Non, le G7 n`est pas has been
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Non, le G7 n`est pas has been
éditorial Non, le G7 n’est pas has been Jean-Marc Daniel L e rituel de juillet a rassemblé au Japon ce que chacun appelle désormais le G8. En fait, il convient de préciser qu’il s’agit du G7, auquel on ajoute la Russie. Argutie que de présenter ainsi les choses, pourrait-on dire. Mais non, subtilité réellement fondée. Car le G7 (états-Unis, Japon, Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie, Canada) constitue un ensemble homogène de pays qui, à la création de cette institution, étaient présentés comme les sept principales économies du monde. Or, à regarder les statistiques, on s’aperçoit que c’est toujours le cas… Ce que disent les chiffres Certes, il est de bon ton de s’extasier devant les performances de l’Inde ou de la Chine. Pourtant, face à la mode et à ses enthousiasmes éphémères, il y a les chiffres. Du PIB mondial, qui représente 60 000 milliards de dollars, le G7 fournit encore et toujours la moitié… D’ailleurs, les dirigeants de cette Chine qui impressionne tant connaissent et reconnaissent les limites présentes de leur pays. Ils se félicitent que ce dernier, qui en 1978 était le pays le plus pauvre de la planète, ait laissé ce triste privilège à certains pays africains. Mais ils savent qu’il reste, eu égard à sa popula- • Sociétal n°61 tion, une économie sous-développée, où 800 millions de paysans produisent ce que pourraient produire 40 millions s’ils avaient la productivité des agriculteurs européens ou américains. Aussi se donnent-ils comme objectif de rattraper le PIB du Japon en 2020, avec une population qui sera alors douze fois plus nombreuse ! Le taux d’investissement, c’est-à-dire le ratio entre le montant des investissements et le PIB, est en Chine de 48 %, taux qui fait fantasmer bien des économistes. Et pour en rajouter sur le thème du déclin des économies traditionnelles, on n’hésite pas à comparer avec emphase ce taux chinois à son équivalent américain, qui n’est que de 19 %. Seulement, compte tenu des montants de PIB en jeu, le niveau effectif de l’investissement est beaucoup plus élevé aux États-Unis qu’en Chine. En pratique, chaque année, les Américains investissent plus que l’équivalent du PIB chinois… Au moins, on peut considérer que, parmi les pays émergents ayant axé leur croissance sur leur insertion dans le marché mondial, ils occupent les places de premier rang en termes d’exportations. Le premier exportateur mondial serait donc la Chine ? Réponse : non, c’est l’Allemagne. Elle exporte pour 1 330 milliards de dollars ; ce qui fait qu’elle représente à elle seule 10 % des exportations mondiales alors qu’elle ne compte que pour 1,5 % de la population de la planète. La Chine, pour sa part, exporte 890 milliards de Non, le G7 n’est pas has been dollars ou 1 235 milliards de dollars, si l’on tient compte de Hongkong. Parmi les pays asiatiques, le Japon a cessé de faire rêver. Présenté comme une référence par les commentateurs en vogue des années 1970-1980, comme le lieu où allait se concentrer le pouvoir économique mondial, il ne semble aujourd’hui plus intéresser personne. Après avoir fait du Japon des années 1980 l’avenir du monde, on l’ignore superbement pour n’avoir d’yeux que pour Shanghai et Bangalore. Ne nous y trompons pas pour autant, ce pays est toujours la deuxième économie mondiale, il dispose d’un PIB équivalant au tiers de celui des États-Unis et à presque deux fois celui de la Chine ! Le redressement de pays comme la Chine ou l’Inde, qui ont accédé à un sentier de croissance insoupçonnable il y a encore trente ans, ne doit pas nous aveugler. Le monde développé, celui qui s’incarne dans le G7, demeure à la pointe de l’activité économique. Sa prédominance, que traduisent les données sur le PIB, se concrétise aussi de façon quasi emblématique sur le plan monétaire. Que ce soit dans les échanges internationaux, que ce soit dans les réserves des banques centrales, que ce soit dans la vie quotidienne de la plupart des habitants de la planète, les monnaies qui circulent sont du dollar, de l’euro et du yen. L’économie mondiale vit au rythme des décisions des banquiers centraux de Washington, de Francfort et de Tokyo. Cette prédominance se mesure également dans les dépenses de recherche et développement, celles qui préparent l’avenir. D’après l’OCDE, ces dépenses s’élèvent à 100 milliards de dollars en Chine, le même niveau qu’au Japon, contre 250 milliards aux États-Unis et 200 milliards dans l’Europe des Vingt-Sept. Revanche du Sud ! ? Ceux qui annoncent pompeusement que l’émergence des pays autrefois en léthargie économique constitue une « revanche du Sud » face aux pays du Nord ignorent trois choses : d’abord qu’à ne regarder que des taux de croissance, que des ratios, on passe souvent à côté de la simple et stricte vérité. Un taux de croissance s’applique à une base et quand celle-ci est réduite, une croissance forte signifie dans la réalité des chiffres bruts encore limités. Ensuite qu’un taux de croissance ne s’apprécie que sur le long terme. Enfin, que la seule revanche à prendre par les pays du Sud est une revanche sur les raisons qui auparavant les empêchaient de croître. Quel a été en 2007 le plus fort taux de croissance du monde : la Chine ? Non, la Slovaquie. Dans les deux cas, ce taux a tourné autour de 10 %, faisant de ces deux pays des modèles de dynamisme. Et ce qu’ils ont en commun, c’est d’avoir vu dans le passé leurs potentialités étouffées par le totalitarisme communiste. Quant à l’Inde, elle a pris son envol dès qu’elle a abandonné le protectionnisme et les stratégies de développement centrées sur des entreprises publiques en permanente agonie. Aujourd’hui ce sont des économies détruites par les absurdités dirigistes qui renaissent, respirent, se développent et connaissent une croissance spectaculaire. Leur revanche, s’il y en a une, ne s’inscrit contre personne, elle est la revanche naturelle et renouvelée de la liberté d’entreprendre sur l’omnipotence paralysante des bureaucrates. Que de nouveaux pays sortent de leur misère, il faut d’autant plus s’en réjouir que c’est grâce à la libéralisation de leur économie. Mais de là à en faire des puissances incontournables, des points fixes sur lesquels appuyer l’avenir, il y a encore un pas… 3 ème trimestre 2008 •