brno hotel slavia

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brno hotel slavia
Sommaire
«Nous cherchons à promouvoir
une Europe sans barrières,»
dit Alexandr Vondra, vice-président du
Conseil pour les affaires européennes
pp. 4 – 7
Editorial
Chers lecteurs,
je suis très content de pouvoir vous
adresser la parole sur les pages de la
présente revue et d’ajouter quelques
remarques sur la République tchèque
et sur le CzechTourisme, organisation
publique dont la mission principale
consiste à faire la propagation, à
l’étranger et sur le marché de tourisme national, de la République tchèque
en tant que destination touristique
attrayante.
La République tchèque compte parmi les destinations touristiques importantes et recherchées d’Europe
centrale. Les beautés naturelles s’y
marient avec celles qui ont été créées
par la main d’homme: par la quantité
de monuments culturels notre pays
compte parmi les grandes puissances
mondiales. Conscients des richesses
culturelles, historiques et architecturales de la République tchèque, les
visiteurs du monde entier viennent
toujours plus nombreux ces dernières
années. Le territoire de notre pays est
parcouru de milliers de kilomètres de
chemins touristiques et il est parsemé
d’un nombre incroyable de monuments culturels, de villes historiques
pittoresques et de stations balnéaires
renommées, recherchées tant pour les
cures que pour le repos. En plus, la
saison touristique ne se limite pas à
quelques mois de l’année: en toute
saison, une excursion en Tchéquie
permet au voyageur de se rendre
compte que c’est un endroit idéal tant
pour y passer les vacances que pour y
venir pour le week-end. C’est d’ailleurs
ce crédo qui inspire les activités que le
CzechTourisme a nouvellement introduites en 2007.
Notre organisation a préparé plusieurs circuits thématiques nouveaux
qui, dans l’esprit des touristes étrangers, devraient représenter la République tchèque à l’avenir et qui se
résument dans la devise: «République
tchèque – symphonie d’impressions».
Notre pays offre, en effet, une incroyable pluralité de possibilités d’un
repos actif et passif. En premier lieu,
citons sa riche histoire à laquelle sont
liées les visites de châteaux forts, résidences historiques et de monuments
religieux, ainsi que celles de monuments techniques. Ces dernières années, ce sont les vacances actives qui
sont de plus en plus populaires, donc
le cyclisme et les randonnées pédestres, de même que les sports d’hiver
et d’adrénaline, ainsi que l’agrotourisme, la chasse, la pêche ou le golf.
La République propose, en outre, de
nombreuses expériences gastronomiques inédites et activités distractives
permettant de passer chez nous des
vacances «pleines d’impressions».
Rappelons encore deux circuits déjà
éprouvés: thermalisme médical et tourisme collectif et de motivation.
L’affluence de touristes étrangers
dans le pays s’accroît d’année en année. L’agence gouvernementale CzechTourism prendra soin de maintenir sa
tendance ascendante.
Je vous souhaite à tous de cueillir
en République tchèque une vraie
«symphonie d’impressions».
Port aérien pour le troisième
millénaire
– le 70e anniversaire de l’aéroport
Letiště Praha
pp. 8 – 11
Les cyclistes sont les bienvenus
– venez pédaler avec nous sur les routes
légèrement ondulées
pp. 12 – 15
Les étrangers découvrent les
rivières tchèques
– la descente des rivières
tchèques – Vltava, Sázava, Morava...
n’est pas payante
pp. 16 – 19
Galerie:
La Forêt vierge de Boubín est vieille
et interdite au public
pp. 20 – 21
Etangs de Bohdaneč
– l’équilibre naturel revient dans le pays
des étendues d’eau monumentales
pp. 22 – 25
Succombant à l’appel de lointains
– la popularité du camping tchèque
était difficile à gérer pour le régime
communiste
pp. 26 – 29
«Gars de la rivière» oubliés
– la gloire millénaire du métier de flotteurs
de bois s’est éteinte avec la construction
des barrages sur la Vltava
pp. 30 – 33
Mosaïque d’évènements et de curiosités
de la République tchèque
pp. 34 – 35
L’association pragoise Vltavan
a survécu à tous les régimes
– et elle est aujourd’hui la plus
ancienne association du pays
pp. 36 – 38
Le Coeur de l’Europe paraît six fois par an. Sur ses pages,
ce périodique donne l’image de la vie en République Tchèque.
Les articles expriment les opinions de leurs auteurs qui
peuvent ne pas être toujours identiques aux points de vue
officiels du gouvernement tchèque. La reproduction des
textes figurant dans le présent périodique sans l’autorisation
de l’auteur est prohibée. Pour l’abonnement, veuillez vous
adresser à la rédaction du périodique.
Éditeur: Éditions THEO, en coopération avec le Ministère
des Affaires Étrangères de la République Tchèque.
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Rédacteur en chef: Pavel Šmíd
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Fischer, Vladimír Hulec, Robert Janás, Milan Knížák, Martin
Krafl, Eva Ocisková, Tomáš Pojar, Jan Šilpoch, Petr Vágner,
Petr Volf, Marek Skolil
Traduction: Institut de Langues et Littératures Romanes
de l’Université Masaryk de Brno.
Imprimé à VČT Sezemice
ISSN 1211–930X
Rostislav Vondruška
Internet: http://www.theo.cz
E-mail de l’éditeur: [email protected]
directeur de CzechTourism
3
«Nous cherchons à promouvoir
une Europe sans barrières»
dit Alexandr Vondra, vice-président du
Conseil pour les affaires européennes
Alexandr «Sacha» Vondra est l’un de
nos hommes d’Etat et diplomates les
plus populaires, grâce aussi au fait qu’il
avait pris une part active à la résistance
anticommuniste et avait été emprisonné
pour ses opinions. En soutenant sa candidature aux élections sénatoriales de
l’année passée, le sénateur Jaromír Štětina l’a caractérisé en termes suivants:
«Le dissident Sacha Vondra n’a jamais
fait de sa dissidence un mérite à récompenser. De même qu’à l’époque, il sait
joindre aujourd’hui tout naturellement
les impératifs de la conscience et ceux
de la raison.»
Agé de 46 ans, Vondra est souvent
traité par la presse de «Monsieur l’Eu-
4
rope tchèque». Dans sa conception, les
Tchèques devraient «se réveiller à une
saine assurance» au sein de l’Union
européenne. Son travail est marqué par
le sérieux et par la constance d’opinions. Les années passées dans la dissidence et dans l’underground donnent
à son activité politique un caractère
dénué de formalisme. Pendant la compagne électorale où, ministre des Affaires Etrangères, il briguait le siège de
sénateur, il parcourait – par principe –
les rues de villes et de communes sans
gardes du corps...
Il est partisan de la société civile et de
la démocratie ouverte et ses destinées
illustrent sa conception du monde. Dans
«Après la révolution», avec Stanisav Devátý et Jana Petrová-Marco. 1990.
Avec Václav Havel: pourparlers menés au nom du Forum civique, décembre 1989.
Recontre de la Solidarité tchéco-polonaise en été 1989. Václav Malý, Václav Havel,
Eda Kriseová, Alexandr Vondra, Anna Šabatová, Ján Černogurský et autres dissidents.
Plus d’un demi-million de personnes se sont ressemblées sur la Plaine de Letná pour se
prononcer pour le renversement du gouvernement en Tchécoslovaquie. Sur la tribune de
droite à gauche: Sacha Vondra, Tomáš Hradílek et Dana Němcová. Le 26 novembre 1989.
Interview
«Dans la politique tchèque, il représente toujours un phénomène à
part: les médias et le public peuvent
facilement l’atteindre par téléphone,
il ne refuse pas les demandes d’entretien, même pas aux journaux qui
le critiquent.»
Hebdomadaire Respekt
au sujet d’Alexandr Vondra
les années 1979-1984, il fit
les études de géographie à
la Faculté des Sciences de
l’Université Charles, à Prague. Il se rallia très tôt aux
travaux de l’opposition démocratique. Il décida de
quitter la faculté et travailla
plusieurs années au château
de Liběchov comme conservateur des collections asiatiques du Musée Náprstek.
Dans les années 1980, il
était manager de Národní třída, groupe underground de
musique rock, composé de
jeunes musiciens, artistes et littéraires.
Avec Jáchym Topol et Ivan Lamper,
il publiait le périodique samizdat Revolver revue, tribune de littérature nonconformiste qui dure toujours. Il entretenait des contacts avec les dissidents
hongrois, polonais et lithuaniens et, en
1987, il devint membre de la Solidarité
tchéco-polonaise.
Il participa aux fameuses rencontres
de représentants de l’opposition tchécoslovaque et polonaise à la frontière
entre les deux pays dans les Monts des
Géants et contribua à l’organisation du
passage en secret de littérature, de cor-
respondance et de moyens techniques
à travers les chaînes de montagne.
En 1989, il fut porte-parole de la
Charta 77 et un des auteurs de la pétition Quelques phrases, dont le retentissement exceptionnel annonçait la chute
du régime communiste. Pour son activité, il fut incarcéré dans les prison de
Ruzyně et de Pankrác. En novembre
1989, il figura parmi les fondateurs du
Forum civique, mouvement politique
qui était à la tête du pays jusqu’aux premières élections libres. L’appartement
de son épouse au centre de Prague, rue
Trojanova, servit alors de lieu de rédacEn famille dans sa maison de campagne près d’Úštěk. 2006.
tion d’Informační servis qui
devait se traformer plus tard
en hebdomadaire Respekt qui
continue toujours à paraître.
Dans les années 1990, il
était tout d’abord le conseiller du président Havel pour
la politique extérieure. C’est
de son iniciative que fut organisée la rencontre, à Bratislava, des intellectuels et
des dirigeants suprêmes de
la Tchécoslovaquie, de la
Hongrie et de la Pologne qui
devait aboutir à la coopération de Visegrád. Plus tard, il
était – en tant que premier vice-ministre
des Affaires Etrangères – à la tête de l’équipe qui s’occupa de la partition des
services diplomatiques tchécoslovaques,
il était parmi les négociateurs de la déclaration commune tchéco-allemande et
il ouvrit les entretiens sur l’entrée de la
République tchèque dans l’O.T.A.N.
E
ntre 1997 et 2001, il fut ambassadeur de la République tchèque
aux Etats-Unis, ensuite mandataire du
gouvernement tchèque à la préparation
du sommet de l’O.T.A.N. à Prague. De
5
Ministre des Affaires étrangères nouvellement nommé, Alexandr Vondra pose avec les chefs de nos
représentations diplomatiques pour la photographie commune.
son propre chef, il a quitté la diplomatie
en 2003.
E
n 2006, il a été nommé ministre des
Affaires étrangères de la République tchèque et, au printemps de la même année,
il a été élu sénateur pour le parti ODS.
En janvier 2007, il est devenu vice-président du Conseil aux affaires européennes. Il est titulaire de nombreuses
distinctions étrangères en appréciation
de ses activités en faveur des droits de
l’homme, de la démocratie et de l’entente internationale, dont National Endowment for Democracy Medal et des distinctions d’Etat polonaises et letonnes.
Quels sont les préparatifs de la République tchèque pour son imminente présidence de l’Union européenne?
Les préparatifs de la présidence
tchèque du Conseil de l’UE, qui aura
lieu dans le premier semestre 2009, se
poursuivent de façon intense depuis le
début de l’année. L’équipe stabilisée,
composée de spécialistes de la problématique en question, a fait d’importants
progrès quant à la définition stratégique
des priorités de la présidence tchèque
une série d’offres publiques de sélection
qui supposent une vaste participation
du secteur d’entreprise privé. Elle intensifie la communication avec différents
ressorts en vue de la coordination des
priorités politiques et de l’organisation
d’activités d’accompagnement. Dans la
phase finale se trouve le concours pour
le logo et pour l’image visuellement
homogène de notre présidence.
Qu’est-ce que la République tchèque
a à proposer à l’Union européenne,
comment devrait-elle s’acquitter de
la présidence pour que, dans un certain sens, elle puisse servir de modèle
à d’autres pays?
et, plus généralement, de sa préparation
au niveau d’organisation, d’administration et de communication tant en République tchèque qu’à Bruxelles.
A
l’heure actuelle, on est sur le
point de terminer, en coopération avec
la Représentation permanente à Bruxelles, la première version du calendrier de
notre présidence, c’est-à-dire de l’échéancier de négociations clés prévues
pour la durée de notre présidence. Ce
6
calendrier sera consulté et corrigé en
collaboration avec le secrétariat général
du Conseil de l’UE. En ce moment,
nous sommes en train de brosser un tableau de capacités de différentes régions
du point de vue d’organisation de congrès, d’hébergement ou de restauration
afin d’évaluer leur potentiel d’accueil
pour les réunions informelles des ministres. Nous voudrions, en effet, que la plupart d’entre elles aient lieu dans les régions. Aussi l’équipe préparatoire de la
présidence publiera-t-elle dès l’automne
Alexandr Vondra photographié au milieu de journalistes pendant le voyage de Václav Havel dans les pays
d’Amérique latine. 1966.
Pendant sa présidence du Conseil de
l’UE, la République tchèque voudrait
faire voir à l’Union comment un nouvel Etat membre ressent les défis du
processus d’intégration européen. Cette
intention est exprimée dans la devise de
la présidence tchèque – «Europe sans
barrières» – embrassant tant les aspects
intérieurs de l’action de l’EU que ses
aspects extérieurs. Notre attention sera
concentrée sur les principaux domaines
prioritaires – compétitivité, les quatre
libertés (note de la rédaction: mouve-
En nous situant au-dessus et en dehors de l’Europe, qu’est-ce que la
République tchèque peut proposer
au monde. Sur quoi repose votre
attachement personnel au peuple
tchèque, au «petit jardin» tchèque?
J’aime le paysage tchèque, sa diversité
et variété. Des liaisons personnelles m’attachent notamment au paysage dramatique de la Bohême du Nord. Cependant,
j’ajoute aussitôt que le paysage n’est pas
la chose principale qui nous distingue du
reste de l’Europe. Je crois que l’âme
tchèque est faite avant tout du sens de
l’humour, d’un certain détachement permettant d’envisager les choses d’un point
de vue élevé, résultat de l’expérience historique, et de la faculté d’autoironie.
Si l’on désigne comme île de la liberté la partie du monde se trouvan
«sous le patronage» des Etats-Unis,
est-ce que devrions en faire partie
sans réserve aucune? Que dire de la
République tchèque et des droits de
l’homme? Est-ce que nous gardons
une attitude digne dans ce sens?
Un pays aussi petit que la République
tchèque ne peut pas faire valoir de prioment libre de marchandises, de personnes, de services et du capital dans
le cadre de l’UE) et politique commerciale libérale.
Parmi les autres thèmes que nous
voudrions souligner sur le sol européen,
j’aimerais rappeler le problème de l’énergétique sûre et durable et celui des
relations extérieures avec l’accent mis
sur l’orientation transatlantique, sur les
pays balcaniques occidentaux, sur l’Europe orientale et sur l’Asie centrale. Les
domaines prioritaires de la présidence
tchèque ont été choisis en fonction de
l’orientation générale de l’Union européenne, mais ils permettent en même
temps que la République tchèque marque les dossiers européens de son propre apport, qu’elle y laisse une sorte
d’«empreinte tchèque».
I
l va sans dire que l’ambition de
servir d’exemple à d’autres pays ne
nous est pas étrangère. Au cours de
la première moitié de l’année 2009, la
République tchèque s’efforcera, donc,
d’être pour les autres Etats membres, de
même que pour les institutions européennes, un partenaire respecté, capable
de s’acquitter avec succès de toutes les
tâches difficiles liées à l’exercice de la
présidence. C’est dans ce sens que nous
pourrions devenir un modèle pour les
autres pays membres nouveaux qui,
pareillement à nous, exerceront la présidence pour la première fois.
En quoi, à votre avis, sommes nous
égaux à l’Europe dès à présent?
La République tchèque fait partie de
l’Europe, à part entière. Elle est égale à
n’importe laquelle de ses autres parties.
Cependant, elle ne devrait pas tabler
uniquement sur les richesses de son patrimoine culturel, mais devrait s’occuper
avant tout à édifier une société d’instruction; je ne me refère pas ici à la recherche de diplômes, mais à la pensée
indépendante et créative.
Ministre des Affaires étrangères Alexandr Vondra
en conversation avec son homologue allemand
Frank-Walter Steinmeier. 2006.
rités bien nombreuses dans sa politique
extérieure. Cependant, les droits de l’homme représentent justement l’une des priorités de la politique extérieure tchèque.
Ses efforts tendant à la démocratisation
de la situation en Cuba ou en Biélorussie
font respecter notre pays, mais lui attirent en même temps la haine des structures totalitaires tant en Europe que
dans le reste du monde. Et je ne dirais
pas que les pays qui jouissent déjà de
liberté puissent être considérés comme
«une petite île sous le patronage des EtatsUnis». La statue de la Liberté ne fut pas
construite par les seuls Américains.
Merci de l’entretien.
Rédaction
Photos: archives d’ Alexandr Vondra, ČTK,
AP/Jan Bauer, archives d’ Anna Šabatová
et de Petr Uhl, archives de la rédaction.
A New York avec le légendaire rocker Lou Reed.
1998.
7
Port aérien pour le
troisième millénaire
«Il est difficile d’imaginer quel aurait
été l’évolution du plus grand port aérien
tchèque si la commission de sélection
avait opté, disons, pour le projet hardi
prévoyant de situer le nouveau aéroport
sur une plate-forme géante couvrant, tel
un toit, l’aire de la gare Masaryk actuelle,»
estime, en regardant en arrière, M. Lubomír Dudáček, ancien directeur général de
l’Administration tchèque d’aérodromes et
historien de l’aviation de transport. «Cependant, la commission finit par opter
pour une plaine légèrement ondulée près
du village Ruzyně peu éloignée du centre
de la capitale et offrant l’espace libre en
abondance. L’édification proprement dite
fut réalisée, dans le style fonctionnaliste,
dans les années 1933-1937. L’année même
de son achèvement, l’aéroport remporta,
8
à l’Exposition mondiale de Paris, une
médaille d’or accordée par un jury de
spécialistes internationaux en appréciation de son aspect final.»
E
Vue aérienne de 1938.
Premier avion vient de se poser à Ruzyně.
L’édification achevée. 1937.
Aire de stationnement de l’aéroport en 1957.
n 1937, les statisticiens de l’époque comptèrent à Ruzyně des milliers de
voyageurs annuels, aujourd’hui – soixante-dix ans plus tard – on les compte par
millions. Plus exactement: onze millions
et demi de voyageurs pour l’année 2006.
A l’avenir, l’aéroport de Prague compte
traiter 20 millions de voyageurs par an.
Il est, en effet, le port aérien «d’attache»,
c’est-à-dire le plus rapproché, de 8 millions de Tchèques, de 4 millions d’Allemands et de 6 millions de Polonais. M.
Jiří Pos, directeur commercial exécutif,
Transports
Aire de stationnement dans les années 1930.
Le 5 avril 1937, le premier avion se
posa sur la piste de l’aéroport de Ruzyně,
à Prague: celui de la Compagnie aérienne tchécoslovaque de la ligne intérieure
Piešťany-Zlín-Brno-Praha. Les statisticiens de l’époque auraient pu compter les
voyageurs en milliers. Soixante-dix ans
plus tard, en les compte en millions.
American, les représentants de cette dernière déclarèrent que Ruzyně était le meilleur aéroport sur le continent eropéen.
Le véritable boom des lignes de grande
distance ne vint que dans les années 1970
où la compagnie Československé aerolinie (ČSA – Lignes aériennes tchécoslovaques) découvrirent pour leurs clients les
destinations exotiques, telles que Cuba,
Djakarta, Damas, Bagdád ou Singapour.
Dans les années 1960-1968, un nouvel
aérodrome – le Terminal Nord – fut construit au nord de l’aéroport primitif. Le 15
mai 1968, il y eut l’inauguration solennelle du nouveau bloc technique flanquée
d’une tour de contrôle aérien et du nouveau bâtiment de traitement prévu pour
deux milions voyageurs annuels. Très tôt,
le nouvel aéroport devait passer un test
d’endurance: dans la nuit du 21 au 22 août
1968, il fut fermé au trafic civil et devint
le terrain d’atterrissage d’avions des troupes d’occupation du Pacte de Varsovie.
A l’heure actuelle, les destinations les
plus fréquentes des avions décollant de
Prague sont Londres, Paris, Francfort et
Amsterdam. Une cinquantaine de transporteurs aériens relient notre capitale avec
cent vingt localités du monde. La liaison
directe avec le continent américain encourage les ambitions de Prague en tant que
métropole européenne insigne et, peutêtre aussi, lieu futur de la tenue des Jeux
ajoute: «Parmi les nouveaux pays de
l’Union européenne, nous réussissons le
mieux. L’année prochaine, nous aurons
en plus l’occasion de diminuer l’avance
de l’aéroport de Vienne, notre concurrent
le plus important. Le 1er janvier 2008,
nous deviendrons membres de la Convention de Schengen et Prague pourrait
devenir alors une porte d’entrée alternative vers l’Europe centrale et orientale.»
Pour l’aéroport, le soixante-dixième anniversaire n’est pas un simple rappel historique. Les succès actuels sont dus en grande
partie à ceux qui le bâtirent, il y a 70 ans.
Dans les premiers années de son existence, le «Ruzyně» était en train de se
transformer en une agglomération indépendante et en un centre d’aviation international. Cependant, l’occupation allemande de 1939 mit un coup de frein à ce
développement prometteur. La Luftwaffe
allemande y créa son école d’aviation.
Avant de quitter l’aéroport dans la nuit du
7 au 8 mai 1945, les Allemands arrivèrent
à en miner l’accès et à placer des explosifs
dans le hall. Grâce à un heureux concours
de circonstances, la destruction de l’aéroport
n’eut pas lieu. Son fonctionnement normal
put reprendre presqu’aussitôt et le premier avion intercontinental fut accueilli à l’aéroport de Ruzyně une année plus tard à
peine. Quand s’yposa l’appareil Lockheed
L-049 Constellation de la compagnie Pan
Accueil des pilotes tchèques de la R.A.F à leur retour dans le pays. 1945.
Aéroport dans les années 1960.
9
Vue aérienne actuelle.
olympiques. Depuis mai 2007, une nouvelle ligne directe réunit Prague et Atlanta.
Les voyageurs peuvent l’utiliser cinq fois
par semaine. La compagnie Delta Airlines,
en coopération avec notre transporteur
aérien national (ČSA), la fait desservir par
le Boeing 767 qui peut transporter 230
voyageurs à la fois. Le maire de Prague
Bém s’en réjouit car il espère que cette
ligne augmentera l’afflux de touristes
américains en Tchéquie. «En dehors de la
ligne régulière Prague-New York, les voyageurs ont la possibilité d’atteindre directement une autre destination aux EtatsUnis,» dit-il. Prague est la première ville
d’Europe centrale et orientale qui ait avec
Atlanta une liaison aérienne régulière.
A
chaque aéroport, la composante de
services la plus sollicitée, c’est probablement le traitement de voyageurs et de
bagages. Six grandes compagnies aériennes étrangères opérant à l’aéroport de Prague offrent à leurs clients la possibilité de
traitement par Internet, réalisable soit de
chez eux, soit de leur lieu de travail. La
ČSA compte les rejoindre bientôt. «Contre un supplément, nous proposons à la
clientèle exigeante toutes sortes de services V.I.P.: traitement sans toute formalité
d’arrivée ou de départ, service complet
en cas d’événements exceptionnels, tels
10
demi d’immeubles dans les environs de
l’aéroport. Dans les communes et dans
les quartiers adjacents, nous sponsorisons
la construction de trottoirs nouveaux, de
terrains de sport, de pistes cyclables et de
terrains de jeu pour les enfants.»
A
Baptême du Boeing avec le panorama de Hradčany.
2007.
tienne des actions de Letiště Praha. Cela
nous aiderait, entre autres, de trouver des
sources financières qui nous permettraient de réaliser les infrastructures nécessaires, tel – par exemple – le prolongement
du métro de Prague jusqu’à l’aéroport.»
Le management s’efforce de donner
l’image favorable de la compagnie du
point de vue de l’aménagement du territoire et de l’impact du trafic aérien sur
l’environnement. M. Pos dit à ce sujet:
«Très prochainement, nous envisageons
de construire une nouvelle piste de décollage et d’atterrissage afin de détourner le
trafic aérien des parties le plus densément
peuplées de la ville. Nous avons subventionné le montage de fenêtres et de portes
de balcon antibruit dans un millier et
u début du 21e siècle, des passerelles d’embarquement vitrées et le premier tapis roulant ont été mis en fonction.
En mai 2005, l’aéroport de Prague a remporté le 1er prix dans le concours international World Airport Awards (en tant que
le Meilleur aéroport de l’Europe centrale/
orientale. En 2006, le Terminal Nord 2 a
été ouvert au public: c’était le plus important des investissements que l’aéroport ait
réalisés pour son développement. C’est ce
terminal, en effet, qui devrait permettre à
l’avenir de traiter 20 millions de voyageurs par an. L’aéroport envisage en outre
une commémoration solennelle de son
70e anniversaire accompagnée d’une propagation en images grandiose. La vue panoramique du Château de Prague peinte
sur les flancs des Boeing fait la propagation de Prague et de l’aéroport de Ruzyně
dans toutes les parties du monde.
Daniel Seman
Source de données d’histoire: Lubomír
Dudáček, L’aéroport de Prague I-III
Photos: Letiště Praha, a.s. (www.prg.aero),
archives de la rédaction.
entrevues d’affaires, accueil de célébrités
ou de sportifs. Mais les autres voyageurs
ne sont pas oubliés non plus: nous voulons
aménager à leur intention une zone de relaxation spéciale dans l’espace de jonction
entre les deux terminaux,» signale M. Jiří
Pos. Parmi les nouveautés envisagées, rappelons l’Hôtel de transit ouvert tout récemment: les voyageurs attendant leur correspondance peuvent s’y retirer pour se reposer.
«Il y a chez nous neuf dizaines d’aéroports, dont dix-neuf internationaux. Cependant, 90 % de tous les voyageurs passent par l’aéroport Prague, dont le rendement se situe au niveau mondial. C’est un
organisme vivant dont le pouls marque l’économie du pays. Chaque million de voyageurs traités se solde par mille emplois
dans ses services, pour ne pas parler des
apports économiques supplémentaires –
investissements, dépenses de touristes et de
représentants de commerce,» constate M.
Aleš Řebíček, ministre des Transports.
La question de propriété de Letiště
`Praha s.p. (Aéroport Prague, e.n.) dont
l’Etat est le principal propriétaire, reste
ouverte. Parmi les acquéreurs figure aussi
la Ville de Prague. Le maire Bém «considère comme fondamental que la ville dé-
11
Les cyclistes sont
les bienvenus
Autant de Tchèques, autant de musiciens? Ne vous y trompez pas. Au début du
21e siècle, un autre dicton a cours: Autant
de Tchèques, autant de cyclistes!
Telle est, en tout cas, l’impression d’un
étranger venant dans le pays. Dans n’importe quelle ville tchèque, il assistera avec
ébahissement à des scènes qui font partie
de la vie quotidienne de la population. Sur
la route, on voit à tout moment des sportifs
à vélo qui, habillés de tricots multicolores,
passent en vitesse et sont doublés de voitures transportant des bicyclettes sur leurs
toits. Sur le trottoir, des messagers à vélo se
glissent avec adresse parmi les passants
pour livrer au plus vite un envoi à leurs clients. Sur l’accotement, une femme entre
deux âges pousse un vélo déglingé avec
des cabas suspendus au guidon. Dans la
zone piétonne, des enfants se poursuivent à
vélo; ils sont tenus à l’oeil par un agent de
police municipale qui les menace montant
lui-aussi une bicyclette. En bref: la population de la République tchèque – qui ne dépasse guère les 10 millions – a aujourd’hui
à sa disposition autant de bicyclettes de qualité, de prix et d’âge divers! Les données
fournies par les producteurs et par les importateurs permettent de conclure que les
Tchèqus achètent chaque année plus de deux
cent mille bicyclettes neuves, sans compter
les vélos importés individuelement de l’é-
tranger, les distributeurs privés et les ventes
d’hypermarché que l’on ne rend pas publiques le plus souvent.
Au début il y eut les vélos de montagne
La vogue du cyclisme chez nous est due
tout d’abord au boom des vélos de montagne qui se fit sentir aux Etats-Unis il y
a une trentaine d’années. Les fondateurs
du mountbiking lancèrent leur message en
1976 de Californie où eut lieu la première
course organisée. Leur appel ne parvint dans
les pays tchèques que vers la fin des années
1980, mais il s’y fit entendre d’autant plus
clairement. Très tôt, toute la nation enfourcha
les vélos de montagne et commença à se
rendre compte quel plaisir c’était de partir à
vélo sans autre but que celui de se mettre en
forme. Pour les vendeurs, importateurs et
producteurs du pays, c’étaient des années
d’or: on vendait des dizaines de milliers de
bicyclettes et, en attendant que le marché se
stabilise et la qualité de l’offre s’améliore,
les cyclistes impatients achetaient vraiment
tout ce qui présentait une vague ressemblance avec le vélo de montagne.
«Les „montagnards“ donnèrent une nouvelle impulsion au cyclisme et au commerce
de bicyclettes. C’est elle qui explique la popularité généralisée du vélo dans la population tchèque actuelle. Parallèlement avec
la multiplication de pistes et d’itinéraires touristiques cyclables augmente aussi la popularité du cyclotourisme, ce qui favorise
l’épanouissement de la production de vélos
de cross et de trekking. Je crois que, dans
les années à venir, le cyclisme sur route re-
12
Sport
«Il y a peu de pays où il soit possible de commencer une excursion à
vélo par un café pris sur une place
ancienne, de faire un court passage
à travers la civilisation et de pédaler
ensuite pendant vingt ou trente kilomètres dans des forêts désertes.»
prendra la place qu’il a perdue. Il suffit de
sortir de Prague en été: aux abords mêmes
de la capitale, les routes pullulent de cyclistes. C’est très éloquent,» dit M. Marek Dalecký, manager sportif et organisateur de
courses-marathon de vélos de montagne.
L
e développement du cyclotourisme
de repos et de famille implique l’accroissement de la demande des services d’hébergement et de restauration. C’est dans ce
contexte qu’a pris naissance en Tchéquie le
projet Cyclistes sont les bienvenus. Dans les
cartes et dans les dépliants d’information,
son pictogramme bien connu, placé à côté du
nom du restaurant ou de la pension, signale
que l’établissement est prêt à accueillir les
cyclistes. Cela veut dire que, pour abriter les
vélos, il dispose d’un espace protégé que
l’on ferme à clé, d’une terrasse extérieure,
de chambres disponibles et du service in-
dispensable. «Notre objectif consiste à améliorer la qualité des services destinés au
groupe spécifique de clients, celui de cyclistes et de cyclotouristes, en introduisant une
certification nationale de ces services par
l’attribution du titre „Bienvenue aux cylistes,“ Le système de certification comporte
les standards de qualité comparables aux
systèmes analogues utilisés dans les pays
de l’Union européenne,» explique le manager
Petr Kazda en parlant des buts du projet.
Routes doucement ondulées
«Il y a peu de pays au monde où il soit
aussi facile de s’évader de grandes villes
pour se plonger dans des forêts profondes
et pour couvrir des dizaines de kilomètres
en pédalant à travers une nature dépeuplée.
Citons à titre d’exemple Hradec Králové,
ville de cent mille habitants: on peut commencer l’excursion en prenant du café sur
13
la grand’place ancienne, puis parcourir
très vite un paysage civilisé et finir par
s’offrir un parcours de 20 à 30 kilomètres
à travers des forêts désertes,» estime le
publiciste Jan Rybář.
Dans ses régions frontalières notamment,
la République tchèque dispose de vastes
aires intactes où l’on est en train d’aménager de nombreuses pistes cyclables. La
région de la Suisse de Bohême et celle de la
Saillie de Šluknov offrent des routes doucement ondulées serpentant entre rochers
et petites maisons en poutres. En plus, «la
distance séparant les auberges les unes des
autres ne dépasses pas généralement cinq
kilomètres», affirment les experts. Certaines pistes cyclables sont construites avec
l’aide puisée aux fonds européens ou aux
dotations assignées à la coopération transfrontalière. Rappelons, à titre d’exemple, le
circuit T.G. Masaryk tchéco-polonais réalisé tout récemment et financé à 80 % par
l’Union européenne. Cette piste relie confortablement la ville de Náchod avec la station balnéaire polonaise Chudoby. La piste
bitumée moderne, où ont lieu des excursions tchéco-polonaises régulières, comporte la passerelle longue de 90 mètres jetée
au-dessus de la centrale électrique sur la
rivière Metuje.
Les pistes et itinéraires touristiques cyclables tchèques ont quelque chose à offrir à
nelle qui n’a pas sa pareille chez nous
tant par son contenu que par son étendue.
Les feuilles de l’Atlas consignent tous les
itinéraires et pistes cyclables. Elles sont
complétées par une liste de 250 tuyaux
pour les excursions réalisables sur les
pistes cyclables sur tout le territoire de la
République tchèque,» dit en appréciation
de l’Atlas M. Michal Gaja, directeur du
marketnig des Editions SHOCart.
Par téléférique aux faîtes de montagnes
tout amateur. Ils permettent de réaliser des
excursions à motivation sportive, culturelle
ou thématique. Le circuit du pays de Svitavy, long de soixante-dix kilomètres, conduit
le touriste sur les traces des compositeurs
Bohuslav Martinů et Bedřich Smetana. Les
cyclistes épris de paysages pittoresques et
de bonne baignade sont attendus sur les
excellentes pistes cyclables de la Bohême
du Sud, tandis que les gourmets de caractère joyeux apprécieront les pistes du vin de
la Moravie du Sud, dans le pays de la Pála-
14
va, par exemple. Les environs d’Opava proposent un circuit «romantique» de 50 kilomètres, faisant le tour des châteaux forts et
de châteaux silésiens.
C’est le Club de touristes tchèques qui,
en collaboration avec les Editions SHOCart
Vizovice, veille à ce que tous les itinéraires
et pistes cyclables balisés soient marqués
dans les cartes. La dernière grande réalisation des deux partenaires est la la publication du Cykloatlas Česko (Atlas cycliste de
la Tchéquie). «C’est une oeuvre exception-
S’il n’est pas possible d’arriver partout
à bicyclette, on peut emporter son vélo pratiquement en tous lieux. A Prague, les cyclistes peuvent transporter leurs vélos gratuitement dans le métro. Pour les grandes
distances, c’est le train qui est particulièrement bienvenu: pratiquement tous les trains
transportent les bicyclettes, ceux qui portent le pictogramme „vélo“ pratiquent un
système symplifié de transport des bicyclettes à un prix unique correspondant à 0,75
euro à peu près. Les bureaux de location de
bicyclettes qui fonctionnent dans treize
gares ferroviaires de la République tchèque
représentent un nouveau service offert aux
cyclotouristes. Sur le vélo loué, on peut se
déplacer gratuitement jusqu’au bureau de
culture de nos pistes cyclables s’améliore
et, pendant mes excursions, je constate que
des groupes de cyclistes d’orientation différente peuvent exister les uns à côté des autres
sans se déranger,» dit Jan Svorada, le plus
célèbre de nos routiers qui est actuellement
manager de l’équipe professionnelle MTB
Merida Biking Team.
Champions dans la ville
Un Tchèque parcourt à bicyclette deux
cent kilomètres par an en moyenne et presque cinquante kilomètres pour se rendre à
son travail. Le développement plus prononcé du cyclisme et son utilisation plus générale pour se rendre au lieu de son emploi est
entravé, entre autres, par le faible prestige
de la bicyclette en tant que moyen de transport. «Beaucoup de gens continuent toujours à considérer le vélo comme un moyen
de trasport du pauvre. C’est souvent à
cause de leurs idées étranges sur leur prestige personnel, que les gens utilisent la voiture pour se rendre au travail,» estime le
cycliste amateur Jaroslav Martínek. On
distingue aussi entre le vélo destiné aux
déplacements en ville et à se rendre au travail et le vélo destiné au sport, dont le prix
est plusieurs fois supérieur. Mais il y a des
exceptions: M. Petr Vaněk, guide de touristes à Prague, fait quotidiennement un trajet
de 30 kilomètres pour se rendra dans son
bureau pragois sur sa bicyclette de course
dont le prix se situe à 4000 euros environ.
«Je le considère comme entraînement pour
les courses d’amateurs auxquelles je participe pendant les week-ends,» dit le jeune
homme qui fait partie des 1,2 % des Pragois
qui, dans la métropole bondée d’automobiles, ne craignent pas d’enfourcher leur vélo
pour se rendre au travail. La moyenne nationale est plus élevée: 7 % des Tchèques
utilisent le vélo pour se rendre au travail.
Cependant, il y a des villes où un tiers des
gens actifs utilisent leur bicyclette pour
aller au travail, telles Prostějov, Olomouc
ou Hradec Králové, par exemple.
Chaque année augmente en République
tchèque le nombre des parcours à vélo solennels en appui des transports ménageant
l’environnement. Tout le pays participe, au
mois de septembre, à la Semaine de mobilité
européenne et à la Journée sans voitures
européenne. Il est vrai que même ce jour ne
sera pas celui où les cyclistes auront le dessus
sur les automobilistes; mais la participation
est de plus en plus nombreuse et le retentissement du public de plus en plus puissant.
Ondřej Vysypal
Photos: CzechTourism,
Václav Novák.
location suivant où l’on le restitue sans être
obligé de revenir au point de départ. Même
la plupart de télécabines et télésièges acceptent de transporter les bicyclettes et les
cyclotouristes sont ravis de pouvoir atteindre «en ascenseur» les faîtes de montagnes
pour en faire le point de départ de leurs excursions. Parmi les localités connues pour
cet emploi spécial de téléfériques, rappelons les sommets suivants: Špičák dans la
Šumava, Klínovec dans les Monts Métallifères, Lysá hora dans les Beskides ou Černá
hora dans les Monts des Géants. Les partisans des disciplines cyclistes modernes, tel
les freeride ou downhill, peuvent descendre
dans la vallée en ligne droite, tant que la
piste le permet. Cependant, la plupart des
cyclotouristes préfèrent profiter de leur
séjour sur les faîtes pour jouir des vues
splendides, pour relaxer et pour faire des
randonnées en descente progressive.
La République tchèque étant un pays
avec une grande tradition du cyclisme sportif, les pistes cyclables du pays sont fréquentées par les cyclistes professionnels –
anciens et actuels. «Depuis deux années,
j’aime enfourcher alternativement le vélo
de route et le vélo de montagne et, quelquefois, je pédale même en suivant la carte,
ce qui n’était pas dans mes habitudes. La
15
Les étrangers découvrent
les rivières tchèques
C’est notamment la descente d’une rivière en été et au printemps qui est consi-
Si les Tchèques avaient fait du nautisme
depuis toujours, ce n’est qu’à l’époque du
communisme que la descente de rivières
devint une distraction vraiment populaire.
C’est que le régime totalitaire limita considérablement les possibilités de voyager
dans les années 1948-1989 et que bon
nombre des Tchèques, en remplacement
des vacances passées à l’étranger, prirent
l’habitude de faire des excursions nautiques sur les rivières tchèques pour y
trouver toutes sortes de distractions et une
sorte d’évasion du train-train de la vie.
Cependant, on se serait gravement
trompé en supposant que la chute du communisme en 1989 viderait les rivières. Il
n’en fut rien. Même avec les frontières
ouvertes, la plupart des Tchèques n’ont pas
renoncé à leur semaine sur l’eau adorée.
Les enfants font des sports nautiques dans
le cadre du programme scolaire et, par ailleurs, les parents emmènent leur progéniture sur l’eau dès que l’enfant marche.
dérée en République tchèque non pas
comme une performance sportive, mais
plutôt comme un passe-temps agréable lié
à la découverte des beautés naturelles et
des joyaux architecturaux de notre pays –
sans parler des charmes du camping et
de connaissances et amitiés nouvelles que
l’on peut y nouer. L’eau efface toute différence entre les personnes de fortune et situation sociale différentes. En descendant
une rivière, on voit dans les campements
des banquiers se lier d’amitié avec ouvriers,
politiciens avec étudiants, artistes connus
avec, disons, femmes de ménage. Tous portent des tricots dépenaillés et des fichus
sur la tête: impossible de distinguer les
nantis et les pauvres. Quand deux embarcations se croisent, leurs équipages se saluent
Avant 1989, il n’était pas facile de transporter les embarcations au bord de rivières. On les déplaçait en train le plus souvent. A l’heure actuelle, les descentes de
rivières sont devenues l’objet de l’entreprise privée. Aussitôt après la chute du
régime totalitaire, des dizaines de postes
de location de navires et d’articles nautiques sont apparus le long des rivières et
il y a eu une multiplication spectaculaire
de restaurants et de campements destinés
à recevoir les adeptes de sports nautiques.
Pour celui qui désire descendre une rivière tchèque en canot, il est inutile de s’encombrer de quoi que ce soit, sauf l’argent:
il lui suffit de venir au point de départ et il
peut louer sur place tout l’équipement.
Rien que le long de la Vltava – qui est la
Ces dernières années, les étrangers toujours plus nombreux viennent se joindre
aux dizaines de milliers des Tchèques qui
considèrent le nautisme comme un sport
quasi national et pour qui la descente de la
Vltava ou d’une autre rivière est un rituel
annuel. Certains n’ont pas de telles rivières
dans leur pays, d’autres sont simplement
attirés par la possibilité de pagayer dans
un pays étranger où les prix sont avantageux. L’eau exerce une attirance non seulement sur les sportifs rêvant de passer à
travers des rapides sauvages ou de réaliser
des performances sportives admirables.
Tout au contraire. En Tchéquie, l’eau est
recherchée traditionnellement même par
ceux qui, mis à part le nautisme, éprouvent pour le sport une véritable aversion.
Ohééé!
16
régulièrement d’un «Ohééé!» consacré; ils
passent tous la nuit sous les tentes et se
réunissent le soir autour du feu.
Les débuts de ce phénomène tchèque se
situent dans un passé relativement récent.
Tourisme
«Cà et là, des rochers surplombent les eaux qui font marcher quelques moulins solitaires. Au confluent de la Blanice et de la Sázava,
on découvre, perchées en contre-haut
de l’eau, les cabanes en poutres de
campeurs...»
plus longue des rivières tchèques – il y
a plus de 150 points de location des embarcations de tous genres et de toutes tailles. Au bout de son voyage qui peut durer
plusieurs jours, le touriste débarque et,
après avoir changé de vêtement, il est
libre de tout souci.
Ce confort omniprésent a attiré sur les
cours d’eaux même ceux qui, auparavant,
étaient découragés par les difficultés liées
au transport des canots et aux services
d’accompagnement déficients. Par contre,
les sportifs qui se vantent d’avoir leur propre navire et d’être capables de le trasporter eux mêmes au bord de l’eau, se plaignent que la rivière est bondée à l’heure
actuelle de touristes de dimanche complètement ignorants des règles du sport nautique. Il n’est pas exceptionnel de croiser
des dames navigant vêtues de robes coûteuses et des messieurs portant des chemises bien repassées. Au milieu de cette
«meute fluviale», des vieux sportifs expériementés évoluent en plongeant dans
l’eau des pagaies de bois usagées et ils
hochent la tête en regardant ce spectacle.
On ne dort guère sur l’eau
Dans le pêle-mêle de voyageurs fluviaux, une grande partie sont des étrangers
qui viennent de découvrir les charmes des
rivières tchèques. Ils représentent 20 % de
la clientèle des postes de location du matériel nautique. Pour les touristes étrangers, la descente de rivières tchèques peut
comporter, en effet, un charme insolite.
Rien que la façon dont on pratique le
sport nautique en Tchéquie constitue une
surprise pour la plupart d’entre eux. Tout
d’abord: la descente de rivières n’est pas
payante en République tchèque, il s’agit
d’un divertissement tout-à-fait libre. Ce
qu’ils économisent sur les taxes, les Tchèques le dépensent volontiers en repas ou
en bière qui coule à flots dans les campements et dans les restaurants qui bordent
les rivières. Jusqu’aux heures avancées
de la nuit on chante, on joue de la guitare
et on s’amuse bien autour du feu de camp.
Pour les étrangers de caractère sociable
et désireux de connaître tous les aspects
du caractère tchèque, il n’y a pas de milieu plus convenable que celui du peuple
d’eau qui se rassemble aux bords des rivières recherchées par les pratiquants
du nautisme.
«J’ai descendu beaucoup de rivières,
mais il n’y a pas de comparaison avec
la Vltava. Ici, il y a de la vie, tout simplement,»affirme Marcus Schneider, Allemand de 33 ans qui, depuis cinq ans, re-
17
vient chaque été à Vyšší Brod. Pendant
la saison, la rivière rappelle parfois une
autoroute bondée où les embouteillages
ne font pas défaut. Mais beaucoup de
sportifs trouvent cette situation à leur
goût. «Il y a plein de bière et de rigolade,»
dit Marcus Schneider. Avec les autoroutes, les rivières où l’on pratique les sports
nautiques ont en commun les services que
le touriste peut trouver dans la plupart
des campements et qui sont incomparablement plus variés que jadis. Il y a une
vingtaine s’années, c’est tout au plus une
saucisse à la moutarde que l’on trouvait
dans les auberges le long des rivières, ou
alors du goulasch. Aujourd’hui, la plupart
des campings propose des plats cuisinés
au choix, de la bière servie en verre et,
pour le petit-déjeuner, des croissants frais
et des beignets soufflés.
L
es touristes qui préfèrent des destinations plus paisibles pourraient êtres
pris un peu au dépourvu par les habitudes
tchèques. A l’encontre d’autres pays, les
campements de nautistes ne sonnent pas
chez nous l’extinction des feux ni n’exigent le silence de la nuit. On boit, on
chante, on joue tard dans la nuit. Le sommeil des enfants n’est guère respecté, car
on veut s’amuser. Le matin, les voyageurs
– quelquefois un peu pompettes – s’assoient dans leurs embarcations pour
mettre le cap sur le campement suivant.
Pour tout rafraîchissement, ils se contentent d’un bain de rivière.
Des forêts de la Šumava
à Český Krumlov
La descente des rivières tchèques n’est
certainement pas réservée seulement aux
amateurs des divertissements nocturnes
effrénés. En navigant, les voyageurs traversent des paysages splendides, visitent
des châteaux et châteaux forts et d’autres
monuments historiques. Pour la navigation sportive, on utilise en Tchéquie notamment les rivières du Sud du pays. Il s’agit
notamment des rivières Lužnice, Otava
et surtout Vltava. Cette dernière est la
préférée des sportifs auxquels elle offre
vraiment de tout: des sections calmes
pour les familles avec de jeunes enfants
et des rapides d’adrénaline dans le cours
supérieur. Depuis le massif de la Šumava,
on la descend par de profondes vallées
boisées où émergent de temps en temps
des châteaux forts et des châteaux. En
dépit de la grande ruée de nautistes,
les eaux de la Vltava sont toujours pures
et le voyage de Zlatá Koruna à Boršov
rappelle, sans exagérer, la navigation sur
une rivière coulant au milieu des forêts
canadiennes. On peut dire qu’au total, le
cours de la Vltava entre Vyšší Brod et
Boršov, près de České Budějovice, est
l’itinéraire nautique le plus fréquenté en
Tchéquie et, même, en Europe. Contrairement à d’autres rivières, cette section de
la Vltava est pratiquable pendant toute
l’année indépendamment du temps qu’il
fait. Dans cette partie méridionale, la
Vltava traverse la ville historique Český
Krumlov, inscrite dans la Liste UNESCO
du patrimoine culturel mondial. Le passage par le centre de Krumlov est la plus
belle impression que la rivière offre aux
sportifs qui la descendent – en dehors des
18
moulins solitaires. Ce n’est qu’au confluent avec la Sázava que l’on découvre,
perchés en contre-haut de l’eau, les cabanes en poutres des campeurs...»
Les rivières tchèques présentent l’avantage que leur descente n’est pas très difficile et qu’au bout d’une instruction sommaire même de simples amateurs peuvent
les maîtriser. Il n’y a pas de rapides et de
sauts d’eau connus de hautes montagnes.
Le seul danger présentent de temps en
temps les barrages et les pertuis d’écluses
que les voyageurs peu expérimentés devraient éviter en transportant leur embarcation par voie de terre. Pour les nautistes
chevronnés, la descente d’un pertuis peut
constituer une distraction bienvenue. Les
frais de la descente de la Vltava (quatre jours
sur l’eau, location du navire et d’autre équipement, transport, hébergement au campement, repas au restaurant, boisson comprise) correspondent aux 40 dollars par
jour. Les étrangers qui viennent de plus en
plus nombreux faire du sport nautique sur
les rivières tchèques considèrent ce prix
comme très favorable.
Marek Kerles
Journal Lidové noviny
Photos: CzechTourism, Pavel Wellner,
archives de la rédaction.
moments de «suspense», car les barrages
de Krumlov posent des problèmes même
aux sportifs chevronnés. Le barrage U plášťáku fait chavirer sept navires sur dix, et
cela sous les yeux de centaines de visiteurs de Krumlov qui aiment à observer
ce qui se passe sur la rivière.
Dans les eaux calmes
A côté de ces rivières très fréquentées,
la Tchéquie compte un grand nombre de
rivières moins passantes et plus tranquilles, dont chacune possède son charme
spécifique. Rappelons au moins la Morava, la Chrudimka, la Svratka et la Jizera.
Un beau voyage à travers la Bohême
centrale offre, par exemple, la Blanice.
Jakub Turek, rédacteur en chef du server
«outdoor» Horydoly.cz, le recommande
aux touristes en des termes lyriques: «Une
petite rivière rapide coule dans une vallée
déserte au point que l’on hésite à se croire
dans une région aussi densément peuplée
qu’est la Bohême centrale. Elle serpente
tout d’abord à travers les prés en contournant sinueusement la colline Blaník,
ensuite elle saute plusieurs barrages bien
élevés pour plonger enfin dans une vallée
boisée. Çà est là, des rochers surplombent ses eaux qui font marcher quelques
19
20
Galerie
Forêt vierge de Boubín – vieille et interdite au public
La réserve naturelle Forêt vierge de Boubín se trouve au pied de la montagne
Boubín (1362 m), du côté sud-est, et elle fut proclamée telle dès 1858. Le mérite en
revient à Josef John, inspecteur forestier de Vimperk et administrateur des forêts
du domaine des Schwarzenberg. C’est lui qui, en 1851, choisit et marqua huit étendues de forêt où les espèce primitives des forêts frontalières étaient le mieux conservées. Il proposa au propriétaire du domaine, Johann Adolf II de Schwarzenberg,
de conserver l’état primitif de la forêt. Un peu plus tard, Schwarzenberg y créa
effectivement, sur une étendue de 150 hectares environ, une «réserve naturelle privée».
En 1870, une grande partie de la forêt vierge fut détruite par une violente tempête: 47 hectares à peine se conservèrent de son étendue originelle. En 1933, la
Forêt vierge de Boubín fut classée Réserve naturelle nationale. Plus tard, l’étendue
du territoire protégé fut agrandie et elle compte actuellement 666,41 hectares.
La forêt vierge est située à une altitude de 920 à 1110 mètres. Elle se compose
avant tout de hêtres, d’épicéas et de sapins, certains dépassant l’âge de 400 ans.
Le noyau de la réserve est interdit au public. C’est que, par le passé, les foules
de touristes désireux de visiter la forêt vierge ont sérieusement endomagé – en les
damant – les racines des arbres. Ceux-ci séchaient et ne résistaient pas aux vents
et aux différents coléoptères nuisibles. Ce fut aussi le sort du «Roi des épicéas», le
plus haut épicéa de Boubín, qui s’abattit dans une tempête de neige le 4 décembre
1970. Il était haut de 57,2 m et la circonférence de son tronc était, à 1,3 m de la
base, plus de cinq mètres.
Les plus intéressants, à la Forêt vierge de Boubín, sont les arbres marqués
de déformations de croissance inhabituelles, telle la multiplication de fûts en forme
de harpe, les épicéas «échassiers» debout sur leur racines écartées et nombreuses
autres particularités de croissance. On y trouve aussi de nombreuses espèces rares
– végétales et animales.
Photos: Jan Kavale, Pavel Hubený.
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Etangs de Bohdaneč
Retour dans le paysage ouvert
Quand un territoire est en passe
d’être classé Réserve naturelle, on
s’attend généralement à ce que «tout y
sera interdit», ou que «l’on va l’entourer de barbelés», etc. On sait pourtant que la conservation du paysage ne
représente pas souvent une solution
idéale. Cela vaut pour les étangs de
Bohdaneč, une aire exploitée depuis
des siècles sans interruption. Un paysage formé par des activités humaines
diverses, que ce soit la pêche, la chasse ou l’exploitation agricole et forestière. Pour qu’il récupère son aspect
traditionnel, les protecteurs du patrimoine naturel prévoient huit étapes
d’un management écologique plus ou
moins sévère qui rendra à ce territoire
exceptionnel son caractère primitif
de paysage ouvert bien irrigué avec
des mouillères et des aulnaies et saulaies marécageuses.
22
fient. Parmi les plus rares figurent
l’aigle de mer, aigle pêcheur, cormoran grand et oie grande,« dit l’ornithologue František Bárta.
L
Hottonie des marais (Hottonia palustris).
«Les étangs représentent la localité
ornithologique la plus importante
du pays: y vivent cent trente espèces
d’oiseaux, dont quatre-vingt y nidi-
e système d’étangs, édifié au
16e siècle par Vilém de Pernštejn, fut
l’occasion de la construction de plusieurs bâtiments monumentaux au
milieu de la vallée de l’Elbe où étaient
concentrés les plus importants étangs
tchèques. Leur superficie actuelle
n’est qu’un pâle souvenir de la gloire
de jadis: l’étang Čeperka, près d’Opatovice, avait une superficie de 1000
hectares. Jusqu’à l’heure actuelle, le
système est alimenté par le Canal
d’Opatovice (construit en 1613) qui
représente, à lui seul, une merveille de
l’architecture médiévale. Bienque les
onze plans d’eau actuels ne peuvent
Nature
«Une nappe d’eau grise, répandue
au loin,
Une aigrette argentée tournant
au-dessus.
Debout sur la chaussée, protégeant
mes yeux de la main
Je regarde le paysage en silence.»
Li Po
poète chinois (701-762),
(selon la traductin tchèque
de Bohumil Mathesius)
pas égaler les deux cent trente étangs
qui y avaient existé en 1560, ils constituent une réserve naturelle d’importance européenne.
La forme envisagée de la réserve se
situe dans un contexte historique. Les
premiers travaux ont été réalisés par
l’Agence de protection de la nature
dans la seconde moitié des années
1990. Les endroits couverts de brousaille sèche ont été transformés en de
vastes plans d’eau peu profonds et
des mouillères couvertes d’herbes de
basse tige. Bientôt commencèrent à y
revenir les espèces d’oiseaux qui, pour
la tranquilité de leur nidification, ont
besoin d’une bonne vue sur les environs. Des peupliers canadiens géants,
plantés ici par quelqu’un il y a une soixantaine d’années, ont été abattus pour
que le caractère de la «péninsule Polák» ne soit pas indûment modifié. Les
enteprises privées se sont chargées du
fauchage manuel des surfaces où il y
avait eu des prés.
«Dans les années 1980, il y eut
l’élevage de la carpe et du canard.
Les excréments d’animaux ont considérablement enrichi les sédiments
au fond des étangs, ce qui a porté
atteinte à l’écosystème local. Dans
deux ans, quand on aura enlevé les
dernières des centaines de milliers
de tonnes de vase, les conditions de
vie des espèces rares connaîtront
une amélioration sensible,»affirme
Lukáš Řádek de l’Agence de protection de la nature.
Iris des marais (Iris pseudacorus).
L
es plans d’eau occupent 70 %
de la surface totale de la réserve. Le
plus vaste d’entre eux est l’étang Bohdanečský, le second en ordre de grandeur est l’étang Matka (=mère) qui a
été restauré en 1999 dans le cadre de la
campagne de revitalisation. En 2000,
on a créé dans la Baie nord-ouest une
douzaine de gours qui sont des biotopes importants pour les amphibiens
et pour les plantes aquatiques.
Les protecteurs de la nature accordent une importance clé à la communication avec les témoins qui se
rappellent l’aspect et le fonctionnement anciens du paysage, et avec les
autorités qui soutiennent le développement touristique de la région et les
contacts avec les entrepreneurs. La
station balnéaire Lázně Bohdaneč est
renommée comme un centre de rééducation recherché. Dès le début, on y fa-
Dans l’aulnaie proche du climax, on trouve toutes sortes de plantes marécageuses.
23
L’étang Bohdanečský est une halte de repos des oiseaux migrateurs.
vorise le tourisme et, comme il s’agit
d’une aire relativement peu étendue,
on insiste sur l’adjectif «doux».
«On a décidé de contenir les touristes à la limite de la réserve, de composer des itinéraires didactiques qui
les renseignent sur les faits historiques
et leur présentent une description
détaillée de la réhabilitation progressive. Dans ses phases initiales, la revitalisation avait l’air plus dramatique qu’elle ne l’était en réalité. Le
dragage a dénudé, en effet, des surfaces assez étendues, ce qui avait l’air
d’une intervention brutale dans l’écosystème de l’endroit. En réalité cependant, c’est grâce à cette façon de procéder que l’on a pu découvrir le potentiel biologique de l’endroit. Dans les
sédiments, on a découvert des spores
et des graines qui, pour commencer,
ont pu germer. Là où l’on a recommencé à faucher, des orchidées et des
fougères rares sont apparues au bout
de deux ans,» dit Jiří Veselý, auteur du
projet de revitalisation.
G
râce aux étapes bien réfléchies
et bien minutées de l’intervention de
l’homme, on peut voir dans l’aire non
seulement des espèces animales et
végétales bien rares, mais on peut y
observer aussi le dynamisme de l’évolution naturelle du paysage. A cet
effet, on a créé dans la région deux
24
Roitelet (Regulus regulus).
Mésange à moustaches (Panurus biarmicus).
Troglodyte (Troglodytes troglodytes).
Gorgebleue à miroir (Luscinia cyanecula).
sentiers didactiques et deux tours
d’observation. La ville de Bohdaneč a
aménagé pour les curistes de petites
aires de repos sur ces sentiers. Avec
le temps, ils se sont bien intégrés au
paysage et sont devenus pour les curiste un parcours apprécié. Le plus
intéressant du point de vue touristique
est la Péninsule Polák d’où l’on peut
observer l’intérieur de la réserve sans
qu’il soit nécessaire d’y entrer. Aussi
y a-t-on dressé un belvédère. On y organise au printemps et à l’automne
des Fêtes du chant d’oiseaux, très appréciées du public. Des centaines de
personnes y défilent pendant trois
heures sans que le calme de la réserve
s’en ressente. Cela indique que c’est
un endroit idéal pour être utilisé de
la façon proposée par les sites ornithologiques d’Autriche ou d’Europe
occidentale.
De quoi a l’air le tourisme didactique de ce type? Par des sentiers cachés,
les visiteurs s’approchent des points
d’observation masqués. A l’aide d’un
ses qualités primitives. Du point de
vue touristique, les étangs sont quelquefois désignés comme des „pièces
rares oubliées“. «Sur la nature, les enfants y apprennent plus qu’au zoo. Il y
a une autre raison encore d’en faire la
destination d’une promenade à pied
ou à bicyclette: il n’y a pas, pour le
moment, de foules de touristes, de restaurants, de kiosques à souvenirs et de
parkings bondés,» estime Martin Biben, journaliste de Pardubice.
Fête du chant d’oiseaux annuelle.
téléscope puissant monté sur pied, ils
peuvent observer la vie des oiseaux.
En plus, des destinations touristiques
de ce genre gardent leur attractivité
touristique toute l’année durant.
D
ans la seconde moitié des années 1990, on a commencé à faire
pression pour obtenir l’intégration de
la grande mouillère de Bohdaneč dans
le réseau international de territoires
particulièrement précieux – Aires spécialement protégées. Au bout de plusieurs années de monitorage, cette initiative a abouti. En tant que zone ornithologique précieuse, elle a été jointe
au système auropéen Natura 2000.
Elle y a été inscrite comme zone unique de distribution du râle tacheté et
du butor grand. Au cours de la revitalisation, on a découvert d’autres
espèces d’oiseaux rares. Ainsi, les
grues cendrées sont venues dans la
localité et une paire y niche de façon
certaine trois ans de suite.
«Le retour de la richesse générique
d’oiseaux rares, leur identification et
leur monitorage ne seraient pas possibles sans la coopération d’ornithologues amateurs. C’est à eux que l’on
doit la réalisation des prises annuelles
d’oiseaux dans la localité. Au cours
de deux mois d’un travail de terrain
épuisant, on a pris dans les filets de
trois à cinq mille oiseaux. C’est ainsi
que l’on a pu constater l’arrivée dans
la localité des espèces extrêmement
rares, telles lusciniole à moustaches
ou bergeronnette citrine» vante sa collaboration avec les fervents amateurs
Jiří Veselý. «C’est ma communication
avec les „amateurs“ qui m’a apporté
les plus beaux moments de mon travail. Je tire mon chapeu à ces ornithologues excellents qui travaillent avec
abnégation pour l’aire de Bohdaneč
et auxquels on doit la naissance des
ouvrages spécialisés de qualité. Ma
plus grande récompense, c’étaient les
moments passés en compagnie de
quatre ornithologues d’un certain âge
au milieu de la réserve de Bohdaneč
en observant l’arrivée des premières
grues cendrées dans l’aire de Bohdaneč. On a commencé par dire: „Quels
drôles de hérons.“ C’était un sentiment
vraiment solennel d’entendre leur
„sonnerie“ significative annonçant leur
intention de nidifier dans la localité.»
L’aire de Bohdaneč a une importance européenne aussi pour les entomologistes, botanistes et zoologistes.
La population du très rare crapaud
sonneur à ventre de feu compte ici plusieurs milliers d’exemplaires. Il y a
aussi la libellule leucorrhinia à gros
thorax et deux de cinq espèces de polyommates menacés en Europe: azuré
des paludes et azuré de la sanguisorbe.
Le potentiel biologique de l’Etang
de Bohdaneč est bien ouvert vers le
futur et on a réussi à rétablir très vite
T
out le programme de revitalisation est financé exclusivement des ressources du pays et il est aujourd’hui
réalisé à moitié. «Il s’agit en principe
du flux de l’énergie dans le paysage,
dans lequel l’eau, le soleil, la terre
et les organismes vivants jouent leur
rôle chacun... Un management sage
peut arriver à ce que les entrées de
l’homme dans la réserve de Bohdaneč
soient de moins en moins fréquentes et
que ses interventions soient de moins
en moins dramatiques. On aura un
type rare de paysage culturel équilibré
et exploité, par dessus le marché, pour
l’agriculture et pour l’élevage. Un type
de paysage difficile à trouver ailleurs,»
affirme M. Veselý.
Michal Klíma
Photos: Jiří Veselý, František Bárta, Zuzana
Růžičková, Lukáš Řádek, Agence de protection
de la nature et du paysage de la RT.
Contrôle régulier des populations d’oiseaux.
25
Succombant à l’appel des lointains
«Le développement du scoutisme ne laissa
pas indifférente la partie des jeunes qui, dans
cette période primordiale, n’avaient pas la
possibilité de devenir membres de l’Union des
scouts ou qui, influencés par la lecture des
écrits de Karl May, refusaient la discipline
scoute et préféraient flâner dans une liberté
absolue.» Voilà la descripion des débuts de la
mode du camping, donnée en 1940 dans L’histoire du camping par son auteur Josef Peterka,
un des gourou de campeurs tchèques, mieux
connu sous son surnom de Bob Hurikán.
C’est un paradoxe que c’est grâce aux communistes – dont les sentiments vis-à-vis des
campeurs n’ont jamais été bien tendres – que
le camping a connu dans les décennies suivantes un épanouissement impressionnant. Les
séjours dans la nature, le jeu à „la liberté“ de la
vie des trappeurs ou vagabonds américains
étaient une sorte d’évasion des contraintes
omniprésentes du régime.
La dernière vague (pour le moment) de l’immense popularité du camping se situe dans
les années 1980. Chaque vendredi après-midi,
la gare de Bráník pragoise offrait à cette époque le spectacle d’une activité fiévreuse du
26
chef de gare. C’est que cette gare, point de départ du fameux Posázavský pacifik (=rapide de
la vallée de la Sázava), était bondée de jeunes
gens en tenue de cow-boy ou militaire, équipés
de guitares et avec d’indispensables havresacs
«usárna» (selon U.S. Army) sur le dos: une
enième génération de campeurs partait pour le
bassin de la Rivière d’or (Sázava), de la Grande rivière (Vltava) et des forêts de Brdy.
Jarda converti en Harry, Pepík en Bob
En Tchécoslovaquie, le camping commença
il y a cent ans ou, plus exactement, dès avant
la Première guerre mondiale, donc sous l’Autriche-Hongrie. Les premiers campeurs se recrutaient parmi les partisans du mouvements
scout commençant.
«Les Tchèques sont des romantiques, ils ont
le désir des pays lointains,» affirme Stanislav
Motl, reporteur de la chaîne TV Nova qui avait
fait du camping pendant de longues années.
Par ailleurs, il est l’auteur de la préface et de
l’épilogue de l’ Histoire de Bob Hurikán. Pendant notre entrevue au café Slavia, à Prague,
il nous dit qu’à son avis, parmi les premiers
campeurs, il y avait aussi des «cadres verts»,
c’est-à-dire les hommes qui étaient allés au
régiment en 1917 et, à la fin de la guerre, sont
restés dans la forêt. Il y furent rejoints par des
jeunes toujours nouveaux qui étaient sous le
charme des livres de Karl May, des histoires
de cow-boys et des films sur le Far West.
«Du jour au lendemain, les Anička, Mánička et Boženka devenaient Annie, Mary, Bobina
ou alors Daisy, Betsy et Virginia. Pour les gar-
Phénomène
Tramp – (‘vagabond’ en anglais) nom
que l’on donne aux excursionnistes faisant régulièrement du camping dans la
nature et se distinguant des scouts par un
caractère très relâché (...) On combat les
excès du mouvement de campeurs au
moyen d’une surveillance exercée dans
les forêts et aux bords de rivières par la
gendarmerie ou par les gardes forestiers.
(...) Le mouvement de campeurs a même
créé son propre argot grotesque et publie
ses propres périodiques.
Dictionnaire encyclopédique Masaryk,
tome 7, Prague 1933
çons, c’était pire encore. Jarda
se convertissait en Harry, Pepík
en Bob, Ota en Brandy, Zdeněk
en Poing de fer ou Wintrop,
Eddie ou encore Swenny, Grizzly,
Bill, Old Shatterhand, Farnum,
Dawson, Jack, etc. Nourrie par
les westerns, la fantaisie avait le
champ libre,» dit Bob Hurikán en
parlant de cette période du camping tchèque, désignée comme
«époque des scouts sauvages».
L’époque qui suivit était celle
«des cow-boys» (1919-1927). Il
paraît que «nulle part dans le
monde, il n’y avait alors autant de shérifs
qu’en Bohême. Il n’y avait pas de bande sans
shérif et, même, pas de couple sans shérif.
Ce titre se gagnait par le droit du plus fort,
ou alors par le vote.» On portait des chemises
bigarrées, «on se coiffait de vieux feutres habilement transformés en stetsons authentiques et
on embellissait les larges ceintures de caboches
de tapissier.» Cependant, son nom tramping,
le camping tchèque l’emprunta au roman
Le voyage de Jack London, et cela pendant la
période suivante appelé «époque canadienne».
On faisait du camping même pendant la Seconde guerre mondiale, bien qu’à une échelle
réduite. Les nazis occupèrent, par exemple,
une vaste partie des vallons au confluent de
la Sázava avec la Vltava et les tramps durent
abandonner les colonies qui s’y
trouvaient. Après février 1948,
le camping fut de nouveau mis à
l’index, de même que le scoutisme. La presse publiait des articles
selon lesquels l’ère des campeurs
avait pris fin en Tchéquie. Mais
le nouveau boom n’était pas loin:
au tournant des années 1950 et
1960, les gares et les forêts se
remplirent de nouveau pour inaugurer une nouvelle période du
camping – son «âge d’or».
Mugissements
sourds du Niagara
«Sur les bords de la Sázava, il y avait des
tas de chalets, ce qui représentait pour nous
tout ce qu’il y avait de pantouflard. Nous,
on allait par principe «refiler la comète».
A Mokropsy, tiens, ce qui est aujourd’hui à
Prague. Mais aussi à Roztoky, à Křivoklát,»
dit le Capitaine Kid, campeur chansonnier
dont le vrai nom est Jaroslav Velinský.
Jan Vyčítal, autre musicien campeur, est
arrivé au camping avec l’aide de son frère
aîné, membre d’un club de garçons campeurs.
Il y était «plutôt à peine toléré par son frangin
en tant que son cadet» et ce n’est qu’à l’âge
de 16 ans que ses parents l’ont autorisé de
faire sa première «vadrouille». C’était en 1957
27
et Vyčítal était coiffé «d’un chapeau bricolé
aux bords relevés, portait une chemise à carreaux, pantalon de survêtement et des bottes
d’agriculteur.» Ce n’est que plus tard que le
survêtement fut remplacé par «une culotte de
cheval et une veste à franges faites par ma
mère avec les restes de drapeaux de pionniers.» En dehors du camping sauvage, les
campeurs se réunissaient lors des fameuses
«causettes». L’organisation de ces rencontres
était assez lâche. «Les bandes se connaissaient
les unes les autres. Les shérifs n’étaient pas
sans savoir ce que deviennent les autres. En
plus, chacune avait son journal, appelé jacteur. Et quand on rencontrait quelque part un
campeur et qu’on le trouvait sympathique, on
lui disait: jacte- moi quelque chose. Moi, je
dessinais des images, d’autres écrivaient. En
tout cas, on notait toujours le contact, de sorte
que l’on pouvait se faire savoir les nouvelles
les uns aux autres, explique Jan Vyčítal.
Chanter des chansons au feu de camp, voilà
qui constituait une partie importante du programme des causettes. Différentes bandes de
campeurs rivalisaient les unes avec les autres
pour la meilleure exécution d’un numéro musical. Cependant, même à l’âge d’or du camping, la plupart des campeurs se contentait de
naïves chansons romantiques composées dans
les années 1930 par Bob Hurikán ou Eduard
Ingriš (auteur du célèbre Niagara). Certaines
chansons composées dans les années 1960 et
1970 furent adoptés pour être chantées au feu
de camp. En 1967 apparut tout-à-fait spontanément Porta, festival de la chanson de campeurs.
A l’apogée de sa popularité – en 1989, ce festival de la chanson folk attira 30 000 visiteurs.
La musique jouée et chantée au feu de camp
par les jeunes campeurs actuels a beaucoup
changé elle aussi. «Les pièces comme Niagara
ou Caisse à whisky ne sont plus jouées et il
n’est pas rare d’entendre au feu de camp la
musique pop actuelle – celle du groupe Buty
ou «Amerika» du groupe Lucie. Le compartimentage n’a aucun sens,» déclare Michael
«Tony„ Antony de l’association Avalon, représentant de la «jeune» génération de campeurs.
Rafles nocturnes dans les forêts de Brdy
En expliquant pourquoi ils avaient succombé au charme du camping dans les années
1950, 1960 et 1970, les vieux campeurs évoquent non seulement ses aspects romantiques
et leur enchantement par la nature, mais aussi
le fait que c’était la période où le régime totalitaire régnait dans le pays. «Aller dans les
bois, c’était la seule chose que l’on pouvait
faire à l’époque. C’était si libre. Un remontant, quoi,» dit le campeur surommé Klondike
qui a toujours encore l’air d’être sorti des
illustrations de certains livres de Karl May,
28
Vyčítal en se rappelant les amusements de la
police communiste.
Le système poussa même quelques-uns des
campeurs tchèques à l’émigration. Ces émigrés organisaient par la suite des causettes mondiales en Suisse, en Australie ou au Colorado...
La dernière de ces causettes a eu lieu en novembre 2006 au Texas.
Fin des cow-boys
en Tchéquie?
Impossible d’établir,
combien de personnes
ont fait du camping sur
le territoire de la Tchéquie. Il n’y a pas de statistiques. C’est Bob Hurikán mentionné plus
haut qui fut le dernier à s’essayer, en 1940,
à un dénombrement. Après le dernier raz de
marée consécutif à la révolution de 1989 où,
cependant, les chapeaux de cow-boy et les
vestes à franges ont été progressivement remplacés par des uniformes américains, il faut se
rendre à l’évidence: le camping traditionnel est
en stagnation. Michael „Tony“ Antony de l’association Avalon, représentant de la «jeune» génération de campeurs, affirme néanmoins que
«pour plusieurs décennies à venir, il y aura des
campeurs, bien que cela ne soit pas un mouvement de masse.» Comme argument il avance
que, pour la revue Puchejř (=ampoule) qu’il
publie et qui est le périodique de campeurs le
plus lu, son adressier compte vers 4000 personnes. «Quand on organise la Ruée vers l’or
(rencontre de campeurs
aux fins d’orpaillage),
les deux kilomètres de
la rivière sont occupés
par 300 orpailleurs,
mes cadets pour la plupart.» Quant à lui personnellement et à ses
amis, ils ne portent plus
le chapeau de cow-boy et
ont renoncé à beaucoup
d’autres attributs de campeur, jadis indispensables.
«La mode de westerns est
en régression même en ce qui concerne la cinématographie et le cow-boy n’est plus depuis longtemps le héros des jeunes,» admet Jan Vyčítal.
Mais il n’est pas pessimiste. «Il y a toujours des romantiques impénitetns qui viennent au monde. Le
temps des westerns a passé, mais je vois toujours
des tas de petits scouts qui, dès qu’ils en auront
l’âge, feront de nouveaux campeurs sauvages.
Petr Kolář
Lidové noviny
Photos: Tomki Němec (noir et blanc), Petr
Havelka, archives de Zdeněk «Britt» Moidl.
dessinées par Zdeněk Burian. Coiffé d’un
feutre noir, barbe mal rasée, visage tanné. En
février dernier, sa colonie Louisiana Tigers a
célébré «son vingtième feu», c’est-à-dire son
vingtième anniversaire.
Un plein contrôle des campeurs étant impossible, les communistes ne voulaient pas les
laisser en paix. Pour disperser les causettes, on
faisait intervenir non seulement la police, mais
encore la Milice populaire destinée officiellement à la surveillance des usines. Vers la fin
des années 1970, les miliciens firent même
sauter quatre dizaines de chalets de campeurs
dans les Brdy. Les détachements armés du régime «s’amusaient» souvent à «accueillir» les
campeurs à la gare de départ: «Ayant encerclé
la gare de Bráník, ils obligeaient tous à défaire
leurs havresacs et les fouillaient en mettant
tout sens dessus dessous. S’il trouvaient un
couteau, ils le brisaient; ils découpaient les
symboles indicateurs des manches et tout ce
qui cmportait les lettres U.S.» raconte “Job„
Veselka, témoin de la répression. «Ils faisaient
même des rafles de nuit à travers la forêt. Pendant les causettes, ils entraient en quatrième
vitesse en cassant tout; ils frappaient les participants et les transportaient en plusieurs
endroits éloignés quelquefois cinquante kilomètres les uns des autres, pour qu’ils ne puissent pas se rassembler de nouveau,» dit Jan
29
Gars de la rivière» oubliés
«
En 1970 eut lieu le dernier en date
flottage du bois en République
tchèque. «Sur le pré de Vyšší Brod, on
avait lié pendant une semaine un
radeau de 120 mètres, dit train. Tous
les travaux avaient été exécutés par
des techniques traditionnelles. Les
troncs furent liés à l’aide de harts en
des radeaux individuels, dits tables,
que l’on nouait ensemble, toujours
avec des harts, pour en former le
train. Les rames furent faites à la
hache et, pendant toute la construction du train, on n’utilisa pas un seul
clou, pas un seul morceau de fil de fer.
La construction du train et sa navigation sur la rivière furent tournées par
une équipe de cinéastes qui eurent
l’occasion unique d’enregistrer toutes
les nuances de ce métier ancien,» se
30
souvient Václav Hodr, un des derniers
flotteurs du bois de la Vltava.
Ce fut la fin officielle du métier
dont l’essor est attesté dès 1316 par
un privilège du roi Jean de Luxembourg. Mais il y a des mentions plus
anciennes: elles concernent les droits
de douane et de péage et remontent à
la fin du 11e siècle. Le transport du bois
par voies fluviales restées les mêmes
pendant des centaines d’années finit
par être rendu impossible par la construction de barrages dans la seconde
moitié du 20e siècle.
L
Construction d’un radeau «sur le canal en contrebas
de la maréchalerie Na Pátečku».
a Vltava avec ses affluents –
Malše, Lužnice, Otava, Sázava et Berounka – avait depuis toujours des conditions idéales pour le développement
Entrée dans le pertuis du barrage de Dobronice.
Sortie du pertuis du barrage de Dobronice.
Entrée dans le pertuis du barrage endommagé de Žďákov, sur la Vltava.
Travail avec les rames de l’avant dans les flots en aval du barrage
de Žďákov, sur la Vltava.
Tradition
Štěchovice, sur la Vltava, au tournant des années 1930 et 1940.
«Hourra, les gars, hourras camarades,
le jour est venu,
que demain, de bon matin, nous partirons d’ici.
Les trains sont prêts, les rames sont
fixées,
Que le bon Dieu nous donne la santé
pour arriver au port
hourra, pour arriver au port.»
Chanson des flotteurs
d’équipes de flotteurs étaient unis par
d’étroits liens de parenté. A la tête de
l’équipe, il y avait le huissier, flotteur
le plus expérimenté jouissant d’une
autorité naturelle. Il était titulaire d’un
Diplôme d’huissier qui n’était pas
facile à acquérir: pour l’obtenir, il fallait plusieurs jours pendant lesquels
le candidat devait faire preuve d’une
connaissance vaste et précise des règlements, de la navigation pratique et
de la situation sur toute une section
de la rivière.
du flottage en trains. C’est le roi Charles IV qui fit la première tentative réussie de rendre navigable le cours
inférieur de la Vltava en aval de Prague. Depuis 1340 des documents
écrits attestent l’existence d’un office
de meuniers jurés, chargé de superviser les cours d’eau de Bohême.
En 1575, le flottage de radeaux
fut déclarée entreprise libre. Selon
les comptes tenus par le péager d’Orlík, 12 000 tables de radeaux passaient
annuellement, au 16e siècle, de la Bohême du Sud en direction de Prague,
ce qui correspond à près de 140 000
troncs d’arbres. Les radeaux transportaient du fret: le commerce du sel
et d’autres marchandises dépendait
du flottage.
A
près avoir navigué sur la Vltava, David Schor, spécialiste hydrotechnique du 18e siècle, élabora tout
d’abord le projet d’enlèvement des
rochers se trouvant dans le lit de la
rivière et, en 1729, il construisit sur
la Vltava le sas de Županovice, le premier en Europe cenrale.
L’âge d’or du flottage vint au 19e
siècle et se prolongea jusqu’au milieu
du 20e siècle. C’est l’époque où la
maîtrise de la construction de radeaux
et de la commande de trains sur la
rivière atteignit son point culminant.
A l’époque de cet épanouissement
C
suprême, de nombreux trains continuaient leur voyage au-delà de Prague pour descendre en Allemagne,
qulques-uns jusqu’à Hambourg. A
partir de 1902, on avait recours aussi
au remorquage. C’est l’époque où les
ethnographes firent les premières tentatives de décrire l’univers spécifique
des «gars de la rivière»
Les flotteurs avaient leur vocabulaire spécifique, mais aussi une tradition soigneusement ciselée de leur métier et de sa sagesse, des légendes, des
superstitions et des fêtes qu’ils prenaient soin de transmettre aux générations suivantes. Le métier de flotteur
restait «dans la famille» et les noyaux
Orlík sur la Vltava au tournant des années 1920 et 1930.
haque étape du parcours et différentes activités d’accompagnement
trouvaient leur reflet dans des chansons généralement bien joyeuses. Les
lieux d’arrêt étaient prévus dans la
proximité d’une auberge, dans un endroit propice à l’attachement des trains.
Différentes équipes de flotteurs avaient leurs haltes préférées où les aubergistes les accueillaient comme des
membres de famille. Après le dîner,
on buvait de la bière et de l’eau-de-vie
et on chantait des chansons de flotteurs avec accompagnement d’accordéon. Pour la nuit, on s’étendait sur
les botte de paille de seigle.
Dans la journée, le train ne pouvait
pas s’attarder; aussi les flotteurs en
voyage anonçaient-t-ils de loin leur
arrivée à l’aubergiste. Leur hurlement
retentissait fort au-dessus de l’eau et
31
En contrebas d’Orlík.
Troncs d’arbres préparés pour être liés en radeaux.
Vyšší Brod, 1955.
avertissait l’aubergiste d’apporter au
bord de l’eau de quoi manger et de la
bière. Pendant les crues, cependant,
même cela n’était pas possible et les
flotteurs devaient se contenter d’une
soupe bien simple (ou même d’un café)
préparés sur le feu à même le radeau.
E
«
n voilà encore un coup de fini»
disaient les flotteurs après la descente
réussie d’un train de bois. Quand l’année était favorable, une équipe expérimentée était à même de réaliser vingt
coups. Pour leur dur travail, les flotteurs recevaient un bon salaire, ce qui
les portait parfois à l’orgueil et à la
forfanterie. Leurs gains élevés n’étaient pourtant que relatifs. Il fallait
naviguer par pluies ininterrompues,
par intempéries de printemps et d’automne. De temps en temps, l’eau prenait son dû quand il y eut la noyade
d’un flotteur. En plus, ils étaient sans
aucun revenu pendant tout l’hiver.
Dans la vallée de la Vltava, la locution suivante fit fortune: «La femme
du flotteur est sans homme en été et
sans argent en hiver.»
Štěchovice, premières années 1930.
E
n parlant de son père Matěj, un
des flotteurs les plus célèbres de la
Vltava, l’héritier des la tradition familial Josef Štofl se souvient des paroles
que son père lui avait souvent répétées: «Sur l’eau il faut savoir supporter des tas de choses; en revanche , on
est son maître.» Chez les flotteurs,
il y avait un cérémoniel d’admission
dans leur corporation de nouveaux et
de benjamins désirant exercer ce dur
métier – le baptême. Il se déroulait à
l’auberge sous la direction d’un parrain
qui donnait au baptisé trois coups de
verge sur le derrière. Faisait partie de
la tradition aussi le respect religieux
pour la rivière. En entrant dans les
32
Týn nad Vltavou au tournant des années 1920 et 1930.
Na Pátečku.
Avant l’achèvement de la colossale
digue d’Orlík en 1960, les derniers
radeaux passèrent par un pertuis
dont la largeur n’était que de sept mètres. Debout sur leurs radeaux, les
navigateurs étaient mouillés jusqu’à
la taille. Telle fut la fin du flottage
de bois tchèque.
D
eux musées rapellent la gloire
de cet ancien métier. A Hluboká nad
Vltavou, au quartier de Purkarec, il
y a une Salle du flottage de bois. On
courants Svatojánské proudy, rapides
les plus puissants de la Vltava, les
vieux flotteurs se découvraient, les plus
anciens se mettaient même à genoux
pour prier. Ils connaissaient de nom
et apostrophaient les blocs de pierre
dangereux se dressant dans le lit de la
rivière et avaient des tas de dictons
indiquant à quelle heure de la journée
il est recommandable de naviguer dans
tel endroit et quels sont les dangers à
éviter dans tel autre.
Dans les années 1951-1953, à la
veille de la construction des barrages
gigantesques, on tourna dans les environs de Zvíkov un film qui, une fois
pour toutes, glorifia le flottage de bois
tchèque. Il s’agit de Plavecký mariáš
(=brisque des flotteurs) du réalisateur
Václav Wasserman. Le film fut créé
en collaboration avec «les Štofl», clan
de flotteurs de Zvíkovské Podhradí.
Parallèlement à la fermeture consécutive de l’écoulement des grands barrages, la tradition millénaire du flottage tchèque s’éteignait. La nouvelle
Cascade de la Vltava comporte neuf
barrages, dont les premiers avaient été
édifiés dans les années 1930. Sa construction se solda par la destruction de
nombreuses localités uniques, naturelles et historiques, tels les rapides Svatojánské proudy et de nombreux villages et hameaux.
y trouve l’outillage et tout le fourbi
dont on équipait les radeaux, objets
d’usage courant ainsi que des licences
de flottage originales, dites diplômes
d’huissier.
C’est Prague, cependant, qui possède le musée du flottage le plus
important. Il se trouve dans le bâtiment de l’ancienne douane de Výtoň
qui est tout ce qui s’est conservé de
Podskalí, ancien village de pêcheurs.
Le principal objet que l’on y expose
est un modèle fidèle du train de radeaux, des outils de flotteurs et une
paire unique de rames de radeau que
l’on a découvertes par hasard dans le
grenier lors de la reconstruction récente de l’ancienne douane. Mais il y
a aussi de nombreuses curiosités à
voir, telle la maquette du village de
Poskalí aux environs de 1870, l’ancre
de remorqueur ou la caisse du poste
de douane de Výtoň.
František Velek
Sources: La Vltava disparue (Jan Čáka), Moi,
flotteur que la rivière fait vivre (Vladimír
Scheufler, Václav Šolc)
Photos: archives de Vojtěch Pavelčík,
archives de l’association Vltavan.
«La vieille Hájková garde le bois sur les radeaux près de Podskalí.»
Le dernier radeau sur la Vltava. 1971.
33
Sous le ciel bleu...
Petra Jeřábková s’est placée première dans
le concours «Les Métamorphoses.»
...est le titre du concours artistique international pour les enfants réunissant le travail
artistique avec la technique informatique.
C’est un concours exceptionnel, unique en
son genre pour le moment.
L’idée du concours appartient à Hana Horská, artiste connue par des expositions de ses
ouvrages à l’étranger. Institutrice à l’Ecole
primaire Palacký de Moravská Třebová, elle
est organisatrice principale du concours
qu’elle a réalisé pour la première fois en
2006 à l’échelle nationale.
Personne ne se doutait que, dès sa première
édition, le concours artistique aurait un tel
retentissement. Vu son succès, l’Ecole primaire Palacký, en collaboration avec Microsoft Česká republika, OR-CZ, S.A.R.L., et avec
l’administration de la ville, a conçu la IIe édition du concours comme internationale.
2000 ouvrages présentés annuellement au
concours démontrent que celui-ci jouit d’un
grand intérêt. L’année dernière, le concours
avait pour thème «Le Paysage de mes rèves»;
celui de cette année – «Les Métamorphoses» –
a littéralement donné des ailes à la fantaisie
des enfants qui ont su réunir de façon brillante
Markéta Přikrylová s’est placée troisième dans
le concours «Les Métamorphoses.»
leur vécu intérieur avec le regard plastique et
exprimer le tout dans le cadre du programme
Peinture élémentaire du système opérationnel Windows. Ils ont démontré ainsi tant leur
talent artistique que leur savoir-faire dans
le travail sur ordinateur. Le concours continuera l’années scolaire prochaine et les organisateurs accueilleront avec plaisir les travaux
des enfants d’autres pays.
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Première Tchèque
et maire de Prague sur
le mont Everest
Klára Poláčková, 28 ans, qui travaille
à l’heure actuelle à Londres comme conseillère, a atteint le 16 mai 2007 le sommet
de la montagne la plus élevée du monde,
donc l’altitude de 8850m. Elle a été accompagnée pendant cette escalade par
deux sherpas et par Tachi Tenzing, petitfils du célèbre Tenzing Norkey qui, en
compagnie du sir Edmund Hillary, réalisa
la première conquête du mont Everest
en 1953.
Klára Poláčková a à son actif l’escalade
de l’Aconcagua (6962 m) en Argentine et
celle de Tcho Oju (8201 m) au Népal.
Deux jours après elle, le maire de Prague Pavel Bém a atteint lui aussi le sommet de la montagne en devenant ainsi le
dixième Tchèque pouvant admirer le panorama que l’on peut contempler du haut
du toit du Monde.
Un musée du
cyclisme est né
La ville de Zlín a blanchi
le nom de J.A. Baťa
En face du gratte-ciel de Zlín, on vient
d’inaugurer une statue en bronze haute de deux
mètres de Jan Antonín Baťa, demi-frère de
Tomáš Baťa, créateur des fameuses usines de
la chaussure.
Soixante ans sont passées cette année depuis
le pronocé du verdict par lequel le Tribunal
national condamna J.A. Baťa par contumace
à la peine de 15 ans de prison et à la perte des
biens pour haute trahison présumée.
«J’ai confiance que le complot communiste
de 1947 sera réparé. Mon oncle était un patriote,» a déclaré à l’inauguration Tomáš Baťa,
neveu du condamné. C’est lui qui a adressé à
la justice tchèque une demande de révision du
procès, dont il attend le blanchissement du nom
de son oncle.
Jan Antonín Baťa prit la direction des usines
Baťa en 1932, après la mort tragique de son
demi-frère Tomáš. «La statue est un geste
de réparation, dont la ville de Zlín réhabilite
l’ancien directeur,» a déclaré le sculpteur Radim Hanke, auteur de la statue.
Etoile nommée
JRM
Le grenier à blé baroque, dans l’aire
du château Nové Hrady, est devenu
le Premier musée du cyclisme tchèque.
Y sont exposés les objets de la collection privée d’un vélocipédiste qui se
dédie à ses activités de collectionneur
dès ses 15 ans.
Le musée abrite une collection représentative de premiers vélocipèdes
remontant pour la plupart aux temps de
l’Autriche-Hongrie. Il y a deux présentations panoramiques: l’une rappelle la
période des deux guerres mondiales, la
seconde propose une visite d’un atelier
de réparation historique et d’un magasin de bicyclettes original, datant des
années 1930. Aux étages supérieurs du
grenier, on est en train d’aménager une
exposition consacrée aux courses cyclistes modernes. Il y aura aussi un
manège pour enfants et un cinéma où
l’on passera des films historiques aux
thèmes cyclistes.
Une étoile nouvelle est apparue sur les ovales
de dirt track: de l’usine JAWA Divišov, le plus
grand producteur mondial de motocyclettes de
course sur piste, sortent depuis juillet les machines portant la marque JRM. «La fin juin est la
date d’expiration du contrat de licence pour la
marque Jawa.» Voilà l’explication du changement
de marque donnée par Karel Horčička, vice-président du management de l’usine.
L’établissement fabrique chaque année de
400 à 460 motocyclettes de dirt track. Pendant la
saison prochaine, les machine JRM (Jawa Racing
Motorcycles) seront montées par des sportifs tels
que le Danois Hans Anderson, le Slovène Matej
Zagar ou les Tchèques Zdeněk Schneiderwind et
Luboš Tomíček.
Mosaïque
Journées de Prague
ont surpris Chicago
a assisté lui-aussi aux fêtes et a souligné
notamment les bonnes relations entre la
Tchéquie et les Américains qui se réclament de leurs racines tchèques. Dans
les années 1930, la communauté tchèque de Chicago comptait vers 500 000
membres; aujourd’hui, 150 000 habitants
de la ville se considèrent héritiers de la
nationalité tchèque.
Dans le cadre des festivités, le public
américain a pu profiter des Journées du
film tchèque où le réalisateur Jan Hřebejk a présenté, entre autres, son film
Pupendo en première américaine. Un
grand retentissement a provoqué l’exposition de gravures originales d’Oldřich
Kulhánek. C’est pour la première fois
que cet artiste ait exposé ses dessins qui
ont servi de base pour les billets de banque tchèques. Le journal Chicago Tribune a chanté les louanges de «l’effet artistique suprême».
Adieu à Luboš
Hruška
Les fêtes des Journées de Prague ont
apporté à Chicago de l’ahurissement et
des surprises agréables. Tout d’abord,
les habitants de cette ville américaine
ont été choqués par la sculpture de
l’«Homme suspendu», par David Černý,
présentant les traits de Sigmund Freud,
natif de Příbor en Moravie. Au moment
de son inauguration solennelle audessus de la Michigan avenue, le 28 juin
2007, le service de secours de Chicago a
été bombardé par une vague d’appels
effrayés de la part des gens craignant
pour le sort du présumé pendu.
Cependant, le programme des Journées de Prague a honoré avant tout la mémoire d’Antonín Čermák, maire tchèque
de la ville: on a solennellement rendu
son nom à l’une des artères les plus animées de la ville. Pendant le cérémoniel,
l’actuel maire de Chicago Richard Daley a rappelé l’influence dont les immigrés tchèques ont marqué l’aspect et la
vie de la ville: «Les Tchèques avaient
une influence immense sur l’édification
de la ville; c’étaient d’excellents architectes, ingénieurs et hommes d’affaires.» Le maire de Prague Pavel Bém
Le maire de Prague Bém au milieu de résidents
tchèques pendant la soirée de gala Prague dorée.
Canne à pêche
automatique
Tomáš Nezval, 19 ans, élève de l’Ecole industrielle secondaire de Prostějov,
a remporté une distinction et une récompense financière à la Foire internationale scietifico-technique Intel ISEF,
aux Etats-Unis.
Il a conçu et confectionné une canne
à pêche automatique qui, à l’aide d’un
microprocesseur, prend les poissons toute
seule. Ce dispositif convient à la pêche
d’hiver où le mouvement de l’appât est
programmable au besoin.
Le prix a été accordé dans la catégorie
Igéniérie électrique et mécanique. Sont
venus rivaliser à la foire 1500 jeunes
scientifiques et inventeurs de 51 pays
du monde.
Gare ancienne
rénovée
Luboš Hruška s’est éteint à Plzeň, à
l’âge de 80 ans. Prisonnier politique de
longues années, il est le créateur d’un jardin de méditation unique – le Mémorial
des victimes du mal – et titulaire de nombreux prix et distinctions, l’Ordre T.G.
Masaryk y compris.
C’est en secret et avec ses propres
moyens que Luboš Hruška commença à
édifier, vers la fin des années 1980, son
Jardin de méditation en tant que rappel des
souffrances de ceux qui s’étaient opposés
aux régimes totalitaires. Les sculptures
en grès du Chemin de la Croix sont dues
au sculpeur Roman Podhrázský. Après la
révolution de novembre 1989, une Fondation du Mémorial des victimes du mal est
née et une nouvelle chapelle a été construite.
Aujourd’hui, l’aire du jardin sert au public
aux fins religieuses et culturelles.
Dans le cadre du concours Grand Prix
des architectes 2007, un prix dans la catégorie Reconstruction vient d’être attribué
au bâtiment de la gare Ostrava-Svinov renové selon le projet de Václav Filander.
La gare, négligée depuis des décennies,
était dans un état de grand délabrement, notamment après que fut abattue
sa façade historique dans les années
1970. Les inondations de 1997 portèrent
à l’édifice le coup fatal.
La gare a été reconstruite dans son
aspect primitif et, en plus, elle a été flanquée d’un nouveau hall d’entrée vitré.
Le hall étant transparent au maximum,
la façade de la «vieille gare» est visible
non seulement dans la journée, mais
aussi de nuit.
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L’association pragoise Vltavan
a survécu à tous les régimes
«Le premier mai, pour la cérémonie annuelle de l’inauguration de la saison de navigation, ils forment la haie d’honneur devant
le bateau historique Vyšehrad, homme et
femme alternativement ou, comme ils disent,
frère et soeur. En grande tenue, ils portent une
ceinture d’apparat et, aux épaules, l’inscription Vltavan Praha en applique. Les personnes unies par l’amour de la rivière Vltava.»
C’est ainsi que le reporteur Adam Pražák décrit
sa rencontre avec Vltavan, la plus ancienne
association du pays.
Vltavan existe depuis 1871 et, tout récemment, elle a célébré les 135 ans du fonctionnement ininterrompu. Contrairement aux
autres associations, tels les Sokols, ses activités
n’avaient pas été interrompues sous le régime
communiste. Ses traditions étant liées au commerce et au flottage de bois, l’association fut
fondée par quatre-vingt trois flotteurs, marchands de bois et pêcheurs, mais avait parmi
ses fondateurs le maire de Prague František
Dittrich et même des aristocrates – les frêres
Adolf et Karel Schwarzenberg.
L’association avait été fatalement liée à l’espace où la rivière arrive au contact lyrique du
centre de Prague – à celui du quartier disparu
Membre de l’association Vltavan, peinture
de Kamil Lhoták. 1980.
Les membres fondateurs de l’association Vltavan étaient flotteurs, marchands
de bois et pêcheurs. Vente du poisson en hiver sur un terrain d’alluvion.
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de Podskalí, victime des démolitions brutales
des années 1905-1910 entreprises dans le cadre
de l’assainissement de vieux quartiers de
la ville. Seul le bâtiment de l’ancien poste de
douane Na Výtoni, siège de l’association Vltavan, est resté debout. Le nom rappelle le výton,
droit de douane fluvial perçu à cet endroit
depuis 1088 sur l’ordre de Vratislav II, premier
roi de Bohême. A l’heure actuelle, il abrite l’exposition du Musée de la ville de Prague, consacrée à l’histoire régionale et aux traditions
du flottage et de la navigation sur la Vltava.
«L’association et ses traditions sont présentes
non seulement dans l’exposition elle-même,
mais sont rappelées aussi par de nombreux
objets que l’on voit dans l’auberge de Podskalí, cabaret de style où se réunissent «les gars
vivant de la rivière,» dit Zuzana Strnadová,
directrice du Musée de la ville de Prague.
Dès sa création, l’association Vltavan orienta son activité sur la charité et l’aide mutuelle,
animées du patriotisme et du dévouement à la
Navire funèbre pendant la cérémonie annuelle en l’honneur des noyés.
Années 1970.
Vltavaniens pragois en excursion sur la Vltava, accompagnés de la fanfare de l’association. Štěchovice, 1905.
Société
«Notre nation étant sortie de l’assoupissement, l’éclair illumina aussi
les coeurs des fils de notre Podskalí
et leur inspira l’idée de faire naître
de la Vltava le père Vltavan pour
qu’il n’abandonne pas les fils de
Podskalí tombés malades, qu’il
accompagne à leur dernier gîte les
défunts, qu’il guérisse les estropiés,
qu’il soutienne les vieux et qu’il préserve ainsi de la misère...»
Introduction au Livre d’or
de l’association Vltavan
cause nationale. Les temps où la
prévoyance sociale déficiente et les
conditions de vie pénibles exigeaient l’entraide sociale entre les
«frères flotteurs» ayant passé, la
conception des activités caritatives
de Vltavan a changé. Aujourd’hui,
l’association coopère activement
avec l’organisation d’enfants handicapés «Avec toi le monde est
amusant». Le patriotisme marque
le cérémoniel d’ouverture du bal
annuel de l’association, le plus
ancien en République tchèque. La
fête commence par la chanson «Ma
belle Bohême» chantée en choeur. «Nous formons tous ensemble une communauté pragoise
typique qui, en dépit de difficultés, a une vision
optimiste de la vie,» dit le frère Jaroslav Vopravil, un des chroniqueurs de l’association.
Un tiers seulement des membres de l’association sont professionnellement liés avec la
rivière. La qualité de membre est souvent héréditaire dans les familles. «Quand j’enseignais à Podskalí, il y a des années, les belles
traditions liées à la Vltava étaient presque palpables dans les familles de mes élèves. J’ai
passé des moments splendides en descendant
les rivières tchèques et j’ai eu la chance de descendre la Vltava avec les flotteurs sur un train
de bois juste avant la construction des barrages sur la rivière. Cela a été une expérience
extraordinaire: le point d’arrivée était encore à
l’endroit traditionnel Na Výtoni...» se souvient
Michal Basch, ancien maire de l’arrondis-
Premier drapeau de l’association , datant de 1872.
Il est appelé «historique» ou «Jéžíš» (=Jésus).
Emblème de Vltavan peint par Karel Svolinský en 1976.
sement Prague 2 dont l’aire de Podskalí fait partie.
Pendant toute la durée de son
existence, l’association resta obstinément attachée à ses usages historiques. Sous le régime socialiste,
les fêtes de l’association furent réalisées sous l’enseigne de «fêtes de
la paix». Après l’abolition de l’association de maîtres nageurs et
baigneurs, elle se chargea de l’organisation de cérémonies funèbres en
l’honneur des noyés, organisées
chaque année le premier dimanche
après la Toussaint.
«Le premier novembre 1930, des hommes de
la rivière se réunirent dans le cabaret U Riehsů, à Podskalí, et décidèrent d’honorer chaque
année la mémoire de ceux que la rivière avait
emportés. Les frères Jandáček, maîtres nageurs
des Bains jaunes, pensaient aux garçons qu’ils
avaient tirés de l’eau cette année en aval de Zlíchov. Les flotteurs pensaient à leurs camarades
morts par noyade. Les marins du St.-Georges,
bâtiment de combat, pensaient à leurs compagnons d’armes de Boka Kotorská (=Bouches
de Kotor). C’est le marin Škába qui alla le plus
loin: jusqu’à Shanghaï.» C’est ainsi que l’écrivain Adolf Branald décrit la naissance de cette
tradition. Dans un essai de son livre Hommes et
navires sur la Vltava, il donne la description du
déroulement actuel de la cérémonie: «En
amont – à Štěchovice – les flotteurs jettent dans
la rivière une couronne d’asters blancs (...) Sur
la jettée, la garde d’honneur avec le président
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Rencontre des membres de l’association Vltavan avec le président Václav Klaus et son épouse Livia. 2005.
de l’association en tête forme la
haie aux sons de la fanfare de
Vltavan. Quand le navire funèbre
accoste le quai, on en retire les
couronnes et on les accroche sur
la statue de la Vltava aux sons
des chorales Col Slaven. Des gens
traversant le pont et ceux qui passent sur le quai se joignent à la
cérémonie, il y en a même qui se
découvrent, mais à part cela le
trafic continue en haut, on entend
les voitures et les trams et, sur la
rivière, le mouvement continue.
On a l’impression, cependat, que
dans la fraction de temps la plus
silencieuse, au moment où l’âge révolu s’est confondu avec le nôtre, quelque chose s’est fait
entendre avec insistance venant de la statue.»
L’association participe annuellement à la traditionnelle course Huit du maire de Prague, compétition à l’aviron des huit avec barreur organisée
depuis 1910. Pour le reste de l’année, les activités
associatives s’orientent plutôt vers la distraction:
inauguration saisonnière du transport fluvial saisonnier entre Prague et Slapy, accompagnée de
musique et beaucoup de chant; ou voyage au bord
du bateau Tyrš, navire de l’association, aux sons
de la musique country. Mais la manifestation
principale de l’année, c’est la Rencontre de Podskalí orientée sur le public pragois. Les participants peuvent visiter le musée, écouter la musique
de la vieille Prague, faire une ballade en bateau,
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assister au spectacle de gardes-nationaux historiques... «Et écouter d’émouvantes mélodies de
notre orgue de Barbarie, utilisé aux grandes
occasions exclusivement,» ajoute Karel Mikšovský qui est aussi capitaine du bateau Tyrš.
Parmi les objets faisant partie des traditions de
Vltavan comptent quatre drapeaux dont le plus
ancien est une véritable pièce unique. «Le premier drapeau de l’association porte le nom Jésus
et il fut consacré lors du premier anniversaire
de sa fondation en 1872. Son poids approche
les trente kilos et, donc, le porte-drapeu qui le
porte pendant les solennités doit être non seuleent
un homme respectable, mais encore un vrai
hercule,» explique Václav Hodr, vice-président
de l’association. «Avec le respect scrupuleux des
statuts, l’emblème et le titre de frère et soeur, les
drapeux et l’uniforme constituent les symboles les plus marquants. En les respectant, on ne
témoigne pas seulement de son
appartenance formelle à l’association, mais d’une réelle liaison affective et de la fierté du
passé et du présent de l’association,» ajoute Jiří Mejstřík, un
autre historien de l’association.
Le ravissant costume porté
par les membres de l’association est vraiment peu habituel.
Il est dérivé de l’uniforme des
marins de la marine marchande
française, le blanc et le rouge
étant les couleurs renvoyant à la lutte d’indépendance par rapport à l’Autriche-Hongrie.
Les traditions de Vltavan ont inspiré de
nombreux artistes. L’emblème actuel de l’association a été dessiné par Karel Svolinský,
tandis que Kamil Lhoták a représenté un
«Vltavanien» modèle en costume se tenant au
bord de la rivière.
La moyenne d’âge des membres de l’association approche aujourd’hui la soixantaine.
Même au sein de Vltavan on admet que, pour
les jeunes, les activités associatives n’ont
plus le même attrait que jadis. Mais on est
convaincu que les bonnes traditions trouvent
toujours des continuateurs.
Rédaction
Photos: archives de l’association Vltavan.
Les membres de Vltavan rencontrent le cardinal Miloslav Vlk au pèlerinage des saints Pierre et Paul. Vyšehrad, 2002.
Heart_5_07_OB 1_4.qxd:Heart 1_07_titulka
12.9.2007
15:03
Stránka 2
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přeskládaná historie
the rearranged history
11. 9.– 20. 10. 2007
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www.galerieart.cz

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