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N° 4 Deuxième trimestre 2012 Z’infos Marines L’actualité environnementale de la Réunion côté marin Edito Ce trimestre dans Z’infos Marines Biolave : l’heure du bilan Arvam et Vie Océane - p° 2 Les poissons profonds de l’Océan Indien, un monde à découvrir Aquarium - p° 4 Mission cachalot à l’île Maurice, avril/mai 2012 Globice - p° 6 La réserve naturelle marine de la Réunion : 5 ans déjà ! Réserve Marine de la Réunion - p° 8 Une observation rare : regroupement de vivaneaux sur les récifs coralliens de La Réunion IRD - p°10 Les projets de la délégation Ifremer océan Indien dans le domaine de la biodiversité, de l’aide à la gestion d’espaces ou d’espèces emblématiques Ifremer - p° 12 L’invité du trimestre Ce trimestre, Z’infos Marines vous invite à toucher le fond. Tiens ? Le journal se laisserait-il submerger par un certain pessimisme ambiant porté par les flots d’une actualité il est vrai peu légère ? Rien de tout cela, au contraire ! Car une fois atteints, les fonds peuvent réserver bien des surprises, et des abysses peuvent surgir curiosités et découvertes. C’est que viennent nous montrer l’Arvam et Vie Océane, en poursuivant le récit de leur exploration des profondes pentes du volcan. L’Aquarium a également touché le fond, ou plutôt les fonds. Il nous explique quelles étranges espèces les peuplent. "Au fond du trou", "les bas-fonds"… Ce terme de "fond" est décidément bien péjorativement connoté. A n’en pas douter, s’il pouvait parler, le cachalot tiendrait à l’égard des profondeurs un tout autre langage. Globice s’attarde sur ce roi de la plongée. Ceci étant, l’actualité de ce trimestre ne prend pas pour unique cadre la zone mésopélagique. A l’heure d’une nouvelle stratégie nationale sur les aires marines protégées, quelles nouvelles du côté de la Réserve Naturelle Marine de la Réunion ? Le GIP nous raconte les évolutions depuis sa création, il y a 5 ans déjà. A l’image des profondeurs, les lagons de l’Ouest "réservent" eux aussi des surprises. En témoigne la surprenante découverte effectuée par l’IRD au niveau de l’Ermitage. Connectivité, efficacité des AMP, à l’Ifremer de conclure sur le sujet. Un peu de poésie pour finir. Gilbert Pounia, l’emblématique leader du groupe Ziskakan, nous livrera le fond de sa pensée sur son île, sa culture, ses rapports à la mer et à son environnement. Quelle plus belle musique de fond pour ce numéro ? Interview de Gilbert Pounia - p° 14 La rédaction 1 BIOLAVE : l’heure du bilan… La phase 3 du projet BIOLAVE s’est déroulée entre le 15 février et le 21 mars 2012. Elle se termine et complète judicieusement les deux phases amont (cf. Z’infos Marines n ° 3). Divisée en plusieurs ateliers, elle s’est intéressée à l’inventaire de la biodiversité des zones où la lumière se fait plus réduite, donc à partir de 60 m de profondeur, zone accessible uniquement par des techniques spécifiques et lourdes de mise en œuvre. Les deux ateliers principaux de la phase 3 (DeepBiolave et DeepFishing) viennent compléter BIOLAVE mais pas seulement. Les scientifiques souhaitaient également partir à la rencontre des nouvelles espèces de l’éruption de 2007 où compléter ces découvertes … L’atelier DeepBiolave s’est déroulé sur 5 jours du 20 au 25 février dernier. Deux plongeurs certifiés, dont un photographe sous-marin professionnel, sont venus explorer les coulées 2004 et 2007 jusque 80 m de profondeur. Equipés d’un matériel rarement utilisé pour les études scientifiques, leurs missions étaient (i) de prendre des clichés des paysages sous-marins présents à ces profondeurs et (ii) de collecter les organismes vivants qu’ils rencontraient. Collecte d’échantillons par 80 mètres de fond. Après 15 minutes d’images et de prélèvements, c’est 1h30 qui est nécessaire en moyenne pour chaque plongée afin de réaliser les paliers de décompression relatifs à ce type d’immersion. Challenge exceptionnel relevé par l’ARVAM et les professionnels de la plongée l’accompagnant dans cette tâche (Mi Air Mi Eau,TSMOI et Sport&Océan), cette nouvelle expédition a permis de collecter une centaine d’échantillons et de bancariser 1.000 photographies supplémentaires. Il semblerait que 60 espèces aient été collectées au total, dont 25% d’algues, 24% d’invertébrés benthiques fixés de type bryozoaires, coraux mous et vers, 15% d’hydraires et 12% d’éponges. Ces premiers résultats sont en cours de vérification. Etonnant paysage volcanique sous-marin. L’atelier DeepFishing s’est déroulé sur 4 jours, nuit et jour, au large des coulées 2004 et 2007, à plusieurs profondeurs. A bord du Let’s go, crevettier professionnel, ce sont 14 palangres verticales, 15 filières de casiers et de nasses qui ont été immergées entre 200 et 1.000 m de profondeur. Environ 50 kg de crevettes ont été récoltés, une espèce de ‘‘zourite’’ pêchée à 400 m de profondeur et plusieurs crabes, 2 Z’infos Marines n° 4 pagures et poissons de grande profondeur. L’identification de ces pêches a fait l’objet d’une étude approfondie par des spécialistes taxonomiques venus de la Société des Sciences Naturelles de La Rochelle. Les identifications sont toujours en cours à ce jour, mais plusieurs espèces semblent venir s’ajouter aux listes d’espèces mondiales des poissons profonds. La contribution des lycéens de 1ère scientifique du lycée Stella Matutina a permis d’ajouter aux descriptions taxonomiques des mesures et des observations complémentaires sur les individus, notamment les requins zépines (taille, sexe, régime alimentaire, etc.). Collecte d’échantillons à différentes profondeurs afin d’en savoir plus sur la composition sédimentaire des coulées de laves. Le volcan nous offre un laboratoire naturel d’exception pour l’étude de la colonisation des substrats sous-marins vierges. Beaucoup d’études sont aujourd’hui menées sur nos récifs coralliens, à raison, mais la zone Est de l’île de la Réunion semble avoir encore bien des richesses à nous offrir. Après un an et demi d’investigations, il est temps aujourd’hui de dresser le bilan de cette aventure scientifique hors du commun. Participation des élèves de 1ère scientifique du lycée Stella Matutina aux mesures et observations. Une étude de la macrofaune endogée est venue compléter cette troisième phase. La quarantaine d’échantillons collectés sur les coulées 2004 et 2007 à différentes profondeurs à bord de l’Explorer (Aquarium de La Réunion) sont en cours de tri et en attente d’identification. Ils permettront d’en savoir plus sur la composition sédimentaire des coulées de laves. BIOLAVE, c’est environ 50 partenaires mobilisés (scientifiques, logistiques, financeurs, etc.), 2.500 heures de terrain pour 1.000 heures de laboratoire, 10.500 photos bancarisées et à trier, 1.500 échantillons et une base de données à 5.000 entrées à gérer. Le bilan se fait donc attendre, mais de nouveaux programmes de recherches/actions sont d’ores et déjà initiés et à envisager pour continuer à améliorer nos connaissances et à valoriser notre patrimoine naturel marin réunionnais. Cette troisième phase a signé la fin des explorations terrain de BIOLAVE, mais ne fait que confirmer à quel point les profondeurs de notre océan restent mal connues à la Réunion. Auteurs : Stéphanie Bollard, Jean-Pascal Quod (Arvam) et Florence Trentin (Vie Océane) Crédits photos : Bassemayousse,Barrère, Arvam,Biolave Pour en savoir plus : www. arvam.com/biolave 3 Les poissons profonds de l’Océan Indien, un monde à découvrir Depuis quelques années, un phénomène nouveau est apparu à La Réunion. Certains pêcheurs, désertant les récifs coralliens épuisés et les DCP du large trop fréquentés, se sont spécialisés dans la pêche profonde (au-delà de 100 m et jusqu’à 600700 m), capturant ainsi des poissons jusqu’alors inconnus sur l’île. Ce sont de nouvelles techniques comme les moulinets électriques et les vire-lignes qui ont permis l’exploitation de cette nouvelle ressource. comme le sanglier tacheté (Xenolepidichthys delgleishi) ont été déterminées à partir des contenus stomacaux des grands prédateurs. La coulée volcanique de la Fournaise en 2007 a également permis de collecter bon nombre d’espèces profondes dont certaines étaient inconnues pour la science, comme le poisson d’argent (Argyripnus hulleyi) ou le colas rouge (Symphysanodon pitondelafournaisei) (Durville et al. 2009a). L’expédition Abyssea réalisée en 2008 avec un robot sous marin a aussi permis d’identifier de petites espèces comme le barbier à plume (Plectranthias inermis) et de découvrir, pour la première fois, les différents habitats de ces poissons jusqu’à 400 m de profondeur (Durville et al. 2009b). La réglementation en vigueur à La Réunion pour ce type de ressources ne concerne pour l’instant que les plaisanciers, qui n’ont pas le droit de posséder des appareils électriques. Ils utilisent alors des engins manuels tout aussi efficaces mais plus longs à mettre en œuvre. Il faut savoir que ces poissons ont un métabolisme beaucoup plus lent que ceux Ce loup noir (Lamprogrammus brunswigi) d’une vingtaine de kilos est le seul individu répertorié à La Réunion. Il a été pêché à plus de 700 m de profondeur. Forte de cette constatation et compte tenu des nombreuses sollicitations de la part des pêcheurs, des plaisanciers, des restaurateurs et des services sanitaires, l’équipe de l’Aquarium a, petit à petit, grâce à la contribution de nombreuses personnes et organismes, collecté et répertorié toutes ces espèces afin de les identifier et d’en dresser un inventaire. Ce travail a permis de compléter largement la liste des poissons marins de la Réunion publiée en 2009 (Fricke et al., 2009). Certaines espèces sont des spécimens uniques collectés dans les eaux réunionnaises, comme l’anguille à nez court (Simenchelys parasitica) pouvant vivre jusqu’à 3.000 m de fond, d‘autres comme le caduchon (Gonorynchus gonorynchus) ont été capturées uniquement à l’état de larves, d’autres encore Certains spécimens profonds comme ce petit beauclair à bandes blanches (Pristigenys niphonia) ont pu être présentés au public dans les bassins de l’Aquarium. 4 Z’infos Marines n° 4 des récifs avec des durées de vie incroyablement longues et des maturations tardives, comme l’hoplosthète (Hoplosthetus atlanticus) qui peut vivre jusqu’à 150 ans mais ne devient mature sexuellement qu’à partir de 60 ans. Ils sont donc très vulnérables et leur population peut décliner très rapidement, comme on a pu le constater sur des espèces comme la castagnole noire ou zambasse (Eumigistus illustris). L’ensemble de ces espèces de poissons a été répertorié dans un guide simple et didactique destiné au grand public. Alain Diringer, dessinateur et photographe, a réalisé l’ensemble des planches de dessins avec une précision remarquable, de façon à représenter au mieux ces animaux et de mettre l’accent sur leurs différentes particularités. Ce livre, qui est le premier volume de 2 ouvrages (les poissons profonds de l’océan Indien et les poissons pélagiques de l’océan Indien), est un bilan initial de ces espèces profondes capturées autour de La Réunion et dans l’océan Indien en général. 160 espèces pour 86 familles y sont représentées et peuvent facilement être identifiées grâce à une description de l’animal, ses caractéristiques, ses mœurs et son utilisation ou sa dangerosité éventuelle. La castagnole noire ou zambasse (Eumigistus illustris) a fait l’objet d’une pêche intensive avec l’apparition des moulinets électriques. En quelques années, les stocks se sont effondrés et c’est maintenant un poisson rare. Il est clair que dans ce domaine, de nombreuses découvertes restent encore à faire et de nouvelles espèces sont régulièrement décrites et inventoriées. N’oublions pas que La Réunion est un volcan posé sur 4.000 m de profondeur et que ses pentes sont autant d’espaces à explorer. Références : Fricke R.., Mulochau T., Durville P., Chabanet P., Tessier E. & Y. Letourneur, 2009. Annotated checklist of the fish species (Pisces) of La Réunion, including a Red List of threatened and declining species. Stuttgarter Beiträge zur Naturkunde, N.S. 2 : 1-168. Durville, P., Mulochau, T., Barrère, A., Quod, J. P., Spitz, J., Quero, J. C. & S. Ribes 2009a. Inventaire des poissons récoltés lors de l’éruption volcanique d’avril 2007 du Piton de la Fournaise (Ile de La Réunion). Annales de la société de sciences naturelles de la Charente-Maritime, 9 (9) : 948-956. Durville, P., Mulochau, T., Alayse J. P., Barrère, A., Bigot L. & R. Troadec, 2009b. Exploration sous-marine à l’aide d’un engin de type ROV sur les reliefs profonds de l’île de La Réunion – Expédition ABYSSEA. Rev. Ecol. (Terre Vie), 64 : 293-304. Le vivaneau la flamme (Etelis coruscans) pouvant dépasser le mètre est très recherché par les pêcheurs. Beaucoup d’espèces de mérous sont capturées en profondeur, comme ce mérou zébré (Epinephelus radiatus). Elles sont parfois difficiles à différencier. Auteurs : Patrick Durville Crédits photos : Aquarium de la Réunion Pour en savoir plus : www.aquariumdelareunion.com 5 Mission cachalot à l’île Maurice, avril/mai 2012 L’association Globice a réalisé du mercredi 25 avril au mercredi 02 mai 2012 la quatrième mission de son projet ‘‘Etude du cachalot dans la zone Réunion-Maurice’’. Cette mission, réalisée en partenariat avec la MMCS (Marine Mauritius Conservation Society), entre dans le cadre d’une étude scientifique de la population de cachalots des Mascareignes, financée par la Fondation Nature & Découvertes et initiée en 2008. L’objectif général de cette étude scientifique vise à améliorer les connaissances sur le cachalot (Physeter macrocephalus) dans le Sanctuaire Baleinier de l’océan Indien et plus particulièrement dans la zone Réunion-Maurice. Le cachalot est une espèce cosmopolite que l’on observe dans tous les océans. Cela dit, son étude n’en est pas moins difficile, du fait de son mode de vie. En effet, le cachalot passe la plupart de son temps en plongée. Il détient d’ailleurs les records de profondeur et de temps de plongée avec 3.000 m de fond et 1h30 d’apnée. de l’espèce). Dès la détection, nous utilisons le logiciel Rainbow click ©, spécialement conçu par IFAW (International Fund for Animal Welfare) pour le suivi acoustique des individus. Ce logiciel détecte automatiquement les clics de cachalots reçus par l’hydrophone stéréo et calcule sa direction par rapport au bateau, en se basant sur le délai de réception du signal entre les deux micros de l’hydrophone. Un échantillonnage acoustique et une veille visuelle sont maintenus jusqu’à ce que l’animal soit détecté en surface. L’écoute des vocalises émises nous permet de savoir si l’animal est en surface ou en plongée et d’estimer le nombre minimum d’animaux présents (1, 2 ou >3). Dans la mesure du possible, un enregistrement en continu des vocalises est réalisé (enregistrement coupé lors des manœuvres au moteur). Les connaissances sur cette espèce au sein de l’océan Indien sont très limitées. Quelques études et observations révèlent sa présence aussi bien en zone océanique qu’en zone côtière. Devant le manque de connaissances sur cette espèce, Globice s’est lancée dans un projet d’étude basé sur la combinaison d’une prospection visuelle et d’un échantillonnage acoustique. L’étude acoustique consiste à faire une écoute le long d’un transect, grâce à un hydrophone tracté à l’arrière du bateau, pour détecter la présence de cachalots (clics caractéristiques 6 Z’infos Marines n° 4 Toutes les données visuelles et acoustiques, ainsi que l’effort de prospection, sont saisis in-situ, dans une base de données Access, via une interface Logger©, conçue par IFAW, à laquelle nous avons ajouté des onglets pour la saisie des données d’observation et d’effort de prospection. Cette interface permet de géo-référencer toutes les données, grâce à une antenne GPS branchée sur l’ordinateur embarqué. Ainsi, chaque enregistrement de la base de données est lié à une position GPS. L’hydrophone est également directement relié à l’ordinateur, via une carte son externe. Les sons sont donc enregistrés en format numérique, directement sur le disque dur de l’ordinateur. Une sauvegarde des données est effectuée chaque jour sur disque dur externe. Ces premières missions ont révélé : - une abondance relativement importante de cachalots à proximité des côtes de l’île Maurice ; - une préférence des groupes pour les eaux de plus de 1.500 m de fond, sur la pente externe du talus de l’île Maurice ; - une résidence de groupes de femelles accompagnées de leurs petits; - deux grands types d’activité : nourrissage et socialisation (les vocalises qui leur sont associées ont été enregistrées) ; - des mouvements d’individus le long de la côte de l’île Maurice et entre différents groupes. L’ensemble des photos a été comparé au catalogue tenu par le Centre d’Etudes Biologique de Chizé (CEBC – CNRS), concernant les TAAF (îles Kerguelen et Crozet). A ce jour, aucune recapture n’a pu être effectuée. Malgré une météo difficile, cette quatrième mission a permis l’identification d’une vingtaine de cachalots dont 7 recaptures et une quinzaine de nouveaux individus. Certains des cachalots recapturés ont été identifiés pour la première fois en 2008. Grâce aux quatre missions réalisées à ce jour, le catalogue de photo-identification des cachalots compte 82 individus différents. Un grand merci à François, le skipper du voilier, pour sa patience et sa disponibilité ; à l’équipage (Vanessa, Zoë, Peggy, JeanMarc et Bernard) pour sa motivation, son efficacité et sa bonne humeur ; à la Fondation Nature & Découvertes pour son soutien et sa confiance ; à la MMCS pour son aide dans l’obtention des autorisations gouvernementales et pour sa participation à la mission. Auteurs :Violaine Dulau, Laurent Mouysset Crédits photos : Globice Illustrations : Kevin Boisvilliers et Sébastien Thomas 1ère Bac pro communication graphique, lycée professionnel de Saint-Pierre Pour en savoir plus : www.globice.org 7 La réserve naturelle marine de la Réunion : 5 ans déjà ! Créée par le décret interministériel n° 2007-236 du 21 février 2007, la réserve naturelle nationale marine de la Réunion couvre environ 40 kilomètres de linéaire côtier et 35 kms carrés d’aire marine protégée. Elle s’étend sur les communes de Saint-Paul, Trois Bassins, Saint-Leu, les Avirons et l’EtangSalé. privilégiés de la réserve naturelle marine de la Réunion, le conseil scientifique qui réunit les principaux experts dont les champs de compétence impactent la gestion de l’espace naturel et le comité consultatif, instance de concertation qui réunit à la fois les services de l’Etat, les collectivités locales, les représentants des usagers et associations, les personnalités scientifiques qualifiées. Créée suite à la prise de conscience de la nécessité de protéger un patrimoine marin exceptionnel et fragile, la réserve naturelle marine de la Réunion a vu 2 organismes prendre en charge sa gestion. En effet, le G.I.P. – RNMR a pris la suite des actions déjà menées depuis 1997 par l’association Parc marin de la Réunion. Si la mise en place de la réserve s’est faite avec beaucoup de tensions dans sa phase initiale, aujourd’hui, force est de constater que les mentalités des usagers de cet espace ont changé et évolué afin de s’approprier cet espaces naturel tout en prenant compte à la fois le patrimoine naturel existant et leurs pratiques. Des irréductibles ou des nouveaux usagers ne connaissant pas toujours la règlementation sont encore pris en flagrant délit d’infraction par les gardes. Le travail Le gestionnaire de cet espace naturel est le G.I.P. – RNMR (Groupement d’Intérêt Public – Réserve Nationale Marine de la Réunion). Son équipe est composée de 15 personnes réparties sur 5 cellules: - Direction (3 personnes), - Cellule Administrative et Financière (2 personnes), - Cellule Surveillance et Police (8 gardes commissionnés et assermentés, 1 garde), - Cellule Animation et Sensibilisation (4 personnes) - Cellule Connaissance, Gestion, Protection Patrimoine Naturel (1 personne et des transversalités d’action avec l’ensemble du personnel). Trois organes de gouvernance se rattachent au gestionnaire : le conseil d’administration qui réunit les financeurs et partenaires 8 Z’infos Marines n° 4 de sensibilisation et d’éducation à l’environnement par les animateurs depuis quelques années a fait son chemin dans les têtes des touristes et locaux qui fréquentent le périmètre de la réserve. Bon anniversaire à la Réserve Nationale Naturelle Marine de la Réunion ! A l’heure actuelle, les actions menées par le G.I.P. - RNMR prennent de plus en plus d’ampleur dans le paysage environnemental réunionnais. Le plan de gestion qui sera validé avant la fin de l’année 2012 donnera au gestionnaire sa feuille de route de 2012 à 2016. Par ailleurs, au-delà du périmètre propre de la réserve naturelle nationale marine de la Réunion, le gestionnaire s’attachera à travailler en gestion intégrée avec l’ensemble des acteurs concernés, y compris ceux du bassin versant, afin que tous prennent conscience de l’impact de leurs actes sur le milieu naturel. L’objectif principal est de travailler et d’avancer en concertation avec l’ensemble des acteurs concernés afin que l’on ne dise plus demain qu’une grande partie des récifs coralliens de la Réunion a été mise sous cloche par la réserve marine ! Auteurs : Soraya Issop Mamode, directrice du GIP RNMR Crédits photos : GIP RNMR Pour en savoir plus : www.reservemarinereunion.fr 9 Une observation rare : regroupement de vivaneaux sur les récifs coralliens de La Réunion Le vivaneau maori (Lutjanus rivulatus, Cuvier, 1828) est un poisson marin de l’Indopacifique pouvant atteindre 80 cm pour un poids de 11 kg. Les jeunes individus affectionnent les platiers récifaux peu profonds recouverts d’algues (Kuiter RH et al., 2001). Les adultes peuvent descendre sur la pente externe jusqu’à 100 m de profondeur où ils se nourriront de petits poissons, céphalopodes et crustacés benthiques (Sommer et al., 1996). Vivaneau maori (Lutjanus rivulatus). Source: fishing-khaolak.com Peu de choses sont connues sur la reproduction de cette espèce. Chez les Lutjanidés, les femelles pondent des millions d’œufs dans la mer où ils sont fécondés par les mâles. Cette méthode de reproduction implique aux mâles et femelles, plutôt d’instinct solitaire, de se regrouper pour maximiser les chances de fécondation. Cela est-il vérifié pour Lutjanus rivulatus ? Existe-t-il des lieux favorables à de tels regroupements ? Un premier élément de réponse peut-être donné à La Réunion où un rassemblement d’une douzaine de Lutjanus rivulatus a été observé en janvier 2012, par moins de 20 m de fond au site de la Passe de l’Ermitage située entre le récif de SaintGilles et celui de la Saline sur la côte ouest de La Réunion. Ce regroupement pourrait être relié à la reproduction de l’espèce. Le même phénomène a été observé aux îles Salomon dans le Pacifique, où les pêcheurs traditionnels ont remarqué au niveau des passes des regroupements réguliers d’individus matures avec des œufs prêts à être expulsés, après les pleines lunes de février à mai (Hviding, 1996). Présent sur les récifs coralliens, il est soumis à une forte pression de pêche commerciale et récréative. Sa taille adulte élevée en fait aussi un bon candidat pour l’aquaculture. L’exploitation mondiale de la pêche des vivaneaux côtiers a été multipliée par 15 en 60 ans passant de 17.305 tonnes en 1950 à 255.320 tonnes en 2010 (Food and Agriculture Organization). Le vivaneau maori est occasionnellement pêché autour de l’île de la Réunion. C’est une espèce peu commune à la Réunion et considérée comme vulnérable (Fricke et al., 2009). La reproduction d’une telle espèce est donc un enjeu important pour la durabilité de cette ressource exploitée. 10 Z’infos Marines n° 4 Ce phénomène décrit pour la première fois à La Réunion montre l’importance écologique de la passe de l’Ermitage, zone d’échange entre le platier récifal et la pente externe, avec une architecture des fonds relativement complexe favorable à l’installation de nombreuses espèces récifales. Cette zone, incluse dans le périmètre de la Réserve Naturelle Marine de La Réunion, ne fait cependant pas partie des zones les mieux protégées contre les prélèvements, car est seulement assujettie à une interdiction à la pêche sous-marine. De ce fait, et à la vue de son importance écologique, elle nécessiterait une vigilance de protection particulière qui pourrait passer par un renforcement de la réglementation en vigueur. Références : Fricke, R., Mulochau, T., Durville, P., Chabanet, P., Tessier, E. & Letourneur, Y. 2009. Annotated checklist of the fish species (Pisces) of La Réunion, including a Red List of threatened and declining species. Stuttgarter Beiträge zur Naturkunde (A) Neue Serie 2: 1–168, figs. 1-4, tabs. 1-7. Hviding, E. 1996. Guardians of Marovo Lagoon: practice, place, and politics in maritime Melanesia. Pacific Island Monograph Series 14. Honolulu: University of Hawai’i Press. Kuiter, R.H. and T. Tonozuka 2001 Pictorial guide to Indonesian reef fishes. Part 1. Eels- Snappers, Muraenidae - Lutjanidae. Zoonetics, Australia. 302 p. Sommer, C.,W. Schneider and J.-M. Poutiers 1996 FAO species identification field guide for fishery purposes.The living marine resources of Somalia. FAO, Rome. 376 p. www.fao.org Auteurs : Antoine Riou & Pascale Chabanet (IRD), Christophe Cadet (RNMR) Crédits photos : IRD et fishing-khaolak.com 11 Les projets de la délégation Ifremer océan Indien dans le domaine de la biodiversité, de l’aide à la gestion d’espaces ou d’espèces emblématiques La délégation Ifremer océan Indien conduit ou participe actuellement à 7 projets de recherche dans le domaine de la biodiversité ou de l’aide à la gestion/conservation d’espaces et d’espèces emblématiques en océan Indien. Le projet Pampa : s’appuyant sur 7 Aires Marines Protégées, dont celle de La Réunion (RNMR), Pampa vise à définir des indicateurs de suivi des ressources naturelles, des usages et de gouvernance afin de créer un tableau de bord permettant l’évaluation et le suivi de la performance des AMP («réussite de la mise en réserve»). L’objectif est de protéger les habitats et les ressources naturelles en contribuant à la gestion des différents usages. L’Ifremer est chargé de l’analyse de la pêche traditionnelle, de la chasse sous marine et de la pêche côtière embarquée. Le tableau de bord pourra être utilisé par la RNMR afin de suivre l’efficacité de son plan de gestion (financement IFRECOR, Ifremer, Aamp, GIP RNMR). Le projet CAMP (Connectivité des Aires Marines Protégées) repose sur l’utilisation de l’outil de génétique des populations : nombre d’aires marines protégées (AMP) sont actuellement en cours de création dans le Sud Ouest de l’Océan Indien (SOOI), notamment sous l’égide de la Commission de l’Océan Indien (COI ). Le but de CAMP est d’estimer la connectivité effective entre les différentes zones côtières du SOOI afin de contribuer au dessin de ce réseau d’AMP : les populations vivant au sein de chaque AMP fonctionnent-elles démographiquement de façon indépendante ? Quelles sont les zones connectées et celles qui sont isolées? Les réserves envisagées s’alimenteront-elles les unes les autres? Lutjanus kasmira CAMP repose sur l’échantillonnage de 14 sites du SOOI (Seychelles, Rodrigues, îles Eparses, etc.) de 3 espèces de petits poissons récifaux (Epinephelus merra, Lutjanus kasmira et Myripristis berndti) sur lesquels sont pratiquées des analyses génétiques (50 individus de chaque espèce sur chaque site) afin de préciser l’historique de colonisation des îles et de cerner les voies d’échange actuelles entre populations. Selon les niveaux d’échange, des recommandations sur la disposition en réseau plus ou moins dense des AMP pourront être formulées à la COI fin 2012 (projet financé par l’UE, le CR, la Deal Réunion, l’Ifremer et la WIOMSA ). Le projet ''tortues marines'' : Les tortues marines sont des espèces aujourd’hui en danger, inscrites à l’Annexe I de la convention de Washington (CITES) ainsi que sur la liste rouge de l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature). Cinq des 7 espèces de tortues se rencontrent dans le SOOI : la tortue verte, l’imbriquée, l’olivâtre, la caouanne et la luth. L’Ifremer travaille sur ces espèces depuis plus de 30 ans en collaboration étroite avec Kélonia , et dispose aujourd’hui des données et connaissances permettant d’élaborer un ensemble de recommandations/propositions qui seront utilisées en 2012/2013 par les Deal de La Réunion et de Mayotte, ainsi que par les Taaf pour rédiger le Plan de Conservation des Tortues Marines dans les îles et eaux françaises de l’océan Indien (OI). Le dernier manque important dans la connaissance porte sur les voies préférentielles de migration empruntées par les tortues entre leurs zones de ponte et leurs aires d’alimentation, parfois éloignées de plusieurs milliers de km. Epinephelus merra Myripristis berndti 12 Z’infos Marines n° 4 Pour ce faire, 140 balises Argos sont en cours de déploiement (action Ifremer et Kélonia en partenariat avec les pays membres de la COI et de la côte Est africaine, ainsi que les gendarmes en poste sur les îles Eparses ; financements multiples ANR, Deal, Conseil Régional, Kélonia, Total, Crédit Agricole, Ifremer). se sont associés pour demander l’emport, en plus du LIDAR prévu, d’un capteur hyperspectral afin de mener un projet de R&D visant à développer puis vérifier l’efficacité d’une nouvelle méthode de cartographie par télédétection des habitats littoraux. La Réunion a été retenue comme site pilote pour ce projet. Les cartographies des secteurs coralliens doivent y être achevées mi 2012. Si les résultats obtenus par le groupe de projet Ifremer/Arvam-Pareto/Actimar sont jugés concluants (précision des cartographies, rapport qualité/coût), le traitement des images acquises sur les autres îles françaises de l’OI sera réalisé en 2013 et 2014. Nous disposerons alors d’une cartographie exhaustive des habitats coralliens, point de départ de suivis long terme de l’évolution de ces écosystèmes à très haute valeur patrimoniale, sous l’effet des pressions anthropiques (La Réunion et Mayotte), ou dans le cadre du changement climatique global (les îles Eparses quasi inhabitées). Le projet Spectrhabent : L’Etat, par l’intermédiaire des Services de la Deal de La Réunion, a lancé début 2009 le projet Litto3D® sur toutes les îles françaises de l’OI. Ce projet consiste à cartographier l’altimétrie et la bathymétrie des îles et de leur littoral. Les données sont acquises au moyen d’un capteur laser aéroporté (‘‘LIDAR bathymétrique’’). Afin de profiter des vols Litto3D, l’État, les Taaf, l’Aamp et l’Ifremer A noter pour finir que la Délégation Ifremer océan Indien contribue également à d’autres projets dans les domaines de l’environnement ou de la biodiversité, menés par ses partenaires locaux, parmi lesquels on peut citer le projet Polarun coordonné par l’ARDA, Gestion durable des cétacés à La Réunion porté par l’association Globice, ou plus récemment le projet Charc coordonné par l’IRD. Auteurs : Ronan Le Goff, Jérôme Bourjea, Pierre Gildas Fleury, Michel Ropert, Hugues Evano, Loïc Le Rû et Laurence Maurel Crédits photos : Pour en savoir plus : www.ifremer.fr/lareunion 13 L’invité du trimestre Z’infos Marines L’actualité environnementale de la Réunion côté marin Gilbert Pounia source: S. Cazanove et T. Caro Ce trimestre, peut-être pour se conformer à la mode du moment, nous avions envie de changement. S’écarter quelque peu du monde de la mer et de l’environnement, pour mieux se recentrer sur la Réunion. Or, qui pourrait mieux nous parler de l’île que celui qui la chante depuis plus de 30 ans ? C’est dans le restaurant familial de Grands-Bois, en bord de mer, que nous reçoit Gilbert Pounia, leader du groupe Ziskakan. Ne perdons pas davantage de temps à le présenter ici, il s’en chargera bien mieux que nous. Ecartons-nous donc un peu de l’environnement pour parler culture et histoire. Mais, vous le verrez, quel que soit le chemin par lequel s’engage la conversation, il nous ramène toujours à la mer. Propos recueillis par Guillaume Cottarel et Zoë Glénard Z’infos Marines : Ziskakan a fêté ses 30 ans en 2009. Afin de mieux vous présenter à ceux qui ne vous connaîtraient pas, comment cette aventure a-t-elle commencé ? 30 ans après, la situation a changé. Le maloya est notamment classé au patrimoine mondial de l’Unesco. Que reste-t-il des combats du début ? Gilbert Pounia : Au milieu du XXème siècle,la langue créole, la culture créole étaient largement méprisées, déconsidérées par les pouvoirs publics, voire même à l’école. Les kabars, le maloya étaient interdits. Dans ce contexte ''d’étouffement'' de notre culture, de notre histoire, des individus, des poètes, ont commencé à prendre la parole, à écrire, à valoriser tout ceci. Axel Gauvin, Alain Armand, Patrice Treuthardt par exemple, vont impulser un mouvement poétique et littéraire créole, en créole. Ça dérange politiquement. Ziskakan n’existe pas encore, mais va naître de ce mouvement, de cette rencontre entre la poésie, l’écriture et la musique. A l’époque, vers la fin des années 70, je reviens de métropole où j’étais parti étudier. Je vois que quelque chose se passe, on attire l’attention sur la culture et sur la langue créole. Je suis séduit par ce mouvement et je décide d’y participer. C’est une période de mouvements identitaires, on note des mouvements similaires à Maurice, voire en métropole dans certaines régions. Ziskakan vient de là. Ce n’est pas qu’un groupe de musique au début, plus un «mouvement». Au début, nous jouions plus ou moins clandestinement. Chez la famille de Daniel Waro, à Trois Mares. Ce sont des souvenirs incroyables ! Toute la réunion se déplaçait. Les scènes officielles ne nous étaient pas ouvertes, nous jouions dans les champs de cannes, dans les cours. Ces kabars marrons, bien qu’illégaux, étaient impossibles à empêcher. Puis les scènes se sont ouvertes petit à petit. A Saint-Denis, au Port, où nous jouions à l’Oasis. Ca n’a cependant pas été facile, en témoigne notre expulsion du théâtre du Tampon en septembre 1979. Nos paroles ne plaisaient pas à tout le monde. Il y a beaucoup à faire encore aujourd’hui, pour diffuser l’histoire de la Réunion, en parler, pour ouvrir sa culture et sa langue largement. Aujourd’hui encore, il n’y a pas de réelle prise en compte de notre histoire, de l’histoire de l’esclavage par exemple, au sein de l’histoire de France. Le classement du maloya est certes une bonne chose, mais ça n’apporte rien de profond. Nous souhaitons continuer à diffuser le plus loin possible la culture créole et son histoire. Notre prochain album abordera ces thèmes : la séparation, la destruction de la personnalité subie par les esclaves arrachés de chez eux, parlera de la langue créole. On note bien que les thèmes de Ziskakan se situent davantage sur le plan social. Quelle place l’environnement occupe-t-il parmi vos sources d’inspiration ? C’est quelque chose d’important ! C’est le sujet de certaines de nos chansons. On voit bien que quelque chose se passe actuellement. On nous parle de réchauffement, de déforestation. Madagascar par exemple, où nous sommes allés tourner un clip de notre dernier album, est grandement victime de cette déforestation. Il faut cependant se poser la question de pourquoi en arrive-t-on là ? A Madagascar, beaucoup de monde n’a pas de moyens et puiser dans les dernières ressources naturelles de l’île, dans sa forêt, est pour certains le seul moyen de subsister. Nous voulons montrer ce que nous avons, et ce que nous risquons de perdre à ce niveau si nous ne faisons pas attention. Un morceau du prochain album parle de notre environnement. Nous 14 projetons de diffuser pendant ce morceau, sur scène, des images de dauphins, de baleines. Nous ouvrons d’ailleurs certains de nos concerts par des chants de baleines ! Pourquoi les cétacés ? J’ai grandi ici (à Grands Bois, ndlr), en bord de mer. On voit souvent les baleines ici en hiver. Elles venaient et viennent toujours danser devant chez moi. On a l’impression que quelque chose se passe pour elles dans ces moments-là, devant nos yeux. J’ai eu envie de faire partager un peu ça. Puisque nous avons rejoint la mer, restons-y ! Quelle vision la mer vous inspire-t-elle ? J’ai grandi au bord de la mer, mais j’en ai bien longtemps eu peur ! A la Réunion, beaucoup de gens voient la mer comme dangereuse. Dès qu’il y a un problème en mer, qu’elle se montre quelque peu dangereuse, ça prend des proportions incroyables. On s’emballe très vite, comme s’il s’agissait d’un élément effrayant. Moi aussi, elle m’effrayait plus jeune. J’ai appris par la suite à l’aimer. Nous avons chanté un «romans bleu», sur des paroles d’Axel Gauvin, montrant que la mer est belle. Vous connaissez bien l’Inde, vous en revenez d’ailleurs. Quel rapport à la mer les gens ont-ils là-bas ? La mer est davantage vue comme nourricière qu’à la Réunion. Cependant, elle ne nourrit plus comme avant, loin de là. Les gens prennent des risques inconsidérés, sur des embarcations de fortune, pour ramener quelques maigres poissons. La pollution marine est par endroits très impressionnante, ce qui a des conséquences énormes pour les gens que la mer est censée nourrir. Constater ceci m’a fait prendre conscience qu’ici, il faut se montrer très vigilants. Il est primordial de sensibiliser les jeunes sur ce sujet, pour éviter de voir ici un jour ce que j’ai vu en Inde. cher, je souhaite que mes enfants puissent voir, à Grands Bois comme ailleurs, ce que j’ai vu petit. Parler de tout ça aux plus jeunes est à mes yeux essentiel. Nous y travaillons avec Ziskakan. On lit trop de choses négatives, dans les journaux par exemple, concernant l’environnement. A chaque fois qu’on le mentionne, c’est sur un ton catastrophique. J’aimerais voir du positif à ce niveau. Pour ça, il faut passer par la sensibilisation des plus jeunes. Les artistes ont un rôle social, nous pouvons trouver les mots qui touchent et les diffuser. Plus largement, quel regard portez-vous sur l’environnement de la Réunion ? Je trouve la Réunion magnifique. Je vis entre la Plaine des Palmistes et Grands Bois, des endroits magnifiques. La nature qui nous entoure est unique, j’en prends conscience à chaque fois que je rentre de tournée à l’étranger. La nuit, notamment, est magnifique dans les hauts. L’hiver, quand je traverse les plaines, il se dégage une ambiance féérique de la vision de toutes les montagnes éclairées faiblement par la lune et les étoiles. Je suis conscient que nous vivons dans un cadre magnifique à la Réunion, que c’est une chance et qu’il faut tout faire pour préserver cela. Je suis optimiste, je crois en l’être humain, nous ne sommes pas fous ! Les jeunes sont plus sensibilisés que leurs parents en ce qui concerne l’environnement, je crois en eux. Vous qui avez grandi au bord de la mer, avez-vous un souvenir d’enfance marquant à nous raconter la concernant ? Ce serait sûrement ces souvenirs de pêche à la gaulette. Toute une troupe de Grands-Bois parcourait le petit lagon et ramenait des filets entiers, vendus le soir à la boutik. Ils ramenaient poissons, langoustes, etc. Il y avait une ambiance chaleureuse et conviviale, qui n’existe plus vraiment. Le folklore qui existait autour de ces moments a grandement disparu, un peu comme les poissons qu’on ramassait alors. Pour conclure, quels sont vos projets ? Souhaitez-vous jouer un rôle au niveau de l’effort de sensibilisation à mener ? Oui, nous avons participé à une campagne visant à sensibiliser sur la préservation de notre lagon. C’est un thème qui m’est Nous partons en Inde enregistrer notre prochain album, qui n’a d’ailleurs pas encore vraiment de nom. Ce sera un album varié, dont les textes nous ont été transmis par différents auteurs. Z’infos Marines L’actualité environnementale de la Réunion côté marin Globice remercie les différents partenaires de ce numéro : l'Aquarium de la Réunion, l'Arvam, l'Ifremer, l'IRD, laRéserve naturelle Marine de la Réunion et Vie Océane Coordination, mise en page et conception graphique : Guillaume Cottarel, Zoë Glénard Contact : [email protected] 15