CINQUIEME PARTIE Les débouchés potentiels
Transcription
CINQUIEME PARTIE Les débouchés potentiels
CINQUIEME PARTIE Les débouchés potentiels de la betterave CHAPITRE I : L'UTILISATION DU SACCHAROSE PAR LES INDUSTRIES CHIMIQUES I - Différentes formes d'utilisation et perspectives d'avenir II - Compétitivité et politique agricole commune III - Réglementation européenne CHAPITRE II : LA LEVURE I - Situation de l’industrie de la levure II - Le souci d’approvisionnement des levuriers III - Nouveau régime pour la production de levure IV - Conclusion CHAPITRE III : L'ÉTHANOL CARBURANT I - La politique de l’UE en faveur des biocarburants II - L’éthanol en France III - L’éthanol dans le monde Les débouchés de la betterave - 287 Chapitre I L'utilisation du saccharose par les industries chimiques I - DIFFÉRENTES FORMES D’UTILISATION ET PERSPECTIVES D’AVENIR 1. Utilisations directes Parmi les utilisations non alimentaires du sucre, nous pouvons citer : - ciments et bétons (l'incorporation de sucre retarde la prise), - moules et noyaux de fonderie (pendant que le métal se solidifie, le sucre fond puis brûle, libérant des interstices qui permettent de dégager la pièce moulée), - tabac (maintien d'un taux d'humidité satisfaisant), - produits phytosanitaires (rôle attractif sur les insectes), - colles (emploi comme additif), - réduction des ions métalliques (exemple : argenture des glaces), - cuirs (préparation de la liqueur de tannage), - etc... Outre son emploi pour l'industrie, il est apparu que le sucre pourrait être utilisé en médecine et chirurgie : le sucre est un antiseptique naturel susceptible de remplacer en certaines occasions les dérivés antibiotiques. 2. Sucrochimie Le saccharose, matière première pour l'industrie chimique, peut donner lieu à deux sortes de transformations : - il peut faire l'objet d'une dégradation (en éléments simples) soit par des substances chimiques, soit par des actions physiques, soit par des micro-organismes, - il peut être mis en présence d'autres substances en vue de susciter des réactions chimiques. Par ces procédés, on peut obtenir de nombreux dérivés, les réactions chimiques en particulier ouvrant de larges possibilités. Les débouchés de la betterave - 289 En effet, le saccharose étant un disaccharide dont la molécule renferme trois groupes hydroxyles primaires et cinq groupes secondaires, il est possible de remplacer un ou plusieurs de ces groupes par d'autres constituants et d'obtenir ainsi un grand nombre de dérivés. Dans le cas le plus simple (un seul groupe hydroxyle remplacé par un autre constituant), il peut théoriquement en résulter 255 dérivés différents ; dans le cas le plus complexe (remplacement des 8 groupes hydroxyles), on peut obtenir théoriquement 16 millions de dérivés différents. Toutefois, que l'on procède par dégradation du saccharose ou par réactions chimiques, seuls quelques dérivés prédominent tandis que beaucoup d'autres existent seulement en quantités infimes. On estime qu'au stade du laboratoire quelque 10 000 dérivés du saccharose ont été mis au point et que plus de 500 brevets ont été pris concernant l'utilisation de cette matière première. A noter toutefois que, dans la pratique, seul un peu plus d'une centaine de dérivés bien définis ont fait l'objet de recherches en vue d'un éventuel développement. Les produits ainsi mis au point ont des usages très divers, notamment : - additifs pour l'alimentation humaine ou animale, - composants de produits pharmaceutiques ou cosmétiques, - tensioactifs (notamment détergents), améliorants de viscosité, - matières plastiques, composants de résine, plastifiants, - matières premières pour peintures et vernis, colles, produits diélectriques, pesticides. 3. Biotechnologie 3.1. Définition Les biotechnologies cherchent à tirer parti des propriétés : - des micro-organismes, - des cellules animales et végétales, - des constituants cellulaires et en particulier des enzymes. Les applications intéressent l'agriculture, l'industrie, l'énergie, la santé et l'environnement. L'emploi des micro-organismes (bactéries, levures, moisissures) pour transformer les matières végétales ou animales est ancien : transformation du jus de raisin en vin, de lait en fromage ou levain de pâte à pain. Les micro-organismes sécrètent des enzymes qui agissent sur la matière biologique, par fermentation. Les techniques de fermentation ont été mises au point progressivement et de façon tout à fait empirique. Dans le cas de la biotechnologie, au contraire, il y a une action volontariste basée sur des recherches scientifiques et techniques : en vue d'obtenir un résultat déterminé, on agit sur le micro-organisme (les manipulations génétiques offrent de grandes perspectives en ce domaine) ou sur la matière biologique à traiter ou à transformer (actions physiques ou chimiques) de façon à "orienter" l’action des micro-organismes. 290 - Les débouchés de la betterave Nota : Le domaine couvert par la biotechnologie va bien au-delà des simples fermentations. Les recherches sur les cellules constituant les plantes ou les animaux, par exemple, peuvent avoir des applications nombreuses dans le domaine de l'agriculture ou de la santé. Nous nous bornons ici à évoquer les techniques qui peuvent intervenir dans la valorisation du saccharose. 3.2. Le saccharose, matière première pour les biotechnologies L'emploi de saccharose comme substrat de fermentations est déjà ancien. En effet, il y a fort longtemps que le sucre contenu dans la mélasse sert de base à des industries telles que la distillerie ou la fabrication de levure boulangère. Au cours des dernières années, ces utilisations se sont multipliées, la mélasse étant utilisée pour la fabrication : - de produits pharmaceutiques tels que vitamines et antibiotiques, - d'acides aminés, notamment acide glutamique et lysine, - d'acides organiques, en particulier acide citrique et acide acétique, - d'enzymes industrielles, - de différents produits tels que des gommes ou des additifs divers. Nota : Le sucre n'est pas la seule matière première possible pour ces différentes fabrications. En fait, toutes les matières carbonées peuvent être employées. Dans ses utilisations industrielles, le sucre entre en concurrence avec d'autres matières végétales telles que l'amidon (provenant des céréales, des pommes de terre, du manioc, etc...) ou la cellulose (beaucoup de laboratoires dans le monde s'efforcent de transformer les produits cellulosiques en matières fermentescibles). On peut de la même manière employer des matières premières fossiles, telles le méthanol, comme substrat de fermentations. II - COMPÉTITIVITÉ ET POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE La réglementation européenne, concernant le sucre et les autres produits d'origine agricole, a été élaborée en tenant compte essentiellement des débouchés alimentaires. L'importation dans l'Union européenne de produits régis par une OCM et utilisés en alimentation humaine ou animale est soumise à l’application de droits de douane qui visent à protéger les productions communautaires en maintenant les prix de ces denrées à un niveau stable et généralement supérieur à celui du marché mondial. En revanche, les produits chimiques industriels - même s'ils sont fabriqués à partir de matières premières agricoles - peuvent être importés dans l'Union européenne en exemption partielle ou totale de droits de douane. Dans la mesure où les possibilités d'emploi du sucre pour des usages non alimentaires se sont développées au cours des dernières années, les industries chimiques de l'Union européenne se sont trouvées confrontées à une distorsion de concurrence : les produits qu'elles fabriquaient à partir de sucre payé au prix communautaire se trouvaient en position défavorable face à des produits en provenance de pays tiers et fabriqués à partir de sucre acheté au cours mondial. Les débouchés de la betterave - 291 De fait, on a constaté une augmentation des importations de produits tels que l'acide citrique, l'acide lactique et le lévulose. Pour l'acide citrique, par exemple, les importations de l'Union européenne sont passées de 5 000 tonnes en 1974 (dont 2 000 tonnes en provenance d'Autriche) à 13 000 tonnes en 1983 (dont 8 600 tonnes d'Autriche). De même, on a enregistré, pour certains produits, une baisse des productions communautaires (pour l'acide itaconique, par exemple, la capacité de production est tombée de 10 000 à 5 000 tonnes). C’est ainsi que certains industriels ont réalisé un transfert de leurs activités vers des pays voisins de l'Union européenne, même si le débouché essentiel de leurs productions continuait à se situer à l'intérieur du Marché commun. Les industriels européens de la chimie ont donc demandé, au début des années 80, la possibilité de bénéficier de sucre à un prix équivalent à celui de leurs concurrents localisés à l'extérieur de l'Union européenne. Le sucre ou saccharose n'est pas la seule matière première pouvant être valorisée par l'industrie chimique. Le principal concurrent, notamment dans le domaine des biotechnologies, est l'amidon issu du maïs ou du blé. Par hydrolyse, on obtient en effet du glucose, qui est un produit sucrant et qui peut, à son tour, subir de nombreuses transformations(1). Pour beaucoup d'utilisations, par conséquent, les industriels sont susceptibles d'utiliser, presque indifféremment, le saccharose issu de la betterave (ou de la canne) et le glucose issu du maïs ou du blé (ou éventuellement d'autres produits amylacés, notamment la pomme de terre). La prise en compte de la demande de l’industrie chimique d’accéder à des matières agricoles au cours mondial a donc nécessité quelques précautions afin de ne pas introduire de nouvelles distorsions de concurrence entre matières premières d’origine communautaire. III - RÉGLEMENTATION EUROPÉENNE 1. Situation initiale L’industrie chimique a bénéficié successivement de plusieurs régimes d’aide à l’utilisation de matières premières agricoles : Pour l'amidon, il était prévu, depuis le Règlement céréales de 1967, une aide forfaitaire dite "Restitution à la production". Cette procédure s'appliquait d'ailleurs quelle que soit la destination finale du produit, alimentaire ou non alimentaire. Concernant le sucre et l'isoglucose, il convient de faire une distinction entre quota et hors quota. (1) Comme pour la betterave, la transformation du maïs donne lieu à des coproduits et en paticulier à un aliment riche en protéines, commercialisé sous le vocable américain de "corn gluten feed". Celui-ci est largement utilisé en alimentation animale comme substitut des tourteaux d'oléagineux. Il entre pour une part non négligeable dans la valorisation du maïs. 292 - Les débouchés de la betterave Pour le sucre et l'isoglucose du quota, le Règlement 1400/78 avait prévu une aide dite "Restitution à la production" pour la fabrication de certains produits de l'industrie chimique énumérés dans une liste limitative. S'agissant d'assurer une égalité de traitement entre le sucre et l'amidon, le montant de cette restitution était égal à celui de la restitution pour l'amidon, après application d'un coefficient de rendement. Pour le sucre et l'isoglucose hors quota ou C, un article avait été introduit, en 1981, dans le Règlement de base, qui précisait que des sucres ou isoglucoses hors quota pourraient être utilisés pour la fabrication de produits chimiques (article 31). Les producteurs d'isoglucose ont demandé (au printemps 1984) la mise en application de cet article afin de pouvoir vendre, à l'intérieur du marché communautaire, de l'isoglucose hors quota ou C pour la fabrication de certains produits. Les producteurs de sucre ont formulé la même demande pour le sucre hors quota. Mais cette demande n’a pas été acceptée. Il fut alors décidé de modifier la réglementation s’appliquant uniquement au sucre et à l’isoglucose du quota. L’élaboration de cette réglementation fut délicate à établir, en raison des difficultés rencontrées résultant essentiellement de la différence fondamentale entre l'organisation communautaire du sucre et celle des céréales. En effet, le Règlement "sucre" et le Règlement "céréales" obéissent à des logiques différentes : - seules les quantités de sucre produites dans le cadre du quota bénéficient de prix garantis, le solde étant exporté, sous la seule responsabilité des producteurs, au prix mondial ; pour les céréales, les prix garantis s'appliquent à la totalité de la production, - même dans le cadre du quota, pour les quantités de sucre dépassant la consommation interne, les frais entraînés par l'exportation vers pays tiers sont intégralement à la charge des producteurs. Il y a neutralité budgétaire au niveau du FEOGA (1) ; les producteurs de céréales n'ont pas à assurer le financement de l'exportation des excédents, - la matière première saccharose recevait, depuis 1978, une restitution à la production calculée d'après celle accordée au maïs mais cette restitution n'était accordée, d'une part, que pour les utilisations non alimentaires et, d'autre part, pour la fabrication d'un nombre limité de produits (liste annexée au Règlement 1400/78) ; pour la restitution accordée à l'amidon, il n'y avait pas de liste limitative et la restitution était accordée, qu'il s'agisse d'usages alimentaires ou non alimentaires. En dépit de ces difficultés d’approche, les négociations ont fini par aboutir au 1er trimestre 1986. 2. Teneur des règlements Le Conseil des Ministres de l'Union européenne a, les 24 et 25 mars 1986, entériné de nouvelles dispositions réglementaires concernant l'amidon et le sucre destinés à l'industrie chimique, lesquelles ont fait l'objet de publication au Journal officiel des Communautés européennes du 9 avril 1986 (Réglements 1006/86, 1007/86, 1008/86, 1009/86 et 1010/86) et sont entrées en vigueur le 1er juillet 1986. (1) Sauf pour la réexportation des sucres importés des pays ACP. Les débouchés de la betterave - 293 Les dispositions nouvelles mises en place répondent à deux objectifs : - permettre aux industries utilisant des matières premières agricoles, régies par la Politique agricole commune, pour la fabrication de produits non protégés par la PAC, d'accéder à ces matières premières à des prix voisins de ceux pratiqués à l'extérieur de l'Union européenne, - éviter toute distorsion de concurrence entre les deux filières, sucre et glucose. Pour répondre à ces deux objectifs, le Règlement a prévu la fixation de restitution à la production par référence aux restitutions à l'exportation. La restitution à l'exportation est diminuée d'un forfait représentant les frais de mise en fob. Afin d'éviter des perturbations brutales sur le marché du sucre et du glucose, le Conseil a prévu un régime transitoire pour la période 1986/87 à 1989/90 : - pour les deux premières campagnes d'application (1986/87 à 1987/88), la restitution devrait réduire le prix du sucre à un niveau égal à celui du glucose, - pour les deux autres campagnes (1988/89 à 1989/90), le calcul des restitutions se fait, soit par référence au prix du sucre sur le marché mondial augmenté du forfait de 8,45 écus/100 kg, soit par référence au prix du glucose quand le prix du sucre sur le marché mondial est inférieur à ce dernier. En pratique, la deuxième méthode de calcul n'a été appliquée qu'un trimestre (1er juillet - 30 septembre), le prix mondial du sucre ayant toujours été supérieur au prix du glucose. 3. Mise en application de la réglementation L'aide attribuée au sucre destiné à l'industrie chimique est recalculée au début de chaque trimestre. La restitution est calculée en constatant le prix du sucre sur le marché mondial, c'est-à-dire sur la base de la moyenne pondérée des restitutions à l'exportation constatée sur une période de référence de deux mois et demi précédant le trimestre de fixation, diminuée du forfait de mise en fob, 8,45 Écus/100 kg. Exemple de calcul de la restitution industrie chimique pour le trimestre du 01/04/95 au 30/06/95 (en Ecus/t de sucre blanc) (1) Moyenne pondérée des restitutions à l'exportation 406,93 Ecus/t pour la période du 01/01/95 au 15/03/95 (2) Forfait de mise en fob (3) Restitution industrie chimique (1) -(2) 84,50 Ecus/t 322,43 Ecus/t Le FEOGA finance les restitutions à la production versées aux industries chimiques et pharmaceutiques dans la limite de 60 000 t (article 9 du règlement CE n° 1010/86) ; au-delà, ce sont les producteurs (60% planteurs et 40% fabricants) qui financent les restitutions à la production. 294 - Les débouchés de la betterave 4. Aménagement du Règlement 1010/86 à compter du 1er juillet 1995 Les contraintes à l'exportation dans le cadre de l'accord GATT ont stimulé l’intérêt d’accroître les débouchés à l'intérieur de l'Union européenne, notamment via l'industrie chimique. Le nouveau Règlement sucre mis en place à compter du 1er juillet 1995 introduit un aménagement au Règlement 1010/86. Afin d'augmenter les quantités de sucre du quota utilisées par l'industrie chimique, le Conseil des ministres de l'Union européenne a donné à la Commission la possibilité de réduire le forfait de mise en FOB de 8,45 écus/100 kg de sucre blanc jusqu’au niveau de 2,42 écus, via la procédure du Comité de gestion. Cette flexibilité a été utilisée pour la première fois à partir du 1er octobre 1998 et à titre d’essais pour deux campagnes. Le forfait de mise en FOB a été ramené de 8,45 €/100 kg à 6,45 €/100 kg (diminution de 2 €/100 kg), se rapprochant ainsi du forfait de mise en FOB de 5 €/100 kg retenu pour le calcul des restitutions à l’exportation. 5. Nouveau Règlement (CE) n° 1265/2001 Le Règlement (CE) n° 1265/2001 du 27 juin 2001 a aménagé à nouveau le règlement concernant l’octroi de la restitution à la production pour certains produits du secteur du sucre utilisés dans l’industrie chimique. A compter du 1er juillet 2001 (entrée en vigueur du règlement) : - le forfait de 60 000 t pris en charge par le FEOGA disparaît ; les restitutions à la production pour le sucre destiné à l’industrie chimique sont désormais intégralement à la charge des producteurs (60% planteurs et 40% fabricants). - la restitution à la production est calculée désormais tous les mois (tous les trimestres auparavant). La période de référence est alors le mois précédent le 15 du mois de fixation. (ex : pour la fixation de la restitution du mois de mai 2004, la période de référence sera 16 mars/15 avril 2004). Exemple de calcul de la restitution industrie chimique pour le mois de mai 2004 (1) Moyenne pondérée des restitutions à l’exportation pour la période du 16/03/2004 au 15/04/2004 (2) Forfait de mise en FOB (3) Restitutions industrie chimique (1) - (2) 496,00 €/t 64,50 €/t 431,50 €/t 6. Résultats 6.1 Evolution régionale de l’utilisation de sucre pour l’industrie chimique depuis le 1er juillet 1986 - Entre 1986/97 et 1994/95, l’utilisation de sucre par les industries non alimentaires a oscillé entre 140 et 215 000 tonnes, sans progression significative : en effet, si l’on excepte les campagnes 1986/87 (137 000 tonnes) et 1993/1994 (213 000 tonnes), la fourchette d’évolution était relativement étroite à 150-190 000 tonnes. Les débouchés de la betterave - 295 Évolution des utilisations de sucre par l'industrie chimique (tous secteurs) dans l'Union européenne Milliers tonnes 450 400 350 300 250 200 150 100 50 0 86/87 87/88 88/89 89/90 90/91 91/92 92/93 93/94 94/95 95/96(*)96/97 97/98 98/99 99/00 00/01 01/02 02/03 Autres pays UK Espagne (*) Union européenne à 15 depuis 1995/96. Autriche Pays Bas France Allemagne Source : Commission des CE - Par contre, depuis 1995/96, on constate une première phase de progression aux alentours de 250-260 000 tonnes, suivie d’une progression sensible de 314 000 tonnes en 1998/99 à 425 000 tonnes en 2002/2003. Il est indéniable que l’élargissement de l’Union européenne à 15 a eu un impact favorable, ceci étant, ce constat vaut également à périmètre constant (Union européenne à 12) : en effet, les utilisations au sein de l’ex-Union européenne à 12 se sont consolidées entre 1995/96 et 1997/98 aux alentours de 230-250 000 tonnes et ont régulièrement progressé de 280 000 tonnes en 1998/99 et 360 000 tonnes en 2002/2003. - La consolidation de 1995/96-1997/98 est liée : - à une forte progression des utilisations en Espagne, au Danemark et en Belgique, - au maintien de l’Allemagne et du Royaume-Uni à des niveaux hauts de consommation, - à l’inversion de tendance observée en France avec une reprise des utilisations à partir de 1996/97 qui succède à une contraction quasi continue depuis 1986/87. - Le développement observé entre 1997/98 et 2002/2003 est dû, pour sa part, à : - l’accélération de la progression de la demande en Espagne et en Belgique, - la poursuite de la progression des utilisations en Allemagne, aux Pays-Bas ainsi qu’en France qui retrouve son niveau de 1998/99. 296 - Les débouchés de la betterave 6.2 Evolution par secteur d’activités en France En France, après les niveaux records qui ont succédé à l’introduction des restitutions à l’industrie chimique, l’utilisation de sucre pour l’industrie chimique s’est établie entre les années 1990/91 et 1996/97 à des niveaux inférieurs à 30 000 t par an. Évolution de l’utilisation de sucre par secteur d'activités Milliers tonnes 80 70 60 50 40 30 20 10 0 86/87 87/88 88/89 89/90 90/91 91/92 92/93 93/94 94/95 95/96(*)96/97 97/98 98/99 99/00 00/01 01/02 02/03 Autres NC30 (Pharmacie) NC29 (Acides organiques et aminés, antibiotiques) (*) Union européenne à 15 depuis 1995/96. Source : FIRS Depuis 1996/97 on assiste à une progression régulière de l’utilisation de sucre dans l’industrie chimique en France pour atteindre, en 2002/2003, 66 000 t. Cette progression est principalement due au développement des biotechnologies et à l’utilisation croissante du sucre pour produire des amino-acides (37 600 t en 2002/2003). 6.3 Conclusions Le régime de restitution à la production instauré en 1986 a réussi à prévenir un déplacement des industries chimiques ou pharmaceutiques utilisatrices de sucres communautaires vers les pays tiers et la perte de débouchés pour le secteur betterave-sucre. Lors de l'instauration du régime, l'industrie chimique prévoyait l'utilisation d'environ 500 000 tonnes de sucre par an pour la fabrication de produits chimiques. Néanmoins, si les volumes de sucre utilisés par l'industrie chimique (environ 250 000 tonnes jusqu’en 1997/1998) restaient modestes par rapport aux objectifs fixés en 1986, leur progression est constante et le niveau de 425 000 t atteint en 2002/2003 se rapproche des objectifs initiaux. Il semble indéniable que l’abaissement de l’abattement au titre du forfait FOB ainsi que la dépression des cours mondiaux du sucre depuis le début de l’année 1998 ont contribué à stimuler fortement les usages non alimentaires du saccharose. Les débouchés de la betterave - 297 298 - Les débouchés de la betterave Chapitre II La levure I – SITUATION DE L’INDUSTRIE DE LA LEVURE La levure est un organisme unicellulaire utilisé notamment en boulangerie (Saccharomyces cerevisia) où elle représente environ 1% de la matière sèche du pain. Elle est cultivée sur substrat sucré, généralement de la mélasse de betterave ou de canne à sucre d’importation, sachant qu’une tonne de mélasse permet de produire approximativement une tonne de levure. Le marché de la levure dans l’Union européenne est essentiellement constitué par la levure de panification. La production européenne est de 900 000 t réparties de la manière suivante : - Consommation intérieure : 600 000 t - Export : 350 000 t - Import (Turquie) : 50 000 t La consommation mondiale de levure est estimée à environ 3 millions de tonnes et le commerce international est voisin de 450 000 t dont les 2/3 sont effectués par l’Europe. Il y a 3 grands producteurs mondiaux de levure, dont 2 sont européens (Lesaffre en France et D.S.M aux Pays-Bas) ; Lesaffre étant le premier producteur mondial de levure. A l’exception du Luxembourg, il y a une production de levure dans tous les pays de l’Union européenne. II – LE SOUCI D’APPROVISIONNEMENT DES LEVURIERS La consommation des levuriers européens est de l’ordre de 1 000 000 t de mélasse par an (dont 250 000 t importées des pays tiers), avec une consommation très conjoncturelle de glucose en cas d’excédent de celui-ci. La mélasse de betterave est le substrat le plus employé ; la mélasse de canne d’importation présentant l’inconvénient de fournir des excédents de substances non fermentescibles induisant un surcoût de dépollution. Les débouchés de la betterave - 299 Le souci des levuriers est d’avoir des coûts de production en baisse pour rester compétitifs à l’exportation ; cela passe par une restructuration vers de grandes usines et la sécurisation de leurs approvisionnements en matière première à des prix compétitifs. Les levuriers estiment que la production de mélasse en Europe va aller en diminuant alors que celle-ci est déjà aujourd’hui très déficitaire par rapport à la consommation européenne. Les perspectives du marché européen de la mélasse de betterave incitent les levuriers à élargir leurs approvisionnements en matière première aux sirops de sucre ; cette incitation est d’autant plus forte que les contraintes environnementales nécessitent de rechercher des substrats plus purs que la mélasse plutôt que d’investir dans des installations de dépollution. Or la réglementation était très restrictive : l’industrie de fermentation pour la production de levure vivante n’avait accès au sucre pur qu’au prix du marché intérieur du sucre, niveau de prix incompatible avec la compétitivité de l’industrie de la levure. En revanche, l’alcool a accès au sucre hors quota du fait de la non-prise en compte dans les quotas des sirops de sucre qu’elle utilise ; et les autres industries de fermentation (acides aminés, acides organiques) ont accès à la restitution à la production dite “industrie chimique” (cf chapitre précédent). Ainsi pendant 10 ans l’industrie de la levure a demandé à pouvoir également s’approvisionner en sucre à des prix proches du marché mondial. III – NOUVEAU RÉGIME POUR LA PRODUCTION DE LEVURE Dès lors que les levuriers souhaitaient s'approvisionner en sucre à des prix proches du marché mondial, plusieurs solutions avaient été envisagées : - Accès au sucre hors quota comme pour l’alcool, - Intégration de la levure dans le règlement sur l'industrie chimique, - Fourniture d'une mélasse spécifique à teneur élevée en sucre. Les fabricants de sucre ont longtemps considéré que la demande des levuriers présentait un risque important pour le marché de la mélasse ; les planteurs estimaient pour leur part qu'il n'y avait pas un grand intérêt à accéder à la demande des levuriers tant que les exportations de sucre n'étaient pas limitées par l'OMC. Aujourd'hui, alors que les restrictions OMC à l’exportation sont de plus en plus sévères, une augmentation de la consommation intérieure, via l’industrie de la levure, représente un débouché à ne pas négliger. C’est ainsi que la Commission a finalement proposé en 2003 d’élargir à la levure les dispositions réglementaires en vigueur pour la production d’alcool. Le Règlement (CE) n° 38/2004 Le Règlement (CE) n° 38/2004 modifie le Règlement (CE) n° 314/2002 « établissant des modalités d'application du régime des quotas dans le secteur du sucre », avec application au 1er février 2004. Ce règlement a pour but de conférer à l'industrie de la levure le même statut que l'industrie de l'alcool. Cette disposition prévoit que les quantités de sirops qui sont transformées en levures 300 - Les débouchés de la betterave vivantes n'entrent pas dans le calcul de la production de sucre, ce qui revient à ouvrir les sirops de sucre hors quota à l’industrie de la levure. A la suite de l’opposition de certaines délégations qui invoquaient des risques de fraudes, la Commission a mis en place un système de contrôle assez contraignant pour les entreprises intéressées. Ce contrôle a été étendu à l’alcool, au rhum, au sirop à tartiner et au “rinse apelstroop” qui bénéficient du même régime. Les dispositions de contrôle mises en œuvre sont les suivantes : - agréments d'entreprises de production d'alcool, de rhum et de levure par des autorités compétentes des Etats membres ; - déclaration des livraisons par l'entreprise attributaire de quotas (contrôles physiques et administratifs) ; - contrôles physiques et inopinés sur place de la part des autorités compétentes des Etats membres (ces contrôles doivent représenter au moins 10% des quantités de sucre inverti et de sirops) ; - établissement par les Etats membres, en fin de campagne, d'un bilan des quantités concernées ; - communication des Etats membres à la Commission. Le Règlement (CE) n° 39/2004 Ce règlement est un corollaire du précédent et retire donc les levures de la liste des produits pouvant bénéficier d’une restitution à l’exportation. IV - CONCLUSION Le COFALEC (Comité des Fabricants de Levure de l'Union européenne) estime que ce débouché nouveau pourrait représenter aux alentours de 200 000 t de sucres, soit au moins 20 000 ha de betteraves. L'achat de ces sirops de sucre se ferait de gré à gré avec les fabricants de sucre à des niveaux d'intérêts qui ne pourraient être que légèrement supérieurs au marché de la mélasse et du sucre C. Les débouchés de la betterave - 301 Chapitre III L'éthanol carburant INTRODUCTION Un biocarburant est un combustible liquide ou gazeux utilisé pour le transport et produit à partir de biomasse, c'est-à-dire la fraction biodégradable des produits, déchets et résidus provenant de l'agriculture (y compris les substances végétales et animales), de la sylviculture et de ses industries connexes, ainsi que de la fraction biodégradable des déchets industriels et municipaux(1). Il existe un grand nombre de biocarburants. Toutefois, seuls deux sont aujourd'hui produits à une échelle industrielle: l’éthanol (ou alcool éthylique) et l’ester méthylique d'huile végétale (EMHV). L’éthanol ou alcool éthylique (ou bioéthanol) est actuellement produit par la fermentation des sucres extraits de plantes saccharifères (betteraves, canne à sucre) ou amylacées (blé, maïs). Il peut également être fabriqué à partir de matériaux ligno-cellulosiques. Il s’utilise pur, dans des véhicules aux moteurs adaptés, essentiellement de type essence mais éventuellement diesel, ou bien en mélange sans aucune modification des moteurs. L'utilisation doit être conforme avec la réglementation européenne qui autorise une incorporation de l'éthanol jusqu'à 5 % dans l'essence, et de son dérivé l’ETBE (éthyl–tertio-butyl–éther) jusqu’à 15 %. L'EMHV, aussi appelé biodiesel, est obtenu par estérification d’acides gras d’huile végétale avec un alcool simple (méthanol). Ses caractéristiques techniques conduisent à l’utiliser dans des moteurs diesel, pur ou en mélange. La réglementation européenne autorise jusqu'à 5 % d'EMHV dans le gazole, avec une distribution banalisée. Par dérogation , il est possible, en France, de porter ce taux à 30 % pour des flottes captives. En Allemagne, l'EMHV est distribué comme carburant pur. L’utilisation de biocarburants comme carburants de substitution n’est pas une idée nouvelle. Les premières utilisations des biocarburants remontent quasiment au début de l’automobile. Des années 20 aux années 50, la consommation d’éthanol en tant que carburant a été importante en France. L’année 1936 a connu la plus forte consommation avec quatre millions d’hectolitres. La recherche de l’indépendance énergétique était alors le facteur déterminant dans le développement de ce produit. Dans les années 60, l’offre abondante et bon marché du (1) Définition donnée par la Directive 2003/30/CE Les débouchés de la betterave - 303 pétrole a éclipsé les biocarburants. Mais ces derniers se sont vu ouvrir de nouvelles perspectives au lendemain du choc pétrolier de 1973. Ce choc fut en effet à l’origine du programme Proalcool lancé au Brésil en 1975, du lancement du gasohol (mélange de 10 % d’éthanol et de 90 % d’essence) en 1978 aux Etats-Unis et de certaines productions européennes. Aujourd’hui, d’autres fonctions des biocarburants ont été mises en évidence et désormais leur production dans les Etats membres de l’Union européenne répond à deux objectifs majeurs : - lutter contre le changement climatique par une diminution des émissions de gaz à effet de serre, dans le cadre du protocole de Kyoto, - réduire la dépendance énergétique et promouvoir les énergies renouvelables. D'autres objectifs peuvent également être mis en avant : - améliorer les performances des carburants (indice d’octane, caractère lubrifiant), - favoriser la défense de l’environnement, en réduisant les émissions des polluants réglementés, - apporter au plan macro-économique des externalités positives en matière de balance commerciale, d’emploi, d’environnement, d’activité rurale, - mobiliser la totalité du potentiel agricole de l’Union européenne. Sur la période récente, les recherches et expérimentations se sont développées dans les années 80, mais la production n’a véritablement repris qu’au début des années 90. Ce sont l’éthanol et l’ETBE pour incorporation dans les essences qui ont été l’objet des premières études. Ensuite, la voie des esters méthyliques d’huile végétale pour incorporation dans le diesel a été exploitée. La production de biocarburants est aujourd’hui une réalité économique et industrielle, et leur usage banalisé en mélange dans les carburants conventionnels est la preuve de leur réussite technique. La production d'éthanol des USA a atteint 102 millions d'hectolitres en 2003. La production d'éthanol du Brésil a été de 139 millions d'hectolitres cette même année. La consommation européenne d’éthanol peut être estimée pour 2003 à 4,9 millions d'hectolitres : 1 million d'hectolitres en France, 2,2 en Espagne et 1,7 en Suède. La production européenne de biodiesel a atteint 1 400 000 tonnes en 2003 dont 357 000 tonnes en France (1). D'autres pays ont récemment engagé des programmes d'utilisation d'éthanol comme carburant, notamment l’Australie, la Thaïlande, l’Inde et la Chine. L’utilisation des biocarburants dans l'Union européenne fait donc désormais clairement partie du pool des carburants tout en restant modeste : les quantités consommées sont actuellement inférieures à 1 % des carburants utilisés dans le secteur routier. L’économie des deux filières repose encore pour une part importante sur une exonération partielle ou totale d'accises (la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) en France). A plus long terme, l’utilisation d’éthanol dans les piles à combustible pourrait également s’avérer prometteuse. (1) Par usage les volumes d'éthanol s'expriment en hectolitres en Europe. On exprime les volumes de biodiesel en tonnes (1 400 000 tonnes = 15,9 millions hl; 357 000 tonnes = 4,1 millions hl) 304 - Les débouchés de la betterave I- LA POLITIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE EN FAVEUR DES BIOCARBURANTS La politique européenne sur les carburants en général a pris une dimension environnementale au début des années 1990, avec pour objectif initial l'amélioration de la qualité des carburants en vue de réduire les émissions polluantes des véhicules, et l'amélioration de la qualité de l'air. A cette époque, les biocarburants étaient considérés comme un moyen parmi d'autres de réaliser ces améliorations. Par ailleurs, la réforme de la PAC de 1992 avait introduit la mise en jachère obligatoire d'une partie des terres agricoles, laissant la possibilité d'y pratiquer des cultures à usage non alimentaire, notamment pour la production de biocarburants. A ces motivations initiales se sont substituées depuis le Protocole de Kyoto en 1997 des considérations nouvelles portant sur une réduction de nos importations d'énergie et de nos émissions de gaz à effet de serre. Ces préoccupations ont motivé des décisions récentes de l’Union européenne. 1. La Directive sur la qualité des carburants Au début des années 1990, il existait déjà des actes législatifs réglementant les émissions des véhicules, mais il était manifeste que la marge de manœuvre pour améliorer encore le comportement des véhicules dans le domaine des émissions se réduisait de plus en plus. Il fallait donc que les normes futures reposent sur une approche plus globale et intégrée. C'est ainsi que la Commission européenne lançait en 1992 le programme Auto Oil, afin de bâtir une base analytique pour l'élaboration des normes d'émissions des véhicules et de qualité des carburants applicables à partir de l'an 2000. Pour la première fois, les secteurs d'activité qui supporteraient l'essentiel des mesures environnementales (pétroliers et constructeurs automobiles) ont été impliqués dans leur élaboration depuis le début. Auto Oil a été adopté en 1996 et a débouché sur plusieurs propositions de Directives sur la qualité des carburants, les émissions des véhicules et leur entretien. Parmi celles-ci, on trouve la Directive européenne sur la qualité des carburants 98/70/CE, adoptée en 1998, qui définit les normes minimales requises pour les carburants routiers en 2000 et 2005. Elle interdit l'essence plombée à compter de 2000 et conduit à une réduction importante du benzène et des aromatiques dans la composition des essences. Elle reconnaît également le rôle des composés oxygénés, et donc des biocarburants, dans l’amélioration de la qualité de l’air. Ces essences reformulées contribueront, parallèlement à l’introduction de d'améliorations techniques sur les véhicules, à améliorer la qualité de l’air. En janvier 1997, la Commission européenne lançait le programme Auto Oil II dont l'objectif était de procéder à une évaluation de l'évolution des émissions de polluants par les véhicules et leur impact sur la qualité de l'air, ainsi qu'une identification des mesures les plus efficaces pour réduire ces émissions. La période étudiée était 1990-2020, mais une attention particulière a été portée sur les mesures qui pouvaient être mises en place dès 2005 pour améliorer la qualité de l'air. Les travaux se sont déroulés jusqu'à début 2000, sous forme de groupes de travail élargis aux États membres et ONG diverses, en plus des pétroliers et constructeurs automobiles seuls préLes débouchés de la betterave - 305 sents dans le premier Auto Oil. De nombreux rapports intermédiaires ont été produits et un rapport final a été remis en novembre 2000. Auto Oil II a abouti à la présentation par la Commission, en 2001, d'une proposition de Directive modifiant la Directive de 1998 et imposant la mise sur la marché progressive de carburants sans soufre. Cette proposition a été formellement adoptée en 2003, sous le numéro 2003/17/CE, et oblige à une réduction de la teneur en soufre des carburants, qui ne devra pas dépasser 10 mg/kg en 2009. Spécifications de l'essence Valeurs limites (reproduction partielle) Paramètres Directive 98/70/CE à titre obligatoire Unité à partir de 2000 Pression de vapeur (été) 60 Aromatiques % v/v Benzène % v/v Oléfines % v/v Soufre ppm Ethanol % v/v ETBE % v/v Oxygène % m/m Directive 2003/17/CE à partir de 2005 à partir de 2009 kPa 60 60 42 1 18 150 5 15 2,7 35 1 18 50 5 15 2,7 35 1 18 10 5 15 2,7 L'éthanol comme l'ETBE, en tant que composants des essences, ont un effet de dilution de composés (aromatiques et notamment benzène, oléfines, soufre) dont la teneur a déjà dû être diminuée ou le sera prochainement. Les normes européennes autorisent jusqu'à 5 % d'éthanol ou 15 % d'ETBE dans l'essence qui peut alors être distribuée de façon banalisée à la pompe. Il est aussi possible d'incorporer simultanément à l'essence de l'éthanol et de l'ETBE. Il faut dans ce cas respecter le pourcentage maximal d'oxygène. Ainsi, si on met 15 % d'ETBE, on ne peut rajouter que 1,0 % d'éthanol. Inversement, avec 5 % d'éthanol, la teneur en ETBE sera plafonnée à 6,1 % (en supposant que l'essence ne contienne pas d'autres composés oxygénés). Caractéristiques Soufre (ppm) Benzène (%) Aromatiques (% vol.) Oléfines (% vol.) RON(3) MON(4) Indice volabilité (mbar)(2) Spécifications(1) 1999 2005 500 50 5 1 35 18 95/98 95/98 85-88 85-87 900 ETBE MTBE 0 0 0 0 110-115 97-100 600 0 0 0 0 Env. 115 Env. 95 1100 Alkylat 0 0 0 0 94-96 88-90 300-400 (1) Valeur maxi, sauf octane. - (2) Valeur « été ». - (3) Indice d'Octane Recherche - (4) Indice d'Octane Moteur. 306 - Les débouchés de la betterave Si l'éthanol comme son dérivé l'ETBE sont tous deux autorisés dans les essences, pétroliers et constructeurs automobiles préfèrent l'ETBE car ses caractéristiques sont comparables à celles des meilleurs produits fossiles entrant dans la composition des carburants. L'éthanol apporte de l'octane, et peut donc se substituer à des aromatiques ou au benzène dont les teneurs sont plafonnées. Il est aussi exempt de soufre, ce qui va dans le sens des évolutions décidées pour 2009. Mais si l'utilisation d'éthanol en mélange direct à l'essence maximise les gains environnementaux(1) , elle présente aussi certaines contraintes. La première est l'affinité de l'éthanol, produit polaire, avec l'eau. Ceci impose des précautions logistiques pour maintenir anhydres les installations de stockage, afin d'éviter que l'éthanol ne migre de l'essence vers l'eau qui serait présente. Cette exigence, qui n'est pas d'ordre réglementaire, peut être satisfaite à un coût acceptable. Dans tous les pays qui l'utilisent, l'éthanol est transporté par camion de la distillerie au dépôt pétrolier où il bénéficie d'un stockage dédié. Le mélange à l'essence se fait en ligne, lors du chargement des camions-citernes qui iront approvisionner les stations-service. Une deuxième contrainte est l'augmentation de la pression de vapeur (ou volatilité) de l'essence, provoquée par l'adjonction d'éthanol. Les raffineurs formulent leurs essences en se plaçant au plus près du plafond de volatilité fixé par la Directive 98/70/CE. L'éthanol provoque une élévation de la volatilité qui oblige le raffineur à retirer de l'essence les fractions légères (butane, pentane...) et à les écouler comme combustible avec une valorisation moindre. En fait, l'augmentation de volatilité est limitée (de l'ordre de 10 kPa) et plafonne dès 2-3 % d'éthanol, pour décroître légèrement ensuite. De plus, il n' y a pas d'impact négatif sur le fonctionnement des véhicules. Influence de la teneur en éthanol sur la pression de vapeur (PVR en kPa) PVR (kPa) PVR du mélange essence/éthanol 71 70 69 68 67 66 65 64 63 62 61 0.0 1.0 2.0 3.0 4.0 5.0 6.0 Ethanol (%) 7.0 8.0 9.0 10.0 Source : BEICIP-FRANLAB (2002) Pour contourner cette difficulté réglementaire, plusieurs voies sont envisageables : (1) Cf II.1 L'éthanol en France - Des intérêts reconnus. Les débouchés de la betterave - 307 - utiliser une base essence à volatilité réduite (inférieur d'environ 10 kPa au plafond), de sorte que, après ajout d'éthanol, la norme de volatilité soit respectée. C'est la solution mise en œuvre en Suède depuis 2001. Cela introduit cependant un surcoût pour le pétrolier qui vient pénaliser la valorisation de l'éthanol. - augmenter de 10 kPa environ le plafond réglementaire de volatilité pour les essences contenant de l'éthanol. Pour cette deuxième option, il serait nécessaire de modifier la Directive européenne sur la qualité des carburants. La Commission européenne doit procéder en 2005 à une évaluation générale des normes sur les carburants, et devrait proposer des révisions au Conseil et au Parlement fin 2005. Concernant l'éthanol, elle pourra « apporter des modifications à d'autres paramètres dans les spécifications relatives aux carburants, tant classiques que de substitution, par exemple les modifications des valeurs limites de volatilité des essences (...) en vue de leur application aux mélanges de bioéthanol et d'essence » (Article 9, Directive 2003/17/CE). L'acceptation de cette demande reposera largement sur la conviction que devront avoir la Commission européenne, le Conseil et le Parlement que la relaxation de la volatilité n'entraînera pas d'augmentation significative des émissions de polluants atmosphériques (notamment les COV, Composés Organiques Volatils) par évaporation. 2. Les biocarburants et les émissions à l’échappement des véhicules Pour réduire les émissions de polluants des véhicules, et donc améliorer la qualité de l'air, deux voies d'actions complémentaires sont utilisées : - agir sur la qualité des carburants (cf 1.1.), ce qui fait porter la contrainte sur le pétrolier, - ou imposer des limites aux teneurs en polluants contenus dans les émissions des véhicules, principalement à l'échappement mais résultant aussi de pertes par évaporation. Avec cette voie, ce sont les constructeurs automobiles qui doivent réaliser les efforts nécessaires. Les émissions de polluants des véhicules sont réglementées au niveau européen par les Directives 70/220/CE (pour les véhicules légers) et 88/77/CE (pour les véhicules lourds), qui ont été modifiées de nombreuses fois depuis. Cette législation impose un plafond à l'émission des polluants dits réglementés: monoxyde de carbone (CO), dioxyde de carbone (CO2), hydrocarbures imbrûlés (HC) et oxydes d'azote (NOx). A l'exclusion du CO2 qui a un impact global sur le changement climatique, ces polluants aggravent la pollution locale, en dégradant la qualité de l'air en zone urbaine. Ils ont une action néfaste et directe sur la santé humaine, mais aussi une action indirecte par la formation d'ozone. Une essence additionnée d’ETBE ou éthanol va dans le sens d’une réduction du monoxyde de carbone (CO) et des hydrocarbures (HC) dans les gaz d'échappement. Toutefois, le développement des systèmes de post-traitement des gaz d'échappement des véhicules a permis de considérablement réduire les émissions de polluants des véhicules mis en circulation. Aussi, on peut dire que les biocarburants ne trouvent plus autant qu'hier de justification dans une réduction des polluants à l'échappement. 308 - Les débouchés de la betterave 3. Les Directives en faveur des biocarburants 3.1. Intérêt des biocarburants : réduire les émissions de gaz à effet de serre et réduire la dépendance énergétique La réduction des émissions de gaz à effet de serre, principalement le CO2 produit par notre consommation d’hydrocarbures fossiles, est devenue une préoccupation environnementale majeure. Le protocole de Kyoto adopté en 1997 prévoit pour l’Union européenne l’engagement de parvenir à l’horizon 2008-2012 à une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 8 % par rapport au niveau d’émissions de 1990. Dans le même temps, les experts estiment que les émissions de CO2 dans l’Union européenne augmenteront d’environ 3 % sur la période 1995-2000. L’effort de réduction avoisine ainsi les 11 %. Si le protocole de Kyoto représente une première étape, les efforts à accomplir pour limiter l'ampleur du changement climatique doivent être bien plus conséquents. Dans son dernier rapport (2001), le GIECC(1) conclut que, d'ici 2100, la température moyenne sur Terre s'élèvera de +1,4 °C à +5,8 °C. Pour rester dans la partie basse de cette estimation, il faudra que les sociétés industrialisées réduisent leurs émissions de gaz à effet de serre de 75 % d'ici 2050. Le secteur du transport est particulièrement concerné puisqu'il dépend quasiment exclusivement du secteur pétrolier. Ses émissions de gaz à effet de serre représentent 30% de nos émissions totales et elles progressent de 2 à 3 % par an, du fait de la croissance du trafic routier. Les biocarburants sont aujourd'hui la seule réponse à cette double problématique car, comparés aux carburants d'origine fossile, ils consomment jusqu'à quatre fois moins d'énergie fossile et produisent aussi jusqu'à quatre fois moins de gaz à effet de serre. Par ailleurs, l’Union européenne connaît une dépendance énergétique croissante : aujourd’hui, nous dépendons à 50 % de sources d’énergie importées et, si rien n’est fait, ce pourcentage passera à 70 % en 2030. Concernant le pétrole, ce ratio pourrait atteindre 85 % à la même date. Pour des raisons évidentes de sécurité de notre approvisionnement énergétique, il est donc essentiel de diversifier les sources d'énergie consommées, ainsi que leurs origines géographiques. C’est sur la base de cette analyse que la Commission européenne a pris de nombreuses positions appelant à un développement significatif des énergies renouvelables et, parmi celles-ci, les biocarburants. Citons le Livre Blanc de 1997 « Energie pour l’avenir : les sources d’énergie renouvelables », Livre Blanc établissant une stratégie et un plan d’action communautaire qui fixait un objectif de production de 18 millions de tonnes de biocarburants liquides pour 2010 (soit 220 millions d’hectolitres). Ce Livre Blanc a été avalisé par le Conseil de l’Union européenne dans sa résolution du 8 juin 1998 sur les sources d’énergie renouvelables. Plus récemment, dans son Livre Vert « Vers une stratégie européenne de sécurité d’approvisionnement énergétique », publié en 2000, et adopté par le Conseil le 14 mai 2001, (1) Groupe Intergouvernemental d'Etudes sur le Changement Climatique (IPCC en anglais), réseau international de plusieurs milliers d'experts chargés d'évaluer le changement climatique, ses conséquences et les solutions possibles (www.ipcc.ch) Les débouchés de la betterave - 309 la Commission européenne a identifié les biocarburants comme une solution pour améliorer la sécurité et la diversité de notre approvisionnement énergétique et lutter contre le réchauffement climatique. Ces analyses de la Commission européenne se sont matérialisées en novembre 2001 par deux propositions de Directives destinées à former le cadre législatif nécessaire à un développement conséquent des biocarburants dans l'Union européenne. Au terme de longues négociations, la Commission européenne, le Parlement européen et les Etats membres ont pu arriver à un accord sur deux Directives, dotant ainsi l'Union européenne d'un cadre législatif favorable au développement des biocarburants. 3.2. Une Directive pour la promotion des biocarburants (2003/30/CE) La Directive a été officiellement adoptée le 8 avril 2003 par le Conseil des ministres de l'Union européenne, après un vote favorable en 2e lecture au Parlement européen le 12 mars 2003. Dans sa forme définitive, la Directive fixe des objectifs de référence pour les parts de marché des biocarburants et autres carburants renouvelables, de 2 % du gazole et de l'essence consommés en 2005 dans l'Union européenne, et 5,75 % en 2010, soit une augmentation annuelle de 0,75 %. Ces objectifs sont exprimés selon le contenu énergétique (PCI) des produits considérés. Exprimés en volume, les objectifs à 2010 sont de 8,7 % pour l'éthanol et de 6,20 % pour le biodiesel. Chaque État membre devra se fixer des objectifs nationaux indicatifs et adresser un rapport annuel à la Commission européenne sur les mesures mises en place et sur l'évolution des ventes de biocarburants sur son territoire. Si les objectifs nationaux indicatifs devaient différer des objectifs de référence fixés par la Directive, l'État membre devra le justifier auprès de la Commission européenne, en mettant en avant, par exemple, des ressources limitées en biomasse. Chaque État membre doit transposer cette Directive en droit national au plus tard le 31 décembre 2004. La Commission européenne rendra fin 2006 un rapport d'évaluation et pourrait éventuellement proposer des objectifs nationaux obligatoires au cas où les États membres n'auraient pas correctement appliqué la Directive. Dans sa forme finale, cette Directive n'a donc pas le caractère contraignant que prévoyait de lui donner la Commission européenne. Il n'en reste pas moins qu'elle fixe un cadre européen pour le développement des biocarburants, avec des objectifs précis et un suivi étroit, de la part de la Commission européenne, sur l'application qu'en feront les États membres. 3.3. Une Directive sur la taxation des produits énergétiques (2003/96/CE) Une fiscalité spécifique est un élément déterminant pour le développement des biocarburants. Jusqu'à fin 2003, les biocarburants ont relevé de la Directive 92/81/CE concernant la taxation des huiles minérales. Elle autorisait un État membre à appliquer une exonération d'accises aux biocarburants dans deux cas: - dans le cadre d'un projet pilote (Article 8.2), avec simplement l'aval de la Commission européenne, mais uniquement pour de faibles volumes, - pour des raisons de politique spécifique (Article 8.4), sans limitation de volume, mais avec une autorisation qui devait être obtenue à l'unanimité des États membres. 310 - Les débouchés de la betterave On avait donc un cadre juridique inadapté, lourd à mettre en œuvre, qu'il fallait donc réformer, en dotant les biocarburants d'un statut fiscal spécifique. Il y eut un premier essai avec la proposition de Directive "Scrivener" du 28 février 1992 qui prévoyait que les taux d'accises applicables aux biocarburants ne pourraient pas excéder 10 % des taux appliqués aux carburants pétroliers correspondants. En raison de l'opposition du Royaume-Uni, l'unanimité requise n'a pu être obtenue et la proposition a finalement été retirée. Ce n'est donc qu'en novembre 2001 que la Commission de Bruxelles proposait à nouveau aux États membres une Directive qui autoriserait une taxation spécifique des biocarburants. S'agissant d'une question fiscale, le Parlement européen ne devait émettre qu'un avis consultatif, mais l'unanimité des États membres était nécessaire. La proposition de Directive sur la taxation des biocarburants a finalement été incorporée dans une Directive plus large sur la taxation des produits énergétiques et de l'électricité, en discussion depuis 1997, et définitivement adoptée le 27 octobre 2003 par un vote unanime des États membres. Selon l'Article 16 de cette Directive 2003/96/CE, les États membres auront la possibilité d'appliquer une exonération partielle ou totale d'accises sur les biocarburants. La possibilité d'une exonération totale d'accises constitue la principale nouveauté depuis la proposition initiale, à la demande notamment de l'Allemagne qui autorise la distribution de biodiesel pur en exonération totale d'accises. Un opérateur économique pourra bénéficier de cette disposition pour une période de 6 ans renouvelable. L'autorisation devra être délivrée à un producteur de biocarburants par l'autorité publique nationale avant fin 2012. Enfin, il est prévu que l'exonération soit modulée selon les variations des prix des matières premières afin d'éviter les surcompensations éventuelles. Dans les faits, ce nouvel élément de droit communautaire permettra surtout aux Etats membres d'appliquer une taxation spécifique sur les biocarburants, avec beaucoup plus de flexibilité que ne l'autorisait le système antérieur, qui imposait d'obtenir une dérogation accordée par le Conseil de l'UE, selon une procédure longue et aléatoire. 4. Biocarburants et Politique Agricole Commune Le crédit carbone La Politique Agricole Commune de l'UE a fait l'objet d'une réforme profonde lors de l'accord conclu entre les Etats membres et la Commission européenne le 26 juin 2003 à Luxembourg. Une disposition de cette réforme concerne les biocarburants: un crédit carbone sous la forme d'une aide de 45 €/ha est versée pour les cultures destinées à la production d'énergie, dont la transformation en biocarburants. Les cultures "énergétiques" pourront continuer à être cultivées sur jachère, mais l'aide ne sera versée que lorsque ces cultures se feront hors jachère, et dans la limite d'un plafond européen de 1,5 million d'hectares. Cette nouvelle mesure constitue une reconnaissance supplémentaire de l'impact positif des biocarburants sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, et notamment de gaz carbonique. Les débouchés de la betterave - 311 Elle est entrée en application pour la récolte 2004. Dans le Règlement d'application adopté pour la seule campagne 2004, la Commission européenne a décidé d'exclure la betterave éthanol du bénéfice de cette aide. Il a été prévu de revoir cette question dans le cadre du futur règlement sucre à partir de 2006. La jachère obligatoire Toujours dans la réforme décidée à Luxembourg en 2003, il a été décidé que les paiements jachère ne seraient pas intégrés au système de paiement unique. L'exploitant est doté de droits à paiement jachère sur la base de ses références 2000-2002. A compter de la mise en œuvre de la réforme, pour chaque campagne, il pourra percevoir ses droits jachère à hauteur des hectares effectivement mis en jachère (ou portant des cultures non alimentaires ou conduit en agriculture biologique). II - L'ÉTHANOL EN FRANCE 1. Des intérêts reconnus En 2002, l'Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Énergie (ADEME) et le Ministère de l'Industrie ont souhaité reprendre ensemble une analyse de cycle de vie des biocarburants et des carburants fossiles correspondants, sous l'angle des consommations énergétiques et des émissions de gaz à effet de serre. L'étude, confiée à un expert indépendant, s'est faite du puits à la roue, c'est-à-dire que l'on a comptabilisé toutes les consommations énergétiques et les émissions de gaz à effet de serre de la parcelle agricole ou du champ pétrolier jusqu'à la combustion des produits par le véhicule. L'étude conclut clairement que l'utilisation de biocarburants permet de réduire sensiblement notre consommation d'énergie non renouvelable et, dans une plus grande mesure encore, nos émissions de gaz à effet de serre. 1.1. Réduire nos importations de pétrole Ainsi, en consommant 1 MJ d'énergie fossile, on produit plus de 2 MJ sous forme d'éthanol de blé ou de betterave, grâce à l'apport d'énergie renouvelable fixée par photosynthèse. Toujours à partir de 1 MJ d'énergie fossile (pétrole), on n'obtient que 0,87 MJ sous forme d'essence. Exprimé différemment, ce résultat signifie que 1 MJ d'essence mobilise 1,15 MJ d'énergie fossile, contre 0,49 MJ pour 1 MJ d'éthanol produit, soit une économie de 57 %. En fait, malgré un PCI inférieur (voir table de conversion), l'ajout de 5 % d'éthanol à l'essence ne provoque pas de surconsommation, avec parfois même une légère baisse de la consommation du véhicule. Aussi, il est légitime de considérer que l'on peut substituer un volume d'essence par un volume identique d'éthanol. L'éthanol génère donc une économie d'énergie non renouvelable (essentiellement du pétrole) de 72 %. Pour l'ETBE, la comparaison doit se faire avec son homologue fossile, le MTBE, obtenu en faisant réagir de l'isobutène avec du méthanol, tous deux d'origine pétrolière. L'utilisation d'ETBE permet d'économiser 24 % d'énergie non renouvelable. Il est donc moins avantageux d'utiliser de l'ETBE plutôt que de l'éthanol, principalement parce que l'ETBE est formé pour moitié par un produit non renouvelable, l'isobutène. 312 - Les débouchés de la betterave Selon le scénario prospectif pour 2009, la mise en place d'améliorations techniques d'ores et déjà disponibles permettrait de sensiblement améliorer le bilan de l'éthanol, contrairement à celui de l'essence. L'économie d'énergie non renouvelable serait portée à plus de 80 %. Energie restituée/énergie non renouvelable mobilisée (du puits au réservoir) Situation 2009 Situation actuelle 4,0 3,57 3,5 3,33 3,0 2,5 2,05 2,0 1,5 1,04 0,873 1,0 0,879 0,76 0,5 e nc se Es (b Etha et n te ol ra ve ) Et h (b ano lé) l E TB M nc se Es ET e l no ha Et BE 0 Source : Etude ADEME/ministère de l’Industrie 2002 1.2. Réduire les émissions de gaz à effet de serre Les 3 principaux gaz à effet de serre ont été pris en compte: dioxyde de carbone (=gaz carbonique, CO2), méthane (CH4) et protoxyde d'azote (N2O). L'augmentation de la concentration de ces gaz dans l'atmosphère est responsable d'un renforcement de l'effet de serre. Indicateur de gaz à effet de serre (du puits à la roue) g eq.CO2/kg Situation actuelle 4 000 Situation 2009 3 663 3 635 3 500 3 131 3 000 2 526 2 500 2 000 1 500 912 1 000 505 500 527 nc e se Es (b Etha et n te ol ra ve ) Et h (b ano lé) l E M TB BE ET nc e se Es Et ha no l 0 Source : Etude ADEME/ministère de l’Industrie 2002 Les débouchés de la betterave - 313 Substituer de l'essence par un même volume d'éthanol permet de réduire considérablement nos émissions de gaz à effet de serre, puisque l'économie se chiffre à 75 %. A court terme (2009), avec la valorisation économique du CO2 de fermentation, l'éthanol de betterave ou de blé permettra de porter l'économie de gaz à effet de serre par rapport à l'essence à 85 %. 1.3. D'autres intérêts à prendre en compte Pour compléter les travaux précédents sur le bilan énergétique et les émissions de gaz à effet de serre, l'ARTB a commandité une expertise sur les externalités de la production d'éthanol ou ETBE produit à partir de betteraves, afin de les comparer aux externalités de l'essence(1). Pour chaque filière de production, il s'agissait de quantifier les coûts et avantages sur l'environnement, l'indépendance énergétique, l'emploi et les revenus fiscaux. Cette étude a particulièrement mis en relief tout l'intérêt qu'il y a à substituer de l'ETBE ou, mieux, de l'éthanol, à de l'essence, sur l'emploi direct et les revenus fiscaux (hors TIPP). Externalités de l’Ethanol et de l’ETBE par rapport à l’essence €/hl 8 7 6 5 4 3 2 1 0 7,4 5,5 4,8 3,6 0,9 0,1 Essence Revenus fiscaux (hors TIPP) ETBE Ethanol Valorisation de l'emploi Source : Étude Price Waterhouse Coopers p/c ARTB 2003 1.4. Une production issue de cultures qui pratiquent l’agriculture raisonnée La question des pratiques culturales respectueuses de l’environnement est posée pour l’ensemble des cultures, indépendamment de leur destination, le développement des biocarburants allant de pair avec une prise de conscience accrue des agriculteurs et des organisations agricoles dans le sens d’une plus grande prise en compte de l’impact environnemental de l’activité agricole, comme c’est le cas de toutes les activités productives. C’est ainsi que les filières betterave, blé, colza ont établi des guides de bonnes pratiques pour chaque culture : « Guide environnement pour la culture de la betterave indus(1) Évaluation des externalités des filières éthanol et ETBE de betterave en France, Price Waterhouse Coopers p/c ARTB, 2003 314 - Les débouchés de la betterave trielle », « Guide environnement pour la culture du blé tendre d’hiver », «Charte pour la production de colza énergétique sur jachère ». Pour plus d'informations sur la betterave et l'environnement, on se reportera à la brochure Évolutions techniques et aspects environnementaux (ITB, 2003). A titre d’exemple, la méthode prévisionnelle du bilan azoté, qui a concerné en 2001 près de 65 % des surfaces betteravières et donc bien davantage que les 3 % des surfaces betteravières consacrées aux biocarburants, a permis de réduire de 30 % les doses d’azote à l'hectare apportées à la culture de la betterave, alors que les rendements racines et sucres progressaient en moyenne de 2 % par an dans le même temps. 2. La fiscalité Les biocarburants sont encore produits en faibles quantités, et ont donc un prix de revient plus élevé que les carburants pétroliers, d'autant plus que le prix du pétrole est loin de refléter son coût réel (par exemple les coûts militaires liés à la localisation géostratégique des gisements, ou les coûts générés par un changement climatique dû à la combustion d'hydrocarbures fossiles). Aussi, comme dans tous les autres pays engagés dans des productions de biocarburants, ceuxci bénéficient en France de mesures de soutien qui prennent la forme d'une TIPP(1) spécifique, inférieure à celle de l'essence et du gazole. 2.1. L'historique jusqu'à 2003 Dès 1987, les pouvoirs publics français ont montré leur intérêt pour les biocarburants en allégeant la fiscalité de l’éthanol dans le cadre de la Loi de finances rectificative. Fin 1991, l'article 92 de la Loi de finances pour 1992 exonère totalement de TIPP les biocarburants élaborés sous contrôle fiscal dans des unités pilotes en vue d'être utilisés comme carburant ou combustible dans le cadre de projets expérimentaux. Cette décision s’inscrivait dans le cadre de l'article 8-2 de la Directive européenne sur l'harmonisation des droits d'accises alors en préparation (Directive 92/81/CE). L'arrêté du 27 mars 1992 définit les modalités d'application de la loi. Elle limite notamment l'exonération à l'alcool produit à partir de betterave, céréales, topinambours, pomme de terre. L'article 32 de la Loi de finances pour 1992 a été reconduit par la Loi de finances pour 1993 puis modifié en Loi de finances rectificative de décembre 1993. Les modifications portent sur les points suivants : - l'exonération est limitée à 3,295 F/litre d'éthanol (montant de TIPP applicable en 1994), - les matières premières doivent obligatoirement être produites sur jachère, - l'Etat s'engage à conclure des conventions de progrès pluriannuelles garantissant les amortissements des futures unités pilotes d'ETBE. L'exonération ainsi accordée a permis le développement de la filière ETBE. L’avantage fiscal prévu initialement jusqu’en 1996 a été prolongé par la Loi de finances rectificative pour 1997, qui a procédé à une réforme d’ensemble du régime fiscal des biocarburants pour répondre aux observations de la Commission européenne. Ces produits doivent désormais bénéficier d’une exonération dans la limite de quantités déter(1) Taxe Intérieure sur les Produits Pétroliers. Les débouchés de la betterave - 315 minées par des agréments, accordés par les pouvoirs publics après appel à candidature communautaire. C’est aussi à partir de cette date que l’exonération de l’éthanol est réservée aux unités d’ETBE. Les Lois de finances rectificatives de 1998 à 2001 ont maintenu l’exonération pour l’éthanol à son niveau de 329,5 francs par hectolitre (soit 50,23 €/hl). En mars 2002, après que la précédente autorisation communautaire ait été condamnée par le TPI de Luxembourg, suite à une plainte de BP Chemicals, la France a obtenu des autres Etats membres la possibilité de maintenir son régime de taxation des biocarburants, en vertu de l'Article 8.4 de la même Directive 92/81/CE. Dans cette décision du Conseil de l'UE, il était aussi demandé que le niveau d'exonération des biocarburants soit régulièrement ajusté, selon les variations des prix des matières premières, et afin d'éviter des surcompensations. Compte tenu de l'économie de la filière, il aurait fallu fixer, pour 2003, une exonération de TIPP de 42 €/hl pour l'éthanol transformé en ETBE (soit une baisse de 8,2 €/hl sur l'exonération en vigueur de 50,23 €/hl ). Dans le seul objectif de réaliser une économie budgétaire, le gouvernement a proposé dans la Loi de Finances rectificative pour 2002 une exonération de 34,2 €/hl d'éthanol. Finalement, le Parlement a décidé de fixer l'exonération de TIPP à 38 €/hl, à compter du 1er janvier 2003, pour l'éthanol destiné à être transformé en ETBE. 2.2. La situation actuelle Pour 2004, l'exonération de TIPP a été reconduite, soit 38 €/hl pour l'éthanol transformé en ETBE. Une disposition nouvelle a aussi été adoptée, déterminant une exonération de TIPP de 37 €/hl pour l'éthanol utilisé en mélange direct à l'essence. Toutefois, les Lois de Finances fixent le montant unitaire de réduction de TIPP. Les volumes éligibles sont eux fixés par le Gouvernement, qui les attribue aux opérateurs industriels sur appel d'offre. Synthèse des évolutions réglementaires de l’exonération fiscale applicable au bioéthanol Texte L.F.R. 87 L.F. 92 Montant Essence-gazole = 295,18 – 152,19 = 142,99 F/hl Exonération totale = 283,40 F/hl L.F. 93 L.F.R. 93 Exonération totale = 290,12 F/hl Exonération limitée 329,50 F/hl (égale TIPP pour 1994) Exonération 329,50 F/hl (=50,23 £/hl) Exonération de 38 £/hl Exonération de 38 £/hl Exonération de 37 £/hl L.F.R. 97 L.F.R. 2002 L.F.R. 2003 L.F. : Loi de Finances; L.F.R.: Loi de Finances Rectificative 316 - Les débouchés de la betterave Application Mélange 5 % à partir du 1/7/88 Incorporation directe et dérivés dans les essences, jusqu’au 31/12/96 Suppression de « jusqu’au 31/12/96 » Sans changement Contenu en alcool des dérivés (ETBE) Contenu en alcool des dérivés (ETBE) Contenu en alcool des dérivés (ETBE) Ethanol en mélange direct à l'essence 3. L'organisation de la filière française 3.1. L'ETBE La voie adoptée initialement en France a été celle de la transformation de l’éthanol en éther par réaction chimique avec un produit pétrolier, à savoir l’isobutène (ou isobutylène), pour former de l'ETBE. Le choix s'est porté sur l'ETBE plutôt que sur l'éthanol en mélange direct à l'essence, car l'ETBE a la préférence des pétroliers (qui y trouvent une bonne valorisation de l'isobutène) et des constructeurs automobiles. L'isobutène (CH3)2CCH2 est une oléfine (ou alcène) d'origine pétrolière. Pour produire de l'ETBE, on utilise principalement l'isobutène présent à environ 20 % dans la coupe C4 produite par le craqueur catalytique (ou FCC) de la raffinerie. Il est aussi possible d'importer du raffinat 1 depuis une unité pétrochimique. La teneur en isobutène est alors plus élevée (40-45 %). Process de fabrication de l'ETBE Ethanol rectifié, déshydraté (>99,7%) transport ferroviaire Raffinerie Dénaturation (2%) stockage stockage Distillerie ETBE 47 % Unité ETBE craqueur catalytique stockage Coupe C4 53 % max. 15% Isobutène Essence Raffinat 1 Unité pétrochimique Distribution La réaction entre l'éthanol et l'isobutène n'est pas complète, si bien que l'ETBE produit est, en moyenne, pur à 92 %, le reste étant surtout formé d'éthanol et d'isobutène n'ayant pas réagi. Ainsi, pour produire une tonne d'ETBE, il a fallu utiliser en moyenne 47 % d'éthanol et 53 % d'isobutène, ce qui diffère légèrement du rapport donné par la stœchiométrie. La transformation de l'éthanol en ETBE permet d'obtenir une bonne compatibilité du biocarburant avec les carburants et véhicules conventionnels ainsi qu'avec les moyens logistiques existants. L’ETBE présente en effet des caractéristiques physico-chimiques Les débouchés de la betterave - 317 favorables : faible volatilité et octane élevé(1), très faible taux de soufre, comportement vis-à-vis de l’eau analogue à celui des produits pétroliers. Ces caractéristiques physicochimiques de l’ETBE sont des éléments favorables à la formulation des essences. Elles lui confèrent une valeur supérieure à la valeur de l’Eurosuper (super 95 sans plomb ou Premium Unleaded). 3.2. Les matières premières En France, la production d’éthanol alimentant les unités d’ETBE est issue de betteraves (70 %) et de blé (30 %). La surface concernée est d'environ 25 000 ha, dont 12 000 ha de betterave. Dans le cas de la production d’éthanol provenant du secteur betterave-sucre, planteurs et producteurs d’éthanol ont convenu que chaque hectolitre d’éthanol donne lieu au paiement d’une tonne de betteraves à 16°, ce qui correspond au rendement industriel. Surfaces de betterave et blé dédiées à la production d'éthanol en France (en ha) 94-95 95-96 96-97 97-98 Betteraves 4 560 6 246 10 182 12 476 Blé 7 673 8 835 12 033 10 427 Surface totale 12 233 15 081 22 215 22 903 98-99 12 134 12 797 24 931 99-00 00-01 01-02 11 021 12085 11579 18 212 15926 13885 29 233 28 011 25 464 02-03 03-04(1) 11007 10428 12702 9614 23 709 20042 (1) provisoire Pour la production d’éthanol issue de betteraves, environ 2/3 des surfaces sont cultivées sur jachère (sans paiement jachère) et une autre part est cultivée hors jachère (1/3). La répartition des surfaces sur jachère et hors jachère est la suivante : (en ha, betterave) 94-95 95-96 96-97 97-98 98-99 99-00 00-01 01-02 02-03 03/04 (provisoire) Sur jachère 643 6 251 10 182 12 476 8 097 7 500 7 345 6 837 6 610 6 462 Hors jachère 3 920 -00 -00 -00 4 037 3 521 4 740 4 742 4 397 3 966 Total 4 560 6 251 10 182 12 476 12 134 11 021 12 085 11 579 11 007 10 428 Source : SIDO et FIRS pour les surfaces sur jachère, CGB pour les surfaces hors jachère 3.3. La production d'ETBE La France dispose aujourd’hui de trois unités de production d’ETBE (2). La plus ancienne est celle de Feyzin qui était initialement une unité de production de MTBE de la société ELF, reconvertie pour la production d’ETBE en 1993. En 1996, ont été construites deux autres unités (Nord ETBE à Dunkerque et Ouest ETBE au Havre) dans (1) En France, le super sans plomb 98 est d’ailleurs largement produit en utilisant de l’ETBE. (2) L’unité MTBE de Lyondell a aussi produit ponctuellement 8 000 tonnes d’ETBE en 1998. 318 - Les débouchés de la betterave lesquelles le groupe pétrolier Total, les producteurs d’éthanol et les professions betteravières et céréalières ont conjointement investi, sans subvention publique. Actionnariat des unités ETBE (2004) Total Ethanol Holding(1) Groupe Tereos Ethanol Nord(2) Unigrains Naples Investissement TOTAL Ouest ETBE 40 % 40 % 10 % 10 % 100 % Nord ETBE 40 % Feyzin 100 % 31 % 9% 10 % 10 % 100 % 100 % (1) Cristal Union, BCE, SLS, SDHF... (2) Cristal Union, SDHF, SLS La production d'ETBE se fait dans la limite d'un volume maximal pour lequel l'éthanol bénéficie d'une TIPP réduite. Chaque unité d'ETBE dispose ainsi d'un agrément, pour un volume d'ETBE et une durée donnés, délivré par le gouvernement. Les 3 unités actuelles sont agréées depuis le 1er avril 1998. Elles ont été retenues dans le cadre d’un appel à candidature européen lancé en novembre 1997 et qui portait sur un volume maximum de 270 000 tonnes d’ETBE, soit environ 1,6 million d’hectolitres d’éthanol. Site de Gonfreville - OUEST ETBE Site de Dunkerque - NORD ETBE Site de Feyzin Potentiel de production TOTAL Agrément délivré en 1998 Volume d’éthanol correspondant Durée d’agrément au 1/4/1998 70 000 tonnes 65 000 tonnes 84 000 tonnes 219 000 tonnes 416 000 hl 387 000 hl 500 000 hl 1 313 000 hl 9 ans 9 ans 3 ans - En 2004, en raison de la non-réalisation des agréments par les unités ETBE, les agréments des unités de Gonfreville et Dunkerque ont chacun été réduits de 10 000 tonnes d'ETBE. Le volume ainsi libéré va permettre au gouvernement de délivrer, en 2004, des agréments à des distilleries pour 150 000 hl d'éthanol destinés à être utilisés en mélange direct à l'essence. Un appel d'offre a été lancé à cet effet en février 2004. Ce même appel d'offre porte aussi sur 84 000 tonnes d'ETBE correspondant à l'expiration de l'agrément de l'unité de Feyzin. Ces sites de production ont permis une mise à la consommation croissante d’éthanol et d’ETBE jusqu'en 1998. Les débouchés de la betterave - 319 Unités de production d’ETBE en France DUNKERQUE 65 000 t/an mise en service 1996 GONFREVILLE 70 000 t/an mise en service 1996 FEYZIN 84 000 t/an mise en service 1993 Zone de production de betterave Consommation d’éthanol et ETBE en France (t/an) 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 Consommation d’éthanol 3 368 27 351 38 276 37 725 59 960 82 849 97 291 90 281 91 966 89 943 87 767 76 711 Production d’ETBE 7 167 58 194 81 438 80 265 127 574 176 275 207 002 192 087 195 672 191 368 186 739 163 215 Source Douanes La production française d’ETBE a été environ de 164 000 tonnes en 2003, produit à partir de 77 000 tonnes d’éthanol et incorporé dans les essences. Ces chiffres sont en retrait sur ceux enregistrés les années précédentes, en raison d'un déficit de fourniture en isobutène. Il faut considérer que la production moyenne d'ETBE est de 190 000 320 - Les débouchés de la betterave tonnes, utilisant 1 150 000 hl d'éthanol, soit 0,7 % (en volume) de l'essence consommée en France (0,45 % en contenu énergétique). 4. Les voies de développement 4.1. A court terme: le développement ouvert par la Directive sur la promotion des biocarburants 2003/30/CE Cette Directive appelle à un développement des biocarburants à hauteur de 5,75 % des carburants routiers (essence et gazole), d'ici 2010 (cf 1.3.2). Pour que l'éthanol représente 5,75 %, en contenu énergétique, de l'essence consommée en France, il suffirait de mobiliser environ 7 % des surfaces actuelles en betteraves et blé tendre. Si l’ETBE présente des caractéristiques qui en font une excellente base essence, l’utilisation de l’éthanol en mélange direct à l’essence serait moins coûteux, d’où un soutien fiscal allégé et, surtout, présenterait un meilleur bilan énergétique et apporterait une contribution plus efficace à la lutte contre l’effet de serre (cf 2.1) Le Brésil, les USA, le Canada France : Projection des surfaces en blé et betteraves Éthanol ou la Suède ont maintenant ha x 1000 une longue expérience dans ce 350 domaine, avec des flottes 309 300 importantes de véhicules qui, sans modification technique, 250 fonctionnent avec une essence 200 contenant de 5 à 25 % d’étha150 nol anhydre. 96 100 En Europe, l'ajout d'éthanol à 62 l'essence est autorisé à hauteur 50 29 11 9 de 5 % par la Directive 0 98/70/CE. Toutefois, ce déve2005 2010 2003 loppement sera grandement Blé Betterave facilité en Europe lorsque le législateur européen aura modifié le plafond de volatilité des essences fixé par cette Directive (voir 1.3.) Ce programme français France : Projection des volumes d’Éthanol de développement des hl x 1 000 000 biocarburants devrait 16 naturellement être inscrit 14,2 14 dans : 12 - le Plan Climat, qui est 10 un ensemble de mesures 8 touchant tous les sec6 4,9 teurs de l'économie, que 4 la France devra mettre 2 en place pour se confor1,1 0 mer à son engagement 2005 2010 2003 pris dans le cadre du Les débouchés de la betterave - 321 Protocole de Kyoto. La réalisation des objectifs de la Directive 2003/30/CE permettra à la France, grâce aux biocarburants, de réaliser 12 % de la réduction nationale d'émissions de gaz à effet de serre. Le Plan Climat a fait l'objet d'une longue préparation en 2003 et devrait être adopté par le gouvernement en 2004; - la Loi d'orientation sur les énergies qui fixera les orientations et les moyens de la politique énergétique française pour les 20 ou 30 ans à venir. Après un vaste débat national qui s'est déroulé en 2003, le projet de Loi a été soumis au Parlement puis au Sénat et devrait être adopté à l’automne 2004. 4.2. A moyen terme : les piles à combustibles et les biocarburants de synthèse La pile à combustible, une technologie d’avenir Le principe de ces piles est de produire de l’énergie électrique (et éventuellement de la chaleur) à partir de certaines molécules contenant de l’hydrogène, pour un rendement énergétique supérieur à celui d’un moteur thermique et potentiellement "O émission" à l'exception de la vapeur d'eau. Malheureusement, l'hydrogène n'existe pas à l'état natif dans la nature. C'est un vecteur d'énergie qu'il faut nécessairement produire, et son stockage, compressé ou à basse température (par cryogénie), est difficilement envisageable pour un véhicule. La solution consiste à produire l'hydrogène en continu, par réformage de molécules qui en contiennent. Les sources d'hydrogène considérées sont le méthanol, les hydrocarbures classiques (essence ou gazole de synthèse) et l'éthanol. L’essence et le gazole de synthèse permettraient d'utiliser des réseaux de distribution déjà existants, mais ce sont des énergies non renouvelables, et produire de l'oxygène à partir de ces mélanges de molécules complexes est loin d'être une réalité technologique. Des piles à méthanol existent mais le méthanol est lui aussi non renouvelable, car issu de la pétrochimie, et il présente de plus une forte toxicité. Finalement, seul l’éthanol est à la fois disponible, facile à stocker, dénué de toxicité et enfin renouvelable. Ces atouts justifient les programmes de recherche conduits entre autres par des constructeurs automobiles, et visant à concevoir des piles à combustible alimentées par de l’éthanol. Pile à combustible + - H2 -+-+ +-+-+-+ +-+- Moteur électrique H2O CO2 Réformeur 322 - Les débouchés de la betterave Catalyseur Réservoir à éthanol Les biocarburants de synthèse Au lieu de plantes saccharifères ou amylacées, on peut imaginer utiliser des matières premières ligno-cellulosiques, formées de résidus de récoltes (paille, rafles de maïs...) ou de cultures spécifiques (miscanthus, taillis à rotation rapide...). Deux voies sont explorées : la conversion thermo-chimique (dite BTL, Biomass To Liquid) et la voie biochimique. En France et dans de nombreux autres pays, de nombreux programmes de recherche ont été engagés sur leur faisabilité technique, qui pourrait être atteinte d'ici 5 à 10 ans. Les aspects socio-économiques paraissent encore peu étudiés. Biocarburants de synthèse biomasse ligno-cellulosique conversion thermochimique conversion biochimique prétraitement gazéification gaz de synthèse hydrolyse enzymatique purification / séparation fermentation synthèse Fischer-Tropsh H2 éthanol hydrocarbure de synthèse Source : IFP III - L'ÉTHANOL DANS LE MONDE 1. Dans l'Union européenne Au sein de l'Union européenne, la France a été le premier pays à relancer une production d'éthanol en 1992, et elle est restée le premier producteur pendant une décennie. En 2003, la France reculait au troisième rang européen, derrière l'Espagne et la Suède. Elle devrait même rapidement passer au 4e rang, derrière l'Allemagne. La consommation européenne de bioéthanol s'est élevée en 2003 à environ 4,9 millions d’hectolitres. Les débouchés de la betterave - 323 L'Espagne produit de l'éthanol carburant depuis 2000. Il existe deux distilleries d'une capacité totale de 2,2 millions d'hectolitres. L'éthanol est produit à partir de céréales, et il est transformé en ETBE. Il n' y a pas de quota de production et l'éthanol bénéficie d'une exonération totale d'accises, soit 39,6 €/hl (Janvier 2004). Fait nouveau, en 2003, l'opérateur espagnol, Abengoa, a acheté 1 million d'hectolitres d'alcool vinique, pour une utilisation comme carburant, mis à l'adjudication par la Commission européenne au prix de 19 €/hl. Cet alcool a été écoulé en partie en Suède. Les développements ultérieurs en Espagne passeront par l'utilisation d'éthanol en mélange direct à l'essence, ce qui suppose une adaptation de la norme de volatilité de l'essence (cf 1.1). Jusqu’en 2000, la Suède consommait en carburation un faible volume d’éthanol importé, vinique ou produit par l'industrie papetière (environ 200 000 hectolitres), pour des programmes pilotes: flotte de bus à Stockholm ou véhicules flexibles fonctionnant à l'essence ou au E85 (85 % éthanol + 15 % essence). Début 2001, une nouvelle distillerie d’une capacité de 500 000 hl a été inaugurée. L’éthanol y est produit à partir de céréales. Totalement exempté de droits d'accises (52,6 €/hl en janvier 2004), il est incorporé à l’essence à 5 %, et le mélange est vendu comme de l'essence banalisée, conformément à la réglementation européenne. En 2003, la consommation d'éthanol a fortement augmenté, atteignant 1,7 million d'hectolitres, pour une utilisation en mélange à 5 % à l'essence. Cette croissance s'est faite par un développement d'importations communautaires (notamment d'alcool vinique) mais aussi largement extra-communautaires. L’éthanol dans l’Union européenne En millions d'hectolitres consommation 2003 en construction 1,7 ★ projet ★ ★ ★ UE avant le 1/5/2004 UE au 1/5/2004 6 1 ★ ★ 2,2 En dehors de ces deux pays ayant déjà une production d'éthanol, d’autres pays membres de l’Union européenne viennent de mettre en place des dispositions fiscales en faveur des bio324 - Les débouchés de la betterave carburants. Ainsi, la Grande-Bretagne a inscrit dans sa Loi de Finances 2002 la possibilité d'appliquer une exonération d'accises de 20 p/l à l'éthanol utilisé comme carburant dans des projets pilotes. Ce montant est toutefois jugé insuffisant par les professionnels pour autoriser un démarrage de la production. L’Italie avait inscrit dans sa Loi de finances 2001 un volume financier pour réduire la taxation de l’éthanol et de l’ETBE, en se proposant d’utiliser d’importantes surcapacités de distillation pour traiter des excédents viniques. Cette disposition législative ne s'est pas concrétisée à ce jour par une production d'éthanol ou d'ETBE par absence de décret d'application. Plus récemment, l'Allemagne a adopté en juin 2002 une loi sur la taxation des huiles minérales, avec une disposition permettant d'exonérer totalement d'accises les biocarburants (65,5 €/hl pour l'éthanol). Début 2004, trois distilleries d'une capacité combinée de 6 millions d'hectolitres sont en construction, dont une du groupe Südzucker (2,6 millions d’hl /an). Parmi les 10 pays qui adhéreront à l'Union européenne en 2004, seule la Pologne a engagé une utilisation d'éthanol comme carburant. Produit à partir de seigle ou de mélasse dans les quelque 600 distilleries agricoles encore en production, il est aujourd'hui utilisé en mélange direct à l'essence, et aussi après transformation en ETBE. Une loi, adoptée fin 2003, rend obligatoire l'incorporation de 3,5 % d'éthanol dans l'essence à compter de janvier 2004. 2. Dans les autres pays Hors d'Europe, la production d'éthanol est principalement le fait de deux pays, le Brésil et les Etats-Unis, même si quelques autres pays ont engagé des programmes d'utilisation d'éthanol (Australie, Chine, Thaïlande, Inde...). 2.1. L’éthanol aux Etats-Unis Le "Clean air act" Le congrès a voté en 1970 une loi sur l'air propre, le "Clean Air Act", à vocation très large, qui visait à réduire les émissions polluantes de (C0, Nox, HC) pour les véhicules automobiles et les moteurs fixes. Ce Clean Air Act a ensuite été amendé, pour rendre obligatoire la présence d'oxygène dans les essences. A partir de 1992, dans les 39 zones où les teneurs en CO de l'air dépassaient les normes, il y a obligation d'incorporer des oxygénés pendant les 4 mois d'hiver. S’y ajoutent, à partir de janvier 1995, 9 zones où les teneurs en ozone dépassent les normes. Les essences sont oxygénées par les raffineurs à partir de MTBE(1), mais aussi d'éthanol. L’éthanol est utilisé en mélange à l’essence, environ pour moitié à un taux de 10 % (gasohol), et pour l’autre moitié à des taux de 5,7 à 7,7 % (oxy-fuels et RFG) pour lutter contre la pollution atmosphérique dans les zones urbaines (en application du Clean Air Act). Il est apprécié pour son indice d’octane élevé et son contenu en oxygène qui permet de satisfaire aux exigences du Clean Air Act qui prévoit, dans le cadre de la reformulation des essences, un taux minimal d’oxygène. Ce taux est dans certaines situations de 2 % et dans d’autres situations de 2,7 %. (1) Methyl Tertio Butyl Ether, obtenu par réaction entre le méthanol et l’isobutène Les débouchés de la betterave - 325 L’éthanol, en temps que composé oxygéné, se trouve en concurrence avec le MTBE d’origine entièrement fossile. Or, l'interdiction du MTBE a été décidée dans une quinzaine d'Etats, dont la Californie. Le MTBE est en effet accusé de polluer les eaux lors de fuites depuis les lieux de stockage. Ces mêmes États ont conservé l’obligation d’oxygénation des essences qui permet d’avoir une combustion plus propre, avec moins de polluants rejetés dans l’atmosphère. Le bioéthanol est donc l'alternative qui se présente aux raffineurs pour remplacer le MTBE. En Californie, le retrait du MTBE du marché n'aura lieu qu'en 2004, mais la presque totalité des groupes pétroliers a décidé d'anticiper dès 2002 l'application de cette décision en incorporant volontairement de l'éthanol à l'essence. Le Congrès américain examine aussi une loi fédérale sur l'énergie qui comprend un Renewable Fuel Standard (RFS). Le RFS imposerait la mise sur le marché de 189,3 millions d’hectolitres de biocarburants (5 milliards de gallons) d'ici 2012. Le Sénat et la Chambre des Représentants n'ont à ce jour pu parvenir à un compromis sur le contenu de la loi. Production d’éthanol (USA) Millions hl 120 100 80 60 40 20 2003 2000 1995 1990 1985 1980 0 Source : DOE/RFA Les incitations fiscales Le succès de la filière éthanol américaine s’explique par une politique fiscale volontariste. Depuis 1978, l’essence contenant 10 % d’éthanol bénéficie sur l’ensemble des Etats-Unis d’une réduction des taxes sur les carburants. Cette exonération partielle, qui devait prendre fin en 1990, a été reconduite jusqu’en l’an 2000 à un niveau de 54 cents/gallon(1). Elle a été à nouveau reconduite jusqu’en 2007 moyennant une réduction en 3 étapes à 53, 52 et 51 cents/gallon en 2001, 2003 et 2005. Il n’existe pas de limite budgétaire à cette incitation fiscale. A cette incitation fédérale, de nombreux Etats, essentiellement situés dans la zone de production de maïs, proposent des exonérations complémentaires qui peuvent atteindre 20 cents/gallon. Le gouvernement fédéral et les États producteurs engagent par ailleurs des sommes importantes comme aides à l'investissement ou en faveur de la recherche. (1) 1 gallon = 3,7853 litres. 326 - Les débouchés de la betterave Capacité de production et utilisation En 2000, la capacité de production d'éthanol était estimée à 70 millions d'hectolitres répartis sur 55 sites industriels, utilisant majoritairement du maïs. La plus grande unité (ADM) a une capacité de 28 millions d’hectolitres. Les unités moyennes ont une capacité de 2 millions d’hectolitres et les petites unités ont une capacité de 40 000 hectolitres. Depuis, la production d'éthanol a progressé très fortement. Elle a dépassé 102 millions d'hectolitres en 2003, soit une progression de 27 % en un an, et de 75 % depuis 1998. Cette évolution s'explique par la demande d'éthanol pour la carburation. Cette tendance devrait se poursuivre puisque, fin 2003, en plus des 73 distilleries actuellement en production, 13 sont en construction. Le marché intérieur est protégé puisque, en dehors d'un quota d'importation représentant 7 % de la consommation nationale, il y a un droit de douane de 54 USD/hl qui bloque les importations. 2.2. L’éthanol au Brésil Production et utilisation Le Brésil conduit depuis 1975 une politique volontariste en faveur de la production d’éthanol, en particulier en ayant lancé son programme Proalcool, qui a permis à l'État d'apporter un soutien financier aux propriétaires de véhicules fonctionnant à l'alcool pur ainsi qu'aux distilleries. En volume, ce pays reste largement le premier producteur mondial avec, pour la campagne 2002/2003, une production d'éthanol de 125 millions d’hectolitres provenant de 284 distilleries utilisant de la canne à sucre. La carburation reste le principal débouché. Environ la moitié de la production cannière est transformée en éthanol. Aujourd'hui, il existe deux voies d'utilisation de l'éthanol comme carburant : éthanol pur, hydraté, pour des véhicules particuliers conçus spécialement, ou éthanol anhydre, utilisé en mélange à l'essence à un taux compris entre 20 et 25 %, pour des véhicules à essence. Actuellement, le taux de mélange de l'éthanol à l'essence est de 25 %. Cette utilisation représente 55 % de la consommation totale. Cette part est en augmentation car la quasi-totalité des véhicules particuliers neufs fonctionnent avec ce mélange essence / éthanol. Les véhicules fonctionnant à l’éthanol pur (hydraté) ne représentent plus qu'une très faible partie des nouvelles immatriculations, alors qu'ils formaient la presque totalité des ventes dans les années 1980. Ceci s'explique par les difficultés rencontrées par le programme Proalcool dans les années 1990 : volatilité des prix et ruptures d'approvisionnement. L'éthanol hydraté représente par conséquent une part décroissante de la consommation totale d'éthanol (45 %). En 2003, Volskwagen, puis d'autres constructeurs, ont mis sur le marché des véhicules qui peuvent fonctionner indifféremment à l'éthanol pur ou au mélange éthanol/essence. Les premiers chiffres de ventes sont prometteurs. A terme, ce nouveau développement pourrait permettre d'augmenter significativement la consommation intérieure d'éthanol. Seule une faible partie de la production est exportée (8 millions d'hectolitres en 2003). Les débouchés de la betterave - 327 Le Brésil affiche son ambition de développer significativement ses exportations, notamment vers les pays qui ont une politique en faveur des biocarburants: Japon, Millions m3 20 15 10 5 Alcool hydraté 00/01 02/03 95/96 90/91 85/86 80/81 75/76 70/71 65/66 60/61 0 Alcool déshydraté USA, pays de l'Union européenne. Evolution de la production totale d’alcool (Brésil) Le soutien des pouvoirs publics Le soutien public au lancement du programme Pro-alcool était de nature fiscale et réglementaire. Malgré la dérégulation générale de l’économie brésilienne amorcée en 1990, dérégulation qui a également concerné le secteur sucre-alcool, le soutien public à l’éthanol carburant a conservé sa nature réglementaire et fiscale : - taux d’incorporation obligatoire d’éthanol déshydraté dans l’essence (entre 20 et 26 %), - subventionnement de stocks d’éthanol, - adaptation de la fiscalité sur les essences pour aligner le prix toutes taxes comprises de l'essence sur celui de l'éthanol. Ces dispositions peuvent être complétées par des incitations fiscales à l’achat de voitures fonctionnant à l’éthanol pur. La forte compétitivité du Brésil Pour l'alcool comme pour le sucre, le Brésil a les coûts de production les plus bas du monde (environ 6 cts/livre de sucre brut dans le Centre Sud); cette situation s'explique par les éléments suivants: conditions agro-climatiques optimales (climat tropical permettant la culture de la canne sans irrigation), coût énergétique nul à négatif car l'énergie du process industriel est obtenue par combustion de la bagasse (tige de canne après extraction du sucre), technologie industrielle d'un pays développé, conditions sociales et environnementales d'un pays en développement. L'extraordinaire compétitivité du Brésil, associée à une politique fédérale très volontariste sur l'éthanol, explique l'expansion spectaculaire du secteur cannier depuis 10 ans. 328 - Les débouchés de la betterave 2.3. Autres pays Le Canada a développé une production d’éthanol depuis 1994, mais les initiatives et le soutien proviennent surtout des Etats, par manque de politique fédérale claire en la matière. L'utilisation se fait en mélange à l'essence (10 %), mais représente encore bien moins de 1 % de la consommation d'essences. En Australie, le Gouvernement avait annoncé en 2001 sa participation au financement d’infrastructures afin de consommer 3,5 millions d'hectolitres d'éthanol d'ici 2010, soit 2 % du marché de l'essence. Dans l'année qui a suivi, la combinaison d'une sécheresse et d'un cours du sucre déprimé ont mis en grande difficulté économique l'industrie cannière et les pressions se sont faites plus fortes pour trouver une nouveau débouché à la canne à sucre. En 2002, le Gouvernement a renforcé le dispositif d'aides au développement de l'éthanol, avec un programme fédéral de 50 millions AUD et une subvention à la production d'éthanol de 0,38 AUD/l, en lieu et place de l'exemption d'accises précédemment accordée. Cette dernière décision aura pour effet de prévenir l'importation d'éthanol, notamment brésilien, en ciblant l'aide sur les producteurs nationaux. En 2003, le Gouvernement australien a pris la décision de limiter à 10 % la quantité d'éthanol dans l'essence et d'imposer une information du consommateur sur le lieu de vente. L’Inde avait initié en 2001 trois projets pilotes d’incorporation d’éthanol anhydre à l’essence à un taux de 5 %. Cette politique devait prendre une plus grande ampleur avec l'obligation faite par le Gouvernement à neuf Etats et quatre régions sous contrôle fédéral de vendre de l'essence contenant 5 % d'éthanol à compter de janvier 2003. La mise en place effective de cette mesure a été retardée faute d'accord entre les compagnies pétrolières et les distilleries sur le prix de l'éthanol. Durant l'été 2003, des progrès ont été enregistrés dans quelques Etats après que des concessions eurent été faites sur le prix de l'éthanol et l'exonération d'accises dont il bénéficie. En Chine, l'année 2001 avait été marquée par le lancement d’un programme ambitieux avec la commercialisation de mélanges éthanol 10 % / essence 90 %, afin de valoriser des excédents structurels en maïs, et de trouver une réponse aux importations croissantes de pétrole. Ce programme s'est à ce jour concrétisé par deux distilleries en production, avec des capacités importantes, supérieures à 6 millions d’hectolitres. En octobre 2003, une nouvelle distillerie de 7,6 millions d'hectolitres de capacité est entrée en production dans la province de Jilin. Soucieuse de réduire ses importations de produits pétroliers et de trouver un débouché à sa production de manioc et de mélasse de canne, la Thaïlande a donné une nouvelle impulsion à l'éthanol. Le Gouvernement a agréé 8 distilleries pour une production combinée de 1,14 million d’hectolitres, mais, fin 2003, seule une distillerie était entrée en production. Après avoir enregistré une production record de sucre en 2002/2003 (7,3 millions de tonnes), le Gouvernement souhaite maintenant la limiter à 6,4 millions de tonnes et orienter l'excédent de canne à sucre vers la production d'éthanol. Pour la campagne 2003/2004, le Gouvernement va garantir un prix minimum pour la canne dans la limite du plafond de production de sucre, les volumes de canne supplémentaires ne bénéficiant d'aucune garantie de prix. Les débouchés de la betterave - 329