Activités de recherche du CERVIM pour le développement de la

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Activités de recherche du CERVIM pour le développement de la
Activités de recherche du CERVIM
pour le développement de la viticulture de coteaux et d'altitude
Sara COLOMBERA, Directeur
Centre de Recherches, d’Études et de Valorisation pour la Viticulture de Montagne,
Loc. Teppe 27, 11020 Quart, Aoste (Italie)
1. Présentation du CERVIM
Le CERVIM (Centre de Recherches, d’Études et de
Valorisation pour la Viticulture de Montagne) est
un organisme international constitué sous les auspices
de l’O.I.V., l’Organisation Internationale de la Vigne et du
Vin. Ce centre, qui œuvre depuis 1987, se propose de
mettre en valeur et d’encourager la viticulture héroïque
et la viticulture de montagne, caractérisées par de fortes
pentes, de petites superficies, des difficultés de gestion,
des coûts de production élevés, mais aussi par une valeur
inestimable du point de vue paysager, socioculturel et
de la protection des versants du risque d’érosion.
"Viticulture héroïque" signifie également des hommes,
qui travaillent avec passion et motivation, qui
se confrontent chaque jour avec une nature rude
et difficile, qui ont été en mesure de créer - au fil
des générations - des chefs-d’œuvre d’architecture rurale
qui doivent être sérieusement sauvés de l’abandon.
- Favoriser la présence de l’homme, la conservation
de l’environnement, la protection du paysage et le maintien
d’un tissu social et culturel dans les zones viticoles de
montagne, car c’est le premier présupposé pour lancer
des processus de développement rural.
- Encourager les solutions visant la protection des territoires
de montagne, ainsi que la réduction des coûts de production
et de transformation du raisin.
- Valoriser la qualité des vins de montagne, en développant
la recherche, l’innovation technologique et la divulgation des
connaissances acquises.
- Se proposer comme organisme de coordination de
la viticulture de montagne auprès des organismes et
des institutions qui œuvrent à l’échelon régional, national
et international.
La viticulture de montagne se caractérise par des difficultés
structurales permanentes telles que la forte pente ou
les conditions orographiques difficiles comme :
- La culture de vignobles sur des pentes de plus de 30 % ;
- La culture de vignobles à une altitude dépassant les 500 m,
exception faite pour les vignobles de hauts-plateaux ;
- Les vignobles en terrasses ou en banquettes.
Les objectifs généraux du CERVIM sont les suivants :
L’activité du CERVIM est également étendue à la viticulture
des petites îles, caractérisée par des difficultés structurales
(par exemple, salinité, impossibilité de mécanisation), par
un isolement réel et permanent et par un contexte structural
et socio-économique pénalisant au point de vue de la rente
des exploitations.
Les régions qui adhèrent aujourd’hui au CERVIM sont
les suivantes :
- Sauvegarder, soutenir, valoriser et encourager la
- Italie : Vallée d’Aoste, Lombardie, Piémont, Ligurie, Sicile,
Figure 1- Vignoble de Banyuls
viticulture de montagne et/ou en conditions orographiques
difficiles (fortes pentes et terrasses).
Province Autonome de Bozen, Province Autonome de Trente
et Province de Reggio Calabria
- Entretenir des rapports avec des organismes publics et
- Suisse : Canton du Valais
privés qui s’occupent de protection et de valorisation du
secteur vitivinicole, éventuellement en stipulant des
accords et des conventions.
- Espagne : Galice
- Favoriser des initiatives techniques, scientifiques,
- Allemagne : Rhénanie-Palatinat.
culturelles et promotionnelles concernant la viticulture
de montagne, y compris l’organisation de concours sur
les vins de montagne.
En outre, des organismes régionaux représentent aussi les
Abruzzes (IT), la Wachau et la Styrie (A), Banyuls-Collioure et
la région Rhône-Alpes (F), ainsi que le canton du Tessin (CH).
- Portugal : Douro
2. Les activités du Centre
Les activités principales du CERVIM concernent essentiellement
quatre secteurs d’intervention.
2.1- La coordination
À l’échelon international, le CERVIM coordonne des activités
de recherche sur les thèmes suivants : techniques vitivinicoles,
environnement et paysage, aspects socio-économiques
du secteur dans les zones de montagne ou en forte pente.
Ces dernières années, le CERVIM a effectué un recensement
important de la viticulture de montagne. Il s’agit d’un passage
fondamental, car cela nous permet aujourd’hui de connaître
la situation : plus de 500 000 personnes concernées et
plus de 200 000 exploitations qui occupent une superficie
de 110 000 hectares environ, ce qui équivaut à 3 % environ
de la surface plantée de vignes en Europe.
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développement de la viticulture de coteaux et d’altutide
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Le tableau brossé par ce recensement confirme l’importance
économique de la filière vitivinicole dans les régions
européennes de montagne et/ou à viticulture difficile, et
il met en évidence son rôle socio-économique et
environnemental.
Le dernier projet mené à terme, le projet CRAFT « Eagle
Wines » coordonné par le CERVIM, a fourni une contribution
à l’étude des cépages autochtones dans 6 zones
européennes différentes, toutes caractérisées par
une viticulture difficile. Afin de contribuer à la connaissance
des cépages autochtones de montagne et
à leur développement, le projet a été conçu avec
les objectifs suivants :
1 - Évaluation des potentialités agronomiques et
œnologiques de quelques cépages locaux :
- Identification des cépages autochtones de moindre
intérêt (souvent déjà décrits du point de vue
ampélographique), adaptés à la propagation et
à l’utilisation.
- Évaluation de leur comportement agronomique et
phénologique et de leurs caractéristiques pour ce qui
est de la culture.
2.2- La communication
Afin de faire connaître cette activité de recherche et
pour constituer un réseau de communication et d’échange
d’expériences entre tous les sujets concernés, le CERVIM
s’est engagé à constituer un centre international de
documentation sur la viticulture de montagne et en
forte pente.
Ce projet prévoit la réalisation d’une bibliothèque
multimédia composée d'archives et de travaux sur papier
(librairies, classeurs pour photos, etc.), d'archives sur
support informatique (CD-rom, DVD, etc., rangés dans
des classeurs adéquats et PC à disposition pour les
visionner), et d'archives de films.
Pour compléter ce projet, il faudra également réaliser
un portail Internet, au sein duquel il y aura une section
"Centre de Documentation", comprenant un catalogue
en ligne par zone thématique, la publication des derniers
travaux parvenus au Centre (sur support informatique)
et la publication de la liste mise à jour à envoyer par
"newsletter" périodique à des adresses sélectionnées.
- Évaluation des performances des cépages analysés
en relation avec le climat, le sol et les conditions
de culture.
- Évaluation du potentiel œnologique des cépages
en voie d’expérimentation, en vinifiant les différentes
variétés à petite ou à moyenne échelle.
- Mise au point de protocoles de vinification adaptés.
- Obtention du profil et évaluation sensorielle de chaque
vin issu d'une vinification mono-cépage
2 - Développement de la coopération et de la synergie
entre les petites et moyennes entreprises
Afin de faire le point sur la recherche dans le secteur
vitivinicole de montagne et de mettre en contact
les différents sujets impliqués dans cette activité, le CERVIM
a organisé le Premier Congrès international sur la Viticulture
de Montagne et en Forte Pente, qui s’est déroulé à SaintVincent (Vallée d’Aoste – Italie) les 17 et 18 mars 2006.
Ce Congrès a été organisé avec la collaboration de la
Région Autonome de la Vallée d’Aoste et avec le parrainage
de l’O.I.V. Plus de 300 spécialistes (professeurs
universitaires, chercheurs, techniciens du secteur
vitivinicole, étudiants et opérateurs) ont pris part
aux travaux.
Les congressistes venaient de 6 pays européens (Portugal,
Espagne, France, Suisse, Allemagne et Italie), ainsi que
du Brésil et d’Amérique du Nord. Dans l’ensemble,
51 travaux de recherche ont été présentés.
Figure 3- Vignoble de Valtellina
La communication scientifique et l’action médiatique visant
la divulgation des thèmes concernant la viticulture de
montagne s’adressent aux experts de ce secteur et, plus
récemment, au grand public.
Parmi les différentes activités du CERVIM, il faut signaler
la création d’un bureau de presse, la publication du numéro
annuel de la revue Viticulture de Montagne, la collaboration
avec les revues internationales du secteur vitivinicole,
en programmant des publications concernant la viticulture
de montagne et les territoires associés. Bientôt, une
"newsletter" périodique sera réalisée et un livre sur
la viticulture de montagne sera publié.
Tout cela dans le but de faire connaître et apprécier
la viticulture héroïque et/ou la viticulture de montagne.
Communiquer le charme, la passion et les efforts qui se
cachent souvent derrière des étiquettes - qui ne rendent
pas justice à tout le travail nécessaire avant d’arriver au
produit fini - signifie créer une valeur ajoutée indispensable
pour permettre la survie de réalités qui seraient, autrement,
à la merci des changements économiques internationaux.
Figure 2- Vignoble de Aymavilles
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2.3- L’organisation du Concours International
des Vins de Montagne
Ce concours œnologique, organisé par le CERVIM sous
le parrainage de l’O.I.V., est le plus important à l’échelon
mondial en ce qui concerne les vins produits en montagne ou
dans des conditions extrêmes. Il s’agit d’une initiative qui vise
à encourager et à mettre en valeur la production œnologique
de ces zones, particulièrement difficiles à planter de vignes.
Le but est de faire connaître la qualité élevée et le caractère
typique de ces vins, ainsi que de récompenser les efforts
des maisons vigneronnes qui œuvrent dans ces terroirs.
531 vins ont été présentés à l’édition 2005. Les échantillons
provenaient de plusieurs pays européens (France, Suisse,
Allemagne, Luxembourg, Grèce, Portugal, Espagne et Hongrie)
et de nombreuses régions italiennes (vallée d’Aoste,
Piémont, Lombardie, provinces de Trente et de Bozen,
Abruzzes, Ligurie, Vénétie, Campanie, Calabre et Sicile).
L’évaluation des vins est effectuée par des commissions
internationales. Tous les vins sélectionnés qui ont obtenu
une note supérieure ou égale à 90 points reçoivent la
médaille d’or, les vins ayant obtenu de 85 à 89 points
reçoivent la médaille d’argent.
2.4- Action du CERVIM au niveau institutionnel
Cette action vise à obtenir la juste reconnaissance pour
la viticulture de montagne et/ou en forte pente.
3. Les principes
Le capital technique et humain accumulé dans les zones
difficiles de montagne est partout en train de se désagréger.
L’abandon des activités productives précède de peu
l’abandon de la résidence. Ce déclin est presque toujours
la conséquence du manque d’activités particulières en
mesure de mettre en valeur des conditions impossibles
à reproduire ailleurs qu’en montagne.
Dans ce cadre général négatif, la viticulture de montagne
s’avère étonnamment résistante et relativement florissante.
Cela est vrai autant dans les zones alpines que dans les
zones méditerranéennes.
Figure 4- Vignoble de Valle Bormida
Les zones qui sont associées au CERVIM regroupent
110 000 hectares de vignobles environ, ce qui équivaut
à 3 % seulement de toute la surface plantée de vignes
en Europe.
Malgré son incidence relative sur le vignoble européen,
l’importance de la viticulture héroïque apparaît clairement
lorsque l’on considère les valeurs socio-économiques
qu’elle représente.
La ténacité nécessaire pour le dur labeur dans les vignobles
en terrasses et dans les petites maisons vigneronnes a,
de fait, sélectionné des personnes enthousiastes et
motivées, qui constituent vraisemblablement un capital
humain unique. La vinification est entièrement effectuée
dans les zones de production. Il s’agit, pour la plupart,
d’exploitations viticoles et artisanales, liées au vignoble
familial, aux dimensions proportionnées par rapport à
leur capacité de production.
La plupart du vin ainsi obtenu appartient à des appellations
d’origine bien connues et ces produits sont fortement
caractérisés par la combinaison des cépages, du climat
particulier et des techniques de production. Dans certaines
zones, une partie du vin est exportée sur les marchés
extra-européens. La majorité du vin, toutefois, reste dans
son pays de production et est destinée à la consommation
locale et régionale.
Le contact avec la réalité viticole et avec ses acteurs
permet à de nombreux consommateurs d’acquérir
de véritables connaissances quant à l’origine, aux conditions
de production, à la valeur organoleptique et artisanale
du produit qui leur est offert.
En définitive, ce qui a vu le jour autrefois pour atténuer
la misère rurale et la pauvreté de l’autarcie alimentaire dans
certaines zones montagnardes et méditerranéennes finit par
devenir un modèle symbolique et opérationnel pour tout
le secteur vitivinicole, et un instrument indirect de politique
économique en faveur de toute la collectivité des zones
difficiles. L’ensemble des zones associées au CERVIM,
avec leurs caractéristiques et leurs évolutions, démontrent
qu’il faut reconnaître de façon explicite les particularités
de la viticulture héroïque. Cela contribue directement à
sauver le tissu humain qui reste, dans de nombreuses
communautés de montagne, souvent sans alternatives
possibles. Cela maintient productif ce capital technique
accumulé avec tant de sagacité et d’abnégation par les
générations précédentes et qui est impossible à reproduire.
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développement de la viticulture de coteaux et d’altutide
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