La guerre des rêves

Transcription

La guerre des rêves
ZELENKAUSKIS Léa
La Guerre des Rêves
Les personnages :
Billy : un jeune garçon de 9 ans, il est frêle et brun
Mère de Billy : maigre elle aussi, elle a une trentaine d’années et est blonde
Polo : un jeune garçon de 9 ans, blond
Scène 1 : extérieur nuit
On distingue dans l’obscurité l’ombre d’une grande ville. Le ciel est seulement éclairé par des
explosions lointaines.
Scène 2 : intérieur nuit
Dans un wagon de train vide.
Billy dors dans un lit improvisé sur le sol.
Soudain des hurlements de terreur brisent le silence de la nuit. Ils retentissent partout dehors
puis plus près, dans le wagon d’à coté.
Billy se réveille en sursaut. Les cris continuent puis peu à peu, s’estompent. Terrifié, le jeune
garçon écoute le silence qui revient et se cache sous ses couvertures tout tremblant.
Scène 3 : intérieur jour
C’est le matin, quelques rayons de soleil se faufilent entre les vieilles planches du wagon.
Billy se réveille doucement. Se redresse en baillant et se lève.
Le garçon est vêtu d’un short vert foncé et d’un débardeur blanc tâché.
Il avance en traînant des pieds dans le wagon d’à côté. La mère de Billy est déjà réveillée, elle
est assise sur le sol et, devant ses pieds se trouve une nappe à carreaux rouges et blancs qui
représente un simili de table. La mère de Billy est sale et parait exténuée : ses yeux sont
cernés et son visage est d’une pâleur épouvantable. Billy s’approche de sa mère et l’embrasse.
Mère de Billy : - Tu as bien dormi mon chéri ?
Billy acquiesce sans grande conviction et fixe sa mère du regard.
Mère de Billy : - Qu’est ce qu’il y a Billy ?
Billy hésite un instant puis demande d’une toute petite voix.
Billy : - Pourquoi toi et les autres vous avez encore crié cette nuit ?
La maman de Billy regarde son fils avec tristesse, elle le fait asseoir sur ses genoux et lui dit
d’une voix douce :
M.B. : - On a fait un gros cauchemar, et voilà tout…
B. : - Tous en même temps ? C’est possible ça ?
M.B. : - On dirait oui, on dirait…
La mère de Billy a les larmes aux yeux, elle inspire un bon coup et donne une petite tape sur
la cuisse de Billy.
M .B. : - Allez ! Va donc jouer avec Polo, je l’ai vu rôdé devant la porte tout à l’heure…
Billy se lève. La caméra suit le garçon qui sort par la porte. Dehors on découvre un ghetto
organisé autour d’un vieux train de marchandises abandonné. Au loin on aperçoit une grande
ville en ruine. Quelques personnes en haillons traînent de ci de là, dans la saleté et la misère.
Billy lui cours vers Polo qui est adossé à un arbre décharné.
Scène 4 : extérieur jour
Billy joue avec Polo, tous deux sont accroupis autour d’une flaque d’eau boueuse. Ils
creusent, avec un petit bout de bois, des sillons dans lesquels l’eau s’engouffre.
Au bout d’un moment Billy se redresse.
Billy : - Dis Polo… tes parents ils crient la nuit ?
Sans quitter son bâton des yeux Polo hoche la tête.
B. : - Et toi, tu sais pourquoi les grands ils crient comme ça la nuit ?
Polo relève soudain la tête et prend un air grave :
Polo : - L’autre jour j’ai entendu mon père qui discutait avec le vieux George de la guerre et
tout ça…et pis ils ont parlé d’une arme, un truc tout nouveau… ils ont dit que c’était encore
pire que l’arme nucléaire et les armes bac…euh…bactorologiques…
B. : - Bactoroloquoi ?
P. : - BAC-TO-RO-LO-GI-QUE.
B. : - C’est quoi une arme bactorologique ?
P. : - Ben j’sais pas trop mais vu le nom ça doit faire vachement mal…
B. : - Ouais…
P. : - Mais mon père y dit que c’est rien a côté de la nouvelle arme… Il a dit… Il a dit que
c’était la pire invention de tous les temps, et qu’il n’arrive toujours pas à comprendre
comment ça marchait, parce que c’est un truc de dingue, que ça peut pas être pour de vrai…
B. : - Et elle fait quoi cette arme ?
Polo laisse tomber son bâton dans la flaque de boue et soupire.
P. : - Elle tue les rêves.
Scène 5 : intérieur nuit
Billy est assis dans le wagon devant la nappe à carreaux. Il mange une bouillie transparente
avec sa mère. Après avoir fini son bol, il regarde sa mère :
Billy : - Maman ?
Sa mère fini son bol à son tour.
Mère de Billy : - Mmm ?
B. : - Ca sert à quoi les rêves ?
La jeune femme s’essuie la bouche et sourit.
M.B. : - Ca empêche les gens de devenir fous…
B. : - Parce que sans les rêves on devient fou ?
M.B. : - Oui… tu vois, ton cerveau est comme une cocotte-minute, et les rêves te servent de
soupape de sécurité… Sans la soupape la cocotte explose… Mais pourquoi tu me demandes
ça ?
B. : - Et ben… c’est Polo, il m’a dit que ceux qui étaient contre nous, tu sais dans la guerre
et ben il m’a dit qu’ils utilisaient une arme qui détruit les rêves et que les gens peuvent plus
dormir, qu’ils sont fatigués et qu’il meurent de fatigue. Que c’était comme un virus, mais que
des grands… pas des enfants…
Billy cherche ses mots, il parait troublé. Sa mère, elle, ne parle pas, ne bouge plus.
B. : - Maman… est ce que quand je serai grand moi aussi j’aurai ce virus ?
La mère de Billy resta un moment sans voix, puis avec douceur, elle posa sa main sur la joue
de son fils :
M.B. : - Non mon chéri, par ce que quand tu seras grand la guerre sera finie.
B. : - Elle a commencé comment la guerre ?
La mère de Billy lui répond avec amertume :
M.B. : - Je t’avoue que je ne m’en souviens plus, comme toutes les autres j’imagine…
Elle enlève la main de la joue de son fils et soupire :
M.B. : - Bon, au dodo maintenant. Tu veux que je te raconte une histoire ?
Billy acquiesce.
M.B. : Alors va au lit. Je range un peu et je te rejoins…
Billy s’exécute et cours dans le wagon qui lui sert de chambre, sa mère le regarde. Elle sourit
quelques secondes puis son sourire s’efface laissant place a un visage angoissé et fatigué.
Scène 6 : intérieur nuit
Billy est dans son lit, il regarde le plafond qui est troué. Sa mère le rejoint.
Elle se couche à côté de lui et le prend dans ses bras.
Elle lui chuchote à l’oreille :
Mère de Billy : - Quelle histoire veux tu que je te raconte ?
Billy : - Peter Pan !
M.B. : - Encore ?
Billy hoche la tête plusieurs fois de suite.
M.B. : - D’accord, d’accord… Alors… Il était une fois l’histoire d’un petit garçon pas
comme les autres, ce petit garçon se nommait Peter Pan. Mais Peter Pan ne vivait pas dans
notre monde à nous, il vivait au-delà des mers et des montagnes dans un endroit mystérieux
appelé le pays imaginaire… Un pays merveilleux rempli de fées et de sirènes, mais aussi
d’affreux pirates avec des dents en moins et des puces un peu partout…
La mère de Billy chatouille son fils en même temps qu’elle décrit les affreux pirates. Billy
rigole et se tortille dans tous les sens.
M.B. : - Mais tout le monde ne peut pas aller dans le pays imaginaire, c’est un pays réservé
aux enfants…
B. : - Pourquoi ? Pourquoi que les enfants ?
M.B. : - Parce que les enfants ont encore ce que l’on appelle l’innocence, c'est-à-dire qu’ils
croient encore en l’imaginaire, pour eux tout est possible.
B. : - C’est pour ça qu’on attrape pas le virus ?
La mère de Billy regarde son fils fixement, lui caresse l’épaule avec tendresse.
M.B. : - Peut-être…
Billy se redresse soudain.
B. : - En toi tu y crois en l’imaginaire ?
La mère de Billy prend son fils dans ses bras. Elle sourit tristement.
M.B. : -Bien sûr mon bébé, j’y crois.
Tous les deux se couchent.
Scène 7 : intérieur nuit
La mère et son fils sont toujours dans le lit.
La mère transpire et bouge sans cesse.
Soudain elle se réveille en gémissant, étouffant un cri. Dehors des cris retentissent parfois.
La mère regarde son fils qui dort toujours profondément. Au bout d’un moment elle se lève et
avance d’un pas chancelant dans l’autre wagon, elle manque de se prendre les pieds dans la
nappe à carreaux et se rattrape de justesse au mur. Elle reste appuyée contre le mur, et
brusquement elle vomit. Son corps est plié en deux et quand elle se redresse elle saigne du
nez.
Dehors toujours des cris. Elle essuie le sang qui coule sur ses lèvres, regarde sa main rougie et
s’effondre sur le sol. Couchée sur le dos les yeux grands ouverts elle respire avec difficulté.
Billy a entendu le bruit et s’est levé. Quand il aperçoit sa mère étendue il accourt :
Billy : -Maman !
Il s’approche d’elle :
Billy : - Maman ! Maman !
Sa mère tourne la tête, le regarde.
M.B. : - Ca va… aide moi à m’asseoir.
Billy s’exécute et aide sa mère à s’asseoir dos contre le mur.
B. : - C’est le virus c’est ça ? Hein ?
M.B. : - Chut, chut…
La mère caresse les cheveux de son fils.
B. : - Viens près de moi mon chéri.
Billy s’assied vers sa mère et l’enlace, il est en larmes.
B. : - Tu vas pas mourir hein ?
Sa mère lui répond d’une voix faible :
M.B. : -Chut…
Billy sert sa mère un peu plus fort.
B. : - Dis…tu peux encore me parler un peu du pays imaginaire… s’il te plait…
La jeune femme tousse.
M.B. : - Le pays imaginaire… le pays imaginaire est un monde magnifique, rempli de fées et
de sirènes… là-bas…là-bas tout est beau, les gens sont heureux…et…
La voix de la mère de Billy s’estompe peu à peu, la jeune femme caresse les cheveux de son
enfant puis stoppe brusquement son geste.
Ses yeux se ferment, sa tête tombe lentement sur le côté.
Billy lui s’est endormi.

Documents pareils