Intervention de l`ANCMSP Intervention lors de la table ronde

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Intervention de l`ANCMSP Intervention lors de la table ronde
Intervention de l’ANCMSP
Intervention lors de la table ronde « Knocking on Heaven’s Door : Getting a Job in
European Academia », organisée à l’occasion de la 1e Graduate Conference de l’ECPR
(European Consortium for Political Research) qui s’est tenue à l’université d’Essex du 7
au 9 septembre 2006.
L’ANCMSP est avant tout une association de doctorants et docteurs sans poste en science
politique. Cela signifie que toutes les personnes liées aux « métiers de la science
politique » peuvent en être adhérentes, mais que seuls les doctorants et docteurs en
recherche d’emploi sont habilités à faire partie de son bureau. L’ANCMSP anime en
outre une liste de discussion sur Internet ouverte aux non adhérents de l’association, qui
compte aujourd’hui 1200 abonnés.
Les activités de l’association sont tournées vers l’insertion des doctorants au sein de la
discipline pendant leur doctorat, mais aussi après lorsqu’ils sont en recherche de poste.
L’ANCMSP milite notamment pour que les doctorants bénéficient de conditions
matérielles décentes et d’un réel accompagnement pédagogique et scientifique pendant
leur thèse ; mais aussi pour une plus grande transparence des procédures de recrutement,
qui perpétuent encore trop souvent des procédures de cooptation. Nous nous préoccupons
également des débouchés pour les docteurs en science politique hors du milieu
universitaire. Or, la position de la science politique dans l’Université (1), la politique de
la recherche (2) et la structure du marché du travail en France (3) permettent difficilement
l’insertion des jeunes docteurs tant dans la discipline que sur le marché du travail
« conventionnel ».
1. En France, la science politique a un statut particulier : son enseignement ne
débute qu’en licence dans le cadre des cursus en droit. Cela a une incidence sur la
diffusion des travaux en science politique comme sur le recrutement des
chercheurs, le nombre de postes dédiés à la science politique étant plus faible que
dans d'autres disciplines au regard du nombre de doctorants, et en tout cas bien
trop faible pour fournir un emploi à tous les docteurs.
Parallèlement à cela, la spécificité du système de formation universitaire en
France place en concurrence les universités et les « grandes écoles » (avec les
classes préparatoires à ces écoles) qui sont habilitées à délivrer des doctorats.
Cette dualité affecte également les disciplines scientifiques (notamment les
mathématiques), mais dans le cas de la science politique), le handicap initial se
trouve renforcé dans la mesure où les docteurs recrutés sont majoritairement issus
des écoles prestigieuses telles que l’ENS, Sciences-Po (voire HEC) ou les IEP de
province. Seule l’Université de Paris I rivalise avec le système des grandes écoles.
2. De plus, le doctorat n’est pas reconnu dans les conventions collectives comme
une qualification propre, correspondant à une base salariale définie. Cela signifie
que les qualifications et compétences acquises ne sont pas considérées comme
spécifiques. C’est pourquoi les docteurs ont davantage de problème à s’insérer sur
le marché du travail que des ingénieurs sans doctorat. On aboutit ainsi à un
cloisonnement stérile des savoir-faire entre l’université et la fonction publique ou
le marché du travail du secteur privé, ce qui rend d’autant plus difficile la
reconversion des docteurs hors du secteur académique.
3. Enfin, en France, la recherche est pensée à court et moyen terme, avec une
demande de visibilité immédiate. La loi de programmation sur la recherche
survalorise la recherche appliquée au détriment de la recherche fondamentale, et
ce dans tous les domaines. Ceci se traduit par l’accroissement de la recherche sur
projet, accompagnée de modes de financement qui s’apparentent davantage à des
investissements sur les projets de recherche. Ces choix politiques posent la
question de la rentabilité de certaines disciplines, en particulier les sciences
sociales. En effet dans ces disciplines, les « applications » ou les retombées
sociales sont plus difficiles à évaluer en termes économiques ou utilitaires, ce qui
laisse craindre que les financements se raréfient de plus en plus. D’autre part la
progression de la recherche sur contrat entraîne la diminution des financements
« de base » ou « stables » et par conséquent implique une précarisation des jeunes
chercheurs, qui sont structurellement les plus touchés par cette tendance. On
constate en effet une augmentation de l’âge au recrutement, il faut en moyenne
désormais trois ou quatre ans d’attente pour trouver un poste stable après un
doctorat en science politique. Les contrats précaires sont mal rémunérés en France
par rapport à d’autres pays, notamment les USA, et le risque de devoir s’inscrire
au chômage est réel. L’Agence Nationale de la Recherche, créée par le
gouvernement en 2005 pour financer cette recherche sur projet illustre ce tournant
de la politique. De plus elle vient concurrencer des organismes de recherche
comme le CNRS qui offrent des emplois pérennes de chercheur. Enfin, rappelons
que le budget consacré à la recherche en France reste relativement faible si on le
compare à ceux d’autre pays : chiffres 2001 de l’OCDE : 2,23 % PIB de R&D en
France, contre 2,82 aux USA, 3,09 au Japon et 4,27 (!!) en Suède... Cependant, le
budget français en matière de R&D reste supérieur à la moyenne européenne mais
moyenne UE-15 : 1,93 %. Dans le cadre de la Stratégie de Lisbonne : 3% du PIB
européen devrait être consacré à la R&D en 2010. C’est en ce sens que pour 2005,
le ministère française de la Recherche annonçait un budget équivalent 2,16 %
PIB, pour la recherche dont environ 63 % par les entreprises : le financement
public doit donc augmenter...