Avis de santé publique sur les impacts de l`implantation de salons

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Avis de santé publique sur les impacts de l`implantation de salons
Avis de santé publique sur les impacts
de l’implantation de salons de jeux au Québec
Région de Laval
2
Agence de la santé et des services sociaux de Laval - Direction de santé publique
Avis de santé publique sur les impacts
de l’implantation de salons de jeux au Québec
Région de Laval
Direction de santé publique
3
publique
Agence de la santé et des services sociaux de Laval - Direction de santé
La présente publication a été rendue possible grâce à la collaboration des personnes suivantes :
Auteurs
Dr Nicole Damestoy, directrice de santé publique de Laval
François Godin, agent de planification et programmation
Remerciements
Cet Avis sur les impacts de l’implantation de salons de jeux au Québec, région de Laval a été élaboré par
la Direction de santé publique de l’Agence de la santé et des services sociaux de Laval. Les personnes
suivantes ont collaboré à la réalisation du présent avis. Nous les remercions sincèrement.
Marie-Reine Corbeil, agente de planification, programmation et recherche
Alejandra Irace-Cima, médecin résidente en santé communautaire
Alexandre St-Denis, agent de planification et programmation
Coordination
Alain Carrier, directeur adjoint-programmes
Collaboration à la production
Martine Caza-Lenghan, responsable aux communications
Conception et mise en page
Hélène Major, secrétaire
Collaboration spéciale
Nous remercions aussi les personnes suivantes pour leurs judicieux commentaires au cours de la
préparation de cet avis :
Geneviève Barlow, Centre le Maillon (Centre jeunesse de Laval)
Nicole Beaudry, Centre de santé et de services sociaux de Laval
Jenny Charest, Direction de santé publique des Laurentides
Serge Chevalier, Direction de santé publique de Montréal-Centre
Diane Demers, Agence de la santé et des services sociaux de Laval
Valérie Houle, Direction de santé publique de la Capitale Nationale
Élizabeth Papineau, Institut national de santé publique du Québec
Isabelle Paradis, Direction de santé publique de l’Outaouais
Jean-Guy Vallée, Direction de santé publique de Laval
Dans ce document, le générique masculin est utilisé dans le seul but d’alléger le texte et désigne aussi bien les
femmes que les hommes.
Direction de santé publique
Agence de la santé et des services sociaux de Laval
800, boulevard Chomedey, tour A
Laval (Québec) H7V 3Y4
Tél. (450) 978-2000
Toute reproduction en tout ou en partie est interdite sans
le consentement de la Direction de santé publique de
Laval, à moins d’en mentionner la référence.
Agence de la santé et des services sociaux de Laval - Direction de santé publique
Février 2007
1
Table des matières
1. TERRITOIRE ET POPULATION DE LA RÉGION DE LAVAL ............................................................. 3
2. LES LAVALLOIS AU REGARD DU JEU ET DES AUTRES DÉPENDANCES......................................... 4
2.1
2.2
2.3
2.4
2.5
Une plus grande dépendance à l’alcool qu’au jeu..........................................................................................4
Une problématique en émergence chez les jeunes .......................................................................................4
La participation des Lavallois aux jeux de loteries vidéo................................................................................5
Les joueurs qui consultent les services spécialisés .......................................................................................5
Jeux de hasard et d’argent : portrait des besoins de la population lavalloise................................................5
3. LES SERVICES EN PRÉVENTION ET EN TRAITEMENT DU JEU À LAVAL ......................................... 7
3.1
Promotion et prévention .................................................................................................................................7
3.2
Les services généraux ...................................................................................................................................7
3.3
Les services spécialisés.................................................................................................................................7
3.4
Les autres ressources dans la communauté..................................................................................................8
3.5
Le plan d’action régional et le mécanisme d’accès aux services ..................................................................8
4. L’OFFRE DE JEU ET LE PROJET DE SALON DE JEU LAVALLOIS ................................................... 9
4.1
Le nombre d’ALV dans la région de Laval......................................................................................................9
4.1.1 Une augmentation du nombre d’appareils......................................................................................................9
4.1.2 Un ratio ALV/population en augmentation....................................................................................................10
4.2
L’emplacement des ALV ..............................................................................................................................10
4.2.1 Des ALV concentrés dans les quartiers défavorisés ....................................................................................11
4.3
La localisation géographique du projet d’hippodrome et salon de jeu..........................................................12
4.4
Un projet d’envergure à surveiller.................................................................................................................12
5. LES ENJEUX SPÉCIFIQUES RELIÉS AU PROJET LAVALLOIS ...................................................... 13
5.1
Des risques pour la santé publique ..............................................................................................................13
1er risque ..............................................................................................................................................13
2e risque ...............................................................................................................................................15
5.2
Augmentation de la participation au jeu .......................................................................................................15
5.3
Augmentation de la prévalence des problèmes de jeu.................................................................................15
5.4
Les dépenses de jeu ....................................................................................................................................15
5.5
Un casino régional?......................................................................................................................................16
5.6
L’accès aux espaces de jeux : variable centrale pour comprendre l’incidence des dépendances et des
problèmes psychosociaux ............................................................................................................................16
3e risque ...............................................................................................................................................17
5.7
Les courses de chevaux et les ALV : une cohabitation à haut risque .........................................................17
4e risque ...............................................................................................................................................18
5.8
La pression sur les dispensateurs de services.............................................................................................19
5e risque ...............................................................................................................................................19
CONCLUSION ............................................................................................................................ 20
Figure 1 :
Figure 2 :
Tableau 1 :
Figure 3 :
Figure 4 :
2
Portrait des besoins de la population lavalloise au regard des jeux de hasard et d’argent ..................................... 6
Portrait des services en dépendances disponibles à Laval - Année 2006............................................................... 8
Nombre d’ALV dans la région de Laval ................................................................................................................... 9
Emplacement des ALV dans la région de Laval – Année 2006............................................................................. 10
Carte régionale avec indices de défavorisation ..................................................................................................... 11
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1. TERRITOIRE ET POPULATION DE LA RÉGION DE LAVAL1
Comptant 365 623 habitants2, le territoire de Laval est d’une superficie de 242,4 km2. Située au
sud-ouest du Québec, la région est entourée des rivières des Prairies et des Mille-Îles et du Lac
des Deux-Montagnes. La municipalité qui lui correspond, Ville de Laval, s’étend sur une trentaine de kilomètres, de l’est à l’ouest, et sur une dizaine de kilomètres, du nord au sud, selon un
schéma irrégulier. Laval occupe une position unique au Québec puisqu’une municipalité, une
municipalité régionale de comté et une région administrative et sociosanitaire s’y superposent.
Résolument urbaine, Laval occupe le septième rang des régions les plus populeuses du Québec.
La population lavalloise se répartit de la façon suivante : près d’une personne sur cinq est
mineure (moins de 17 ans) ou jeune adulte (18 à 34 ans), un peu plus de quatre personnes sur
dix sont des adultes (35 à 64 ans) et une personne sur huit est âgée de 65 ans et plus3. Bien
que la population soit en croissance, le nombre de personnes mineures diminuera constamment, alors que celui des aînés augmentera régulièrement.
Au plan socioéconomique, plusieurs observateurs considèrent que la région traverse une période de relative prospérité. Le revenu personnel par habitant était à Laval, en 2005, à 31 160 $, ce
qui est légèrement supérieur à celui de l’ensemble de la province (29 499 $)4. La région de Laval
compte cependant 54 190 personnes (16 %) vivant sous le seuil de faible revenu : 20 % des
familles lavalloises sont monoparentales, ce qui représente 8 815 familles, alors que 9 % de la
population est constituée de personnes vivant seules, soit 31 795 personnes5. Un nombre
significatif de Lavallois est donc défavorisé sur le plan socioéconomique et vit une situation
précaire. Ces personnes, habitant dans l’ensemble du territoire lavallois, se concentrent particulièrement dans certains quartiers : Pont-Viau, Laval-des-Rapides, Chomedey et Saint-François.
1
2
3
4
5
Données tirées du Profil sociosanitaire de la population lavalloise, Direction de santé publique, août 2006.
Projections de population de l’Institut de la statistique du Québec (ISQ), mise à jour, édition 2003.
Recensement canadien de 2001.
ISQ, 2006.
Recensement canadien de 2001.
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2. LES LAVALLOIS AU REGARD DU JEU ET DES AUTRES DÉPENDANCES
Pour bien cerner l’ampleur des problèmes reliés à la pratique des jeux de hasard et d’argent
chez les Lavallois, nous avons d’abord comparé les données s’y rapportant avec celles existantes concernant d’autres dépendances. La participation aux jeux de hasard et d’argent ainsi que
la consommation d’alcool et de drogues partagent, en effet, plusieurs caractéristiques. La
majorité des Lavallois ne présentent pas de problèmes lorsqu’ils s’adonnent aux jeux de hasard
et d’argent6. Tout comme une majorité d’entre eux consomment de l’alcool sans que cela
n’occasionne de difficultés.
2.1 Une plus grande dépendance à l’alcool qu’au jeu
En matière de consommation d’alcool, la population lavalloise se situe dans la moyenne provinciale. En 2002, on établissait à environ 2 % la proportion des personnes âgées de 15 ans et plus
consommant de l’alcool aux prises avec une dépendance. Les buveurs à risque de 12 ans et
plus (5 consommations et plus en une seule occasion, une fois par semaine ou plus) comptaient
pour 4,8 % de la population7. Les données concernant les consommateurs de drogues illicites
indiquent par ailleurs que 0,9 % en sont dépendants8.
Les dernières données québécoises indiquent que les taux de joueurs pathologiques probables et
de joueurs à risque sont respectivement de 0,8 % et 0,9 % 9. Ces taux appliqués aux Lavallois âgés
de 18 ans et plus représente environ 4 900 personnes10. Les Lavallois éprouvant des problèmes liés
aux jeux de hasard et d’argent sont peu nombreux en proportion de la population adulte totale de la
région. Toutefois, les problèmes de ces personnes n’en sont pas moins importants et leurs multiples
conséquences se révèlent souvent désastreuses. Nous y reviendrons.
2.2 Une problématique en émergence chez les jeunes
La situation des jeunes lavallois concernant le jeu et la consommation de substances psychotropes se compare aussi à celle observée dans les autres régions du Québec. La pratique des
jeux de hasard est une problématique en émergence : les jeunes d’aujourd’hui forment la
première génération exposée à une offre de jeux intense, dans un contexte social tendant à la
banaliser.
Les données disponibles concernant les jeunes laissent présager une plus grande vulnérabilité
de ceux-ci vis-à-vis les jeux de hasard et d’argent que chez les adultes11. En 2002, 51 % des
élèves ont déclaré avoir parié une fois au cours des douze derniers mois. Parmi ceux-ci, 8 %
jouaient régulièrement, soit au moins une fois par semaine. La participation aux jeux de hasard
et d’argent passe de 39 % en 1ère secondaire à 62 % en 5e secondaire12.
Comme la majorité des jeunes Québécois, les élèves lavallois s’initient à la consommation
d’alcool à un plus jeune âge et connaissent des épisodes de consommation excessive plus
fréquentes13. La consommation de cannabis a aussi augmenté de manière significative chez les
jeunes de 15 à 24 ans, un résultat attribué en bonne partie à sa banalisation.
6
7
8
9
10
11
12
13
4
Association canadienne de santé publique, 2000; Chevalier et Allard, 2001c; Chevalier et al., 2004.
Enquête de santé sur les collectivités canadiennes (ESCC), 2003.
ESCC, Enquête santé mentale, 2002.
Institut nationale de santé publique (INSPQ) et CQEPT, 2004a.
Données calculées à partir de la population adulte de 288 311 – année 2005 (Source : ISQ, 2003)
Courteau, Jean-Pierre et Isabelle Paradis, État de situation sur les jeux de hasard et d’argent en Outaouais, juin
2003.
Chevalier et Deguire, 2003 dans Jeux de hasard et d’argent : portrait de la situation en 2002, ISQ.
ISQ 2002b et 2002c, « L’alcool, les drogues, le jeu : les jeunes sont-ils preneurs? »
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2.3 La participation des Lavallois aux jeux de loteries vidéo
En 2005, 10,7 % des Québécois âgés de 18 ans et plus jouaient aux appareils de loterie vidéo
(ALV). Cette proportion est en augmentation. La probabilité pour les joueurs d’ALV d’éprouver
un problème de jeu est estimée à 13,8 %. Ce taux inclut les joueurs pathologiques qui représentent 8 % des joueurs d’ALV et les joueurs à risque dans une proportion de 5,8 %14.
À Laval, on estime que 31 000 adultes de 18 ans et plus jouent aux ALV et environ 4 300 d’entre
eux - soit un joueur d’ALV sur sept - éprouvent des problèmes liés aux jeux de loteries vidéo.
Les joueurs d’ALV sont surtout des hommes, des jeunes de 18 à 24 ans, des personnes qui vivent
sans conjoint, des personnes moins scolarisées et des personnes dont le revenu est faible.
2.4 Les joueurs qui consultent les services spécialisés
Les joueurs consultent après plusieurs années de pratique régulière et la plupart du temps après
avoir accumulé plusieurs dettes et/ou pertes liées au jeu. Ils consultent à la suite de pressions
de leur entourage et/ou lorsque le jeu les a conduit à adopter des comportements les éloignant
considérablement de leurs valeurs : mensonges, manipulation, idées suicidaires, isolement, etc.
Les données régionales recueillies en 2005-2006, auprès des dispensateurs de services spécialisés en traitement du jeu, indiquent que 311 personnes se sont adressées à eux en raison de
problèmes liés au jeu pathologique. Parmi celles-ci, 277 personnes avaient un diagnostic de
joueur pathologique alors que 34 étaient des proches15.
Le Centre Le Maillon, un organisme offrant des services externes spécialisés en dépendances
dans la région de Laval, indique que 35 % des joueurs pathologiques traités sont âgés entre
40 et 50 ans et 15 % ont 60 ans et plus. Dans la dernière année, le Centre a par ailleurs
constaté une augmentation de la population des clients âgés entre 20 et 30 ans qui représentent
15 % de sa clientèle. Les hommes représentent 65 % de l’ensemble de la clientèle. La plupart
des gens qui consultent occupent un emploi.
2.5 Jeux de hasard et d’argent : portrait des besoins de la population lavalloise
Le schéma suivant présente, à partir d’une perspective populationnelle, les habitudes de jeu des
Lavallois jeunes et adultes.
La majorité des Lavallois jouent à des jeux de hasard et d’argent et n’éprouvent pas de difficulté :
31 000 Lavallois jouent aux ALV, un nombre en augmentation. Nous relevons aussi que 13,8 %
des joueurs d’ALV sont considérés comme des joueurs à risque ou des joueurs pathologiques.
14
15
Chevalier et al., 2002.
GESTRED, 2005-2006, Données jeu et violence.
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Figure 1 : Portrait des besoins de la population lavalloise au regard des jeux de hasard et d’argent
277 Lavallois qui
avaient un diagnostic
de jeu pathologique
ont consulté des
services spécialisés
Joueurs pathologiques ou à risque
2 500 Lavallois parient sur les courses
de chevaux (8 % des joueurs)
4 300 Lavallois sont des joueurs d’ALV
(13,7 % des joueurs)
4 900 Lavallois sont des joueurs de JHA*
(1,7 % de la population adulte)
Jeunes
900 élèves** jouaient régulièrement au moins
une fois par semaine (8 % des élèves joueurs)
Adultes
31 000 Lavallois de 18 ans et plus jouent aux
ALV (10,7 % de la population adulte)
ALV
Jeunes
2 050 élèves de 5e secondaire ont joué à des JHA au cours des 12 derniers mois
(62 % des jeunes)
2 100 élèves de 1re secondaire ont joué à des JHA au cours des 12 premiers mois
(39 % des jeunes)
11 000 élèves du secondaire ont déclaré avoir parié une fois au cours des 12 derniers
mois (51 % des élèves)
Adultes
242 000 Lavallois de 18 ans et plus jouent aux JHA (84 % de la population)
JHA
*JHA : Jeux de hasard et d’argent
** Source du dénominateur de la population scolaire : MEQ, 2004-2005
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3.
LES SERVICES EN PRÉVENTION ET EN TRAITEMENT DU JEU À LAVAL
Les services offerts en matière de dépendances sur le territoire de Laval se partagent entre les
établissements du réseau public de santé et de services sociaux et des organismes communautaires.
3.1 Promotion et prévention
Au plan de la promotion et de la prévention, la Direction de santé publique de Laval a ciblé deux
groupes : les jeunes et les personnes âgées. Conformément aux orientations du Programme
national de santé publique, la région privilégie des approches préventives globales chez les
jeunes. Celles-ci ont donné lieu à l’élaboration de Système d, des activités de développement
des compétences pour les jeunes du troisième cycle du primaire, en lien avec la promotion des
saines habitudes de vie, la prévention des dépendances et la transition du primaire au secondaire, le tout inscrit dans l’approche École en santé. Au premier cycle du secondaire, un projetpilote consistant à implanter cette approche, où la préoccupation principale concerne les
dépendances, est actuellement en cours.
Le Centre de santé et de services sociaux de Laval (CSSS de Laval) agit aussi en matière de
promotion, de prévention et de dépistage des dépendances. En milieu scolaire, il assure, en
collaboration avec les commissions scolaires de Laval, le déploiement de l’approche École en
santé. Il a de plus formulé des recommandations à la suite d’une enquête portant sur les besoins
d’information et les pistes d’intervention les plus prometteuses en regard des jeux de hasard et
d’argent chez les personnes âgées de 50 ans et plus.
Le Centre d’aide aux familles d’alcooliques et de toxicomanes (CAFAT) offre également des
activités préventives destinées notamment aux proches des joueurs pathologiques et à risque.
Une campagne promotionnelle régionale a par ailleurs été déployée afin de sensibiliser la population aux problèmes reliés au jeu et pour encourager les personnes affectées à consulter les
ressources existantes dans la région. Différents outils ont en ce sens été développés.
3.2 Les services généraux
Les services généraux en dépendances sont assurés par le CSSS de Laval qui couvre l’ensemble
du territoire. Celui-ci est la porte d’entrée désignée pour le réseau local. Il assure l’évaluation de
premier niveau (DEP-Ado, DÉBA-Alcool/Drogues/Jeu) et réfère au besoin les clients vers des
services spécialisés. L’intervention du CSSS de Laval s’effectue par le biais d’un suivi de court
terme en mode individuel. Il gère le programme Alcochoix+ et assure le déploiement de l’approche
École en santé, en plus d’offrir une intervention en développement de compétences parentales à
des groupes. Selon la demande, une rencontre supplémentaire sur la dépendance peut être
offerte.
3.3 Les services spécialisés
Les services externes spécialisés en dépendances sont principalement offerts par le Centre Le
Maillon. Ce centre de réadaptation public offre des services aux joueurs et à leurs proches à
l’intérieur d’un programme sur le jeu. Il s’agit d’interventions individuelles et de groupe auprès
des jeunes, des adultes et des personnes âgées.
La région peut aussi compter sur les services offerts par La Maisonnée Paulette Guinois, un
organisme à but non lucratif offrant des services internes en réadaptation pour les adultes
alcooliques, toxicomanes et/ou joueurs pathologiques, ainsi que leur entourage familial.
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7
Devant l’absence de certains services spécialisés et surspécialisés sur le territoire, des collaborations ont été établies avec divers partenaires suprarégionaux concernant le jeu. Le Centre
universitaire de santé McGill, de concert avec le Centre Jean Lapointe pour adolescents,
intervient auprès des joueurs de moins de 18 ans. Le Pavillon Foster assure pour sa part les
services spécialisés pour la clientèle unilingue anglophone.
3.4 Les autres ressources dans la communauté
La région peut compter sur l’action de certains organismes communautaires sans but lucratif. Ils
interviennent de diverses manières auprès des personnes aux prises avec un ou plusieurs
problèmes de dépendances, dont le jeu. Ces interventions s’effectuent à des fins de stabilisation en situation de crise et au moyen de consultations individuelles, de groupes ou familiales,
dans une perspective de réadaptation. Les fraternités anonymes (A.A., N.A., G.A., etc.) sont
aussi présentes sur le territoire.
3.5 Le plan d’action régional et le mécanisme d’accès aux services
En 2003, l’Agence de la santé et des services sociaux de Laval a adopté un Plan d’action
régional en jeu pathologique. Elle s’est dotée au cours de l’année 2006 d’un mécanisme
d’accès aux services spécialisés en jeu et dépendances.
L’illustration suivante16 offre un portrait des services actuellement disponibles pour les Lavallois
selon leur niveau d’intensité.
Figure 2 : Portrait des services en dépendances disponibles à Laval - Année 2006
Niveau 3
Intervention de pointe
Surveillance médicale 24/7
IGT-Ado
Cotes 6 et +
IGT- Adulte
Cotes 6 et +
IGT – Jeu
Cotes 6 et +
DEP-Ado
Cotes 0-19
DÉBA- Alcool/drogues
Cotes 0-19
DÉBA – Jeu
Cotes 2-5
Un score supérieur exige
une référence au
Niveau 2
Niveau 2
Intervention spécialisée
Évaluation approfondie
Références vers les services requis
Réadaptation, désintoxication, réinsertion sociale
Niveau 1
Intervention primaire
Évaluation de premier niveau
Dépistage, prévention
Références vers les services requis
Interventions sommaires
Centres hospitaliers
Centre Le Maillon
Ressources privées
Organismes communautaires
CSSS de Laval
Ressources privées
Organismes
communautaires
Personnes en demande d’aide
Jeu – Alcool – Drogues
Jeunes – Adultes – Entourage
16
8
Tiré de Mécanisme d’accès aux services spécialisés en dépendances pour la région de Laval, août 2006, Centre
Le Maillon de Laval.
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4. L’OFFRE DE JEU ET LE PROJET DE SALON DE JEU LAVALLOIS
Le nombre d’ALV et la localisation géographique sont les deux principaux éléments sur lesquels
Loto-Québec fonde son projet de reconfiguration de l’offre de jeu et d’implantation de salons de
jeux. L’organisme avance qu’en regroupant progressivement les ALV à l’intérieur d’un nombre
limité de sites d’exploitation, elle diminuerait l’accessibilité à ces appareils et favoriserait une
répartition équilibrée des ALV dans les régions en évitant les zones où la dynamique sociale est
fragilisée. Ce regroupement permettrait de contenir l’offre dans les quartiers défavorisés où les
risques de problèmes sociaux et les coûts qui y sont rattachés sont élevés.
L’examen de la réorganisation de l’offre de jeu dans la région et de ses effets prévisibles et
potentiels sur la santé de la population se réalisera donc en référence aux orientations de LotoQuébec17. Notre analyse s’appuiera notamment sur le nombre d’ALV dans la région, leur emplacement dans les différents quartiers et sur la localisation géographique du projet de salon de jeu.
4.1
Le nombre d’ALV dans la région de Laval
Les données du tableau 118 indiquent que Laval comptait 717 ALV en 2002-2003. Ces appareils
étaient répartis dans 157 sites liés à des établissements détenteurs d’une licence d’exploitant de
sites d’ALV émise par la Régie des alcools, courses et jeux (RACJ).
Tableau 1 : Nombre des ALV dans la région de Laval
2002-2003
Région de Laval
Salon de jeu et hippodrome
Modifications
Sites
ALV
Ratio
Sites
ALV
Sites
ALV
Ratio
157
717
2,58
-30
-85
127
632
2,19
-
-
-
+1
+1 300
1
1 300
128
1 932
TOTAL
4.1.1
2007-2008
6,70
Une augmentation du nombre d’appareils : 717 à 1 932 ALV à Laval
Loto-Québec indique que 85 des 717 ALV en exploitation dans la région en 2002-2003 seraient
relocalisés, une diminution de 11,9 % dans les quartiers. Mais, avec l’implantation projetée d’un
salon de jeu dans la région, Laval compterait 1215 nouveaux appareils à la fin de 2007-2008. Le
nombre de sites d’ALV serait quant à lui réduit de 157 à 127, une diminution de 19 % dans les
quartiers.
À terme, Laval se retrouverait avec un total de 1932 ALV, ce qui représenterait une
augmentation de 169 % du nombre d’appareils. Parmi ceux-ci, 1 300 seraient regroupés au
salon de jeu et 632 autres appareils seraient répartis dans les quartiers, à travers 127 sites
implantés principalement dans des quartiers défavorisés.
17
18
Ces orientations sont présentées dans le Plan de développement 2004-2007 de Loto-Québec.
Ces données ont été fournies par Loto-Québec le 22 septembre 2006 suite à notre demande d’informations en
rapport aux salons de jeux.
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9
4.1.2
Un ratio ALV/population en augmentation
Le ratio québécois global d’ALV par 1 000 habitants est de 2,7719. Le même ratio appliqué à la
population totale de Laval passerait de 1,96 en 2002-2003 à 5,27 par 1 000 Lavallois en
2007-2008.
L’accès aux sites d’ALV étant interdit aux personnes de moins de 18 ans, nous estimons plus
juste de construire le ratio d’ALV/population sur la base de la population adulte. Le ratio
ALV/population de 18 ans et plus qui était de 2,58 ALV par 1000 Lavallois en 2002-2003
s’établirait alors à 6,70 une fois le salon de jeu implanté.
4.2
L’emplacement des ALV
Actuellement, les sites et appareils de loteries vidéo sont répartis dans les quartiers de Laval de
la façon suivante :
Figure 3 : Emplacement des ALV dans la région de Laval – Année 2006
Les points rouges indiquent l’emplacement des détenteurs de permis d’ALV dans la région. La
dimension des points renvoie au nombre de permis détenus par chaque établissement licencié.
Chaque permis autorise l’exploitation d’un maximum de cinq ALV. Dans les faits, environ 10 %
des établissements détenteur de permis ne possèderaient pas d’appareils.
19
10
Loto-Québec, plan de développement 2004-2007.
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4.2.1
Des ALV concentrés dans les quartiers lavallois les plus vulnérables au plan
socioéconomique
Loto-Québec affirme son « souci de contenir l’offre de jeu dans les quartiers lavallois les plus
vulnérables au plan socioéconomique et de choisir des zones où la dynamique sociale n’est pas
fragilisée ». Nous vous présentons une carte régionale avec des indices de défavorisation
sociale et matérielle.20
Figure 4 : Carte régionale avec indices de défavorisation
Site pressenti pour l’implantation d’un
salon de jeux dans la couronne nord de
Montréal
Source : Variations régionales de l’indice de défavorisation en 2001 Unité Gestion de l’information, Direction des ressources
informationnelles, Direction générale de la planification stratégique, de l’évaluation et de la gestion de l’information, Ministère de la
Santé et des Services sociaux (2006)
La carte illustre les indices de défavorisation par secteur de dénombrement (recensement 2001).
Les secteurs où les taux de défavorisation sociale et matérielle sont les plus importants se
situent dans les quartiers de Pont-Viau, Laval-des-Rapides, Chomedey, Laval-Ouest et
St-François. Cette carte a aussi l’intérêt d’indiquer les zones où se concentrent les groupes de
personnes les plus à risque par rapport au jeu pathologique : les personnes seules, défavorisées
au plan socioéconomique et peu scolarisées.
La Direction de santé publique de Laval n’a pu obtenir d’indications précises sur le nombre
d’ALV par quartier. En se référant à la carte ci-haut (figure 4) et à celle qui présentait
précédemment l’emplacement des détenteurs de permis dans la région (figure 3), nous
20
Selon l’indice de Pampalon, la défavorisation sociale correspond à la proportion de gens séparés, divorcés,
veufs, familles monoparentales et personnes vivant seules. La défavorisation matérielle correspond à la
proportion de gens qui ont de faibles revenus ou qui ne possèdent pas de diplôme d’études secondaires.
Agence de la santé et des services sociaux de Laval - Direction de santé publique
11
constatons que la majorité des ALV du territoire lavallois se concentrent dans des secteurs
défavorisés de Laval, soit Pont-Viau, Laval-des-Rapides, Chomedey et Laval-Ouest. Plusieurs
sites d’ALV ont pignon sur rue le long des boulevards Labelle et des Laurentides.
4.3
La localisation géographique du projet d’hippodrome et salon de jeu
De tous les sites pressentis pour implanter le complexe de divertissement qui accueillera l’hippodrome d’Attractions Hippiques du Québec (AHQ) et le salon de jeu de Loto-Québec, c’est celui
illustré par un carré noir qui semble actuellement le mieux correspondre aux critères des deux
promoteurs dans l’état actuel du développement urbain (figure 4).
À la jonction nord-est des autoroutes 440 et 13, le site se trouve dans un secteur favorisé au
plan matériel et social (vert). Le secteur à l’ouest (rouge) est considéré comme défavorisé au
plan matériel. Il compte toutefois une faible densité de population.
L’endroit serait localisé à l’extérieur des secteurs où le revenu moyen des ménages est inférieur
à 50 000 $ et où le ratio est supérieur à deux ALV par 1 000 habitants. Il n’y a pas non plus
d’écoles à proximité du site. En cela, le lieu envisagé rencontre les critères énoncés dans le
plan de développement de Loto-Québec.
Les autoroutes 440 et 13 sont deux axes routiers majeurs de la région. Ils sont empruntés
quotidiennement par plus de 80 000 véhicules21. Le site pressenti pour implanter l’hippodrome
et le salon de jeu pourrait avoir une incidence importante sur leurs fréquentations futures.
L’accessibilité au jeu se trouverait alors augmentée pour les milliers d’automobilistes qui
retrouveraient sur leur trajet habituel un salon de jeu.
Nous estimons qu’une attention particulière devra être apportée à l’aménagement du site.
Celui-ci devrait pouvoir cohabiter harmonieusement avec son environnement immédiat et ne pas
favoriser des comportements impulsifs de la part des joueurs, notamment les automobilistes de
passage. Des mesures visant l’encadrement du site et son accès pourraient être adoptées en ce
sens.
Au plan de l’offre de jeu, l’ajout possible dans une région urbanisée comme Laval de 1 300 ALV
regroupés dans un salon de jeu adjacent à un hippodrome, une installation qui n’existe pas
actuellement dans notre région, comportera de toute évidence des impacts importants. Certains
de ces impacts soulèvent des préoccupations que la Direction de santé publique de Laval
souhaite porter à l’attention des acteurs impliqués dans ce projet.
4.4
Un projet d’envergure à surveiller
La Direction de santé publique de Laval se préoccupe des risques pour la santé de la population
lavalloise découlant de la modification de l’offre de jeux de hasard et d’argent et l’ajout d’un
nombre aussi important d’ALV concentrés dans un complexe de divertissement incluant un
hippodrome et un salon de jeu. Nous exposerons dans la prochaine partie les risques attachés
à ce projet et formulons des recommandations afin d’atténuer les impacts négatifs de celui-ci.
Plusieurs éléments reliés à ce projet étant actuellement inconnus, la Direction de santé publique
de Laval s’appuie sur les données disponibles afin de dégager les enjeux spécifiques à la région
au regard de la santé de la population.
21
12
Estimation établie à partir des données de circulation fournies par le Ministère du transport du Québec.
Agence de la santé et des services sociaux de Laval - Direction de santé publique
5. LES ENJEUX SPÉCIFIQUES RELIÉS AU PROJET LAVALLOIS
Le projet d’implanter un salon de jeu à Laval repose sur la prémisse qu’en diminuant progressivement le nombre de sites d’exploitation d’ALV pour les regrouper dans une zone où la dynamique sociale n’est pas fragilisée, il serait possible de limiter les coûts économiques et sociaux
élevés du jeu pathologique dans les quartiers défavorisés.
5.1
Des risques pour la santé publique
Le projet annoncé par Loto-Québec comporte des risques potentiels et prévisibles pour la santé
de la population. Ces risques et le principe de précaution qui doit nous guider en pareil cas justifient que Loto-Québec révise son projet dans la région de Laval.
La Direction de santé publique de Laval demande que Loto-Québec apporte des correctifs à son
projet et mette en place des mesures d’atténuation supplémentaires afin de réduire l’impact
négatif sur la santé des Lavallois.
1er risque Le maintien d’un nombre élevé de sites et d’appareils de loterie vidéo dans les quartiers
les plus densément peuplés et défavorisés de la région.
La nouvelle offre de jeu laisserait la région de Laval avec un salon de jeu de 1300 ALV en plus de
632 ALV répartis dans 127 sites localisés dans les quartiers les plus densément peuplés de Laval.
La majorité de ces quartiers correspondent aux secteurs les plus défavorisés au plan socioéconomique, ceux où se concentrent les personnes à faible revenu, les familles monoparentales
et les personnes vivant seules. Le retrait de 30 sites (19 %) et de 85 ALV (11,9 %) présents
dans la région en 2002-2003 est minime et en deçà des engagements pris par Loto-Québec
dans son plan de développement 2004-2007, lequel fut approuvé par le Gouvernement du
Québec en novembre200422.
De fait, Loto-Québec ne remplit pas les attentes créées par l’annonce de son plan de retrait.
Celui-ci proposait de diminuer l’accessibilité aux ALV et d’en favoriser une répartition équilibrée
dans les régions de la province, selon les zones de villes, en tenant compte des conditions
socio-économiques. Ce plan de reconfiguration du réseau des ALV avait notamment pour cibles
que soit réduit de 31 % le nombre de sites d’appareils de loterie vidéo et de 18 % le nombre
d’ALV avant la fin de 2007.
Pour ce faire, Loto-Québec proposait à quatre municipalités, dont Laval, « le retrait obligatoire
des ALV des établissements comptant un à quatre ALV ainsi que ceux dans les zones identifiées comme étant fragilisées, soit celles où le revenu moyen familial est inférieur 50 000 $ et où
le ratio d’ALV est supérieur à deux par mille habitants ».
Par ailleurs, nous savons qu’un joueur d’ALV sur sept (13,8 %) développe des problèmes reliés
au jeu. Selon une recension des écrits, plusieurs chercheurs effectuent une relation entre les
problèmes engendrés par la pratique des jeux de hasard et d’argent et l’accessibilité de ceux-ci,
surtout en lien avec les appareils électroniques de jeu23.
22
23
Décret 058-2004, novembre 2004, Gouvernement du Québec.
Paradis, Isabelle, Recherche sur l’emplacement des ALV dans certains secteurs de la ville de Gatineau, mars
2006. La recension inclut les écrits suivants : Marshall & Baker, 2001; Australian Productivity Commission, 1999;
National Gambling Impact Study Commission, 1999; Boisvert et al., 2003; Ladouceur et al., 2004b, Régie de
Montréal-Centre, 2003; Paradis et Courteau, 2003, Suissa, 2005).
Agence de la santé et des services sociaux de Laval - Direction de santé publique
13
Considérant le potentiel de dangerosité des ALV et les effets connus de leur proximité sur les
populations vulnérables, la Direction de santé publique de Laval estime nécessaire que LotoQuébec en fasse plus pour « contenir l’offre dans les quartiers défavorisés où les risques de
problèmes sociaux, incluant les coûts sociaux qui y sont rattachés, sont élevés »24.
Recommandation I
•
Retirer 19 sites d’appareils de loterie vidéo supplémentaires dans les quartiers lavallois les
plus vulnérables au plan socioéconomique d’ici la fin de l’année 2007.
Ce retrait ferait passer le nombre de sites d’ALV dans la région de 157 qu’il était en 2002-2003 à
108. Cette réduction correspond à la cible du plan de développement 2004-2007 de Loto-Québec
qui était fixée à 31 %. Actuellement, la réduction projetée est de 19 % à Laval. Le retrait devrait
s’effectuer dans les quartiers de Pont-Viau, Laval-des-Rapides, Chomedey, Laval-Ouest et
St-François.
Recommandation II
•
Retirer 44 appareils de loterie vidéo supplémentaires dans les quartiers lavallois les plus
vulnérables au plan socioéconomique d’ici la fin de l’année 2007.
Ce retrait ferait passer le nombre d’ALV dans la région de 717 qu’il était en 2002-2003 à 588,
une réduction qui correspond à la cible du plan de développement 2004-2007 de Loto-Québec
qui était fixée à 18 %. Actuellement, la réduction du nombre d’ALV est de 11,9 % à Laval. Le
retrait devrait s’effectuer dans les quartiers de Pont-Viau, Laval-des-Rapides, Chomedey, LavalOuest et St-François.
Recommandation III
•
Limiter à un ratio de 2,0 ALV par 1000 Lavallois de 18 ans et plus le nombre d’appareils en
exploitation dans les quartiers d’ici la fin de 2009.
Considérant la dangerosité des ALV et les risques reliés à leur proximité des populations dans
les quartiers, nous estimons inapproprié que ceux-ci se trouvent toujours concentrés dans les
secteurs les plus vulnérables au plan socioéconomique de la région comme c’est le cas présentement.
Lorsque le plan de reconfiguration de Loto-Québec sera achevé à la fin de 2007, le ratio d’ALV
s’établirait à près de deux appareils par 1000 Lavallois de 18 ans et plus. Nous demandons
conséquemment que ce ratio s’applique dans chacun des quartiers où se trouvent les groupes
de personnes les plus à risque concernant le jeu pathologique.
24
14
CQEPT, 2003.
Agence de la santé et des services sociaux de Laval - Direction de santé publique
2e risque L’augmentation du nombre de joueurs d’ALV, des problèmes reliés au jeu et les impacts
sur les joueurs, les familles et la communauté.
L’implantation d’un grand complexe de divertissement et de loisirs accueillant un salon de jeu
de 1300 ALV et un hippodrome exercera une attraction considérable. Il aura probablement pour
effet de faire augmenter le nombre de personnes jouant aux ALV dans la région. L’accessibilité
économique et symbolique à ce type d’activités s’en trouvera augmentée.
5.2
Augmentation de la participation au jeu
Plusieurs études démontrent un accroissement significatif de la participation au jeu dans une
région à la suite de l’implantation d’un casino. Dans leur étude publiée sur les impacts de
l’implantation du Casino de Hull, les chercheurs25 ont noté que le pourcentage de personnes de
la région de l’Outaouais qui déclaraient avoir fréquenté un casino dans les douze derniers mois
était passé de 14 % à 65 % après l’ouverture du site. On peut supposer que l’implantation d’un
complexe de divertissement comme celui annoncé aura un effet semblable.
5.3
Augmentation de la prévalence des problèmes de jeu
Les résultats de l’Enquête sur la santé des collectivités canadiennes démontrent par ailleurs
une prévalence plus élevée de problème de jeu lié à l’accessibilité. L’enquête concluait que :
« La prévalence sur 12 mois des problèmes de jeu au Canada était de 2 %, avec
variabilité interprovinciale. La prévalence la plus élevée se constatait dans les
régions avec de fortes concentrations d’ALV dans la collectivité, combinée avec
les casinos à demeure. Ces résultats soutiennent les prédictions antérieures
selon lesquelles l’expansion rapide et prolifique de nouvelles formes de jeu
légalisé, dans de nombreuses régions du pays, serait associée à un coût
considérable de santé publique. »
En lien avec ces études, il est prévisible que l’ouverture d’un salon de jeu dans la couronne
nord entraînera un nombre important de nouveaux joueurs. De plus, il est permis de prévoir,
connaissant la dangerosité « addictive » des ALV, qu’une proportion de ces nouveaux joueurs
connaîtra des problèmes liés au jeu.
5.4
Les dépenses de jeu
De tous les joueurs, ce sont ceux qui jouent aux ALV et parient sur les courses de chevaux qui
dépensent le plus d’argent dans leur activité. Nous savons aussi que les personnes à faible
revenu sont, parmi les joueurs d’ALV, celles qui consacrent la proportion la plus importante de
leurs revenus aux jeux de hasard et d’argent.
Une étude26 démontre le fardeau économique supplémentaire qu’entraîne la présence de ce
type d’installation dans une population. Les chercheurs ont étudié, entre les années 1990 et
2000, plus de 250 comtés américains où une maison de jeu était implantée pour conclure à
l’alourdissement important du fardeau financier des familles en lien avec le jeu. Ces comtés
affichaient notamment un nombre de faillites personnelles deux fois plus élevé que les autres
régions urbaines en tout point semblables économiquement. Les populations étudiées se
25
26
Ladouceur, Robert, Ferland, Francine et Christian Jaques, Université Laval, dans Canadian journal of psychiatry,
2000.
Goss et Edward, Université Creighton, 2004.
Agence de la santé et des services sociaux de Laval - Direction de santé publique
15
trouvaient dans un périmètre de moins de 40 km autour des lieux offrant des jeux de hasard et
d’argent à la population.
5.5
Un casino régional?
L’expression « casino régional » semble bien s’appliquer au projet de salon de jeu de Laval en
ce qui a trait à l’accessibilité aux appareils électroniques de jeu et aux activités de
divertissement s’y rattachant. En comparaison, on dénombre actuellement 800 machines à
sous au Casino de Charlevoix et 1 800 autres au Casino du Lac Leamy. Sous cet angle,
l’ampleur du projet actuel est donc comparable à celle des casinos implantés ailleurs au
Québec. D’autant que d’autres activités à caractère récréo-touristique sont prévues à l’intérieur
du complexe sur le modèle des casinos déjà implantés au Québec.
5.6
L’accès aux espaces de jeux : variable centrale pour comprendre l’incidence des
dépendances et des problèmes psychosociaux
L’augmentation de l’accès aux espaces de jeux constitue une variable centrale pour comprendre la plus grande incidence des dépendances et des problèmes psychosociaux associés.
Plusieurs méfaits sont associés à la pratique des jeux de hasard et d’argent. Ils peuvent affecter
le joueur, sa famille et son milieu de vie. Ceux-ci se regroupent au sein des grandes catégories
suivantes27 : les conséquences psychologiques, les conséquences comportementales, les
affections psychiatriques, les idées suicidaires, les tentatives de suicide et les suicides, l’alcoolisme et les autres toxicomanies, les problèmes physiques, les comportements criminels, les
problèmes financiers, les problèmes interpersonnels et les problèmes au travail ou à l’école.
Plusieurs recherches portant sur l’augmentation de l’accès aux espaces de jeu et l’implantation
de maisons de jeu et de casinos dans des populations canadiennes et américaines ont démontré les effets négatifs28 de tels projets sur la santé des populations, notamment :
Les problèmes psychosociaux reliés au jeu augmentent avec la promotion d’une plus
grande accessibilité liée à l’implantation de casinos dans la communauté de Windsor en
Ontario (Govoni et al., 1998).
L’augmentation du nombre de joueurs compulsifs et de nouveaux problèmes sociaux sont
associés à l’augmentation de l’accès aux casinos (Room, Turner et Lalomiteau, 1998).
Des liens concrets existent entre l’accessibilité aux espaces de jeu et les problèmes
psychosociaux qui s’y rattachent (Cox, Yu, Afifi et Ladouceur, 2005).
La prévalence du jeu augmente avec le temps et ce, en lien avec le nombre d'années
d'exposition (Korn, 2000).
La participation de la population aux jeux de loteries vidéo et les dépenses s’y rapportant sont
en augmentation depuis quelques années au Québec. Considérant la dangerosité des ALV et le
projet de nouvelle offre de jeu, la Direction de santé publique de Laval est inquiète des effets
que cette hausse appréhendée de la participation de la population aux jeux de loteries vidéo
pourrait entraîner.
27
28
16
Paradis, Isabelle, ibid.
Suissa, J Amnon, Actualités sur les addictions, Toxico Québec Actualités, juin 2005.
Agence de la santé et des services sociaux de Laval - Direction de santé publique
Recommandation IV
•
Limiter à 848 le nombre d’ALV offerts au salon de jeu qui s’implanterait dans la couronne
Nord, incluant Laval et les Basses-Laurentides, afin que l’offre de jeu dans ce territoire
corresponde au ratio québécois de 2,77 ALV par 1000 habitants.
La population de Laval et des Basses-Laurentides compte 761 551 habitants. En appliquant à
cette population le ratio de 2,77 ALV par 1 000 habitants, tel qu’indiqué dans le Plan de
développement 2004-2007 de Loto-Québec, nous obtenons un nombre total de 2 107 ALV pour
ce territoire. De cette nouvelle offre de jeu, nous soustrayons les ALV déjà offerts dans les
quartiers de Laval (588) et des Basses-Laurentides (671), ce qui fixe à 848 le nombre maximum
d’ALV dans le nouveau salon de jeu.
Dans le cas où Loto-Québec persisterait dans son intention d’offrir plus d’appareils dans ce
nouveau salon de jeu, elle devrait réduire d’autant le nombre d’appareils dans les quartiers de
Laval et les territoires de Deux-Montagnes, Rivière-du-Nord, Thérèse-de-Blainville et Argenteuil.
En révisant de cette façon son projet, Loto-Québec respectera le plan de reconfiguration du
réseau des ALV adopté par le gouvernement du Québec en 2004 et l’équité interrégionale
attendue à l’intérieur dans un tel cadre.
3e risque L’impact de l’implantation d’un hippodrome par un promoteur privé dans une région qui
ne disposait pas de ce type d’installations et sa cohabitation avec un salon de jeu à
l’intérieur d’un complexe de divertissement.
Le projet de transfert des activités de l’Hippodrome de Blue Bonnets dans de nouvelles
installations à Laval sous la gérance d’un promoteur privé, les nombreux aspects inconnus du
projet et le choix officiel du site qui n’est pas encore annoncé laissent la Direction de santé
publique dans l’expectative.
Laval se distingue en matière de pari sur courses de chevaux par la présence dans sa région
du plus important des dix-huit salons de pari hors piste du Québec (les hippoclubs). Ce site peut
accueillir 350 personnes et permet de miser sur des courses de chevaux (sur piste ou hors
piste) 365 jours par année, au moins 10 heures par jour. Les paris peuvent s’appliquer à des
courses de chevaux présentées au Québec, au Canada ou dans d’autres pays. Le salon met
aussi à la disposition des joueurs 20 appareils de loterie vidéo. En terme d’accessibilité, il est
donc facile pour les Lavallois de parier sur des courses de chevaux. Depuis 2005, tous les
Québécois ont aussi la possibilité de placer des mises par téléphone ou par Internet.
Malgré l’accroissement de l’offre de jeu s’y rapportant, les sommes pariées sur les courses de
chevaux périclitent depuis la fin des années 80 au Québec. Le projet de déménager Blue
Bonnets pour implanter un nouvel hippodrome à Laval constitue une tentative nouvelle de
relancer cette industrie.
5.7
Les courses de chevaux et les ALV : une cohabitation à haut risque
La dangerosité des appareils de loterie vidéo est maintenant bien connue. Un joueur sur sept qui
s’adonne à ce type de jeu éprouve des problèmes29. Bien que méconnue du public, la
29
Chevalier, Serge, 2004.
Agence de la santé et des services sociaux de Laval - Direction de santé publique
17
dangerosité des paris sur course de chevaux est presque aussi grande et bien documentée que
celle reliée aux ALV. Au Québec, en 2002, 11,4 % des adeptes de pari sur courses de chevaux
éprouvaient des problèmes de jeu. De plus, 80 % des dépenses annuelles que les Québécois
consacrent aux courses de chevaux proviennent de personnes qui ont un problème de jeu. La
dangerosité de ce jeu provient des caractéristiques de cette forme de jeu, de l’organisation des
courses et de la forme de pari dominante dans l’industrie et unique au Québec : le pari mutuel.
Les personnes pariant sur les courses de chevaux et jouant aux ALV sont particulièrement
vulnérables en ce qui a trait au jeu pathologique : 24,3 % de ces joueurs éprouvent des problèmes reliés au jeu et dépensent en moyenne 7 584 $ par année dans ces activités.
La Direction de santé publique de Laval est préoccupée des risques pour la santé des personnes que comportera la fréquentation d’un complexe de divertissement offrant à ses usagers la
possibilité de s’initier dans un même site aux paris sur des courses de chevaux et aux appareils
de loterie vidéo.
Recommandation V
•
Regrouper à l’intérieur du nouvel hippodrome les activités du salon de pari hors piste de Laval.
L’accessibilité et la dangerosité des paris de course de chevaux liées à la présence dans la région
de Laval d’un nouveau complexe de divertissement incluant un hippodrome et un salon de jeu
nécessitent une vigilance importante. La centralisation de ces activités facilitera cette vigilance et
nous permettra de mieux suivre l’évolution de ces activités. En lien avec cette recommandation, la
Direction de santé publique de Laval demande que les vingt appareils qu’offre présentement le
salon de pari hors piste soient inclus dans l’offre du nouveau salon de jeu.
4e risque L’accessibilité géographique, la proximité et la visibilité du site pressenti pour
l’implantation du projet.
Laval est une région urbanisée et densément peuplée. Elle représente aussi un pôle d’attraction
économique et de divertissement important dans la couronne Nord de Montréal. L’implantation
d’un nouveau complexe de divertissement incluant un salon de jeu, un hippodrome et d’autres
activités reliées à l’industrie récréotouristique exercera une attraction considérable.
Le site pressenti se trouve à la jonction de deux axes routiers majeurs qu’empruntent quotidiennement des dizaines de milliers d’automobilistes, la plupart d’entre eux habitant dans la
couronne Nord de Montréal. Si le futur complexe de jeu peut devenir un « site de destination »
comparable aux casinos déjà implantés ailleurs au Québec, il risque de constituer aussi un site
de « proximité » pour les usagers du transport en commun et les milliers d’automobilistes qui ont
l’habitude de transiter par ces autoroutes pour aller au travail et effectuer leurs achats.
En conséquence, la Direction de santé publique demande qu’une attention particulière soit
apportée à l’aménagement urbain du projet. La fréquentation du nouvel hippodrome et du salon
de jeu devrait être le résultat d’un choix réfléchi, ce qui n’est pas toujours le cas lorsque les
sites d’ALV se trouvent à proximité des activités quotidiennes. Le plan d’aménagement du futur
site pourrait contribuer à éviter des comportements impulsifs de la part de certains joueurs et
permettre de s’assurer une cohabitation harmonieuse avec l’environnement. Des mesures
devraient être adoptées en ce sens.
18
Agence de la santé et des services sociaux de Laval - Direction de santé publique
5.8
La pression sur les dispensateurs de services
Au-delà de l’application des mesures proposées, la problématique du jeu reste préoccupante.
La Direction de santé publique de Laval demande que des mesures soient mises en place afin
d’offrir une aide aux joueurs à risque et amoindrir les conséquences du jeu pathologique sur les
joueurs, leurs proches et la communauté.
5e risque L’augmentation anticipée de la demande d’aide.
Des ressources additionnelles devraient être consenties au réseau de la santé et des services
sociaux et au réseau communautaire afin qu’ils puissent répondre à l’augmentation de la
demande de service et mettre en œuvre des mesures de prévention, particulièrement auprès
des jeunes.
À sa base, la proposition de regrouper les ALV en un seul site, un salon de jeu, semble
acceptable aux dispensateurs de services de notre réseau. Elle pourrait même faciliter le
dépistage et l’intervention précoce auprès des joueurs à risque. Le CSSS de Laval et le Centre
Le Maillon sont prêts à intervenir afin de détecter et aider les joueurs problématiques et leurs
proches moyennant que des ressources supplémentaires leur soient consenties.
Le Centre Le Maillon dispose actuellement de 2,5 intervenants pour desservir les joueurs
pathologiques et leur entourage. Il estime sa capacité d’accueil à 215 personnes par année et
se dit dans l’incapacité de traiter 292 joueurs pathologiques, cible fixée par le MSSS pour
l’année 2006-2007. Le Centre a offert des services à 194 joueurs et à 19 membres de l’entourage durant la dernière année.
Le CSSS de Laval anticipe pour sa part une hausse des demandes de services à l’accueil
psychosocial concernant les problèmes familiaux, les dépressions, les comportements suicidaires ainsi que les problèmes socio-économiques et de gestion de crise. Les demandes d’aide
n’étant pas nécessairement formulées directement, les intervenants devront être sensibilisés et
formés dans le but de dépister, d’intervenir et d’orienter vers les ressources spécialisées les
personnes qui présenteraient une problématique de jeu.
Considérant l’importance des problèmes psychosociaux et de santé mentale reliés au jeu, des
ressources telles que La Maisonnée Paulette Guinois, le Service régional de crise l’Îlot, le
Service MASC de l’organisme Carrefour d’hommes en changement, CAFAT et d’autres partenaires pourraient voir augmenter le nombre de demandes qui leur sont adressées. La Direction
de santé publique de Laval tient pour essentiel que ces partenaires soient aussi mis à contribution afin de dépister et intervenir auprès des joueurs et leurs proches.
De façon concomitante, une attention particulière devrait être portée au financement d’initiatives
de promotion et de prévention en milieu scolaire. Ces activités conjointes du secteur de l’éducation et du réseau de la santé doivent permettent de renforcer les facteurs de protections en
lien avec le développement des jeunes.
Recommandation VI
•
Allouer des ressources additionnelles aux dispensateurs de services du réseau de la santé
et des services sociaux et aux autres partenaires impliqués dans la prévention, la détection,
l’intervention précoce et le traitement des joueurs problématiques.
Agence de la santé et des services sociaux de Laval - Direction de santé publique
19
CONCLUSION
Le projet d’implanter dans la couronne nord de Montréal un complexe de divertissement incluant
un hippodrome et un salon de jeu suscite un grand intérêt de la part de plusieurs acteurs de
notre région. Cet intérêt est légitime et nous le comprenons.
Les activités de jeux de hasard et d’argent que Loto-Québec et le promoteur privé envisagent
d’offrir à la population de Laval et de l’ensemble de la couronne nord de Montréal ne sont toutefois pas sans risques. Loto-Québec elle-même le reconnaît et se dit soucieuse que ces
nouvelles activités n’entraînent pas une augmentation des problèmes de jeu.
La Direction de santé publique de Laval a pour mandat d’assurer la protection de la santé de la
population. Il s’avère ainsi essentiel qu’elle examine ce projet et ses éventuels impacts négatifs
sur la santé de la population lavalloise.
Nous reconnaissons l’intérêt de ce projet pour plusieurs acteurs de notre région et les bénéfices
qu’il peut comporter. Toutefois, le développement économique ne peut se faire au détriment de
la santé et du bien-être de notre population. Nous estimons donc que Loto-Québec doit revoir
ses orientations en apportant des correctifs et en mettant en place des mesures d’atténuation
supplémentaires afin de minimiser l’impact négatif sur la santé de la population lavalloise. C’est
en ce sens que la Direction de santé publique de Laval soumet son avis. Elle identifie des
risques et formule des recommandations.
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Agence de la santé et des services sociaux de Laval - Direction de santé publique
Agence de la santé et des services sociaux de Laval - Direction de santé publique
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