Tempête sous un crâne rasé au Théâtre Garonne Vu au Garonne

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Tempête sous un crâne rasé au Théâtre Garonne Vu au Garonne
Tempête sous un crâne rasé au Théâtre Garonne
Vu au Garonne
Du 08/04/2014 au 11/04/2014
Un couple, au fond d'une salle vide de restaurant. Tous deux viennent de se retrouver par hasard.
On apprendra plus tard qu'elle a été son étudiante et qu'elle l'a quitté avant qu'il ne se décide à
quitter sa femme. Ému, bouleversé et maladroit, lui s'engage et s'englue dans de pompeuses
conversations sur l'art, le romantisme, la chapelle Sixtine qu'il qualifie d ‘art baroque. Elle, ne
lâchant rien mais non sans humour, le reprend «Baroque ? Non Pure Renaissance Italienne».
Ils évoquent ensuite un voyage raté en Grèce, alignent leurs idées reçues sur l'Inde où ils ne
sont, ni l'un ni l'autre, jamais allés.. Par moments, lui soliloque, enfermé dans ses pensées,
indifférent à sa répulsion à elle, racontant ainsi les détails atroces d'une autopsie à laquelle il a
dû assister la veille et qui le hante encore.
Tous deux parlent de tout et de rien, allant jusqu'à aborder la problématique des frigos
encastrables, n'arrivant pas, évidemment à parler du seul sujet qui les intéresse : eux et leur (im)
possible amour. Eux et leurs retrouvailles (im) possibles.
Présenté jusqu'à ce samedi au théâtre Garonne par la Cie de Koe, «L'homme au crâne rasé»,
très librement inspiré (et réécrit) du roman éponyme de Johan Daisne, est une joute verbale
sentimentale, d'une vérité, d'une justesse, mais aussi d'une sensibilité extrêmes, tant le jeu
expressif mais aussi les voix, l'intonation et le rythme, doux comme la nostalgie et claquant la
perte, des deux comédiens, Peter Van den Eede et Natali Broods, enveloppent et emportent le
spectateur.
Grâce à connivence établie subtilement avec l'assistance, que Natali Broods prend à
partie,«Vous n'avez pas un mouchoir à me passer ? » demande-t-elle ainsi tout à trac au public,
ou plus tard quand Peter s'étend sur le «vert pistache du foie de l'autopsié, englobant la salle
d'un geste : «Tu ne vas pas nous infliger ça… », les spectateurs se retrouvent intégrés, concernés
dans cette joute qui devient miroir de chacun. Sans se sentir voyeurs, mais plutôt complices et
surtout retrouvant des bribes d'eux-mêmes ou de leur propre histoire dans les propos de l'un ou
de l'autre. L'homme, enfermé dans son incapacité à dire, la femme dans celle d'être écoutée et
aimée pour ce qu'elle est «Tu aimes la femme qui est en moi ? Ravie d'apprendre qu'il y aune
étrangère qui m'habite » assène Natali, à Peter, qui ne comprend mot…
C'est juste, vrai subtil, plein de choses sont dites et c'est un moment rare, vif, drôle, tendre et
fascinant à ne pas manquer pour ceux qui veulent voir, une heure trente durant, un théâtre qui
leur fera oublier tout. Sauf l'essentiel.
Jusqu'au samedi 11 avril à 20 heures au théâtre Garonne, 1 avenue du Château d'Eau. De 11 à
22 €. Tel : 05 62 48 54 77
Nicole Clodi, publié le 08/04/2014