Infirmière de nuit

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Infirmière de nuit
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Histoires
de Pays-d’en-haut
Josée Louise Tremblay
Chroniqueuse de rue
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J’étais rebutée par la pensée d’avoir à lire un roman. Je préfère lire d’autres genres
de bouquins qui m’apportent des idées différentes de celles que je pourrais avoir au
préalable. J’ai pourtant trouvé ce que je cherchais dans L’infirmière de nuit!
La mort, sujet plutôt commun abordé par Henri Lamoureux, sociologue de formation,
y est traitée de façon inhabituelle!
J’ai adoré la narration de ce livre. Même
s’il aborde un sujet sombre, le roman se
lit avec aisance. L’histoire tourne autour
de cinq personnages atteints d’une
maladie incurable. Un prof d’université,
un riche homme d’affaires, un poète
célèbre, une travailleuse du sexe (connue
par le riche et le poète) et une jeune
secrétaire sous l’emprise de sa mère, se
retrouvent aux Pays-d’en-haut, un établissement qui accueille les gens venus pour
y mourir. L’infirmière de nuit consigne ses
réflexions dans un journal : «Parfois, je
pense que j’exerce ce métier parce que
la mort représente pour moi un mystère
si grand que c’est finalement peu de
choses que de consacrer une vie à
rechercher sa signifiance» (p.64). J’ai
senti la compassion de l’infirmière,
personnage profondément humain, et j’ai
eu l’impression que l’auteur s’y cachait
derrière.
Ce livre est à lire pour se réapproprier sa
vie. Il m’a confirmé l’importance de régler
ses problèmes pour éviter l’accumulation
de tensions qui mènent à la maladie et
provoquent parfois la mort, tout comme
l’a compris M. Bertrand, l’homme
d’affaires imbu de lui-même sur le point
de rendre l’âme: «J’ai été tout entier
tourné vers la découverte de moi-même
comme expression de la vie et, alors
qu’elle arrive à son terme, je constate
que cette quête est tout à fait vaine. Je ne
suis pas plus avancé qu’avant. Je ne sais
pas trop pourquoi j’ai existé. Et pourtant,
ma raison me dit qu’il faut bien qu’il y ait
du sens là-dedans…» (p.105). L’infirmière
nous livrera quant à elle ce qu’elle
ressent face au disparu: «Quand il est
entré ici, j’ai eu l’impression qu’il partait
en vacances. Comme si sa terrible
maladie était […] le prétexte qu’il
cherchait pour arrêter. Comme s’il savait
MONTRÉAL, 1er JANVIER 2006
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qu’il n’aurait plus à feindre quoi que ce
soit» (p.128). Elle dira aussi des patients
et du personnel de l’établissement : «Les
citoyens des Pays-d’en-haut sont tous
égaux devant l’implacable destin qui les
guette. Ici, pas de place pour autre chose
que la vérité. Une vérité qu’on se doit à
soi-même» (p.183).
J’ai reçu plusieurs leçons de L’infirmière
de nuit et je vous en recommande la
lecture. Ce roman traite humainement du
dernier voyage des vivants par lequel
nous passerons tous, alors aussi bien s’y
préparer.
L’infirmière de nuit, Henri Lamoureux, VLB éditeur,
Montréal, 2006.