Dynamique du front de ruissellement et du
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Dynamique du front de ruissellement et du
PROPOSITION SUJETS DE THESES CONTRATS DOCTORAUX 2015-2018 Directeur de thèse : Maminirina JOELSON Co-directeurs : Philippe BELTRAME Co-Encadrants : Stéphane RUY Correspondant : Nom : BELTRAME Prénom : Philippe Mail : [email protected] Téléphone : 04 32 72 22 68 Titre en français : Dynamique du front de ruissellement et du mécanisme d’infiltration sur une surface poreuse Titre en anglais : Front dynamics of run-off and infiltration mechanism through a porous medium Mots-clés : ruissellement, mouillabilité, EDP non-linéaire, analyse de bifurcations, milieux poreux, interface. Co tutelle : Non Pays : France Profil du candidat Compétences dans le domaine de la modélisation en mécanique des fluides ou du transfert dans les milieux poreux, soit par exemple un master de physique, soit un master de mathématiques appliquées en particulier dans le domaine des EDP non-linéaires. De plus, le candidat doit avoir une expérience en matière de méthode numérique avec programmation dans un langage, comme Fortran, C ou bien Matlab (ou équivalent). Présentation détaillée en français Le milieu méditerranéen est particulièrement exposé aux périodes de sécheresse et à des épisodes de pluies localisées et intenses. Seulement une fraction de ces pluies contribue à l’irrigation de la végétation et à la recharge des nappes, la majeure partie étant ruisselante. Ce ruissellement favorise la survenue de catastrophes naturelles telles que les inondations ou les glissements de terrains. Ces risques sont accentués sur les sols secs, car ils ont un caractère hydrophobe. Or l’infiltration des sols secs présentant des fractures est un phénomène complexe qui reste encore peu étudié. Pour mieux comprendre la dynamique de ruissellement et d’infiltration, il est nécessaire de s’intéresser, d’une part, au front de ruissellement et, d’autre part, à l’interface eau/milieu poreux. Les mécanismes les régissant mettent en jeu la mouillabilité du sol. Or, à ce jour, on ne dispose que peu de modèles décrivant la mouillabilité d’une surface poreuse. Les difficultés principales à sa description sont sa dépendance en teneur en eau dans la matrice et les effets d’hystérésis au niveau du front de ruissellement. C’est donc un phénomène essentiellement dynamique et hors-équilibre. En particulier, notamment sous l’effet des hétérogénéités locales telles que l’hydrophobicité, le front n’est pas uniforme induisant l’existence de zones sèches qui réduise les capacités d’infiltration. De plus, le front peut présenter une avancée intermittente qui influe l’infiltration. Finalement, le mécanisme par lequel l’eau commence à s’infiltrer dans un macropore met également en jeu un nouveau problème d’interface. Le but de la thèse est donc de lever ces verrous à petite échelle pour contribuer à une meilleure connaissance de l’infiltration et du ruissellement aux grandes échelles (versant, parcelle agricole). Contrairement à des approches utilisant les équations de type Sain-Venant ou Shallow-water à l’échelle de la parcelle voire du versant, (voir par exemple Delestre, 2010), nous nous intéresserons au ruissellement à petite échelle, c’est-à-dire de l’ordre du cm au dm et à des films minces allant d’une épaisseur nulle au centimètre. Dans ce contexte, de nombreux paramètres physiques sont en jeu tels que la mouillabilité de la surface du sol, c’est-à-dire l’interaction entre l’eau et le sol, la tension de surface de l’eau, la viscosité, la topographie etc… Le ruissellement sera décrit par un système d’équations aux dérivées partielles (EDP) de type équations de lubrification qui permet une prise en compte de la mouillabilité (Beltrame et al. 2009). Ce système d’équations devra être couplé avec une description de la dynamique d’infiltration dans la matrice poreuse. L’équation de Richards devra être adapté afin de tenir compte de la mouillabilité en s’inspirant de travaux actuels. Afin de capturer la complexité des scénarios, nous proposons d’étudier les solutions de ces EDP en utilisant les outils d’analyse de systèmes dynamiques. Cette approche a été fructueuse pour modéliser l’écoulement sur des substrats hétérogènes où des instabilités de types fingering pouvaient se combiner avec un écoulement intermittent (Beltrame et al. 2011). Dans le cas présent, on s’attend à des scénarios encore plus riches puisque l’intermittence du ruissellement est couplée avec l’infiltration. On espère ainsi déterminer dans les plans de paramètres les instabilités de front, les seuils de ruissellement et d’infiltration dans la matrice poreuse ou bien d’activation de macropore. Selon l’état d’avancement de la thèse, une approche stochastique où les paramètres du modèle tels que les propriétés de la surface du sol seront alors considérés comme des variables aléatoires dans le système d’EDP. L’approche vise à décrire la probabilité d’infiltration dans la matrice ou la macroporosité en fonction des paramètres du modèle dont le caractère stochastique non-linéaire pourra être abordé par des méthodes de décomposition de type Wiener-Hermite (Joelson and Ramamonjiasoa, 2003). Contrat / Partenariat Contrat de bourse ministérielle. Partenariat avec la Société du Canal de Provence (SCP). La société du Canal de Provence (Aix-enProvence) avait été associée comme partenaire socio-économique lors de la demande de bourse l’an dernier. La SCP est particulièrement intéressée par ce projet, car elle espère trouver des éléments nouveaux lui permettant de rendre plus efficiente/économe la pratique de l’irrigation sur les secteurs dépendant de la concession régionale. Domaine / Thématique Le domaine et la thématique scientifique concerne la modélisation d’interface entre deux ou plusieurs phases (eau, milieux poreux, air) et de leur interaction qui se traduit ici par la mouillabilité. D’autre part, les aspects non-linéaires de l’écoulement à surface libre sont primordiaux pour comprendre les mécanismes hors-équilibres. Du point de vue des finalités, ce travail vise à mieux comprendre l’infiltration et le ruissellement des pluies sur des sols naturels ou cultivés, ce qui doit contribuer à mieux prévoir les risques de crue, d’érosion, et de pollution des nappes, ainsi qu’à définir de mesures de protection adéquates et des pratiques culturales favorisant la protection des milieux. Objectif On espère apporter des éléments de réponses aux deux principales questions ouvertes. La première concerne le développement d’un modèle hors-équilibre prenant en compte d’effets due à des propriétés de mouillage partiel voire le caractère hydrophobe de la matrice poreuse et de sa surface. Ce modèle devra coupler les dynamiques de ruissellement et d’infiltration. La seconde question concerne la dynamique de la genèse du ruissellement sur un sol et de l’infiltration résultante. La caractérisation d’un seuil de ruissellement, d’instabilité de front ou encore d’activation hydraulique de macropore. Déterminer ces seuils en fonction de paramètres physiques tels que le les propriétés physiques de mouillabilité, du diamètre du macropore, etc…, serait une avancée importante dans la compréhension du lien entre ruissellement et infiltration. Finalement, les résultats pourraient être intégrés au sein de la plateforme de modélisation Sol Virtuel. Cette plateforme de l’INRA est développée à l’UMR EmmaH d’Avignon. Elle vise à favoriser le couplage de modèles permettant de modéliser le fonctionnement du sol dans ses composantes physiques, chimiques et biologiques. Elle a d’ores et déjà une portée nationale (elle fait partie du projet d’avenir ANAEE-Services) et européenne. Contexte et enjeux Caractériser le ruissellement dès sa genèse est primordial pour comprendre le risque d’inondation après un événement pluvieux. Le but de cette thèse est de mieux quantifier le ratio entre eau infiltrée et ruisselante mais aussi déterminer sa répartition spatiale. De plus, il s’agit également de distinguer la quantité infiltrée dans la matrice poreuse et dans les macropores. L’originalité de cette étude de s’intéresser aux interfaces eau/matrice poreuse ainsi qu’au front de ruissellement et d’autre part, d’adopter une description hors-équilibre par des outils de systèmes dynamiques. La dynamique de ruissellement d’eau de pluie a été largement étudiée dans la littérature. Les études expérimentales ou les mesures sur le terrain mettent en avant la complexité du phénomène. Que ce soit le seuil de ruissellement (Penna et al. 2011) ou plus généralement le lien entre type de sol et quantité ruisselée (Gillies and Smith, 2005; Lei et al., 2006; Li et al., 2011) ces questions sont encore loin d’être résolues. À grande échelle (parcelle, versant), les modèles de prédiction du ruissellement prennent généralement en considération une capacité de détention à la surface (Kamphorst et al., 2004) du sol dont le remplissage déclenche le ruissellement généralisé (Morgan et al., 1998). Cependant de nombreuses études ont montré que la prise en compte d’un seul effet seuil ne permet pas de rendre compte de la dynamique du ruissellement, en particulier dans les premières phases. Ainsi, des modèles plus physiques ont été développés à plus petite échelle. Ces modèles sont généralement ceux utilisés pour les écoulements en eau peu profonde appelé shallow watter ou équation de Saint-Venant (Erduran, 2005 ; Delestre, 2010). Certains modèles simplifiés conduisent au modèle d’ondes cinématiques. La dissipation visqueuse et les irrégularités du sol sont introduites comme un terme de frottement. Finalement, ces équations peuvent être combinées avec un terme source de pluie et un terme puits représentant à l‘imbibition dans le sol. Le terme d’infiltration dans le sol est soit une donnée empirique homogène, modélisée par la loi de Darcy (voir par exemple Thiele et al., 2009), ou par des approximations telles que l’équation de Green et Ampt (Nord et Estèves, 2005). Certaines modélisations récentes se basent sur un couplage mécaniste 2D ou 3D entre l’équation de Saint-venant décrivant l’écoulement à la surface du sol et l’équation de Richards décrivant les transferts hydriques dans le sol (Weill et al., 2009). Cependant, la spécificité du comportement hydrophobe d’un sol très sec ou plus généralement de la mouillabilité de la surface du sol et de sa matrice poreuse n’est pas prise en compte. À notre connaissance aucun modèle ne s’est attaqué à la modélisation de l’interface eau/matrice poreuse en tenant compte d’une mouillabilité. De même la présence de fractures ou plus généralement de macropores ne semblent pas être abordés. De plus, tous ces modèles de type Saint-Venant ne permettent pas de modéliser les premières phases du ruissellement lorsque les hypothèses conduisant à l’équation de Saint-Venant ne sont pas satisfaites. En particulier, ils ne tiennent pas compte de la dynamique du front. L’UMR EmmaH a une expertise dans le domaine de transfert dans les sols insaturés tant au niveau des mesures (Sammartino et al. 2012) que dans les modèles déterministes (travaux actuels sur la modélisation de mouillabilité des milieux poreux) ou encore stochastiques (Golder et al., 2013, Maryshev et al. 2013, Ouloin et al. 2013). Le sujet proposé s’intègre donc dans la thématique actuelle de recherches et constitue un élément clé de la compréhension du transfert. Méthode La modélisation déterministe des dynamiques de ruissellement se fera dans le contexte de l’approximation de lubrification, c’est-à-dire avec un ruissellement de faible épaisseur et un écoulement lent où la viscosité et la tension de surface jouent un rôle prépondérant. On tiendra compte éventuellement d’une faible inertie en suivant la démarche développée par Ruyer-Quil et al. (2013). L’interface solide-eau est prise en compte par la théorie d’interface diffusive (Thiele et al., 2001). Elle permet en effet de décrire le mouillage partiel et donc un angle de contact. De plus, il est possible de modéliser l’hystérésis de l’angle de contact et/ou des défauts topologiques en faisant varier la mouillabilité (voir Beltrame et al., 2009 et Beltrame et al., 2011). Les paramètres des équations seront deux termes d’énergie libre en compétition dont résulte l’angle de contact. Cette approche est l’objet de travaux actuels dans l’UMR qui a l’avantage de prendre en considération la dépendance de la mouillabilité en fonction de la teneur en eau. La validation des approches théoriques pourra s’appuyer sur le travail d’autres équipes qui disposent de résultats expérimentaux (Bachmann J. et al., 2012). Les trois étapes successives dans cette première phase sont donc : 1- Proposer un modèle décrivant l’écoulement à la surface couplé avec une équation de type Richards pour l’infiltration dans la matrice poreuse. La difficulté essentiellement est d’introduire la mouillabilité de la surface et du milieu poreux qui peut dépendre de la saturation. 2- Adaptation/développement du code numérique pour l'intégration temporelle et l'analyse de bifurcation (2D puis 3D). 3- Simulations : détermination des régimes de ruissellement et d’infiltration et des seuils dans l’espace des paramètres (modèles 2D et 3D). Pour les deux premières étapes, le doctorant s’appuiera sur les modèles récemment développés et les codes existant d’intégration temporelle et d’analyse de bifurcation. Références bibliographiques : Bachmann J. et al., (2012) “Moisture-Dependent Wettability of Artificial Hydrophobic Soils and Its Relevance for Soil Water Desorption Curves”, Soil physics, 72, 2, 342-349 Beltrame P., Hänggi P. and Thiele U., (2009) “Depinning of three-dimensional drops from wettability defects”, Euro. Phys. 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