Petit déjeuner Actualités fiscales 2015 – 2016
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Petit déjeuner Actualités fiscales 2015 – 2016
ACTUALITÉS 2015-2016 FISCALITÉ DES ENTREPRISES 17/12/2015 APDC – RÉUNION MENSUELLE Alain Recoules Avocat associé [email protected] Thomas Mercey Avocat [email protected] SOMMAIRE 2 PROPOS LIMINAIRES THÈME 1 : (UN) PEU DE CHANGEMENT 1. 2. 3. 4. PLFR 2015 PLF 2016 PLFSS 2016 ACTIONS GRATUITES ET LOI MACRON DU 6 AOÛT 2015 THÈME 2 : REMISE EN CONFORMITÉ DES TEXTES 1. INTRODUCTION DU RÉGIME D’INTÉGRATION FISCALE HORIZONTALE PAR LA PLFR 2014 : RETOUR SUR LES COMMENTAIRES - AVANTAGES (LIMITÉS) ET INCONVÉNIENTS (INDUITS) SUITES DE STÉRIA : SUPPRESSION DE LA NEUTRALISATION DE LA QPFC DANS L’INTÉGRATION FISCALE - LES CONSÉQUENCES IMMÉDIATES – STÉRIA DANS LE CADRE PLUS GLOBAL DE LA DÉSTRUCTURATION DU RÉGIME DES GROUPES D’INTÉGRATION ADMINISTRATIFS 2. THÈME 3 : CONTRÔLE FISCAL 1. 2. 3. 4. 5. CORRECTION SYMÉTRIQUE DES BILANS ET « DROIT À L’OUBLI », CE 11 MAI 2015 N°370533 NOUVELLES PRÉCISIONS SUR LA DÉDUCTIBILITÉ DES RETENUES À LA SOURCE ÉTRANGÈRES, CAA, 7E CHAMBRE, 17 SEPTEMBRE 2015 N°15VE00985 L’IMPOSSIBLE RÉCUPÉRATION DES PERTES D’UNE FILIALE ÉTRANGÈRE, CE 15 AVRIL 2015 N°368135 AGAPES CLARIFICATION DES MODALITÉS D’IMPUTATION DES DÉFICITS, CE 10 AVRIL 2015 N°369667, PLÉN. SOCIÉTÉ FAYAT MODALITÉS D’IMPUTATION DES DÉFICITS SUR UNE BASE ÉLARGIE ET POSSIBLE REMISE EN CAUSE D’UN RÉGIME TROP FAVORABLE? PROPOS LIMINAIRES TENDANCES ET CONTEXTE Tendance à l’allègement de la charge d’impôt des entreprises Les mesures de soutien aux entreprises (CICE, Pacte de responsabilité et de solidarité, suramortissement, mesures pour les TPE et les PME...) représenteront un allègement de la fiscalité de 33 milliards d'euros en 2016 et d'environ 41 milliards en 2017. De plus, le CICE et le Pacte devraient permettre la création de 500 000 emplois et de rehausser l'activité de 1,7 point, à l'horizon 2020. • La contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), payée par environ 300 000 entreprises, sera supprimée d’ici 2017 ; • La contribution exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés (IS) prendra fin en 2016 ; • Le taux nominal de l’IS baissera progressivement de 33⅓ % actuellement à 28 % en 2020, avec une première étape dès 2017. Renforcement de la lutte contre la fraude et l’optimisation fiscales Mise en œuvre du reporting pays par pays dans le PLF 2016, publication des montages frauduleux; etc. Mise en conformité du droit français avec le droit de l’Union européenne Suites de Stéria… et fin ? (issue du contentieux contribution 3% ?) 3 4 THÈME 1 : UN PEU DE CHANGEMENT THÈME 1 : (UN) PEU DE CHANGEMENT 1. PEU DE MESURES FISCALES DANS LE PLFR 2015… (1/2) Retour sur les mesures phares en cours d’examen… Suites de Stéria : suppression de la neutralisation de la QPFC afférente aux dividendes dans un groupe intégré L’amendement prévoit de supprimer la neutralisation de la quote-part de frais et charges afférentes aux dividendes versés entre sociétés d’un même groupe. Toutefois, « compte tenu du coût que représente cet aménagement pour les groupes fiscaux », le gouvernement propose « d’abaisser à 1 % le taux de la quote-part de frais et charges afférente aux dividendes éligibles au régime mère-fille que perçoivent les sociétés membres d’un groupe d’autres membres du groupe ou de sociétés établies dans un autre État de l’Union ou de l’Espace économique européen ». Dividendes distribués à une société mère européenne : le régime de faveur serait aménagé Les régimes d’exonération des revenus distribués applicables aux sociétés mères et filiales seraient ouverts aux sociétés mères détenant des titres en nue-propriété et complétés d’une clause anti-abus conforme à la directive mère-fille. Les cas d’exclusion du régime applicable aux dividendes distribués à une société mère française, supprimés l’an dernier en raison de la censure du Conseil constitutionnel, seraient réintroduits. Il n’y aurait pas de réintégration d’une exclusion générale, mais la réintégration des exclusions spécifiques prévues antérieurement (exclusion des dividendes versés par les sociétés d’investissement et de développement régional ; exclusion des dividendes versés par les SIIC). L’exonération de retenue à la source actuellement prévue par la doctrine administrative en faveur des sociétés mères européennes détenant une participation comprise entre 5% et 10% serait, par ailleurs, prévue désormais par la loi. 5 THÈME 1 : (UN) PEU DE CHANGEMENT 2. PLF 2016 : PRINCIPALES MESURES INTÉRESSANT LES ENTREPRISES ET LES DIRIGEANTS (1/2) Lutte contre la fraude et l’optimisation fiscales L’amendement du PLF 2016 met à la charge de certaines entreprises une obligation de transmission d’informations financières (bénéfice, chiffre d’affaires, effectif, etc.) avec une répartition pays par pays à l’administration fiscale. L’amendement ne concerne, pour le moment, que les groupes établis en France réalisant plus de 750 millions d’euros de chiffre d’affaires HT consolidé et détenant ou contrôlant une ou plusieurs entités juridiques ou succursales établies hors de France. L’obligation déclarative concernera les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2016. Pour les grandes entreprises, l’obligation déclarative relative à la politique de prix de transfert, instaurée par la loi relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière du 6 décembre 2013, devra être transmise par voie électronique et la société mère des groupes de société devra déposer une déclaration pour chaque entité du groupe. Un amendement au PLFR 2015 prévoyait par ailleurs un champ d’application encore plus large : • Les entreprises concernées par le reporting pays par pays auraient été celles dépassant 2 des 3 seuils suivants : chiffre d’affaires net : 40 millions € ; total du bilan : 20 millions € ; effectif : 250 salariés. • Les données communiquées auraient été rendues publiques. Pour des raisons tenant tant au nombre d’entreprises qui auraient été concernées qu’au risque de compétitivité qui auraient pu peser sur les entreprises françaises du fait de la communication des informations, l’amendement a été retiré. 6 THÈME 1 : (UN) PEU DE CHANGEMENT 7 Modernisation et réduction de la fiscalité des entreprises dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité La contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), payée par environ 300 000 entreprises, sera supprimée d’ici 2017 : • Une première réduction équivalente à 1 Md€ est intervenue en 2015 sous la forme d’un abattement qui a permis à deux tiers des assujettis, des petites et moyennes entreprises (PME) de ne plus payer cette contribution ; • Un deuxième abattement sera mis en place en 2016, exonérant ainsi 80 000 entreprises de taille intermédiaire (ETI), pour ne conserver que 20 000 entreprises assujetties. La contribution exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés (IS) prendra fin en 2016 ; Le taux nominal de l’IS baissera progressivement de 33⅓ % actuellement à 28 % en 2020, avec une première étape dès 2017 ATTRIBUTIONS GRATUITES D’ACTIONS ARTICLE 34 DU PROJET DE LOI DITE « LOI MACRON » Grandes lignes de la réforme : Avant Régime fiscal pour les salariés Régime social Conditions de détention Gains d’acquisition et de cession soumis à l’IR selon deux catégories différentes (TS/PV de cession de valeurs mobilières) Pour les bénéficiaires Pour les entreprises Contribution salariale de 10% due lors de l’acquisition et recouvrée à la date de cession des titres et soumission des gains d’acquisition à la CSG et CRDS Contribution patronale de 30% due à la date d’attribution des titres Durées minimales d’acquisition et de détention de 2 ans chacune Après Gains d’attribution et de cession imposés selon les modalités applicables aux PV mobilières Pour les bénéficiaires Suppression de la contribution salariale spécifique et soumission des gains d’acquisition aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine (15.5%). Pour les entreprises Abaissement du taux de contribution patronale à 20% due à la date d’acquisition des titres par la salarié et mise en place d’une franchise de cotisations par salarié pour les PME n’ayant jamais versé de dividendes Durée minimale d’acquisition de 1 an et somme des durées d’acquisition et de détention de 2 ans minimum THÈME 1 : (UN) PEU DE CHANGEMENT 4. ACTIONS GRATUITES ET LOI MACRON DU 6 AOÛT 2015 9 Réforme « Macron » applicable aux plans d’AGA décidés en AG après le 6 août 2015 01.01.2016 01.01.2017 01.01.2018 Plus-value de cession Action ordinaire Gain d’acquisition Période de conservation (1 an minimum) Période d’acquisition (1 an minimum) Mise en place du plan Attribution définitive des actions Traitement social Calcul du gain d’acquisition Traitement fiscal Déduction éventuelle de la moins-value par la société correspondant au prix de rachat de ses propres titres attribués aux bénéficiaires du plan Contribution patronale spécifique de 20% sur valeur à la date d’attribution Point de départ de la durée de détention pour le calcul ultérieur des abattements Cession des actions Imposition du gain d’acquisition et de la plus-value de cession - Prélèvement sociaux : 15,5% Imposition du gain d’acquisition et de la plus-value de cession - Impôt sur le revenu (jusque 45%), après application des abattements pour durée de détention sous réserve du respect d’une période de conservation minimum de 2 ans - Contribution exceptionnelle sur les hauts revenus : 3%/4% 10 THÈME 2 : REMISE EN CONFORMITÉ DES TEXTES THÈME 2 : REMISE EN CONFORMITÉ DES TEXTES 1. INTRODUCTION DU RÉGIME D’INTÉGRATION FISCALE HORIZONTALE PAR LA Intégration fiscale horizontale en cas de détention directe PLFR 2014 : RETOUR SUR LES COMMENTAIRES Intégration fiscale horizontale entre deux sociétés « cousines » détenues par une « grand-mère » non résidente Entité non résidente (UE) 95 % Entité non résidente (UE) 95 % 95 % Tête de groupe (France) 95 % F1 (France) Périmètre de l’intégration fiscale ADMINISTRATIFS 11 95 % F2 (France) Société étrangère 1 (UE) 95 % Tête de groupe (France) Société étrangère 2 (UE) 95 % F1 (France) Entité mère non résidente Société ou établissement stable soumis à un impôt équivalent à l'IS français dans l’UE en Islande, en Norvège ou au Liechtenstein dont le capital ne doit être détenu, sauf exception, à 95 % au moins, directement ou indirectement, ni par une autre personne morale soumise à l'IS ou à un impôt équivalent à l'IS dans l’un des Etats précités. Société étrangère Société ou établissement stable soumis à un impôt équivalent à l'IS français dans un Etat de l'UE, en Islande, en Norvège ou au Liechtenstein, par l'intermédiaire duquel l'entité mère non résidente détient indirectement à 95 % au moins la société mère. L'administration admet que la détention de la société étrangère par l'entité mère non résidente soit indirecte, i.e., par l'intermédiaire d'autres sociétés étrangères, de sociétés membres du groupe ou de sociétés intermédiaires. L'établissement stable d'une société française ne peut pas être entité mère non résidente ou société étrangère. THÈME 2 : REMISE EN CONFORMITÉ DES TEXTES 1. INTRODUCTION DU RÉGIME D’INTÉGRATION FISCALE HORIZONTALE PAR LA PLFR 2014 : RETOUR SUR LES COMMENTAIRES ADMINISTRATIFS 12 Grandes lignes Des retraitements sont à effectuer à raison des opérations réalisées par les sociétés membres du groupe avec l'entité mère non résidente et les sociétés étrangères. Sortie spécifique aux groupes horizontaux : une société membre n'est plus détenue directement ou indirectement à 95 % par l'entité mère non résidente (BOI-IS-GPE-40-10 n° 10 à 40). Outre les cas identiques à ceux d'un groupe vertical, plusieurs autres cas de cessation propres aux groupes horizontaux existent : Option d'une personne morale, autre que la société mère, pour devenir société mère du groupe (BOI-IS-GPE-40-10 n° 112). Option pour la formation d’un nouveau groupe fiscal vertical ou horizontal effectuée par la société mère L’option ne permet pas de constater un stock de déficits d’intégration horizontale qui serait né avant la réforme et qui serait imputable sur le résultat du groupe nouvellement créé. THÈME 2 : REMISE EN CONFORMITÉ DES TEXTES 1. INTRODUCTION DU RÉGIME D’INTÉGRATION FISCALE HORIZONTALE PAR LA PLFR 2014 : RETOUR SUR LES COMMENTAIRES ADMINISTRATIFS 13 Passage d’un groupe horizontal à un groupe vertical Principe Lorsque le capital de la société mère d'un groupe vertical est détenu ou vient à être détenu dans les conditions prévues pour les groupes horizontaux, elle peut entrer dans le groupe formé par la société mère du groupe horizontal, ou se constituer elle-même société mère d'un tel groupe. Précisions administratives Une société qui en remplit les conditions peut ne pas former un groupe horizontal ou ne pas rejoindre le groupe horizontal formé par une autre société. Dans ce cas, elle peut demeurer, ou se constituer, société mère d'un groupe vertical si elle en remplit les conditions. Ultérieurement, si les autres conditions sont toujours satisfaites, elle pourra former ou rejoindre un groupe horizontal, avec les sociétés membres de son groupe. Ces dispositions permettent d'atténuer les conséquences de la cessation d'un groupe vertical lorsque sa société mère forme un groupe horizontal ou rejoint un groupe horizontal, alors qu'elle était déjà détenue dans les conditions prévues pour les groupes horizontaux avant l'entrée en vigueur de l'article 63 de la loi 2014-1655 du 29 décembre 2014 (BOI-ISGPE-50-60-30 n° 90). THÈME 2 : REMISE EN CONFORMITÉ DES TEXTES 2. SUITES DE STÉRIA : SUPPRESSION DE LA NEUTRALISATION DE LA QPFC DANS L’INTÉGRATION FISCALE Retour sur la décision Stéria (CJUE 02/09/ 2015, Stéria) Rappel des faits et de la procédure La société Stéria détient des participations dans des sociétés établies en France et dans d’autres Etats membres de l’UE, qui lui versent des dividendes. La société a introduit une réclamation contentieuse car elle considère que la règlementation française viole la liberté d’établissement consacrée en droit de l’UE, dans la mesure où la déduction de la QPFC lui est refusée pour les dividendes distribués par ses filiales établies dans un autre Etat membre, alors qu’elle y aurait été éligible si ces filiales avaient été établies en France. La réclamation a été rejetée. Le litige est aujourd’hui porté devant la CAA de Versailles. Question préjudicielle posée par la CAA de Versailles à la CJUE : La différence de traitement fiscal des dividendes reçus par une société mère d’un groupe d’intégration fiscale en fonction du lieu d’implantation de sa filiale est-elle contraire à la liberté d’établissement ? Solution de la CJUE La Cour considère que la règlementation française en cause désavantage les sociétés mères qui détiennent des filiales établies dans d’autres Etats membres, ce qui est de nature à rendre moins attrayant l’exercice par ces sociétés de leur liberté d’établissement, en les dissuadant de créer des filiales dans d’autres Etats membres. Un amendement déposé par le Gouvernement au PLFR 2015 prévoit de supprimer la neutralisation de la quote-part de frais et charges sur dividendes intragroupe, réduite corrélativement de 5% à 1%. Ces aménagements s’appliqueraient aux exercices ouverts à compter du 1-1-2016. 14 15 THÈME 3 : CONTRÔLE FISCAL THÈME 3 : CONTRÔLE FISCAL 1. CORRECTION SYMÉTRIQUE DES BILANS ET « DROIT À L’OUBLI », CE 11 MAI 2015 N°370533 Contexte et faits Le « droit à l’oubli » est prévu à l’article 38, 4 bis du CGI : la règle d’intangibilité du bilan d’ouverture du premier exercice non prescrit peut être écartée lorsque l’entreprise apporte la preuve qu’une erreur qu’elle a commise est intervenue plus de sept ans avant l’ouverture du premier exercice non prescrit. En pratique, cette règle permet de réparer les erreurs commises plus de 10 ans avant la rectification (7 ans + délai normal de reprise de 3 ans). En l’espèce, à l’occasion d’une vérification de comptabilité, l’administration a remis en cause la déduction d’une provision comptabilisée par une société au titre d’une créance douteuse détenue sur sa filiale : provision constatée à la clôture de l’exercice 1994 et ayant fait l’objet d’une dotation supplémentaire à la clôture de l’exercice 1995 Pour éviter le rehaussement, la société se prévalait du « droit à l’oubli » sur cette provision. 16 THÈME 3 : CONTRÔLE FISCAL 1. CORRECTION SYMÉTRIQUE DES BILANS ET « DROIT À L’OUBLI », CE 11 MAI 2015 N°370533 Solution du Conseil d’Etat Le CE valide la position de l’administration et juge que l’inscription non justifiée en provision d’une somme pendant plusieurs exercices successifs, même si les montants sont identiques, constitue la répétition d’une erreur : Ainsi cette erreur, même commise pour la première fois au cours d’un exercice clos plus de sept ans avant l’ouverture du premier des exercices non prescrits, ne peut être corrigée dans le bilan d’ouverture du premier de ces exercices ; Le CE en conclut que la société ne pouvait pas se prévaloir du « droit à l’oubli » dès lors que l’erreur tenant à la déduction de la provision litigieuse, si elle est intervenue la première fois plus de sept ans avant l’ouverture du premier exercice non prescrit, a été répétée à la clôture de tous les exercices suivants. Portée de la décision Cet arrêt met fin aux positions jurisprudentielles divergentes sur cette question. Décision conforme aux règles comptables : l’entreprise doit réexaminer chaque année si une provision doit être maintenue inchangée au bilan, faire l’objet d’une dotation supplémentaire ou être reprise (article 324-1 du PCG). L’erreur est commise lors de l’inscription initiale et à chaque nouveau bilan dans lequel la provision est maintenue. La position du CE ne s’applique qu’aux provisions non justifiées. 17 THÈME 3 : CONTRÔLE FISCAL 2. NOUVELLES PRÉCISIONS SUR LA DÉDUCTIBILITÉ DES RAS ÉTRANGÈRES, CAA 7E CHAMBRE, 17 SEPTEMBRE 2015 N°15VE00985 Contexte et faits Le service vérificateur a estimé que la société L'Oréal avait perçu des revenus de ses filiales étrangères qui n'étaient, en réalité, pas imposables dans la catégorie des redevances, ainsi que l'avaient fait les États étrangers, mais dans celle des bénéfices. Il a, dès lors, considéré que sur le fondement des stipulations des différentes conventions fiscales applicables (article 7), les revenus étaient imposables en France. Il en a tiré comme conséquence que les impôts payés à tort à l'étranger n'étaient déductibles ni sur le fondement du 4° de l'article 39 du CGI ni sur le fondement de la stipulation de la convention fiscale visant à éviter les doubles impositions. La question était relative à la possibilité de déduire ces impôts étrangers acquittés à tort sur le terrain des conventions fiscales conclues par la France avec un certain nombre d'États. Certaines conventions fiscales excluent expressément la déductibilité des impôts étrangers et sont rédigées selon le modèle suivant : « Les bénéfices et autres revenus positifs qui proviennent de [l’Etat X] et qui y sont imposables conformément aux dispositions de la Convention, sont pris en compte pour le calcul de l'impôt français lorsqu'ils reviennent à un résident de France. L'impôt [étranger] n'est pas déductible de ces revenus. Le bénéficiaire a droit à un crédit d'impôt imputable sur l'impôt français correspondant à ces revenus. » Une interprétation littérale des clauses de non-déductibilité prévues dans les conventions rédigées sur ce modèle permet de considérer que ces restrictions ne sont applicables que dans les situations où les revenus sont imposables à l’étranger en raison d’une application conforme des conventions. 18 THÈME 3 : CONTRÔLE FISCAL 2. NOUVELLES PRÉCISIONS SUR LA DÉDUCTIBILITÉ DES RAS ÉTRANGÈRES, CAA 7E CHAMBRE, 17 SEPTEMBRE 2015 N°15VE00985 Solution du tribunal administratif non remise en cause par la CAA En l’espèce, confronté à une convention rédigée sur ce modèle, le tribunal administratif de Montreuil (TA Montreuil, 1er décembre 2014 n°1301376, SA L’Oréal) a considéré que les stipulations conventionnelles restreignant la déductibilité des impôts prélevés à l’étranger sur des revenus provenant de l’étranger n’étaient pas applicables car ces impôts étrangers avaient été appliqués en violation des stipulations de la convention, lesquelles réservaient un droit exclusif d’imposition à la France. Dans ces conditions, le tribunal a admis la déduction du résultat imposable en France les impôts acquittés à l'étranger au titre des années 2007 et 2008. L’administration fiscale a fait appel de ce jugement et a obtenu gain de cause devant la Cour administrative d’appel de Versailles. Toutefois, le litige n’a pas remis en cause les principes dégagés par le tribunal administratif de Montreuil, seul le quantum des décharges d’impositions a été modifié. Dès lors, cet arrêt de la Cour administrative de Versailles ne semble pas remettre en cause l’interprétation littérale susvisée. La DVNI a eu l’occasion de préciser que des discussions informelles avaient lieu avec la centrale, et qu’une solution intermédiaire pourrait être que la société qui supporte de telles retenues à la source puisse doter une provision (déductible), en adressant par ailleurs un courrier aux administrations étrangères contestant le principe de la retenue à la source effectuée, et en envoyant copie à leur SIE. 19 THÈME 3 : CONTRÔLE FISCAL 3. RÉCUPÉRATION DES PERTES D’UNE FILIALE ÉTRANGÈRE, CE 15 AVRIL 2015 N°368135 AGAPES Contexte et faits En l’espèce, la société française Agapes avait réclamé à l’administration fiscale l’imputation sur le résultat de son groupe fiscal intégré, les pertes de sa filiale polonaise et de sa sous-filiale italienne détenues à plus de 95% et qui n’étaient plus imputables sur leurs bénéfices du fait de l’expiration des délais de report des pertes dans leur Etat de résidence. La société Agapes se fondait sur l’arrêt Marks & Spencers (CJUE 13 décembre 2005 C-446/03). L’administration considère que la jurisprudence Marks & Spencer ne trouve à s’appliquer qu’à la situation d’une filiale faisant l’objet d’une liquidation. L’administration se fonde aussi sur l’article 223 A du CGI ; le régime d’intégration fiscale permettant la prise en compte par est réservé aux seules sociétés soumises à l’IS en France. Elle rappelle l’arrêt X Holding BV lequel a validé le dispositif de « tax unity » néerlandais qui empêche la constitution d’une entité unique avec une filiale non résidente. Question posée au Conseil d’Etat : l’impossibilité pour une société française d’imputer sur ses résultats les pertes subies par ses filiales dans d’autres Etats membres de l’Union européenne, compte tenu du périmètre territorial du régime de l’intégration fiscale de l’article 223 A du CGI, estelle contraire à la liberté d’établissement? 20 THÈME 3 : CONTRÔLE FISCAL 3. RÉCUPÉRATION DES PERTES D’UNE FILIALE ÉTRANGÈRE, CE 15 AVRIL 2015 N°368135 AGAPES Solution du Conseil d’Etat Le Conseil d’Etat applique le principe de l’arrêt X Holding BV au dispositif d’intégration fiscale français. En France, une société mère ne peut imputer les pertes subies par une filiale sur le résultat d’ensemble du groupe fiscal intégré qu’en application de ces dispositions. Toutefois, l’intégration fiscale est réservée aux sociétés et établissements dont les résultats sont soumis à l’impôt sur les sociétés en France. Or, en vertu des principes posés par l’arrêt X Holding BV, les dispositions de l’intégration fiscale française ne sont pas incompatibles avec la liberté d’établissement. Le Conseil d’Etat estime qu’il « n’incombe pas à l’Etat de résidence de la société mère d’assurer la neutralisation de la charge fiscale que la société filiale supporte ou supportera du fait de la décision de l’Etat membre ou elle réside elle-même, au titre de l’exercice de sa compétence fiscale, de limiter le droit d’imputer les pertes subies ». Pas de prise en compte du caractère inutilisable ou définitif des pertes. Le CE exclut en tout état de cause la possibilité d’imputation des pertes définitivement tombées en non valeur dans un autre Etat membre dès lors que cette circonstance est le fait de la législation de l’Etat membre en cause. 21 THÈME 3 : CONTRÔLE FISCAL 4. CLARIFICATION DES MODALITÉS D’IMPUTATION DES DÉFICITS, CE 10 AVRIL 2015 N°369667 PLÉNIÈRE SOCIÉTÉ FAYAT Contexte CE 11 mars 1988 n°48646 • Le Conseil d’Etat reconnaît la faculté pour les contribuables de choisir l’ordre d’imputation des déficits et des amortissements. Cette faculté constitue une décision de gestion opposable aux contribuables. • Solution rendue dans un contexte où les déficits n’étaient reportables que sur les bénéfices des 5 exercices suivants. Loi de finances pour 1989 (n°88-1193 du 29/12/1988) : • Inclusion dans l’article 209 du CGI de la possibilité d’imputer les déficits reportables avant déduction des amortissements Loi de finances pour 2004 (n°88-1193 su 29/12/1988) : • Report illimité des déficits dans le temps (sauf cas de changement d’objet social ou d’activité réelle) • Modification de l’article 209 : suppression de la référence à la faculté d’imputer les déficits reportables avant déduction des amortissements Rappel des faits Une société membre d’un groupe d’intégration impute sur son résultat individuel, des déficits qu’elle a subi avant son entrée dans le groupe fiscal avant de procéder à la déduction des amortissements de l’exercice. Suite à un contrôle, l’administration fiscale conteste l’ordre de déduction des amortissements et d’imputation des déficits propres de la filiale intégrée et procède aux rehaussements correspondants dans le résultat propre de la filiale. 22 THÈME 3 : CONTRÔLE FISCAL 4. CLARIFICATION DES MODALITÉS D’IMPUTATION DES DÉFICITS, CE 10 AVRIL 2015 N°369667 PLÉNIÈRE SOCIÉTÉ FAYAT Solution du Conseil d’Etat Le Conseil d’Etat suit la CAA et rejette la position de la société : il n’est pas possible de procéder à l’imputation des déficits avant la déduction des amortissements. Fondements : Analyse sur le plan comptable : les déficits n’entrent pas dans la définition comptable des charges et ne sont pas non plus pris en compte pour la détermination des bénéfices industriels et commerciaux imposables à l'impôt sur le revenu. Les déficits sont cependant assimilés à des charges pour la détermination du bénéfice fiscal d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés. Ces déficits ne peuvent s'imputer que sur le bénéfice net de l'exercice sur lequel ils sont reportés. Ce bénéfice net est établi conformément aux dispositions du 1 de l'article 39, après déduction de toutes charges, dont les amortissements. Portée de la décision Conséquence en matière d’intégration fiscale • les déficits ante-intégration ne sont pas imputables sur le résultat d'ensemble du groupe mais uniquement sur les résultats propres de la société concernée. • La possibilité d’imputer des déficits antérieurs sur le bénéfice avant déduction des amortissements de l’exercice aurait donc pu conduire à dégager un déficit transmissible au groupe. Plafonnement des déficits Compte de la limite d’imputation des déficits à 1 m€ majoré de 50% du bénéfice imposable la portée pratique de cette décision est limitée. 23 THÈME 3 : CONTRÔLE FISCAL 5. IMPUTATION DES DÉFICITS SUR UNE BASE ÉLARGIE ET POSSIBLE REMISE EN CAUSE D’UN RÉGIME TROP FAVORABLE? (1/2) Sort du déficit d’ensemble du groupe cessant en cas de sortie de l’intégration fiscale Si à l’issue de la dernière déclaration, il subsiste un déficit d’ensemble reportable, ce déficit est conservé par la société mère : • Si cette société mère devient une filiale du nouveau groupe, ce déficit est normalement utilisable suivant les règles applicables aux déficits antérieurs. • Le déficit d’ensemble généré antérieurement ne sera imputable que sur le résultat individuel de l’ancienne société mère. Cette imputation individuelle s’effectuera avec les règles spécifiques de l’intégration, plus contraignantes que les règles applicables de plein droit. L’article 223 I-5 du CGI permet, dans certaines conditions, d’imputer le déficit d’ensemble sur les bénéfices des sociétés du groupe ayant cessé, membres du nouveau groupe : il s’agit de l’imputation des déficits sur une base élargie. L’avantage est de pouvoir élargir les possibilités d’imputation. Toutefois, en cas d’option pour l’imputation des déficits sur une base élargie, les déficits ainsi imputables tombent en non-valeur dès que la société à laquelle est affecté le déficit sort. Les sociétés pour lesquelles il n’est pas demandé le bénéfice de cette mesure et qui sortiraient par la suite du nouveau groupe n’entraînent pas la perte du droit au report des déficits qui leur auraient été applicables dans le cadre de cette mesure. 24 THÈME 3 : CONTRÔLE FISCAL 5. IMPUTATION DES DÉFICITS SUR UNE BASE ÉLARGIE ET POSSIBLE REMISE EN CAUSE D’UN RÉGIME TROP FAVORABLE? (1/2) Etapes d’imputation des déficits en cas d’option pour l’imputation des déficits sur une base élargie 1ère étape : imputation chez chaque société des déficits non imputables sur une base élargie sur le bénéfice plafonné en appliquant les limites de l’article 209-II du CGI. 2ème étape : imputation du déficit d’intégration fiscale sur le résultat du groupe, en appliquant les limites de l’article 209-II du CGI. 3ème étape : imputation du déficit imputable sur une base élargie sur la somme des bénéfices plafonnés qui demeurent disponibles après l’imputation, de la première étape, des sociétés concernées par la base élargie en respectant les limites de l’article 209-II du CGI. Cette articulation des textes n’était à l’évidence pas souhaitée par le Législateur. Reste à voir s’il cherchera à en limiter la portée dans le futur. 25 THÈME 3 : CONTRÔLE FISCAL 5. IMPUTATION DES DÉFICITS SUR UNE BASE ÉLARGIE ET POSSIBLE REMISE EN CAUSE D’UN RÉGIME TROP FAVORABLE? (2/2) 26 Effet de levier en cas d’option pour l’imputation des déficits sur une base élargie : au niveau de la détermination du résultat taxable de l’ancien groupe : l’imputation sur une base élargie permet de minorer le résultat de l’ancien groupe en majorant les déficits ; au niveau du résultat taxable du groupe (ancien groupe + nouvelle société mère). Hypothèse 1 : Option pour l'imputation sur une base élargie (IBE) Hypothèse 2 : Pas d'option pour l'imputation sur une base élargie Résultat taxable au niveau de l'ancien groupe intégré (étape 1) Résultat taxable de l'ancienne société mère (a) Résultat table des anciennes filiales intégrées (b) Déficits de l'ancien groupe d'intégration fiscale Imputation des déficits sur une base élargie [1+50%*(a+b-1)] Résultat taxable d'ensemble après IBE Résultat taxable au niveau de l'ancien groupe intégré (étape 1) 35 50 250 43 42 Résultat taxable au niveau du nouveau groupe intégré (étape 2) Résultat taxable de l'ancienne société mère Résultat taxable des anciennes sociétés intégrées Déficits de l'ancien groupe d'intégration fiscale Imputation des déficits sur le résultat de l'ancienne société mère [1+50%*(a-1)] Résultat taxable d'ensemble à défaut d'option pour l'IBE 35 50 250 18 67 Résultat imposable au niveau du nouveau groupe intégré (étape 2) Résultat taxable au niveau de la holding Résultat taxable du groupe (ancien groupe + nouvelle holding tête de groupe) (x) Déficits reportables Imputation des déficits [1+50%*(x-1)] -13 Résultat taxable du groupe après imputation des déficits 30 15 Résultat taxable au niveau de la holding Résultat taxable du groupe (ancien groupe + nouvelle holding tête de groupe) (x) Déficits reportables Imputation des déficits reportables [1+50%*(x-1)] 30 27,5 14 Résultat taxable du groupe après imputation des déficits 26,5 29 -13 54