de l’agence. « Pour l’instant, nous ne sommes pas encore à saturation. Il reste encore quelques places. Et d’autres doivent encore ouvrir, à Tournai notamment. Les unités mobiles sont elles aussi plus remplies chaque jour. » Par ailleurs, le gouvernement wallon a annoncé mercredi la mise en place d’un groupe de travail ministériel sur ces questions de l’accueil des migrants sur le sol national. Avec comme objectif de « faire le point sur les besoins des différents services de la fédération pour accueillir ces réfugiés ». TH.CA. L’instant fatal où le meurtrier présumé, Vester L. Flanagan (à dr., photo d’archives) fait feu, quasiment à bout portant, sur la journaliste Alison Parker. L’image de gauche a été filmée – et diffusée – par le tueur. Celle du centre a été prise par le cameraman de la chaîne, lui-même abattu dans la fusillade. © AFP. cette dernière, il avait confié le souhait de « quitter l’actu », de passer à autre chose. Tous deux, malgré leur très jeune âge, faisaient l’unanimité autour d’eux. Parker était une « rock star », confient ses collègues. Ward avait fait ses études à l’université Virginia Tech, lorsqu’un tueur solitaire y avait froidement abattu 32 personnes le 16 avril 2007. « Comment l’assassin a-t-il pu voler à ces familles, celle d’Allison et d’Adam, leurs vies, leur bonheur et leur amour ?, lâche le directeur général de WDBJ 7, Jeffrey Marks. Ils illuminaient la salle de presse tous les matins. » Francisco State University, il avait été exclu d’autres chaînes précédemment, saisissant toute occasion de dénoncer des discriminations raciales ressenties. Pourquoi Parker et Ward ? Tandis qu’une chasse à l’homme débute, Flanagan alimente ses comptes Twitter et Facebook en vidéos choquantes de la tuerie, filmée smartphone au poing, et livre quelques confessions. Parker aurait « proféré des propos racistes ». Premier tweet. Lui, aurait déposé une plainte auprès de l’Office fédéral pour l’égalité des chances (EEOC). Deuxième tweet. « Comment a-t-elle pu être « Vous faites ce métier et vous vous attendez à risquer votre vie dans une vraie zone de guerre. Pas au bord d’un lac paisible » BROOKE BALDWIN, PRÉSENTATRICE DE CNN Pendant ce temps, la chaîne ABC News reçoit par fax un manifeste signé d’un certain Bryce Williams. Revendique-t-il son geste ? Le parallèle est vite établi : Williams est le nom d’emprunt d’un reporter qui a travaillé moins d’un an à WDBJ 7, avant d’en être licencié en février 2013. Vester Lee Flanagan, de son vrai nom, était sujet à des accès de colère incontrôlés. Originaire d’Oakland et diplômé de la San embauchée après cela ? » Troisième et dernier tweet, avant que le compte de Bryce Williams ne soit fermé. Ward, quant à lui, serait celui qui aurait « dénoncé » Flanagan aux ressources humaines pour son comportement erratique et paranoïaque. Flanagan s’enfuit à bord d’un véhicule de location sur l’autoroute 66, à l’ouest de Washington. Entre Markham et Linden, un barrage de police le contraint Traité sur les armes, ça tiraille e tous les risques... © AFP. pression d’être dans un rêve. A l’extérieur, tout le monde s’éparpille à la recherche du passeur qui les amènera de l’autre côté. Deux nuits plus tard, la même scène : parmi les derniers à sortir, Bilal, Mustafa et la petite fille au foulard blanc. On se serre la main tandis que, à voix basse, ils me confient que la police leur a réclamé 15 euros pour les laisser passer. Maintenant, la frontière est à 8 heures de marche. Navid et Heshmat ont remis leur sort dans les mains d’un passeur dépourvu, ils perdent le signal GPS au milieu des broussailles. Parvenus de l’autre côté, ils sont mis en joue par la police hongroise. « Ils nous ont fait dormir dehors, mais il a plu. Les Syriens ont protesté et dans la confusion, la police a eu recours à des gaz lacrymogènes. » Il faut aussi un laisser-passer pour sortir du centre d’identification hongrois et gagner ensuite les camps de réfugiés dispersés dans le pays. Ici aussi, peu choisissent de s’y rendre. A la gare internationale de Budapest, devenu un refuge pour une centaine de personnes, nous saluons pour la dernière fois Navid et Heshmat. Sur le tableau électronique du quai 6, il est écrit : « Munich, 21h00 ». Heshmat sourit tout en montant dans le wagon. « Pour ne pas attirer l’attention, j’ai changé de vêtements. Tu penses que je suis de quelle nationalité maintenant ? » ■ FRANCESCA GHIRARDELLI (« LA REPUBBLICA ») P. 17 QUE POUVONS-NOUS FAIRE POUR AIDER LES MIGRANTS ? n adoptant le Traité sur le commerce des armes, les E Etats ont reconnu qu’il n’est plus guère possible de considérer les armes et les munitions comme une catégorie de marchandises comme les autres », a indiqué cette semaine à Cancun Peter Maurer, président du Comité international de la Croix-Rouge. Il participe à la première conférence des Etats parties à ce traité, entré en vigueur le 24 décembre 2014. « En obligeant les Etats parties à prendre en compte le respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme dans leurs décisions sur les transferts d’armes, a-t-il poursuivi, le Traité contribuera à ce que les armes ne se retrouvent pas dans les mains de ceux qui risquent de les utiliser pour commettre des crimes de guerre. Encore faut-il que des contrôles rigoureux soient exercés au niveau national. » La conférence, qui se tient cette semaine à Cancun, rassemble un grand nombre des 72 pays ayant déjà ratifié le Traité et des 132 autres l’ayant signé. « Il s’agit de mettre le Traité sur les rails, précise Cédric Poitevin, directeur adjoint du Grip (Groupe de recherche et d’informations sur la paix et la sécurité). Les Etats parties doivent s’accorder sur les règles de procédures qui seront en vigueur lors des prochaines conférences, et ils ont accepté que les ONG, qui se sont battues de longues années pour obtenir ce traité, puissent avoir accès à toutes les discussions comme observateurs. La question du “rapportage” n’a pas encore été tranchée. Ce terme barbare fait référence à un article du traité qui prévoit, de façon assez imprécise, que les Etats rapportent annuellement les informations sur leurs exportations et importations. Ces informations doivent-elles être confidentielles ou publiques ? Les ONG plaident pour la plus grande transparence, d’autant qu’un grand nombre des Etats les publient déjà de façon volontaire. » à une sortie de route, à pleine vitesse. L’auto fait une embardée et percute des arbres. Le fugitif se tire alors une balle dans la tête. Il décédera deux heures plus tard à l’hôpital où il a été héliporté. La Virginie et l’Amérique émergent, groggy, de ce nouveau drame lié à la libre circulation des armes à feu outre-Atlantique. La pilule est amère pour le gouverneur local, le démocrate Terry McAuliffe, qui avait tenté en début d’année de réglementer le contrôle des armes à feu dans son Etat. Timidement, pourrait-on penser : en interdisant à ses concitoyens d’acheter plus d’une arme par mois, et en imposant des contrôles d’identité dans les foires aux armes où se troquent armes lourdes et munitions en tous genres. En vain. Sur CNN, la présentatrice Brooke Baldwin refrène son émotion. Elle aussi a fait ses classes sur des chaînes locales en Virginie. « Vous faites ce métier et vous vous attendez à risquer votre vie dans une vraie zone de guerre, soupire-t-elle. Mais pas au bord d’un paisible lac, ici, en Amérique, en direct et à l’heure du petit-déjeuner. C’est hélas le pays dans lequel nous vivons. » ■ MAURIN PICARD LESBRÈVES GRÈCE DIPLOMATIE Conférence à Cancun pour appliquer le nouveau traité pas nous arrêter » convergent directement vers la frontière. Il est 22 heures et à la voie 1L de la gare, les portes du train pour Subotica s’ouvrent. Subotica, c’est la dernière ville serbe avant la frontière hongroise. De jeunes Afghans joyeux se jettent à bord comme s’ils partaient en excursion. Sur le train, on est plus de 120. Dans deux jours, c’est ce même train que prendront Mustafa et Bilal, tandis que Navid et Heshmat ont préféré le bus. Les agents des chemins de fer nous poussent dans les wagons bondés de 2e classe. Les portes qui les séparent de la 1re classe, sur laquelle voyagent les Occidentaux, sont bloquées. Sur le convoi, un homme fait un signe de la paume pour signaler la petite taille des enfants. « En Syrie, c’est comme ça que les enfants meurent. » Puis, le même homme mime le jet d’un sac. Le convoi s’ébranle, les mains se lèvent en guise de prière pour qu’Allah veille sur eux. Une demi-heure plus tard, ils dorment presque tous, étendus sur les sièges ou en dessous, à même le sol, usés par trop de nuits sans sommeil. Cependant, un petit garçon m’a l’air agité. J’ai l’impression qu’il compte le nombre de frontières traversées. « On en est à six et la pire, ça a été la frontière bulgare avec les policiers qui ont lâché les chiens. » A deux heures du matin, nous arrivons à Subotica. Nous descendons en file, escortés par la police. Le silence est tellement surréel malgré le monde qu’il y a dans cette gare qu’on a l’im- Il est tout juste 6 h 45 du matin, ce mercredi, dans l’Etat de Virginie. Sur les écrans des téléspectateurs encore mal réveillés, une blonde pimpante en tailleur rouge et noir interviewe en direct la directrice de la chambre de commerce locale au Bridgewater Plaza, un havre de paix sur les rives boisées du lac de Smith Mountain. Sur la vidéo baignée de lumière rasante, Vicki Gardner explique patiemment à Alison Parker, la reporter de la chaîne locale WDBJ 7, que l’endroit est voué au bien-être public et aux loisirs en famille, après des travaux imposés par de graves inondations. C’est à ce moment précis que des coups de feu, huit au total, éclatent à l’antenne. Alison Parker tente de s’enfuir prise de panique, hurlant « Oh mon Dieu ! », tandis que Vicki Gardner sort du champ, touchée dans le dos. Le cameraman Adam Ward, qui tournait le dos à l’agresseur, est froidement abattu, à bout portant. La caméra heurte le sol de biais, laissant apparaître furtivement le visage du tueur, revolver à la main, petite moustache et barbichette, peau sombre. Sur le plateau de WDBJ 7, à Roanoke, la présentatrice blonde, bouche bée, reprend les rênes, « pas certaine de ce qui vient d’arriver ». La rédaction, en état de choc, s’efforce de joindre ses employés tandis que les secours foncent vers le lac proche de la ville de Moneta. A Bridgewater Plaza, Alison Parker, 24 ans, et Adam Ward, 27 ans, sont morts, foudroyés par le tueur, encore anonyme – mais pas pour longtemps. Des journalistes s’effondrent en larmes. Parker était la compagne du présentateur du journal quotidien de 18h, Chris Hurst, tandis que Ward allait se marier avec une productrice des informations du matin, Melissa Ott. A mi les pays du sud, plaide pour que les institutions internationales ne soient pas réservées aux pays développés. Un vote à bulletin secret est attendu. » Dans la plupart des pays occidentaux, des agences contrôlent déjà de façon adéquate les ventes d’armes à des pays étrangers. « Il y a cependant encore beaucoup à faire pour renforcer les capacités de contrôle de pays en développement, poursuit le chercheur du Grip, mais aussi pour que les décisions prises, parfois par le seul chef de l’Etat, soient transparentes pour le gouvernement, le Tsipras exclut de former un gouvernement d’unité nationale Le Premier ministre grec sortant Alexis Tsipras, qui a démissionné de ses fonctions, ouvrant la voie à des élections anticipées, a exclu mercredi de former un gouvernement d’unité nationale avec les partis de droite ou de gauche s’il n’obtient pas de majorité lors du scrutin sans doute organisé le 20 septembre. « Je ne vais pas devenir un Premier ministre qui coopère avec la Nouvelle Démocratie (droite), le Pasok (socialistes) ou To Potami (centregauche) », a-t-il assuré. (afp) BALKANS « Il y a beaucoup à faire pour renforcer les capacités de contrôle de pays du Sud » CÉDRIC POITEVIN Une autre question qui doit être tranchée est relative à l’organisation du secrétariat du Traité. « Les Etats doivent décider de la composition de ce secrétariat et du mode de sélection du secrétaire. C’est important, précise Cédric Poitevin : un secrétariat léthargique, c’est la meilleure façon d’enterrer un traité. Son but, c’est de mettre de l’huile dans les rouages. Trois pays étaient candidats pour accueillir ce secrétariat dans leur capitale : l’Autriche, la Suisse et Trinité-et-Tobago. Les deux premiers se targuent d’abriter déjà des institutions internationales et de nombreuses délégations diplomatiques. Trinité-et-Tobago, qui a de nombreux soutiens par- parlement et les citoyens. » Alors que les USA sont le premier exportateur mondial d’armes, le président Obama a signé le Traité mais le Congrès refuse de le ratifier. Le commerce international des armes est pourtant déjà fortement régulé aux USA. La Russie et la Chine, qui sont aussi de gros exportateurs, sont restées à l’écart du Traité, car ils ne supportent que la vente d’armes soit conditionnée au respect des droits humains. « Néanmoins, conclut Cédric Poitevin, la communauté internationale progresse à grands pas vers une réglementation plus responsable des ventes d’armes. » ■ Une grosse percée entre Belgrade et Pristina L’accord scellé mardi par la Serbie et le Kosovo à Bruxelles, portant sur l’énergie, les télécommunications et la création d’une association des municipalités serbes au Kosovo, dope leurs espoirs d’un rapprochement rapide à l’UE. « Je ne vois plus aucun obstacle à l’ouverture des premiers chapitres » de négociations d’adhésion à l’Union européenne, a dit le Premier ministre serbe Aleksandar Vucic. A Pristina, les dirigeants sont aussi satisfaits : « Nous considérons cet accord comme un grand succès qui nous assure la pleine souveraineté sur tout le territoire du Kosovo, le nord (à majorité serbe) y compris », a déclaré le Premier ministre Isa Mustafa. (afp) VÉRONIQUE KIESEL ** 13