Quand les souris se redressent
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Quand les souris se redressent
Perspectives 30 31 ergonomie Quand les souris se redressent Vendues comme plus ERGONOMIQUES, les souris informatiques verticales ont, à ce jour, peu fait l’objet d’études. Sont-elles réellement moins sollicitantes que les souris traditionnelles, permettent-elles de travailler aussi rapidement, sont-elles appréciées par les utilisateurs, quel est leur meilleur emplacement sur le plan de travail ? C’est à ces questions que l’INRS s’est intéressé. I nventée en 1963 par l’américain Engelbart, la souris informatique ne fera son apparition dans les bureaux que bien plus tard. D’abord à boule, ensuite optique, avec puis sans fil, ce dispositif de pointage pour ordinateur a conservé une même forme pendant longtemps. Elle impose une pronation de la main à 90° par rapport à la verticale, position de l’extrémité du membre supérieur qui n’est pas neutre. En effet, la position neutre est obtenue lorsque la main est inclinée de 30° par rapport à la verticale 1. Dans le but de respecter ce principe de neutra lité en assurant une prise en main plus naturelle des souris dites verticales apparaissent réguliè rement sur le marché depuis quelques années. Elles peuvent être classées en deux catégories, selon leur inclinaison par rapport à la verticale, de l’ordre de 20° ou de 60°. Bien qu’il existe une forte demande les concer nant, notamment de la part de personnes souf frant du poignet, ces souris ne sont aujourd’hui vendues pratiquement que sur Internet. Leur prix peut être jusqu’à dix fois supérieur à celui d’une souris traditionnelle. En matière de position nement, la souris traditionnelle est habituelle ment disposée à côté du clavier. Cependant, une équipe de recherche 2 recommande de la placer devant soi quand le clavier est peu utilisé. Sur le plan scientifique, les souris verticales ont fait l’objet de très peu de recherches jusqu’à présent, et il en est de même pour le positionnement des souris sur le plan de travail. pointage, le simple et double cliquage, le dépla cement d’objet sur l’écran et aussi la reprise de la souris après frappe sur le clavier. Avec chaque souris, trois emplacements sur le plan de travail ont été testés : à côté du clavier, devant le clavier et en position libre sans clavier. Selon les recommandations de l’INRS 3, le poste de travail était réglé de façon que les pieds du sujet reposent à plat sur le sol, que l’angle entre son bras et son avant-bras soit d’au moins 90°, que sa main utilisant la souris soit dans le pro longement de son avant-bras, et que le haut du moniteur soit à hauteur de ses yeux. Enfin, l’éclai rement du plan de travail était compris entre 300 et 500 lux. Une souris bien positionnée Au cours des exercices, ont été enregistrées des données concernant les sollicitations de diffé rents muscles de l’avant-bras, du bras et du cou, les angles du poignet et de l’épaule ainsi que le ressenti et la performance. Quel que soit l’empla cement de la souris sur le plan de travail et quelle que soit la tâche effectuée, l’activité des muscles de l’avant-bras était moindre avec les souris ver Les deux modèles de souris verticales utilisés lors de l’étude Afin d’évaluer le bénéfice des souris verticales par rapport à la souris traditionnelle ainsi que de leur emplacement sur le plan de travail, l’INRS a mené une étude en laboratoire. Dix-huit femmes de moins de 40 ans familiarisées avec la bureautique ont testé trois souris : une souris traditionnelle, une souris verticale présentant une inclinaison de 25° (V25) et une avec une inclinaison de 55° (V55). Les tâches à réaliser étaient celles couramment effectuées lors d’activités sur ordinateur comme le travail & sécurité – n° 762 – juin 2015 Modèle V25 Modèle V55 © Anne-Christel Rolling pour l’INRS Forme, emplacement : quels compromis ? perspectives © Anne-Christel Rolling pour l’INRS La position du bras en fonction du type de souris utilisé ticales, ce qui avait déjà été constaté dans des études précédentes 4. Par ailleurs, la souris V25 sollicitait davantage le muscle du bras enregistré que les deux autres. Selon la norme ISO 11228-3 5, le poignet restait dans les zones de confort avec les trois souris. La souris V25 était jugée comme la plus difficile à utiliser et la durée de réalisation des tâches était plus élevée avec celle-ci qu’avec les autres. Ainsi, la souris verticale V55 apparaît comme le meilleur compromis entre sollicitations et performance par rapport à la souris verticale V25 et la souris traditionnelle. Quelle que soit la souris utilisée, la performance et le ressenti étaient meilleurs quand elle était placée librement (sans clavier). Chez tous les participants, cet emplacement se situait entre les deux positions imposées, légèrement plus proche de celle à côté du clavier. Ce positionne ment nécessite l’absence du clavier, ce qui est peu habituel dans la pratique quotidienne. À propos des deux autres emplacements, le tra vail était jugé un peu plus confortable et la per formance légèrement meilleure lorsque la souris était placée à côté du clavier que devant le cla vier. En revanche, les sollicitations musculaires et angulaires étaient plus élevées lorsque la souris était placée à côté du clavier. De ce fait, inciter les opérateurs à placer leur souris devant le cla vier, lorsque celui-ci est peu utilisé, constitue une alternative utile pour réduire les sollicitations musculosquelettiques. Quels que soient la souris utilisée et son empla cement sur le plan de travail, de toutes les tâches effectuées, la reprise de la souris après frappe sur le clavier était la tâche la plus sollicitante. Elle est donc à réduire au cours de l’activité de travail. n 1. Norme NF EN ISO 9241-410 : Ergonomie de l’interaction homme – système : critères de conception des dispositifs d’entrée physiques. Afnor, 2008. 2. « Changes in upper extremity biomechanics across different mouse positions in a computer workstation » – J. Dennerlein, P. Johnson. Ergonomics, 2006. 3. Écrans de visualisation, santé et ergonomie – F. Cail. INRS, ED 924, 2014. 4. « The effect on forearm and shoulder muscle activity in using different slanted computer mice » – H.-M. Chen, C.-H. Leung. Clinical Biomechanics, 2007 ; « Computer mouse use in two different hand positions: exposure, comfort, exertion and productivity » – E. Gustafsson, M. Hagberg. Applied Ergonomics, 2003 ; « Providing training enhances the biomechanical improvements of an alternative computer mouse design » – A. Houwink, K. Hengel K., D. Odell, J. Dennerlein. Human Factors, 2009. 5. Norme NF ISO 11228-3 : Ergonomie – Manutention manuelle – Partie 3 : manipulation de charges faibles à fréquence de répétition élevée. Afnor, 2007. François Cail et Clarisse Gaudez travail & sécurité – n° 762 – juin 2015