10 raisons de détester Paléo
Transcription
10 raisons de détester Paléo
LA CÔTE VENDREDI 22 JUILLET 2011 6 RÉGION MAUVAISE FOI JOURNALISTIQUE Comme d’habitude, le Festival fait l’unanimité. Alors nous, on a décidé de le critiquer. Dix raisons de détester Paléo prochain reproche de votre conjoint(e). «T’as pas quelque chose de plus sexy pour dormir?» «Ben quoi, il est très bien mon t-shirt.» LUCA DI STEFANO [email protected] Comment est-ce possible? Comment un festival qui réalise des millions de chiffre d’affaires, qui génère des montagnes de déchets, qui macule la région de litres d’urine, échappe-t-il au moindre reproche? Par simple esprit de contradiction, avec une belle dose de mauvaise foi, on a décidé de collecter dix bonnes raisons de maudire le festival. 10. LES TOILETTES DES FILLES 1. PARCE QUE LA TERRE ENTIÈRE ADORE PALÉO Et c’est déjà une bonne raison pour critiquer le festival. On a cherché: aucun scandale, jamais trouvé de salmonelle dans le poulet ou de bière sans alcool. Même les voisins ne se plaignent pas, ils jubilent lorsque leur champ est transformé en parking, ils s’amusent de trouver des festivaliers bourrés sur le pas de leur porte le matin au réveil. Si ce n’est pas de l’aliénation ça! Même le syndic n’a jamais rien Les spectateurs qui passent leur soirée à filmer les concerts alors qu’ils ont un groupe légendaire sous les yeux, ça, c’est énervant! AUDREY PIGUET trouvé à reprocher au festival. 2. C’ÉTAIT MIEUX AVANT Cette phrase est une vérité indiscutable, valable dans tous les domaines. Ne demandez pas pourquoi, c’est comme ça. La vie, comme Paléo, c’était mieux avant. On regrette donc l’esprit du festival des années ‘70 dans la salle communale ou à Colovray. Malicorne – qui s’est produit en 1976 – c’est mieux qu’Iggy Pop ou The Who. Objectivement. 3. LES BÉNÉVOLES Paléo est l’une des rares associations sans but lucratif de la planète à se permettre de refouler les bénévoles qui abondent. Pour donner son temps au festival, y a du monde. Pour animer l’atelier point de croix du dimanche matin à l’EMS, y en a moins. 4. LES BÉNÉVOLES, ENCORE Pourquoi les bénévoles de Paléo doivent-ils impérativement se balader en ville ou au centre commercial avec leur badge bien visible, par-dessus le tshirt? Est-ce pour narguer ceux qui ont reçu un mail leur signifiant que malheureusement ils ne correspondent pas «au profil requis». C’est quoi le profil requis? Je suis prêt à tout pour être bénévole moi! 5. LA BOUFFE AVANT LA MUSIQUE A y voir clair, Paléo s’apparente davantage à un pèlerinage de morfals qu’à un symposium de mélomanes. Et il existe une idéologie bien précise qui hiérarchise les mets dans le cerveau des festivaliers. Ainsi, rater le sandwich au magret de canard serait comme passer à Âgrâ sans jeter un coup d’œil au Taj Mahal. Il n’est pas nécessaire de faire la liste des stands à ne pas manquer, il suffit de repérer les files les plus longues et d’y prendre place. Dans la vie ordinaire, on appelle ça des moutons de Pa- nurge. Et puis il y a l’attente. Quand certains rataient le concert de James Brown pour une tartine au raifort, d’autres priaient le Seigneur afin qu’Alain Bashung soit en retard, il fallait encore touiller un peu afin que la fondue atteigne la bonne consistance. 6. CEUX QUI FILMENT LES CONCERTS La génération smartphone a sans doute produit l’une des plus grandes aberrations de l’histoire humaine. Et elle se vérifie à Paléo. En plein concert, entassés dans la foule, ils sont des centaines à sortir leur téléphone pour filmer le concert. Ils tiennent leur Iphone en l’air durant des heures, partagent la vidéo sur facebook, commentent la vidéo, lisent les réactions de leurs «friends». Cette vidéo, ils ne la regarderont jamais parce que le son est pourri, le chanteur n’arrête pas de sortir du champ et il apparaît environ 150 fois plus petit qu’en réalité. Pis le concert, eh bien ils ne l’ont pas suivi, ils étaient trop occupés à filmer. 7. «T’ES OÙ, J’ENTENDS RIEN» Cette phrase, chaque festivalier la hurle au moins une fois par soirée dans son téléphone. Et là, on a envie d’aller lui dire: «C’est normal que t’entendes rien, t’es à trois mètres d’une sono de concert en plein air et le guitariste d’Indochine se lance dans un solo guitare.» C’est alors que le festivalier s’en va chercher ses amis et se mêle au cortège permanent de paléorandonneurs qui vous causent toutes ces taches de bière ou de sangria – plus agréable en termes d’odeurs, un peu moins esthétiquement – sur votre tshirt. Après 3h21 de recherche, 11,2 kilomètres de marche, le festivalier retrouve ses amis et lui reste plus qu’à leur dire: «à demain». 8. «RELAX, OUEDIWIIII-DIIII-ZÉ» Notre bagage culturel est fortement empreint de musique anglophone. Malheureusement, tous n’ont pas suivi les cours du Wall Street Institute. Mais oui, vous savez, cette école qui, sur ses affiches, vous promet dents blanches et diplômes en rafale. Ainsi, il n’est pas rare de se trouver à côté d’une personne capable de gâcher votre concert pour cause de vocifération dans un anglais mal maîtrisé. On se réjouit alors d’entendre le public chanter: «Relax, ouediwiiii- diiii - zé» (Comprendre: Relax, take it ea - ea - sy»). 9. LE T-SHIRT PALÉO Tout habitant de la région en a un. Tout habitant de la région le met pour dormir. Mais attention, lors d’une rupture, ce maudit t-shirt délavé et déformé avec lequel on dort depuis l’inoubliable édition 1997 pourrait être le Il apparaît notable que la notion de festival «respectueux de chaque différence», comme l’affirme la charte des valeurs de Paléo, échoue lorsqu’il s’agit d’affranchir ces dames d’une profonde inégalité de genre: les toilettes. Pour une femme, aller soulager sa vessie durant le festival relève du martyre. La file est toujours (beaucoup) plus longue que celle de la roulotte réservée aux (rares) mâles qui privilégient les toilettes à l’espace public. Ceci principalement en raison de la dimension nécessairement collective du pipi féminin. Et puis il y a toujours la fille juste devant qui crie à ses 12 copines du club de gym: «hey venez, je vous ai réservé une place». Après tout ceci, vous réfléchirez avant d’acheter vos billets pour le prochain Paléo. Et la liste aurait encore pu être longue, mais voilà, il n’y a plus de place sur la page. Et puis il faut que j’y aille, je vais à Paléo ce soir. AURAIENT PU FIGURER DANS CETTE LISTE: - «Bamboulé», le brame des gueulards de Paléo. Particulièrement déplacé lorsqu’on écoute le Requiem de Fauré, dirigé par Michel Corboz. - Les campeurs qui utilisent la piscine pour faire leur toilette. Au fond du bassin s’amoncelle une quantité de sable équivalente à celle qui recouvre les 40 00 km2 du désert de Mojaves. - Paléo et son zapping. Qui est capable de citer trois concerts qu’il/elle a suivi du début à la fin l’année dernière? - Mika pour remplacer Amy Winehouse. C’est moins risqué pour les programmateurs, d’accord, mais pas très rock and roll comme attitude. - Porter son verre autour du cou, en bandoulière. On a sûrement dû faire quelque chose de très mal dans une autre vie pour mériter ça. PODOMÈTRE (2) Le patron de Paléo n’a jamais vu autant de boue. Il a donc réglé le maximum de problèmes par téléphone. Dans la gadoue, Daniel Rossellat a compté ses pas C’était au tour du patron de Paléo de porter, mercredi, le podomètre de «La Côte». Daniel Rossellat a effectué 18 422 pas entre 13h et 3h30. Pas plus?, se dira sans doute un lecteur attentif de notre journal qui aura lu, dans notre édition de jeudi, que notre bénévole maison avait à son actif, mardi soir, 21 220 pas représentant 13,66 km! «Compte tenu de la boue, j’ai limité mes déplacements», explique-t-il. Il faut dire qu’avec la gadoue, le pas est lourd, et suivant les endroits, très, très lourd. «Avant de traverser le site, j’ai d’abord examiné s’il n’était pas possible de résoudre les problèmes par téléphone», déclare, toujours aussi pragmatique, le patron de Paléo. S’il a assisté à pas mal de concerts, il ne s’est pas rendu au camping, ni au Détour, ni à la Ruche. Les caprices du ciel sont, depuis le début du festival, au cœur de ses préoccupations. «Je n’ai jamais vu une telle situation, autant de boue. Les parkings, c’est un désastre!» affirme-t-il. Les organisateurs ont dans leurs cartons 4 ou 5 scénarios possibles, mais ils sont confrontés à des prévisions météo peu fiables qui compliquent leur mise en place. Feu de détresse à enclencher Du coup, pour la troisième journée consécutive, le plan pluie «Diluvio» avait été reconduit jeudi. Il était recommandé aux festivaliers, compte tenu de la fermeture de certains parkings à proximité du site, de se diriger vers ceux du cen- tre-ville. Une petite astuce était proposée pour faciliter le tri des véhicules dans les rues de Nyon. Il était demandé aux automobilistes festivaliers d’allumer leurs warnings pour indiquer leur volonté de se parquer. Et jeudi encore, le service de bus gratuit avait été renforcé. «De toute façon, les personnes qui ont pris les transports en commun ont mis beaucoup moins de temps que celles qui ont voulu rejoindre les abords du festival en voiture», conclut Daniel Rossellat. Lundi, quand cette photo a été prise, l’herbe était encore verte! KEYSTONE