Etrange bienvenue

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Etrange bienvenue
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Etrange bienvenue
Lydia Magnoni
jeudi 17 octobre 2013, par Lydia Magnoni
Welcome est un petit mot tout simple pour accueillir ceux qui arrivent chez vous. Un mot que
l’on retrouve sur les paillassons, à l’entrée des maisons. Welcome, en anglais, cela veut dire «
Bienvenue ». Welcome, c’est aussi le titre d’un film que Philippe Lioret a réalisé en mars 2009.
Ce film parle de la façon dont l’Union européenne et particulièrement la France dit « Welcome,
bienvenue » aux réfugiés qui arrivent sur son territoire.
Welcome, c’est l’histoire d’une rencontre, d’une amitié
entre Simon, un Français, ancien champion en natation et Bilal, un jeune réfugié kurde en situation
irrégulière. Simon travaille comme maître nageur à la piscine municipale de Calais. Dans le passé, il a été
champion de natation. Il était aussi marié à Marion qui vient de le quitter. Et il vit très mal cette rupture.
Marion est bénévole dans une association qui donne à manger aux nombreux réfugiés en situation illégale
qui essaient de rejoindre l’Angleterre.
Au moment où l’histoire commence, Bilal vient juste d’arriver à Calais, en France. Il est parti de Mossoul,
une ville du Kurdistan, en Irak. Il a parcouru plus de 4000 kilomètres pour arriver en France. Il veut
rejoindre Mina, la jeune fille qu’il aime et qui a quitté le Kurdistan pour vivre en Angleterre avec sa
famille. Bilal est kurde. Il a 17 ans et des rêves plein la tête. Bilal veut retrouver Mina, vivre avec elle en
Angleterre et devenir footballer professionnel à Manchester United.
Et entre Calais en France et Douvres en Angleterre, il n’y a un bras de mer : le « Pas de Calais ».
Seulement 25 km. Quand il se promène sur les plages de calais, Bilal voit les falaises de Douvres. Pourtant,
ces quelques kilomètres qui le séparent de ses rêves ne seront pas si faciles à franchir.
Des risques insensés
Pour passer en Angleterre, il faut traverser la Manche en bateau ou par le tunnel. Et pour cela, Bilal, avec
d’autres réfugiés n’hésite pas à se cacher dans des camions qui embarquent. Il faut pour cela payer les
passeurs. Il faut aussi risquer de mourir étouffé, la tête dans un sac plastique pour échapper aux contrôles
CO2. Et mettre sa tête dans un sac plastique, Bilal ne peut plus le faire. Dans son voyage vers la France,
la police turque lui a mis un sac sur la tête pendant de longues heures. Au moment du passage, il y a un
contrôle, Bilal craque : il enlève la tête du sac. A cause de cela, lui et ceux qui essayaient de passer se font
arrêter par la police.
Mais Bilal ne renonce pas malgré cela. L’Angleterre est si proche. Pourquoi ne pas traverser le Pas de
Calais à la nage ? Bilal va prendre des cours de natation pour y arriver. C’est ainsi qu’il va rencontrer
Simon.
Simon va l’entraîner et en même temps, essayer de le faire abandonner son projet fou.
Car c’est une folie de vouloir traverser à la nage : l’eau du Pas de Calais est à 10 degrés. Il faut nager dix
heures au minimum pour le traverser. Et ce bras de mer est une des zones maritimes les plus dangereuses
du monde : les courants sont forts. Il y a des dunes sous marines en mouvement. De plus, beaucoup de
bateaux passent sur cette voie maritime : soit pour la traverser, soit pour aller au Nord de l’Europe. Mais
rien ne pourra empêcher Bilal de partir…
Des réfugiés dans le Nord
Le film « Welcome »a été tourné à Calais dans le nord de la France. Et on peut dire que ce film colle à la
réalité. Comme Bilal, beaucoup de réfugiés fuient leur pays d’origine pour rejoindre l’Angleterre.
L’Angleterre, c’est l’Union européenne en dehors de l’espace Schengen. C’est aussi un pays où l’on parle
anglais, et l’anglais est une langue que l’on parle dans beaucoup d’autres pays du monde. Pour rejoindre l
‘Angleterre, certains de ces réfugiés passent par la France et se retrouvent coincés à Calais.
En 1999, le gouvernement Jospin et les autorités avaient créé à Sangatte un centre d’hébergement et
d’accueil d’urgence organisé par la Croix-Rouge. Le centre de Sangatte était installé dans une ancienne
usine d’Eurotunnel. Il pouvait accueillir environ 200 personnes. Mais jusqu’à 1 600 personnes y ont été
hébergées surtout des Afghans, des Iraniens, des Irakiens, des Kurdes et des Kosovars. En novembre 2002,
Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur ministre de l'Intérieur responsable de la police, de la
sécurité des personnes et des biens. , a fait fermer le centre de Sangatte. Mais le problème n’a pas
disparu : de nouveaux immigrés illégaux ont continué d’arriver. Ils vivent maintenant dans des abris de
fortune tout au long de la côte.
Un film qui colle à la réalité
Pour réaliser son film, Philippe Lioret, a voulu tourner dans les « vrais endroits » : les rues de Calais, le
port trans-Manche, Blériot plage. Il a aussi a rencontré des bénévoles qui travaillent dans des associations
qui à Calais, aident ces réfugiés.
A leur arrivée à Calais, Lioret et Lindon, (l’acteur qui joue Simon) se sont rendus au "quai de la soupe".
C’est l’endroit où les bénévoles donnent de la nourriture aux réfugiés. Lindon raconte :« Le premier soir,
Lioret vient me chercher à la gare, on prend des migrants en stop dans un tournant. On est dans
l’illégalité. On est dans le film. Lioret me raccompagne à l’hôtel : on parle du personnage ? Pas la peine,
on s’est tout dit »
Et le film Welcome sonne juste. Il dépeint avec vérité la situation des réfugiés et aussi le risque que
prennent ceux qui les aident. On voit les bénévoles qui offrent les repas, inquiétés par la police. Des
policiers n’hésitent pas à fouiller chez Simon, que son voisin a dénoncé parce qu’il a hébergé des réfugiés
pour quelques nuits.
Car en France, on peut prendre cinq ans de prison ferme parce que l’on a aidé une personne en situation
irrégulière. C’est ce que les associations appellent : « délit délit action contraire à la loi. de solidarité ».
Alors que la France est le "pays des droits de l’homme". Une honte pour l’Union européenne. « J’espère,
disait Vincent Lindon à la sortie du film, qu’on va faire bouger les choses. Avec un film de fiction, on
retient. Car on est avec des gens. A hauteur d’homme. »
Quelques années plus tard, les choses malheureusement, ne semblent pas vraiment s’arranger…
P.-S.
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