En France « maréchaliste », articles de « L`Eclair » et des prétendus

Transcription

En France « maréchaliste », articles de « L`Eclair » et des prétendus
En France « maréchaliste », articles
de « L’Eclair » et des prétendus
« documents maçonniques »
La presse locale permet de mesurer l’évolution et l’intensité de la propagande anti-maçonnique au
travers de « l’Eclair », seul journal dont la série biterroise soit conservée ( collections de la
médiathèque d’agglomération de Béziers Méditerranée, « André Malraux »).
« L’Eclair » était un journal conservateur et « clérical », il s’opposait au « Petit méridional ».
La propagande anti-maçonnique, dans « l’Eclair », est signée « le Guetteur », pseudonyme du
chroniqueur biterrois.
Entre 1940 et 1944 plusieurs périodes se succèdent : d’abord de juillet à décembre 1940 sept
articles vont fustiger, sous forme d’informations confidentielles ou officielles et d’articles « de
fond », la Franc Maç∴ locale autant que nationale, ses rites, ses idéaux et ses pratiques, au nom,
bien sûr, des sacro-saints principes de la « Révolution Nationale ».
Mardi 20 août 1940 - « Dissolution anticipée »
« Un récent décret a prononcé la dissolution des sociétés secrètes notamment la francmaçonnerie. Cette décision a provoqué un soupir de soulagement général car la tyrannie de cette
secte occulte était devenue insupportable pour les Français soucieux d’accomplir loyalement leur
devoir dans les fonctions dont ils assumaient la charge.
Cependant les intéressés n’ont pas été surpris et n’avaient pas attendu le décret pour prendre
toutes leurs dispositions en vue de soustraire leurs agissements aux regards indiscrets.
C’est au mois de juin lorsque la défaite fut consommée et que le gouvernement échut au
Maréchal Pétain, que les affiliés de la loge L’Action Sociale ou de la loge Les Amis Choisis,
sentant venir l’orage, prirent la détermination de mettre à l’abri tous leurs documents. Un soir, à
l’heure où d’ordinaire, furtivement, les adeptes se rendaient à la réunion secrète, on vit arriver
boulevard de la Citadelle, devant l’immeuble occupé par les deux loges susnommées, un camion
sur lequel furent hâtivement chargés tous les objets mobiliers parmi lesquels abondaient les
bouteilles de liqueur de grande marque ainsi que les multiples accessoires servant aux
mystérieuses séances d’initiation.
Les attributs maçonniques qui se trouvaient sur la façade, ainsi que l’enseigne, furent enlevés et il
paraît que durant cette soirée de nombreux papiers furent brûlés.
Nous voulons croire que cette dissolution anticipée n’empêchera pas l’application du décret et
que les sectateurs ne pourront plus continuer leur œuvre malfaisante à l’abri d’un camouflage
quelconque. »
Mardi 3 septembre 1940 - « Sur l’honneur »
« La loi comportant la dissolution des sociétés secrètes est entrée en application. Tous les
fonctionnaires doivent déclarer « sur l’honneur » qu’ils n’ont jamais appartenu aux sociétés
secrètes ou ont rompu toutes relations avec ces sociétés.
A cet effet les diverses administrations de l’Etat, du département ou de la commune ont invité
leur personnel à prendre par écrit l’engagement demandé par la nouvelle loi.
Les deux formules de déclaration sont présentées aux intéressés qui en prennent connaissance et
remettent à leurs chefs hiérarchiques la déclaration signée et assurée de la plus entière
discrétion. »
Vendredi 13 septembre 1940 - « Une impudence a pris fin »
« Il a été signalé dans ces colonnes le défi impudent d’une Société secrète qui avait étalé
ostensiblement sa domination sur les pouvoirs publics en plaçant sur la façade de l’immeuble
qu’elle occupait une plaque portant l’inscription : « Place de la Loge maçonnique ».
Or il n’y a pas de place à cet endroit là, puisque le boulevard de la Citadelle continue sans
interruption et c’est par un abus de pouvoir que la plaque avait été apposée. Il nous est agréable
de constater que les services compétents ont enfin relevé ce défi à l’autorité gouvernementale et
enlevé cette plaque.
Nous voulons croire que, conformément au décret de dissolution des Sociétés secrètes, tous les
biens mobiliers ou immobiliers de la franc-maçonnerie à Béziers seront mis sous séquestre sous
quelque camouflage qu’on les ait dissimulés ».
Dimanche 27 octobre 1940 - « Les soubresauts d’une évolution »
La révolution nationale qui s’est opérée depuis le jour où le Maréchal Pétain faisant à la Patrie le
don de sa personne pour atténuer son malheur sauvait tout ce qui pouvait encore être sauvé a été
essentiellement pacifique.
Cependant les transformations profondes réalisées ainsi que les mesures prises soit contre les
étrangers, soit contre les Sociétés secrètes (franc-maçonnerie), soit contre l’intrusion des juifs
dans les administrations publiques ne pouvaient se passer sans heurts et sans secousses.
Il est certain que l’application de ces lois de salut public, atteignaient des personnes disposant
d’une grande influence et parfois d’une grande considération. Ces personnages appartenaient aux
milieux les plus divers soit qu’ils fassent partie d’un service public soit qu’ils soient membres d’un
organisme issu de l’élection.
Béziers n’a pas été à l’abri des soubresauts consécutifs à la mise en pratique des dispositions
gouvernementales. C’est ainsi que tel fonctionnaire dont les origines françaises étaient imprécises
a dû céder son poste, tel autre occupant une fonction incompatible avec un récent décret a dû se
retirer. Un certain nombre sont encore dans leurs emplois sous le couvert d’un renoncement
dont la sincérité devra être éprouvée.
Il y a aussi des élus qui ont compris que leur place n’était plus dans la Compagnie dont ils étaient
membres et qui très dignement ont subi les conséquences d’une situation causée par des appétits
et des ambitions auxquelles ils étaient étrangers.
Il en est d’autres issus du suffrage universel qui ont compris l’erreur à laquelle ils avaient
succombé dans un moment d’égarement et après avoir résilié leurs fonctions en guise de
protestation ont fait amende honorable. Ces derniers cependant comme les fonctionnaires
réticents, doivent être soumis à une épreuve et l’on veut être sûrs que leur repentir n’est pas une
feinte passagère.
Mais il reste encore ceux qui n’ont pas compris leur devoir et se maintiennent dans des fonctions
dont ils sont destitués. A ceux-là nous conseillons la lecture attentive des articles 197 et 258 du
Code pénal. Elle leur sera profitable et salutaire.
Quant à ceux qui ont la conscience troublée qu’ils réfléchissent à leurs actes et à leurs paroles. Le
Gouvernement du Maréchal Pétain l’a signifié à tous. Pour réaliser son œuvre de reconstruction
nationale, il ne veut pas opérer de brimades mais il entend que les serviteurs du pays fassent
preuve de loyauté et de fidélité à la France qui doit être sauvée. »
« LE GUETTEUR »
Dimanche 24 novembre 1940 - « Une destination imprévue »
C’est celle que pourrait avoir le local occupé autrefois par la loge maçonnique dissoute, descente
de la Citadelle.
Hier après-midi, plusieurs officiers supérieurs sont allés visiter les locaux pour se rendre compte
s’ils pourraient être affectés au Centre de réforme.
Nous ne connaissons pas le résultat de leur enquête, mais cette nouvelle destination, quoique
imprévue, ne serait-elle pas une réparation des dommages causés à l’armée par les fameuses fiches
maçonniques ? »
Début décembre 1940 un article reprend les « informations » sur la Franc maçonnerie locale et les
amplifie en première page : c’est une sorte de point culminant de cette phase d’anti-maçonnisme
local, alors que le « Guetteur », n’avait eu droit qu’à la rubrique « Béziers » .
L’article reprend les griefs, déjà développés, contre la Franc-Maçonnerie et dévoile aux lecteurs
l’intérieur du Temple, avec deux photographies antérieures au pillage par les individus du P.P.F.,
puisque la tenture de l’orient, ainsi que la toile qui masquait la première fenêtre de la façade,
toutes deux brûlées lors du pillage devant la porte de la Loge, étaient encore en place.
Enfin l’article fait référence au squelette d’enfant trouvé dans le cabinet de réflexion et qui sert de
prétexte à un dénigrement nauséeux des rites pratiqués en Loge.
Voici l’intégralité de ce texte :
L’Eclair, dimanche 8 décembre 1940 :
« L'INVENTAIRE DES LOGES MAÇONNIQUES
On découvre le squelette d'un enfant de sept ans
A BEZIERS
et une importante documentation
« Béziers, 7 décembre.
On sait que les biens de la franc-maçonnerie dissoute comme société secrète par un .récent décret, ont été mis sous
séquestre. La loge maçonnique de notre ville, située descente de la Citadelle, a été soumise à, cette mesure et, à cet
e££et; un inventaire du matériel a été fait récemment.
Cet inventaire s'est accompli sans bruit, car les francs-maçons biterrois niaient pas cru bon de se dévoiler et ont
voulu garder un prudent anonymat.
Cependant, cette opération n'est pas passée inaperçue pour tout le monde et nous avons eu la bonne fortune de
rencontrer un témoin oculaire qui nous a donné des détails intéressants.
L'immeuble servant de local à la Loge se trouve à l'angle de la rue du Bœuf, comprend trois étages et abrite deux
Ateliers ∴ :
« Réunion des Amis Choisis », qui est une loge chapitrale et aréopagique et « l’Action sociale ». L accès en est
interdit aux profanes et seul un concierge occupe le rez-de-chaussée en dehors des locaux réservés aux initiés. Pour
ces derniers, d'ailleurs, l'admission exige des formalités assez complexes et une tenue spéciale assez cocasse dont on
trouvera ci-contre la reproduction.
Mais n'anticipons pas ! Pour accéder à l’intérieur, il faut franchir un long couloir au bout duquel se trouve une
cellule d'attente. Aucune ouverture sur l'extérieur ne l'ajoure et une simple bougie est allumée pour permettre de se
guider et d'apposer sur une table disposée au centre, la signature d'acceptation du règlement et de la constitution.
Seulement lorsque Je postulant est abandonné à ses réflexions, une surprise désagréable l'attend. Il se trouve en
présence d'un cadavre étendu sur une table et dont le squelette encore en bon état laisse supposer que la mort ne
remonte pas très loin. C'est le cadavre d'un enfant de 7 ans environ qui est ainsi exposé là pour l'accomplissement
des rites maçonniques et l'on se demande comment le transfert de ce corps a pu être opéré. Nous ne croyions pas
qu'on puisse ainsi disposer d'une dépouille humaine et nous nous demandons comment les autorités administratives
ont pu tolérer un pareil transfert, même de la Faculté de Médecine, Nous voulons croire qu'une information
judiciaire sera ouverte pour connaître les responsables d'un tel abus.
Ceci dit, continuons à pénétrer dans le secret de la Loge. L'initié a été admis et dès lors est autorisé à accéder au
Temple. Il doit alors emprunter un escalier tortueux aux murs duquel des maximes retiennent son attention. L'une
dit : « Si la curiosité t'a conduit ici, va-t'en », une autre : « Si tu persévères, tu seras purifié par les éléments, tu
sortiras de l'abîme des ténèbres, tu verras la lumière ».
L'initié arrive enfin au Temple, situé au 2e étage et dont les tribunes sont à la hauteur du 3e étage. Cette salle,
assez grande, à tout l'aspect d'une chapelle avec un autel surmonté d'un calice et ornée de tous les attributs
maçonniques. On y remarque un buste de la vraie Marianne en marbre, d'Injalbert. avec la mention Rep∴
Mac∴
Il est à remarquer que toutes tes fenêtres donnant sur l'extérieur sont bouchées et que la lumière du jour ne peut
pénétrer à l'intérieur. Une femme ailée entourée d'anges et dominant l'autel porte une torche enflammée qui doit
suffire à éclairer les adeptes, ainsi qu'un triangle lumineux portant au centre la lettre G. Des tableaux avec des
maximes maçonniques complètent l'ornementation de cette salle où se trouvent encore les fauteuils des deux
Vénérables M∴et G∴
Nous nous en voudrions d'oublier qu'en dehors des lieux d'initiation, une grande salle de café permettait
d'accueillir les profanes susceptibles de devenir des adeptes.
L'inventaire qui a été fait en présence du procureur de la République et du receveur d'enregistrement, a permis de
saisir des documents intéressants qui ont été transférés à Paris pour accroître l'intérêt de l'Exposition de la francmaçonnerie organisée dans la capitale.
Indiquons aussi qu'on a pu relever des noms de personnages connus dans notre ville et qui surprendraient beaucoup
s’ils étaient divulgués. On y a trouvé en particulier un manuscrit de l'ancien maire, Suchon et les statuts de la
coopérative de boulangerie.
D'ailleurs, nous croyons savoir que certaines indications recueillies nécessiteront une perquisition dans une villa du
quartier des Arènes où auraient été cachés des documents importants. Espérons que l'épuration ainsi commencée ne
tardera pas à s'achever. »
Le journal ne cache pas ses préjugés hostiles à la Franc-maçonnerie, les locaux sont présentés
négativement et le fiel est abondamment répandu dans ces pages se voulant « objectives ».
On appréciera le ton de « corbeau » qui caractérise si justement la noble presse
vichyssoise…Quant au reste, l’auteur est bien informé.
Quart du bas à droite de la page. Dimanche 8 décembre 1940 : la « Une » de « l’Eclair »
« L’inventaire des loges maçonniques de Béziers »
Les photos et la documentation parues sous ce titre dimanche proviennent de « L’Emancipation
Nationale »
Mercredi 11décembre 1940
« L’émancipation nationale » était l’hebdomadaire du Parti Populaire Français de Jacques Doriot…
De janvier à juin 1941, le journal est muet sur la Franc-maçonnerie. Le « Guetteur » accompagne
la mise en place des liturgies pétainistes. En février-mars, c’est le salut au drapeau dans les
établissements scolaires, puis les temps forts de la « Légion Française des Combattants » qui est
censée regrouper les membres des anciennes associations d’anciens combattants. Il s’inquiète
beaucoup de la tiédeur de certains fonctionnaires vis-à-vis de la « Révolution Nationale », de la
« démoralisation » de la jeunesse dont témoigne le rôle du tribunal et enfin du temps qu’il fait.
Les sujets se suivent devenant peu à peu plus dramatiques et dérisoires au fur et à mesure du
déroulement du conflit jusqu’à, et y compris l’invasion de la zone libre début novembre 1941.
Le journal donne l’impression de présenter une succession de sujets divers placés sous le feu de
l’actualité, la série d’articles antimaçonniques des premiers six mois du régime de Vichy
participant d’une rhétorique et d’un temps de revanche que l’on pourrait croire calmé à la fin de
juin 1941.
Pourtant à la mi-août 1941 le journal fait état, dans un article de sa première page, de la
publication, par les services du gouvernement de Vichy, de listes de noms de Francs-maçons et
des interdictions d’emploi dans la fonction publique qui touche les Maçons :
« L’EPURATION NATIONALE »
« Les fonctionnaires francs maçons n’exerceront plus de fonctions publiques
Leur action qui n’a été que trop néfaste à la France les mettant en mesure de déformer,
jusqu’à les rendre méconnaissables les décisions du Gouvernement »
« Vichy, 13 août »
« La loi du 13 août 1941 a prescrit la dissolution des sociétés secrètes. En application de cette loi
et par décrets des 19 août 1940 et 27 février 1941, le Grand Orient de France, la Grande Loge de
France, la Grande Loge nationale indépendante, l’Ordre mixte international du droit humain, la
Société théosophique ont été effectivement dissous, leurs biens ont été saisis et celles de leurs
archives qui ont pu, jusqu’à ce jour, être retrouvées ont été méthodiquement dépouillées. Le
dispositif matériel des loges est détruit, les secrets essentiels sont connus, mais les hommes
demeurent.
On peut considérer comme définitive en raison même des sanctions qui s’attacheront à toute
reprise d’activité, la renonciation de la plupart des membres de grade inférieur des sociétés
secrètes. Par contre ne étroite solidarité eut continué à subsister entre les dignitaires et hauts
grades de la franc-maçonnerie si certaines mesures n’avaient pas été prises. En effet aucune police
ne pourrait empêcher la reconstitution rapide et occulte d’un nouveau réseau d’agents. Si les
noms de quelques milliers de dignitaires officiers de loges et hauts gradés qui constituaient les
cadres de la franc-maçonnerie, n’étaient pas entièrement révélés au public, seule la publication de
ces noms au J. O. de l’Etat français rendra impossible de nouvelles collusions et la reconstitution
des sociétés dissoutes.
D’autre part, parmi les dirigeants des sociétés secrètes, plusieurs centaines exerçaient avant la
défaite et continuent d’exercer des fonctions publiques. Ces fonctionnaires ont bénéficié de
toutes les faveurs du régime antérieur. Quelques-uns n’ont dû leur situation qu’à leurs qualités
maçonnique. Tous ont joui d’une influence prépondérante et ils ont eu l’adresse de paraître se
rallier au nouvel état de chose.
Mais s’ils étaient maintenus dans leurs fonctions, ils resteraient en mesure de déformer dans leur
application jusqu’à les rendre méconnaissables, les décisions du Gouvernement et garderaient la
possibilité de poursuivre une action qui n’a été que trop néfaste à la France. C’est la raison pour
laquelle le Gouvernement a décidé de leur interdire l’exercice de fonctions publiques. »
« Une première liste de dignitaires maçons »
« Voici la liste des F∴M∴ayant appartenu au Conseil de l’Ordre, au Grand collège des rites, ou à
la Chambre de Cassation du Grand Orient de France :
Abadie (Mars-Guillaume) professeur honoraire de génie rural, 78, rue Legravarend, Rennes,
membre du Conseil de l’Ordre, grand capitaine des gardes du Grand Collège des Rites 1939, 33e »
Dans la foulée « L’Eclair » commence d’abord en 1941 puis en 1942 à publier les noms des
« Dignitaires de la Franc-maçonnerie », selon la terminologie consacrée par les pouvoirs publics
de l’époque.
Les premières listes sont composées de noms de FF∴ issus des LL∴ de tout la France, on y
trouve celui de notre V∴M∴ Louis Malbosc, la seconde batterie de liste est plus spécialement
composée de noms de FF∴ méridionaux, on y trouve celui de notre F∴ André Robert. Le 16
août 1941, la première listes de « Dignitaires et « officiers » est publiée, elle est suivie de
nombreuses autres liste alphabétiques.
On imagine quel devait être l’état d’esprit des FF∴ attendant de lire dans le canard local, leur
nom désigné à la vindicte publique au cours de trois périodes : Août et septembre 1941, février
1942 et septembre 1942…
Les 14, 16, 17, 20, 22, 23, 26, 28, 29 août 1941 ; 8, 9, 11, 12, 13, 15, 18, 24 septembre 1941 ; 1er
octobre 1941.
Le 28 février ; 1er mars 1942 reprise des publications de listes de « Dignitaires et officiers ».
Reprise des publications de listes de noms de « Dignitaires et officiers », 7, 11, 12, 14, 16, 17
septembre 1942.
Deux conférences, à la Maison du Peuple, marquent l’année 1942 : l’une a eu lieu le 4 mars,
l’orateur, Christian Michel est présenté comme un « professeur agrégé », il s’exprime « sous l’égide
« de la revue « Documents maçonniques » et c’est le « délégué cantonal à la propagande » Gautier qui
le présente.
Vendredi 6 mars 1942
« Qu’est-ce que la F ∴ M ∴
par M. Michel Christian »
« Mercredi soir à 21 heures, M. Michel Christian, professeur agrégé d’Histoire, a donné une conférence très
intéressante sur la Franc-Maçonnerie.
C’est M. Gautier, délégué cantonal à la Propagande, qui présente le conférencier. Il demande d’abord une minute
de recueillement pour honorer la mémoire des victimes du bombardement de Paris et, après avoir flétri l’odieuse
agression britannique contre la capitale, donne la parole à M. Christian.
Celui-ci tient à s’associer de suite à l’hommage rendu aux malheureux ouvriers tués par les bombes anglaises et à
dire toute la réprobation et l’indignation d’un si inqualifiable attentat. M. Christian aborde ensuite le sujet de sa
conférence et fait l’historique de la F∴M∴
Son origine peut remonter aux Templiers, mais c’est vers 1725 que le Grand Orient de France, importé
d’Angleterre, s’implanta en France avec sa constitution et ses rites. la franc-maçonnerie fit d’abord de lents progrès
et se heurta à l’attentive surveillance de la police du roi qui se méfiait de cette importation anglaise mais peu à peu
la secte s’infiltra dans le pays et la Révolution de 1789, qu’elle provoqua en partie, lui donna un grand relief.
Par la suite la franc-maçonnerie s’adapta –du moins apparemment- aux régimes successifs, mais elle ne tarda pas
à évoluer vers la forme républicaine dont les principes s’accordaient avec les siens. Peu à peu tous les rouages
démocratiques étaient envahis par la franc-maçonnerie et tant dans le domaine politique que sur le terrain scolaire
son influence ne faisait que s’accroître. Bientôt le haut-personnel de la République tombait entre les mains de la
Maçonnerie et les révélations en furent faites par les grands scandales du régime déchu : Panama, l’affaire des
fiches, et, plus prés de nous, l’affaire Stavisky.
M. Christian n’a pas de peine à montrer la nocivité de la franc-maçonnerie dans tous les grands corps constitués,
même l’armée, qui étaient gangrenés à un point tel que seule la débâcle de 1940 put nous en faire mesurer la
profondeur.
Avec véhémence, l’orateur s’élève contre cette tyrannie occulte qui pesait sur la France et montre que le Maréchal
Pétain a eu, seul, le courage de nous délivrer de ce joug intolérable dans un Etat conscient de son autorité et de sa
responsabilité devant l’Histoire.
Aussi M. Christian, dans une brillante péroraison, invite ses auditeurs à se ranger autour du Chef prestigieux que
la Providence nous a donné pour surmonter notre malheur et à être prêts à le suivre pour assurer le salut de la
Patrie.
La réunion se termine par la lecture d’une adresse de fidélité au Chef de l’Etat que l’assemblée adopte a
l’unanimité aux cris de Vive Pétain ! Vive la France ! »
La seconde conférence fin octobre est le fait de Robert Vallery-Radot, un des rédacteurs, avec
Bernard Faÿ et jean Marquès-Rivière des mêmes « Documents maçonniques » évoqués ci-dessus. C’est
un autre « délégué local à la propagande » le sieur Cabanes, qui présente le conférencier…
Jeudi 29 octobre 1942
« Conférence de M. Robert Vallery-Radot sur
la franc-maçonnerie »
«Un public nombreux et attentif était rassemblé mardi soir à la Maison du Peuple pour écouter le rédacteur en chef
des « Documents maçonniques ». M. Cabannes, délégué local à la Propagande présente l’éminent conférencier qui
pendant 2 heures va captiver son auditoire.
M. Vallery-Radot fait un historique très documenté de la franc-maçonnerie rappelant ses origines à Londres en
1717 d’où elle s’étendit immédiatement en France, tout en restant sous l’obédience du roi d’Angleterre et de deux
pasteurs anglicans qui édictaient les mots de passe.
L’orateur met en évidence la coopération d’idées et d’action de la City anglaise et de la franc-maçonnerie, l’influence
néfaste des écrivains français du XVIIIe siècle tels que Voltaire, Montesquieu, Diderot qui symbolisaient l’esprit
maçonnique, et on arrive aux déplorables résultats dont nous supportons les funestes conséquences.
M. Vallery-Radot montre que les adeptes de la secte sont de trois sortes : les naïfs, les fanatiques et les profiteurs.
Il espère que les premiers auront compris ; quant aux autres, il déclare qu’ils doivent cesser de nuire.
L’orateur insiste sur l’action criminelle conjuguée de l’Angleterre et de la franc-maçonnerie pour nuire à la France.
Il rappelle les événements de Fachoda, la scandaleuse attitude des francs-maçons qui, en juin 1917 tenaient un
congrès à Paris pour empêcher la paix avec l’Autriche qui aurait mis fin à la guerre un an plus tôt. Il dénonce le
rôle d’hommes d’Etat américains et anglais dont le but était d’asservir la France comme le montrent les plans
Young, Dawes, etc… et flétrit l’alliance de la finance internationale de la Cité et de Wall-Street cimentée par les
liens maçonniques.
Aussi M. Vallery-Radot n’hésite pas à affirmer que les responsables de la défaite sont les francs-maçons alliés aux
juifs et soutenus par le communisme destructeur.
La guerre actuelle, dit-il, est une guerre d’idées qui met d’un côté les barbares d’Asie alliés aux juifs et aux maçons
et de l’autre les défenseurs de la civilisation européenne. Il faut prendre position et l’orateur conclut en proclamant
que la France, fière de son passé et fidèle à ses traditions, ne peut pas hésiter te confiante dans son destin suivra les
directives du Maréchal qui a montré la voie de la renaissance et de la résurrection. »
« UNE ADRESSE AU MARECHAL PETAIN »
« A la suite de ce magistral exposé, l’assemblée adopte l’ordre du jour ci-après :
« 500 biterrois réunis à la Maison du Peuple pour entendre conférence de M. Vallery-Radot démontrant par
arguments irréfutables emprise étrangère par dictature maçonnique expriment au Maréchal leur dévouement sans
limites à la cause de la Révolution nationale. »
Robert Vallery-Radot était un des rédacteurs, avec Bernard Faÿ et Jean Marquès-Rivière des
« Documents maçonniques » parus sous le Régime de Vichy.
La seconde conférence se termine comme la première par une adresse incantatoire à Philippe
Pétain envoyée par « 500 Biterrois » disant soutenir indéfectiblement la « Révolution Nationale ».
La rhétorique, les références a un passé convoqué pour soutenir l’argumentaire des conférencier
ainsi que le parti pris agressivement négatif contre la Franc-Maçonnerie est semblable dans les
deux conférences, cependant , à la veille du débarquement des Alliés en Afrique du Nord et de
l’occupation de la « Zone Sud », le ton de la seconde conférence, et surtout de sa conclusion
révèle la radicalisation des responsables de la propagande vichyssoise collaborationniste : entre les
« barbares » et les « défenseurs de la civilisation européenne », il faut « prendre position », le choix
est clair !
Le journal a passé sous silence le pillage par les hommes du « baron de Plenval » : même aveuglé
par la passion voire la paranoïa anti-maçonnique, il est des choses dont on ne peut guère
s’enorgueillir…
Ainsi, après les premiers temps suivant l’installation du régime de Vichy, marqué par des actions
revanchardes plus ou moins spontanées et des articles, certes inspirés par une profonde animosité
contre la F∴M∴qui remonte jusqu’au début du siècle (on fait référence explicite à l’affaire des
fiches), mais aussi d’une certaine spontanéité, il semble que l’on assiste à une prise en main par la
propagande officielle et les spécialistes de sa rhétorique, de l’antimaçonnisme local.
De véritables campagnes de presse, où l’on utilise les publications des listes de « Dignitaires »
comme moyen d’attiser les haines et ressentiments, culminent dans les comptes rendus des
conférences antimaçonniques données par des « spécialistes » professionnels militants du sujet,
invités spécialement à cet effet.
Reste à évaluer l’effet de ces efforts, spontanés ou concertés, sur la population biterroise, ce qui
est, évidemment difficile en l’absence de documents.
La collection de l’édition biterroise de « L’Eclair » est interrompue au 31 décembre 1942, nous
privant de toute approche sur l’évolution de l’antimaçonnisme du journal pendant la plus grande
partie de l’occupation de la zone sud.
Pourtant en août 1943, la Franc-maçonnerie biterroise a eu les « honneurs » de la presse antimaçonnique nationale : l’article suivant, issu des « Documents Maçonniques »nous a été
aimablement communiqué par le F∴Pierre Dur∴de Montpellier :
« LA F∴M∴ET L’USAGE DE L’HORRIBLE
En prenant possession des locaux maçonniques de Béziers, on trouva le cadavre d'une fillette âgée d'environ sept
ans.
Commis par M. le procureur de l'État français, M. le docteur Roullaud, médecin-légiste, s'est rendu le 19
décembre 1941 à 16 heure, à la Loge, et il a dressé le rapport suivant :
J'ai été conduit par le séquestre de la Loge dans un réduit obscur et humide du rez-de-chaussée où j'ai été
mis en présence d'un cadavre squelettique décharné.
J'ai fait transporter ce cadavre en un lieu où l'examen pouvait être fait minutieusement avec toutes les garanties
désirables, car, au moment de l'examen, on procédait au déménagement et à la vente des meubles de la Loge.
J'ai donc fait transporter ce cadavre dans mon cabinet d'examen.
Le cadavre examiné est celui d'une fillette mesurant cent trois centimètres et, apparemment âgée d'environ sept ans.
Son poids est de deux kilos. Ceci n'a rien d'étonnant, car nous nous trouvons en présence d'un cadavre momifié,
dont les parties molles sont absolument desséchées, fibreuses et légères. De plus, tous les viscères ont été enlevés. Il
ne reste que le squelette, les muscles des membres, avec des morceaux de peau et les nerfs…
Ce travail anatomique du fait de son abandon dans un réduit humide, est à présent en fort mauvais état et des
moisissures ont commencé à l'altérer
CONCLUSIONS
Le cadavre examiné est une momie très méticuleusement préparée par un professionnel. Étant donné
l'embaumement qu'il a subi, il est impossible de fixer la date de décès et d'en établir les conditions.
Béziers, le 19 décembre 1941.
Le Médecin-Légiste,
Signé: BOULLAUD »
« Nous donnons, ci-dessus, des reproductions photographiques de cette pièce anatomique minutieusement
préparée et conservée par les Frères de Béziers pour l'instruction des nouveaux adeptes
Les crânes, les tibias, les tentures de deuil, les cercueils, les toiles peintes, les transparents lumineux faisant
apparaître un corps d'homme, les silhouettes en matières luminescentes, les squelettes en fer forgé peint, etc.,
sont fort employés dans les cérémonies ritueliques de la Franc-maçonnerie. Ils ornent généralement les cabinets de
réflexion et servent aux initiations, notamment à celles au grade de maître.
Voici ce que le Frère Oswald Wirth, dans son livre « Le Livre de l'Apprenti », écrit sur le cabinet de
réflexion dans lequel le candidat est enfermé pour y- méditer :
Pour apprendre à penser, il faut s'exercer à s'isoler et à s'abstraire… Au sein de ces ténèbres absolues, la lampe
de la Raison éclaire seule les fragments du squelette qui semblent évoquer des spectres ; ces débris d'ossements
figurent la réalité, telle qu'elle apparaît, dépouillée de son décor sensible.
Et dans son « Livre du Maître », le même Frère note :
« La chambre aux volets clos, où s'effectuait la préparation du postulant, devient par la suite un caveau funéraire,
tombeau du futur Initié, condamné à mourir au monde profane, afin de renaître à une vie supérieure... »
Et décrivant la cérémonie au cours de laquelle le compagnon deviendra maître, le Frère précise
:
« S'il se sent le cœur pur, le futur Maître doit enjamber sans frémir le cadavre étendu à ses pieds… Le voici digne
— après le voyage qu'il est tenu d'effectuer au-dessus du cadavre —d'être élevé à la maîtrise, car le cadavre est
derrière lui...
La découverte faite à Béziers est un exemple éclatant de la façon dont la Maçonnerie entend le-respect de la «
personne humaine ». Sans aucune nécessité scientifique, sans aucun droit, contrairement aux lois, la
Maçonnerie s'est approprié le malheureux cadavre d'une petite fille pour le faire figurer dans ses cérémonies
macabres afin d'impressionner les Frères.
Il nous a paru utile de bien mettre en relief le cynisme d'une organisation qui n'hésite pas à violer le code et à
utiliser les restes mortels d'un être humain pour placer ses' adeptes dans cet état spécial d'hypnose intellectuelle
et d'énervement physique qui est, malgré tout ce que l'on veut dire, l'une des conditions nécessaires de la vie
maçonnique.
Derrière ces procédés macabres se dissimulent bien des machinations obscures ».
LA DIRECTION
Les « Documents maçonniques » furent une revue qui se voulait de qualité, publiée pendant l’occupation
afin de faire découvrir au public les dessous et turpitudes de la Maçonnerie. C’est dans ce vaste programme
de propagande que cet article vient prendre place.
La « momie », sujet de ce texte, fut présentée à grand renfort de publicité pendant une exposition
antimaçonnique dans le foyer du théâtre Municipal. Il fallait extirper de cette ville et de cette population
infectée de Maçonnerie le virus dénoncé par le régime de Vichy. Cela fut fait, et plusieurs biterrois s’en
souviennent encore.
Pourtant, la lecture du rapport du médecin légiste, même s’il se laisse aller à quelques suppositions
tendancieuses et marginales, ne paraît pas corroborer les interprétations malveillantes voire carrément
hostiles de l’article.
Le légiste a pratiqué l’examen d’un corps préparé pour l’étude universitaire comme il a dû en étudier dans
sa propre carrière.
Ce squelette est évoqué par l’inventaire de levée des scellés du 18 octobre 1940 : « dans une petite pièce située
derrière le logement du concierge » (…) « dans un petit placard, appelé chambre de méditation…un squelette de taille plutôt
petite… »
Quel est l’ancien étudiant en médecine qui a cru bon de doter le cabinet de réflexion d’un tel élément ? Nul
ne le sait plus aujourd’hui. Cependant, plusieurs de nos Frères furent médecins.
Le cadavre momifié de la petite fille sans nom a retrouvé et gardé longtemps sa place, après la guerre, dans
le Cabinet de Réflexion du rez-de-chaussée de la Loge.
Il est remplacé aujourd’hui dans ce cabinet par des objets « synthétiques » permettant de méditer sur la
mort en respectant les « restes mortels » comme ose écrire l’auteur de cet article ; lui-même complice et
valet d’un régime faisant bien peu de cas des vivants.
Le rapport des hommes aux « restes mortels » a changé. Les « Oscars » pendus dans les amphithéâtres de
nos collèges, lycées et, bien sûr, facultés de médecine, il y a quelques dizaines d’années seulement, sont
remplacés par des mannequins en résine de synthèse.
Ne jugeons pas. Cela serait trop facile et d’ailleurs, dérisoire.
Finalement, ce qui compte c’est que l’aspirant maçon doit toujours méditer sur la mort au Cabinet de
Réflexion ; pas pour se mettre en quelque transe hypnotique, mais pour se confronter à une réalité
d’humaine condition, avec le souvenir du mot de M. de Montaigne :
« Que philosopher apprendre à mourir »

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