Petits suicides entre amis
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Petits suicides entre amis
Petits suicides entre amis jusqu'au cap Saint-Vincent au Portugal, où l'autocar kamikaze finira par se précipiter dans Arto Paasilinna Ce roman, paru en Finlande en 1990, n’a été traduit en français qu’en 2003. Il s’agit d’un « road book » désopilant à travers toute l’Europe. Un beau matin, Onni Rellonen, petit entrepreneur dont les affaires périclitent, et le colonel Hermanni Kemppainen, veuf éploré, décident de se suicider. Le hasard veut qu'ils échouent dans la même grange. Dérangés par cette ren- l'Atlantique. Ce roman est l'occasion d'une réflexion férocement drôle sur le suicide : « Rater son suicide n'est pas forcément ce qu'il y a de pire dans l'existence ». Extraits « Le colonel Kemppainen et le président Rellonen rédigèrent une annonce à l’intention d’un quotidien national. En termes succincts, on pouvait y lire : SONGEZ-VOUS AU SUICIDE ? Pas contre fortuite, ils se rendent à l'évidence : de panique, vous n’êtes pas seul. Nous sommes nombreux sont les candidats au suicide. Dès plusieurs à partager les mêmes idées, et même lors, pourquoi ne pas fonder une association et un début d’expérience. Ecrivez-nous en exposant publier une annonce dans le journal ? Le suc- brièvement votre situation, peut-être pourrons- cès ne se fait pas attendre, et ils organisent, nous vous aider. Joignez vos noms et adresse, avec les centaines de personnes qui ont nous vous contacterons. Toutes les informations répondu à l'appel, un symposium et un ban- recueillies seront considérées comme stricte- quet. Une trentaine de suicidaires de tous poils ment confidentielles et ne seront communi- décident de s’embarquer dans l’aventure, dans quées à aucun tiers. Pas sérieux s’abstenir. un car de tourisme flambant neuf. S'ensuit, à Veuillez adresser vos réponses Poste restante, travers l'Europe, une folle équipée de joyeux Bureau central de Helsinki, nom de code désespérés, une quête existentialo-rocambo- «Essayons ensemble».» ■ lesque dans la pure tradition des romans de Éditions Denoël, 2003. Paasilinna. Un périple loufoque mené à un Prix : 20 euros train d'enfer, des falaises de l'océan Arctique (Collection « Folio », 2005 : 6,20 euros) Ce thème du suicide « collectif » et « d’entraide » a inspiré de nombreux auteurs, dont celui de « L’île au trésor » et celui de la célèbre trilogie des « Fourmis ». Robert-Louis Stevenson : Le club du suicide (Folio, 2 euros). Avec cette nouvelle, Stevenson (1850-1894) ouvre un ensemble de récits fantaisistes et rocambolesques, « Les Nouvelles Mille et une Nuits ». « Nous savons désormais que la vie n’est qu’une scène où faire le pitre aussi longtemps que le rôle nous divertit. Il manquait encore une commodité au confort moderne ; une manière convenable et facile de quitter la scène ; l’escalier de service vers la liberté ; ou, si vous voulez, comme je l’ai dit à l’instant, l’escalier de service vers la Mort. Tout cela, mes chers compagnons de révolte, est fourni par le club du Suicide. » C’est un luxe rare qu’offre cette société secrète aux jeunes gentlemen londoniens, ruinés par le jeu et les femmes ou simplement désenchantés : le luxe de se suicider en toute discrétion, la garantie d’une mort « honorable ». Un suprême raffinement au Progrès déjà mis en marche par l’invention du chemin de fer ou du télégraphe. Moyennant 40 livres, les désespérés de bonne famille sont reçus par le président du club pour un entretien préalable où ils doivent faire la preuve de leur désir de mort. C’est une partie de carte qui décide de qui verra son souhait réalisé parmi l’assemblée des membres. Le principe est simple : celui qui tire l’as de pique obtient son passeport pour un au-delà sans scandale, tandis que celui qui tire l’as de trèfle est désigné pour être son bourreau. Tout candidat au suicide est donc également candidat au meurtre. Bernard Werber : Exit (Albin Michel, 3 volumes, 9 euros chacun). Mourir, oui, mais comment ? La jeune et jolie Amandine Wells, journaliste dans un magazine de jeux vidéo, perd son job, son petit ami et son appartement dans la même journée. Désespérée, elle décide de mettre fin à ses jours. Mais le courage lui manque. Sur Internet, elle tombe alors sur un site lui proposant un étrange marché (www.sos.dprim.fr) : « Vous avez raté votre vie ? Réussissez votre mort ! EXIT, le premier service d'aide à la sortie ». « On » l'aidera à mourir si elle-même accepte de tuer un autre désespéré. Amandine accepte. Et, bien sûr, reprend rapidement goût à la vie. Mélangeant polar et fantastique moderne, dessiné de manière très réaliste par Alain Mounier (auteur d'une autre série fantastique, « Dock 21 », chez Dargaud), Exit joue avec les peurs modernes : dépression, sectes, nouvelles technologies. Neurologie - Psychiatrie - Gériatrie / Année 6/Février 2006. © Masson, 2006.Tous droits réservés. 51