Du manque de `bons points` au comble de l`image. Catherine Poncin

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Du manque de `bons points` au comble de l`image. Catherine Poncin
Du manque de ‘bons points’ au comble de l’image. Catherine Poncin
Collages papier d’archives originales sur cahier de vacances canadien.
Trois cahiers.
Œuvre unique.
Aout 2009.
Lettre à Emmanuel.
Cher Emmanuel,
Je suis très heureuse de répondre à ta proposition.
Réaliser un travail en quelques semaines, sur les hauts plateaux lozériens où je me trouve
actuellement, avec pour tout support trois cahiers de vacances… est un pari !
Je suis donc allée dans le grenier de mes parents à la recherche d’images qui ‘existent déjà’
selon le concept que je poursuis depuis de nombreuses années.
(fouille de marchés aux puces, fouilles de fonds d’archives, fouilles de photos de famille
etc…)
Et j’ai trouvée…. la collection de cartes postales de ma mère dont un nombre conséquent
porte ma signature, ainsi qu’une boite contenant d’autres images… mes ‘bons points
d’écolière’.
En regardant de plus près… j’ai compris que l’une des sources de la démarche que je
développe depuis que je porte un intérêt à la photographie prenait source dans la frustration
que j’avais eu enfant d’un manque de ‘bons points’…
J’étais une très mauvaise élève, refusant absolument d’apprendre et j’ai été reléguée durant
toute la période scolaire obligatoire au rang de cancre.
Cette position était pour moi une conséquence que j’assumais de fait, mais j’avais un
problème qui ne résidait pas en ma qualité d’ignorante notoire mais à une conséquence :
je n’obtenais jamais de ‘bons points’.
Ces bons étaient des images particulières, des sortes de passeports pour l’imaginaire et l’on
gagnait lorsque l’on en obtenait un, une place non pas pour le paradis mais…. quelque
chose qui ressemblait à ça…
Je n’étais pas jalouse que certains les exhibent ou les échangent chaque fin de semaine
contre des Images ; mais malheureuse cependant d’être exclue de ce commerce.
Les Images étaient le summum de la réussite ! il fallait dix b.p pour obtenir une Image –
évidemment ces objets tenaient pour moi de l’ordre de l’inaccessible !
Impossible étant un terme déjà banni de ma pensée, j’ai donc décidé de m’en fabriquer, j’ai
découpé des images dans les journaux auxquelles se sont jointes toutes sortes d’illustrations
d’imagerie publicitaire placées dans les tablettes de chocolats ou dissimulées dans poudres
de lavage etc…
Je décidais moi-même suivant la qualité du papier et du contenu de l’image s’ils entraient
dans la catégorie bp ou images.
Autre moyen, lorsque j’ai atteint les dernières classes de primaire, j’en achetais aux bons
élèves qui outre les échangeaient avec les maîtres et maîtresses contre des images ; m’en
revendaient parfois très cher !
Cependant pour moi, l’essentiel consistait à cumuler tout de même ces points pour l’avenir.
Lorsque parfois il m’arrivait d’en obtenir un par la ‘force’ et la ‘ténacité’ dont j’avais fais
preuve pour apprendre par cœur une récitation, j’étais si heureuse que je découpais l’image
de son contenu essentiel et l’isolais de son cadre.
Exemple : un poisson glissant dans les fonds marins, je découpais soigneusement le
poisson
pour ne laisser que les algues, l’eau salée et le cadre.
Sorte d’anthropophagie du désir me semble-t-il …. le fragment…
A côté de cette boîte, le carton de cartes postales de ma mère…
J’en ai retiré mes correspondances aux ‘points de vue’ soigneusement sélectionnés.
Ils étaient variés et nombreux ! (j’ai commencé à voyager vers l’age de vingt ans)…
et de tous les pays que je traversais, j’adressais à mes parents une carte postale.
D’autres bp en quelque sorte qui venaient revaloriser la piteuse image que je leur avais
donnée…
Un lien m’est immédiatement apparu entre le bp et la carte postale.
Les lieux mythiques figurant sur les bp ; je les retrouvais sur les cartes postales – les lieux
sur lesquels je pouvais physiquement me poser.
De cette traversée l’image, de l’éclatement de son cadre, je ne cesse depuis ce jour de me
‘fondre’ dans le contenu d’une démarche post-photographique….
‘Du manque de bons points au comble de l’image’
en porte témoignage…..
Catherine Poncin

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