L`Ôdieuse Compagnie donne deux versions du même personnage

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L`Ôdieuse Compagnie donne deux versions du même personnage
Mardi 22 septembre 2015 | 24 heures
24 heures | Mardi 22 septembre 2015
Culture&Société
Culture Société
Gastro Ciné Conso
Sortir Les gens
L’Ôdieuse Compagnie donne deux versions
du même personnage en un seul spectacle
Interview
«Nos
artistes
ont besoin
de sortir»
Scène
Dès demain, à l’Oriental de Vevey,
les comédiens Yann Mercanton et
Sylviane Röösli proposent une
expérience originale: découvrir
à la suite deux mises en scène
du même monologue. Intrigant!
Qu’est-ce qui se passe quand deux metteurs en scène se saisissent d’un même
texte? Deux œuvres nourries des mythologies personnelles de chacun. C’est le
propre du théâtre que de réinterpréter,
génération après génération, des mêmes
motifs, d’éclairer les mots d’un auteur à la
lumière de son époque ou de sa sensibilité. Mais, sauf hasard du calendrier, le
public doit attendre des années avant de
pouvoir confronter les différentes visions
d’un même objet artistique. A l’Oriental
de Vevey, dès mercredi, c’est possible.
Avant de partir en tournée romande,
l’Ôdieuse Compagnie propose l’expérience rare de découvrir, le même soir et
sur la même scène, un seul monologue
soumis à la créativité distincte de deux
artistes. La comédienne neuchâteloise
protéiforme Sylviane Röösli (36 ans), formée à l’école Les Teintureries et connue,
entre autres, grâce aux performances de
son personnage burlesque Miss Sulfuric.
Et le metteur en scène et comédien lausannois Yann Mercanton (39 ans), que
l’on n’avait plus vu sur scène depuis son
dernier succès, Hétéro-kit.
Tous les deux incarneront mademoiselle Werner, un personnage imaginé par
le Français Claude Bourgeyx, qui avait
déjà inspiré à Yann Mercanton ses Petites
fêlures. «J’aime travailler avec cet auteur,
A Paris pour les 30 ans du Centre
culturel suisse, Alain Berset évoque le
rayonnement culturel suisse à l’étranger
Xavier Alonso Paris
A
lain Berset a lancé vendredi les réjouissances
pour l’anniversaire du
Centre culturel suisse de
Paris. Il y a 30 ans,
l’ouverture de ce lieu
d’exposition et de création dans le quartier du Marais à Paris était une première
pour Pro Helvetia. Désormais, la Suisse
compte six centres à l’étranger (Paris,
New York, San Francisco, Rome, Milan et
Venise) ainsi que quatre bureaux de
liaison (Shanghai, New Delhi, Le Caire et
Johannesburg). Paris est-il encore Paris?
Qu’est-ce donc que le rayonnement culturel de la Suisse à l’étranger? Entretien
avec le ministre des cultures suisses.
La culture n’est qu’une partie du
Département de l’intérieur. Ce weekend à Paris, vous n’êtes que ministre
de la Culture: c’est un petit plus?
Ce n’est pas qu’un petit plus. C’est évident que les grands dossiers de l’Intérieur
sont les assurances sociales et le domaine
de la santé. Mais j’investis beaucoup de
temps et d’énergie dans la culture. Et
c’est un vrai plaisir! Nous avons, depuis
mon entrée en fonctions, redéfini le message culture, qui a été adopté par le parlement cet été. Nous avons aussi mis en
place les prix suisses dans les différents
domaines artistiques. Et j’ai accompagné
cela d’assez près.
Paris est-elle la capitale culturelle de la
Suisse, du moins de la Suisse romande?
Question provocante! Je me souviens, enfant, de l’importance du premier voyage
à Paris. On commençait par la tour Eiffel,
les grands symboles! Et plus on revient,
plus on explore la ville en profondeur.
Naturellement, Paris joue un très grand
rôle pour la Suisse romande. Cela ne nous
empêche nullement d’avoir, à notre
échelle, beaucoup de capitales culturelles. Nous fonctionnons en réseau.
A titre privé, vous visitez quoi à Paris?
Quand j’ai un peu de temps à côté des
séances de travail dont je vous épargne
l’inventaire, je tente de privilégier une
visite coup de cœur. Quelque chose que
je ne vais pas voir forcément en Suisse. La
dernière fois, c’était l’exposition de Bill
Viola au Grand Palais. Un choix très personnel. Avant d’être conseiller fédéral,
c’était plus complet comme programme
de visite à Paris. Mais on va commencer à
venir en famille. Et là, je vais repartir de
zéro: par la tour Eiffel (rires).
Paris et la Suisse ont une longue
histoire. Quel lieu de la Suisse à Paris
feriez-vous visiter à votre
homologue française Fleur Pellerin?
Les 30 ans du Centre culturel suisse
auraient été une bonne occasion de rencontrer Fleur Pellerin dans un lieu suisse.
Cet événement marque précisément notre présence à Paris. Pour des raisons
d’agenda, cela n’a pas pu se faire.
Créerait-on le Centre culturel suisse
à Paris aujourd’hui?
Le soutien et la présence culturelle suisses à l’étranger évoluent. La question se
poserait différemment. A Paris, comme à
Rome, avec la relation soutenue et la
proximité géographique, une présence
physique se justifie toujours. C’est un
support indispensable, mais qui ne suffit
pas. Car les échanges et le réseautage
doivent animer le rayonnement de la cul-
Le 6e roman du Chaux-defonnier Jean-Bernard
Vuillème est une sorte de
remake sociologique et
contemporain d’un conte à
la Perrault. En plus déjanté
C’est parce qu’il y avait semé des
cailloux que le Petit Poucet repéra le chemin de sa maison. Pablo Schötz, le héros du nouveau
roman de Jean-Bernard
Vuillème, lui, use d’une clé mystérieuse, dénichée fortuitement
dans un vieux tiroir, pour tenter
de revisiter toutes celles où il a
vécu depuis son enfance. S’ensuit un périple ébouriffant, à la
VC2
Contrôle qualité
Jean-Bernard Vuillème. DR
fois géographique (géolocalisant)
et autobiographique, qui lui fait
remonter le temps. C’est-à-dire
des étapes de son passé qui furent jalonnées par des domiciles
épars. N’osant introduire impunément son énigmatique sésame
dans les serrures, il frappe aux
Représentations
Vevey Le Théâtre Oriental, où se crée
Mademoiselle Werner, propose à la
suite dès mercredi les deux versions
du monologue, d’abord défendu par
Sylviane Röösli, ensuite par Yann
Mercanton. De me 23 à sa 26 à 20 h,
di 27 à 17 h 30. Rés.: 021 925 35 90.
www.orientalvevey.ch
Lausanne Le CPO, Centre pluriculturel et social d’Ouchy, programme du
1er au 4 octobre uniquement la
version «masculine» de Mademoiselle
Werner. Rés.: 021 616 26 72.
www.cpo-ouchy.ch
Yverdon-les-Bains Au Théâtre de
l’Echandole, les 4 et 5 février prochain, Sylviane Röösli et Yann
Mercanton joueront de nouveau dans
la même soirée. Rés.: 024 423 65 84.
www.echandole.ch
quelques jours, ils étaient encore en répétition. «Nous présenterons exactement le
même texte, si ce n’est qu’il est aménagé
différemment, confie le duo, qui initie,
avec ce projet, sa collaboration. C’est passionnant de voir comme on finit tous les
deux par faire émerger la schizophrénie
de cette femme alors qu’on ne voit ni
n’entend ou ne lit cette schizophrénie de
la même manière.» Plus que la comparaison, c’est la complémentarité des deux
approches qui devrait rendre l’expérience originale pour le spectateur. Du
moins dans les théâtres qui ont choisi de
programmer les deux «options».
Pluralité des interprétations, liberté
de l’acteur, construction du rôle, approche de la mise en scène. Le choc des
points de vue promet, aussi, de plonger le
public directement dans la cuisine théâtrale. «Avec Sylviane, on propose tous les
deux un théâtre qui utilise les codes traditionnels de la scène, mais on aime aussi
aller ailleurs pour creuser la matière, la
folie et les failles humaines. Nous avons
une vraie parenté artistique même si
nous travaillons de façon fondamentalement différente.» Quand l’une prend des
risques, «déverse ses émotions et cultive
l’instant» avant de trouver son fil conducteur, l’autre «travaille plus à la partition»,
se nourrit d’objets pour donner du sens à
ses personnages et définir leur univers
intérieur. Un univers intérieur qui, chez
mademoiselle Werner, devrait virer du
rose au noir et qui, de l’excentricité,
pourrait bien glisser vers plus d’introspection. Une façon de se jouer du masculin et du féminin. Mais pas nécessairement comme on pourrait s’y attendre.
Gérald Cordonier
Visiteur
Le conseiller fédéral en charge
du Département de l’intérieur
a rendu une visite au Centre
culturel suisse pour ses 30 ans.
SIMON LETELLIER
«Nous ne vivons pas
dans un pays où le
ministre de la Culture
dit: «Il faut faire ceci ou
soutenir cela…»
Alain Berset
Chef du Département fédéral
de l’intérieur
ture suisse en France. Si on va ailleurs, on
ne commencerait pas aujourd’hui par
acheter les murs! Mais ne déduisez pas de
cela qu’on a changé de point de vue. Paris
est une ville extrêmement concurrentielle et le Centre culturel suisse a trouvé
sa place. C’est remarquable.
Où doit-on ouvrir des centres culturels
suisses ou des antennes en 2015?
Je dois être terriblement prudent. Pro Helvetia bénéficie depuis sa création, en 1939,
d’une grande autonomie, et c’est très bien.
Nous ne vivons pas dans un pays où le
ministre de la Culture dit: «Il faut faire ceci
ou soutenir cela…» Par contre, je dois
créer les conditions qui permettent à celles et ceux qui ont les réseaux et la con-
Sa vieille clé de porte rouvre des vies antérieures
Littérature
car il nous fournit un matériau assez naïf
et proche de la bande dessiné, quelque
chose de très écrit mais dépouillé, qui n’a
pas de réelle profondeur et autorise, du
coup, de vrais partis pris.» Mademoiselle
Werner est un monologue qui se construit
autour d’une quinzaine de courtes nouvelles. On y découvre une jeune femme
de tempérament qui pourrait être n’importe quelle célibataire endurcie par une
vie bien rangée. Avec sa solitude, avec ses
allers-retours entre réel et existence rêvée, avec son caractère terre à terre qui
camoufle surtout ses petites perversités.
Tour à tour, Sylviane et Yann créeront
ce personnage plein de fissures. Il y a
portes et se fait accueillir diversement par des locataires réfractaires ou accueillants.
Il s’aperçoit que le vieux téléphone à roue mobile a été partout
remplacé par une technologie numérique. Que la vie des couples
s’est encore compliquée. Et que
dans la maison de ses grands-parents, on ne respire plus à la cave
l’odeur du cellier, ni aux cuisines
celle du pain frais.
Le surprend aussi une sorte de
«décadence domestique» animalière qui permet aux souris de
coloniser une maison «infestée
de chats». Les neuf chapitres de
ce récit rétrospectif sont tous pimentés d’observations amusantes de cet aloi – une façon élé-
gante de camoufler le chagrin de
n’être plus un enfant, alors qu’on
n’a pas suffisamment «grandi
dans sa tête».
Parvenir à divertir le lecteur,
tout en lui passant de profondes
inquiétudes, réclame une intelligente contention de ses propres
émois, et une maîtrise éprouvée
des mots qui les sous-entendent et
les sous-tendent. Gilbert Salem
Sur ses pas
Jean-Bernard
Vuillème
Zoé, 256 p.
naissance de pouvoir définir librement les
endroits où la Suisse doit renforcer sa présence culturelle. Ce que je vois, c’est que la
réflexion actuelle porte sur l’Amérique du
Sud. Beaucoup de choses se font aussi en
Inde et en Chine. Qui fonctionnent très
bien sur le mode du réseau à partir d’une
antenne à Delhi et à Shanghai. C’est extrêmement efficace pour ces pays.
Revenons à Paris… L’impression est
que tous les Français savent que
Jacques Brel est Belge, mais qu’ils
ignorent que Jean Villard-Gilles, Le
Corbusier, Giacometti ou César Ritz
sont Suisses. L’expliquez-vous?
On peut le voir de manière positive. C’est
une immense force. Cela montre que ce
Repéré pour vous
Romance au Pays-d’Enhaut
Dans un contexte de Seconde Guerre mondiale
et de militaires internés
en Suisse, un soldat polonais en exil découvre
les réalités du fameux
Réduit alpin, et ses réserves d’or mondial
protégées par l’armée.
Rongé par le souvenir
de sa terre natale, il se
laisse envoûter par les
mystères du Pays-d’Enhaut et
tombe amoureux de l’étonnante
personnalité de Miette, une alerte
enfant de Montbovon.
Troquant son stylo de journaliste contre une plume de con-
teur, notre confrère
Christian Campiche sait
camper ses personnages et réveiller l’âme des
paysages. En promenant un regard résolument candide sur les rives de la Sarine, les pâturages de Château-d’Œx, et jusqu’au
grand chalet de Rossinière. Sans oublier le
bredzon à edelweiss des
armaillis. Gilbert Salem
Montbovon
Christian Campiche
Ed. L’Aire, 136 p.
qui s’est échappé de la Suisse sur le plan
culturel, au sens très large puisque vous
citez l’hôtelier Ritz, a été complètement
intégré ailleurs. Au point que les Français
s’y identifient. Après, on peut être un peu
vexé et se dire que ces grands noms qui se
sont nourris de cette terre, une fois partis,
nous ont oubliés. Ce n’est pas vrai, et peu
importe, au fond, car c’est la diffusion qui
compte. Nous avons en Suisse une approche du soutien à la culture qui diffère des
pays qui nous entourent.
Quelle est la spécificité du soutien
culturel suisse?
Nous ne soutenons jamais un artiste
en lui disant qu’il doit rester à Zurich
ou à Berne, par exemple. Au con-
traire, on leur dit: «Allez-y, allez vous
confronter, aller là où il y a de l’énergie! Partez puis revenez et allez encore plus loin.» Nous fonctionnons
sur l’idée du réseau, des contacts et
de l’émulation. D’autres investissent
plus dans les infrastructures et le
soutien direct. En Suisse, nous sommes conscients que nos artistes ont
besoin de sortir. Notre territoire est
peut-être trop exigu. Du coup, la
Suisse est l’un des pays les plus
ouverts au monde, même si on a de
la peine à l’admettre. C’est ce qui m’a
frappé en voyageant: dans les coins
les plus isolés, il y a toujours un
Suisse. Cette ouverture est l’une de
nos forces.
Sylviane Röösli
et Yann
Mercanton
vont tous les
deux incarner
le même
personnage
sur la scène
du Théâtre
Oriental.
ODILE MEYLAN
Benedikt Taschen fête les 30 ans de démocratisation du beau
Edition
En 1985, le Rhénan lançait
son concept du livre d’art.
Il s’offre un somptueux
cadeau d’anniversaire,
«Bibliotheca Universalis»
Benedikt Taschen, 54 ans, a créé le
livre le plus cher du monde, Helmut Newton’s Sumo, coté à plusieurs milliers de dollars. Mais la
monographie Picasso qui lança sa
maison d’édition en 1985, et tire
encore ses 12 000 exemplaires annuels, vaut à peine une trentaine
de francs. Avec le concept d’un
livre d’art soigné mais pas cher,
Benedikt Taschen ambitionnait
d’impacter l’édition avec autantdeVC2
Contrôle qualité
«Bibliotheca Universalis»: 100 titres réédités dans un moyen
format à un prix modique par la maison Taschen. LDD
glamour que Swatch le monde horloger. Dénichant les experts, soignant l’iconographie, précédant
les tendances, l’éditeur posait sa
griffe sur les tables de salon avec
des livres-objets aussi séduisants
que bon marché. Désormais, il s’en
vend une quinzaine de millions
bon an mal an, dans plus de 25 langues et 100 pays.
Malgré ses triomphes, Benedikt
Taschen passe toujours pour le
«bad boy» des esthètes, encaisse le
mépris de ceux qui considèrent
son travail aussi vain et flashy
qu’une œuvre de Jeff Koons. Le
patron s’en moque: il adore Jeff
Koons, qu’il collectionne dans sa
maison des hauts de Mulholland
Drive. Fou de Walt Disney, et sur-
tout de son dessinateur Carl Barks,
il fait plus qu’appliquer la logique
capitaliste de Picsou à ses affaires.
«Je vis comme un somnambule. De
temps à autre, je bute sur un génie
qui me rend riche, dans ma tête,
mon cœur, mes finances», confiait-il au Huffington Post.
Dans la collection «Bibliotheca
Universalis», une centaine des
plus fastueuses réussites Taschen
s’offrent dans un moyen format,
au prix symbolique de 15 euros.
Joli cadeau d’anniversaire de la
maison trentenaire. De quoi se
royaumer dans les moindres émanations de l’art, des Indiens de
l’Amérique du Nord de Curtis au
Livre des palmiers, de Monet à
Dalí. Cécile Lecoultre
En diagonale
Bienne et la photo
Bilan Les Journées photographiques
de Bienne se sont terminées
dimanche sur «un bilan positif».
Les 22 expos (14 premières mondiales
et 6 suisses) ont été visitées par plus
de 6700 personnes, une fréquentation stable par rapport à 2014. L’an
prochain, l’édition anniversaire des
20 ans aura lieu au printemps. B.S.
La TV des Emmy Awards
Prix «Game of Thrones» a été sacrée
meilleure série dramatique dimanche
aux Emmy Awards et Jon Hamm a
remporté le prix du meilleur acteur
pour son rôle dans «Mad Men». Mais
la soirée a été marquée par le 1er prix
décerné à une comédienne noire,
Viola Davis, pour son rôle dans «How
to Get Away With Murder». ATS

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