Avril - Mai 2013 - Le Pré
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LA LETTRE D’ACTUALITÉ DU PRÉ-BARREAU Avril - Mai 2013 Editorial : la connaissance de l'actualité juridique et la maîtrise de la méthodologie sont des clés essentielles de la réussite aux épreuves du CRFPA. Pour vous aider à mieux les appréhender, le Pré-Barreau vous propose, dans sa lettre mensuelle, une sélection commentée de quelques arrêts et textes adoptés ainsi que de brefs conseils méthodologiques. Bonne lecture et n'hésitez pas à nous retourner le formulaire situé en quatrième page si vous souhaitez recevoir gratuitement les prochains numéros de la lettre d'actualité du Pré-Barreau. SOMMAIRE FLASH SUR … Cass. civ. 1ère, 20 mars 2013 (pourvoi n° 12-19.835) FLASH SUR… Cass. civ. 1ère, 20 mars 2013 Matière : procédure civile JURISPRUDENCE Matière : droit international privé Arrêt : CJUE, 7 février 2013 Matière : droit administratif Arrêt : CE, 23 janvier 2013 Matière : procédure administrative contentieuse Arrêt : CE, 26 novembre 2012 LÉGISLATION ET RÈGLEMENTATION Matière : procédure pénale Texte : projet de loi relatif aux attributions du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public CONSEIL MÉTHODOLOGIQUE Objet : introduction à la note de synthèse Matière : procédure civile En d’autres termes, et sous réserve des Mots-clés : pourvoi en cassation – recevabilité dispositions de l’article 607 du Code, qui - décision statuant sur les mesures provisoires. n’avait pas vocation à s’appliquer ici, sauf Commentaire : au double visa des articles 606 dispositions légales contraires, seuls les et 608 du Code de procédure civile, la jugements définitifs au sens de l’article 480 du première chambre civile de la Cour de Code de procédure civile, c’est-à-dire ceux qui cassation est, le 20 mars 2013, venue tranchent tout ou partie du principal, et ceux réaffirmer que la décision en dernier ressort qualifiés de mixtes (ceux qui tranchent une statuant sur des mesures provisoires ne partie du principal et ordonnent une mesure pouvait faire l’objet d’un pourvoi en cassation d’instruction ou une mesure provisoire) immédiat et ne pouvait être attaquée peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation immédiat. indépendamment de la décision au fond. La solution est parfaitement rigoureuse. En effet, si l’article 606 du Code de procédure civile admet la recevabilité du pourvoi en cassation immédiat contre les jugements qui, dans leur dispositif, ordonnent une mesure provisoire (comme c’était le cas en l’espèce), c’est à la condition qu’ils y tranchent aussi une partie du principal. En application de cet article, si les jugements qui ordonnent une mesure provisoire peuvent faire l’objet d’un pourvoi immédiat c’est donc à la condition qu’ils puissent être qualifiés de mixtes. Par ailleurs, si l’article 608 du même code prévoit que les jugements avant dire droit peuvent faire l’objet d’un pourvoi immédiat c’est à la condition que cette l’hypothèse ait été expressément prévue par un texte ou, selon la jurisprudence, en cas d’excès de pouvoir (V. sur ce point Cass. civ. 1ère, 15 avril 1986 : pourvoi n° 84-13.422 ; Cass. civ. 2ème, 17 juin 1987 : pourvoi n° 86-14.716). Or, la décision rendue sur appel d’une ordonnance de non-conciliation dans le cadre d’une procédure de divorce et qui se borne à prescrire des mesures provisoires pour la durée de l’instance et qui, pour statuer sur la demande de l’épouse tendant à l’octroi d’une provision à valoir sur ses droits dans la liquidation du régime matrimonial, décide que les époux sont soumis au régime légal français de la communauté, ne répond à aucun des critères sus évoqués. En effet, il ne tranche pas dans son dispositif tout ou partie du principal, ne met pas fin à l’instance et n’entre dans aucun des cas spécifiés par la loi. Précédents jurisprudentiels : Cass. civ. 1ère, 2 mars 2004 (pourvoi n° 02-14.901) ; Cass. civ. 1ère, 18 déc. 2003 (pourvoi n° 02-10.837) ; Cass. civ. 2ème, 6 juin 2002 (pourvoi n° 00-18.787). JURISPRUDENCE JURISPRUDENCE Matière : droit international privé Arrêt : CJUE, 7 février 2013, C-543/10 Refcomp Spa. Mots-clés : coopération judiciaire en matière civile compétence judiciaire en matière civile et commerciale - règlement (CE) nº 44/2001 interprétation de l’article 23 - clause attributive de juridiction figurant dans un contrat conclu entre le fabricant et l’acquéreur initial d’un bien - contrat s’inscrivant dans une chaîne de contrats translatifs de propriété - opposabilité de cette clause à l’égard du sous-acquéreur du bien. Commentaire : à la livraison de climatiseurs, la société française qui les avait commandés a constaté des désordres imputables à un défaut de fabrication des compresseurs réalisés par une société à la demande de l’assembleur final des marchandises. L’assureur de l’acheteur des groupes de climatisation l’a indemnisé et, subrogé dans ses droits, a assigné le fabricant, l’assembleur, et le vendeur du système de climatisation. Une clause attributive de juridiction (ci-après CAJ) figurant dans le contrat signé entre le fabricant et l’assembleur, le premier a contesté la compétence du juge français saisi par l’assureur. Interrogée par la Cour de cassation, afin de savoir si une CAJ convenue dans une chaîne communautaire de contrats entre deux contractants peut produire ses effets à l’égard du sous-acquéreur de la chose, la CJUE rend un arrêt important. D’abord, elle semble confirmer la nécessité, pour la mise en œuvre de l’article 23 du RBI, que la situation soit internationale : « (…) il est constant que le rapport juridique en cause (…) présente un caractère international » ajoute-t-elle en fin de rappel des conditions d’applicabilité de l’article 23. Ensuite, la CJUE considère que le sous-acquéreur et le fabricant ne doivent pas être considérés comme étant unis par un lien contractuel, ce dont il résulte qu’ils n’ont pu convenir du tribunal compétent désigné dans le contrat initial conclu entre le fabricant et le premier acquéreur. Expliquant pourquoi elle retient une telle solution, alors que pour le connaissement elle admet l’opposabilité de la clause attributive de juridiction y figurant à un tiers à ce contrat, la CJUE estime que s’il n’est pas nécessaire de vérifier que le tiers a donné son consentement, c’est que le connaissement est un instrument du commerce international destiné à régir une relation impliquant au moins trois personnes, postulant un rapport de substitution entre le porteur du connaissement et le chargeur. «Or, dans une chaîne de contrats translatifs de propriété, le rapport de succession entre l’acquéreur initial et le sous-acquéreur ne s’analyse pas dans la transmission d’un contrat unique, ainsi que de l’intégralité des droits et obligations qu’il prévoit ». Il est donc possible que les obligations contractuelles des parties varient d’un contrat à l’autre, le sous-acquéreur pouvant faire valoir à l’encontre de son vendeur immédiat des droits qui ne sont pas nécessairement les mêmes que ceux dont le fabricant dispose à l’égard du premier acheteur. Matière : droit administratif Arrêt : CE, 23 janvier 2013, Ord. Commune de Chirongui, n° 365262. Mots-clés : voie de fait – compétence juridictionnelle – concurrence nouvelle du juge judiciaire et du juge du référé-liberté pour faire cesser une voie de fait. Commentaire : une ordonnance du juge des référés du Conseil d’État vient d’admettre la possibilité du juge du référé-liberté « d'enjoindre à l'administration de faire cesser une atteinte grave et manifestement illégale au droit de propriété, lequel a le caractère d'une liberté fondamentale, quand bien même cette atteinte aurait le caractère d'une voie de fait ». Cette décision majeure conduit à s’interroger sur ce qui demeure « judiciaire » au sein de la voie de fait ainsi que sur les raisons du maintien d’un chef de compétence dont la portée mérite d’être réévaluée. Il existe désormais une nouvelle concurrence entre les deux ordres de juridiction pour connaître d’une voie de fait, puisque le juge du référé-liberté ainsi que le juge judiciaire peuvent y mettre un terme. L’institution du référé-liberté, en 2000, avait conduit le Tribunal des conflits à distinguer clairement le champ de cette procédure de celui de la voie de fait, rappelant qu’en matière de voie de fait, l’Administration était « sortie » de ses pouvoirs (TC. 23 octobre 2000, M. Boussadar c/ Ministre des Affaires Etrangères, req. n° 3227). Certains membres de la juridiction administrative appelaient cependant de leurs vœux la mise en œuvre du référé-liberté en présence d’une voie de fait. Alors que le Conseil d’État rejetait classiquement cette possibilité (CE, juge des référés, 16 avril 2003. req. n° 256002), l’ordonnance ci-dessus vient d’opérer, à ce sujet, un revirement jurisprudentiel d’autant plus étonnant qu’il est contraire à l’énoncé de l’article L. 521-2 du CJA relatif au référé-liberté. Il résulte en effet des termes de cet article que le référé-liberté concerne l’hypothèse où une atteinte à une liberté fondamentale a été portée par l’administration – notamment – dans le cadre de l’exercice de l’un de ses pouvoirs, ce qui, à rebours, exclut la voie de fait. Cette ordonnance, en établissant une nouvelle grille de compétences juridictionnelles en matière de voie de fait et de référé-liberté, contribue à la perte de sens de la voie de fait. Précédent jurisprudentiel : CE, juge des référés, 16 avril 2003, req. n° 256002. JURISPRUDENCE Matière : procédure administrative contentieuse Arrêt : CE, 26 novembre 2012, Mme Brigitte B., n° 354108. Mots-clés : charge de la preuve – recours pour excès de pouvoir. Commentaire : contrairement à la procédure civile, les parties, en matière d’excès de pouvoir, sont libres de leurs moyens de preuve. L’administration peut le cas échéant être contrainte par le juge administratif d’expliciter les motifs d’une décision ou, lorsqu’elle seule détient des documents (CE, ass. 28 mai 1954 Barel), de les lui fournir, à sa demande, afin que la vérité judiciaire puisse être établie. En dehors de cette dernière hypothèse, le Conseil d’État a déjà précisé l’étendue des pouvoirs d’instruction que doit mettre en œuvre le juge administratif lorsqu’il apparait que le demandeur en excès de pouvoir éprouve des difficultés à faire état d’une preuve, bien que l’administration ne soit pas, dans ce cas, seule détentrice d’un document qu’elle refuserait de communiquer. Le Conseil d’État a décidé, à propos de la réintégration d’un fonctionnaire en disponibilité, qu’il appartenait au premier juge « de rechercher s’il n’existait pas […] de poste vacant correspondant au grade de la requérante [avant une certaine date] » (CE 19 mars 2007, Mme Audebert, req. n° 276990), jugeant ainsi que ce dernier ne pouvait se contenter d’une affirmation de l’administration sur ce point. Dans une affaire comparable à l’occasion de laquelle la requête du demandeur qui attaquait un refus de réintégration dans un poste - avait été rejetée parce que ce dernier n’avait pas apporté la preuve de l’existence d’un poste disponible dans lequel il pût être réintégré, le Conseil d’État clarifie le régime de la charge de la preuve en matière d’excès de pouvoir. Il décide qu’« il appartient au juge de l’excès de pouvoir de former sa conviction sur les points en litige au vu des éléments versés au dossier par les parties, que s’il peut écarter des allégations qu’il jugerait insuffisamment étayées, il ne saurait exiger de l’auteur du recours que ce dernier apporte la preuve des faits qu’il avance ; que, le cas échéant, il revient au juge, avant de se prononcer sur une requête assortie d’allégations sérieuses non démenties par les éléments produits par l’administration en défense, de mettre en œuvre ses pouvoirs généraux d’instruction des requêtes et de prendre toutes mesures propres à lui procurer, par les voies de droit, les éléments de nature à lui permettre de former sa conviction, en particulier en exigeant de l’administration compétente la production de tout document susceptible de permettre de vérifier les allégations du demandeur ». Cette décision, sans bouleverser la jurisprudence antérieure, présente le mérite de la clarifier. Elle se révèle certes favorable au requérant mais il y est précisé que la mise en œuvre, par le juge, de ses pouvoirs d’instruction, est toutefois conditionnée par l’existence d’« allégations sérieuses non démenties par les éléments produits par l’administration en défense ». La charge de la preuve est donc allégée pour le demandeur. Mais celui-ci n’en est pas dispensé pour autant. Précédent jurisprudentiel : CE, 19 mars 2007, Mme Audebert, req. n° 276990. LÉGISLATION ET RÈGLEMENTATION Matière : procédure pénale Texte : projet de loi (présenté en conseil des ministres le 27 mars 2013) relatif aux attributions du garde des sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et d’action publique. Commentaire : le ministre de la Justice « conduit la politique d’action publique déterminée par le Gouvernement » et « veille à la cohérence de son application sur le territoire de la République » (CPP, art. 30). A cette fin, il adresse aux magistrats du ministère public des instructions générales d’action publique. Il peut en outre dénoncer au procureur général les infractions à la loi pénale dont il a connaissance et lui enjoindre, par instructions écrites et versées au dossier de la procédure, d’engager ou de faire engager des poursuites ou de saisir la juridiction compétente de telles réquisitions écrites que le ministre juge opportunes. Conformément aux engagements pris par le Chef de l’État pendant la campagne de l’élection présidentielle, Christine Taubira a déposé un projet de loi visant à empêcher toute ingérence de l’exécutif dans le déroulement des procédures pénales. Il inscrit dans le Code de procédure pénale la prohibition – déjà officialisée par la circulaire générale de politique pénale adressée le 19 septembre 2012 à l’ensemble des juridictions – pour le ministre de la Justice d’adresser aux magistrats du parquet des instructions dans des affaires individuelles. Le projet de loi confie par ailleurs au garde des sceaux la responsabilité de conduire la politique pénale déterminée par le Gouvernement et d’en préciser, par instructions générales, les grandes orientations pour assurer sa cohérence et son efficacité. Les relations entre la Chancellerie, les procureurs généraux et les Procureurs de la République sont ainsi clairement définies : le garde des sceaux a la responsabilité d’animer la politique pénale tandis que les parquets ont le plein exercice de l’action publique, et ce dans le respect des dispositions de l’article 5 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, selon lesquelles les magistrats du parquet sont placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques et sous l’autorité du garde des sceaux. Corrélativement, le projet de loi modifie l’article 35 du CPP relatif aux attributions des procureurs généraux et insère un nouvel article 39-1 relatif à la mission des Procureurs de la République. Sont également rappelées l’obligation d’information du garde des sceaux par le procureur général, soit par le biais du rapport annuel de politique pénale, soit par le biais de rapports particuliers, ainsi que l’obligation d’information du procureur vis-à-vis du procureur général. MÉTHODOLOGIE CONSEIL METHODOLOGIQUE : Objet : introduction à la note de synthèse documents. On évitera ici le style interrogatif. En matière de note de synthèse, le correcteur se prononce L’introduction doit être concise et dynamique. Elle ne saurait se limiter à l’annonce du plan, ni, à l’inverse, trop anticiper sur les développements. Un paragraphe de trois ou quatre phrases fera donc l’affaire. Sa construction en trois temps obéit à des règles simples : 3) La phrase d’annonce 1) La phrase d’accroche La phrase d’ouverture vise à attraper l’attention du correcteur. Il s’agit d’incarner de manière empirique le sujet de la note : définition des termes du sujet, évocation d’une ‘affaire’ emblématique, indication de données chiffrées donnant la mesure du sujet, rappel historique... En tout état de cause, on évitera les propos généraux et lénifiants. L’étudiant en mal d’idée pourra toujours s’inspirer des introductions figurant dans les documents. 2) La phrase d’enjeu Souvent négligée, la phrase d’enjeu s’efforce de donner de l’ampleur à l’introduction : arrière-plan juridique du sujet, principes en contradiction ou à concilier, sens de l’évolution, singularité du régime par rapport à un système étranger… L’enjeu, on le voit, est modeste, il ne s’agit pas de dégager à tout prix une problématique élaborée, sauf si elle s’évince naturellement des L’annonce du plan clôt l’introduction. Elle est débarrassée de tout renvoi aux documents (de même que les annonces secondaires, ou ‘chapeaux’ – et pour cause, ce sont les trois seuls moments de la note où s’exerce l’apport créateur de l’étudiant). Sa formulation en une seule phrase n’est pas seulement une exigence d’économie, elle assure aussi une expression plus claire du lien logique entre les deux parties annoncées. La rédaction, faut-il le rappeler, doit être directe et impersonnelle : le traditionnel et irritant ‘nous verrons tout d’abord…puis il conviendra d’étudier’ doit être oublié. Voici pour finir un exemple d’introduction. Le sujet de la note porte sur la rémunération des dirigeant sociaux : « L’envolée de la rémunération des dirigeants sociaux français a suivi de près l’inflation observée depuis dix ans dans les entreprises américaines (doc.5). La perspective de rémunérations excessives risque toutefois d’entamer la confiance dans les sociétés privées et de porter atteinte à l’investissement (doc.10). Le droit positif a donc pris la mesure de ces dérapages : la sanction par le juge de l’excès des rémunérations (I) est aujourd’hui relayée par des mesures d’endiguement (II) ». SOMMAIRES DES MATIERES DU PROCHAIN NUMERO : procédure pénale, droit des obligations, droit pénal, droit des sûretés. 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