Le trading haute fréquence vu de l`AMF
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Le trading haute fréquence vu de l`AMF
Le trading haute fréquence vu de l’AMF Arnaud Oseredczuck,chef du service de la surveillance desmarchés Introduction -Trading haute fréquence :définitions Conceptuellement,il convient de distinguer : – Trading algorithm ique ethaute fréquence :lesstratégiesautomatisées ne sont pastouteshaute fréquence (ex: stop loss) – Algorithm es de trading,algorithm es d’exécution : • le premier désigne l’identification desopportunitéset l’initiation desordres, • le second la mise en œ uvre,sur cette base,de l’exécution desordres Les principales stratégies : – Non directionnelles • «Market-making »consistant pour un intervenant àintercaler desordres d’achat passifset de vente auxmeilleureslimitesen ayant ou non le statut officiel de market-maker • Arbitrage entre valeursliées(actionscorrélées,indiceset sous-j acents, dérivéset sous-j acent)ou entre desprixdifférentspour une même valeur sur deslieuxd’exécution variés – Directionnellesàcourt terme (qqssecondesàqqsminutes) • Parissur le «retour àla moyenne »d’une valeur en casd’écart de comportement • Parisinversessur la poursuite temporaire d’un écart de tendance • Le tout en fonction de grillesde comportement backtestées – Cescatégoriessont théoriques;ce que l’on rencontre sur Euronext est souvent un «mix»«cross-markets»de market-making et d’arbitrage, avec plusou moinsde risque directionnel selon l’horizon I.Emprise et développement du trading haute fréquence sur le marché français Trading haute fréquence :les faits sur le m arché français Le poidsdu trading haute fréquence danslesordreset lestransactions – – 30 à35% destransactionsréaliséesen Europe selon lesestimationsde marché,5060% destransactionsréaliséesauxUS Difficulté pour l’AMF àétablir ce ratio car lestradersHF ne sont pastousmembresde marché et l’AMF n’a accèsen direct qu’àl’identité des membresde marché responsablesdesordreset destransactions,non desclientsfinaux.Ilest possible que destradersHF soient actifsderrière desbrokersmembres,notamment en DMA Etude AMF avril 2010 sur les«pure players»: 3 membresde marché d’Euronext entrent àeuxseuls,en compte propre,50% desordressur actions du CAC 40 Lesratiosd’exécution sont de l’ordre de 1 à5% Exemple : en avril 2010,un intervenant a entré 15 millionsd’ordressur les valeursdu CAC 40 et n’a exécuté qu’une transaction pour 154 ordres Lestauxd’agressivité varient beaucoup selon lesstratégies De nombreuxacteurs entrent et sortent du marché selon l’efficacité de leurs stratégies Trading haute fréquence :la course àla vitesse Exemple sur une valeur CAC 40 au coursd’une séance particulièrement active – Volum e d’ordres sur EuronextParis : • 540,000 ordres au cours de la séance • 800,000 m essages (ordre ajouté/annulé/m odifié,transaction) PSI1 32% PSI2 20% PSI 3 12% PSI4 10% PSI5 5% Totaldes 5 plus gros ém etteurs de m essages = 80% des m essages – Latence : • Jusqu’à600 m essages au cours d’une seule seconde, dont190 provenantd’un m êm e m em bre de m arché • Tem ps m inim um entre 2 m essages consécutifs d’un m êm e m em bre :7 m icrosecondes • Plus courte durée de vie d’un ordre (annuléavantexécution):25 m icrosecondes II.Efficacité de marché et HFT Les term es du débat Lesdéfenseursdu trading haute fréquence estiment : – – qu’il «apporte de la liquidité »(via lesstratégiesde «market-making »et d’arbitrage) et qu’il participe plus généralement àl’efficacité du marché en équilibrant lesprixentre placeset entre valeursliées Sesdétracteursopposent lesargumentssuivants: – – – – – – L’effet favorable sur la liquidité serait seulement apparent («liquidité fantôme »).L’ «impact de marché »d’un ordre ne se réduirait pas,bien au contraire => attention àla notion d’efficience qui peut ne pascorrespondre au ressenti destradersfondamentaux la prépondérance destradershaute fréquence sur lesmarchés«lit »repousserait les transactionsverslesmarchés«dark» l’équilibrage desprixentre «venues»se ferait uniquement au profit destraders algorithmiques l’instabilité permanente du carnet d’ordresintroduirait une incertitude structurelle dans le trading (un ordre est déj àobsolète au moment oùil est envoyé)qui est un obstacle à l’efficience le HFT prospèrerait sur une microstructure de marché qui n’est pasoptimale car elle permet de court-circuiter la file d’attente àbasprix Lesalgorithmespourraient être prisdansune logique mimétique oùilsaccroissent les déséquilibresau lieu de lesrésorber Co-location,égalité de concurrence et efficacité – – «concurrence déloyale »desintervenantsen co-location ? Sur touslesmarchés,lesinvestissementstechniquespeuvent permettre de gagner une meilleure position.Toutefois,l’existence de barrièresàl’entrée et d’un marché à deuxvitessesconduit rarement àun optimum économique 02 /0 1 11 /20 /0 06 1 20 /20 /0 06 1 31 /20 /0 06 1 09 /20 /0 06 2 20 /20 /0 06 2/ 01 20 /0 06 3 10 /20 /0 06 3 21 /20 /0 06 3 30 /20 /0 06 3/ 10 20 /0 06 4 21 /20 /0 06 4 03 /20 /0 06 5/ 12 20 /0 06 5 23 /20 /0 06 5/ 01 20 /0 06 6 12 /20 /0 06 6 21 /20 /0 06 6/ 30 20 /0 06 6 12 /20 /0 06 1 21 /20 /0 10 1 01 /20 /0 10 2 10 /20 /0 10 2 19 /20 /0 10 2/ 02 20 /0 10 3 11 /20 /0 10 3 22 /20 /0 10 3 31 /20 /0 10 3/ 13 20 /0 10 4 22 /20 /0 10 4 03 /20 /0 10 5 12 /20 /0 10 5/ 21 20 /0 10 5 01 /20 /0 10 6/ 10 20 /0 10 6 21 /20 /0 10 6 30 /20 /0 10 6/ 20 10 Liquiditévs profondeur :en 4 ans le spread a étéréduit..m ais la quantitédisponible aux m eilleures lim ites plus encore 0,35 Prem ier sem estre 2006 Prem ier sem estre 2010 300000 Spread (€)échelle de gauche Spread (% )échelle de gauche Depth (€)échelle de droite 0,3 250000 0,25 200000 0,2 150000 0,15 100000 0,1 0,05 50000 0 0 => Nécessitéd’un travailbeaucoup plus approfondipour apprécier l’«utilitésociale »du trading HF III.Intégrité -Pathologiesdu trading haute fréquence Pathologies possibles du trading haute fréquence Risque systémique et perturbations du mécanisme de formation desprix – – Le flash crash du 6 mai : rôle perturbateur,maisnon moteur du HFT Sur le marché français: quelquesexemples vécusde pertesde contrôle d’algos,ou d’interactionsdéfavorablesentre algorithmes,notamment en pre-opening ou preclosing Abusde marché : – Layering /spoofing : déséquilibrer le carnet par sesordres,pour réaliser une transaction en sensinverse.Nombreusesvariantes.SanctionsauxEtats-Unis (Trillium),travauxen Europe. – Incertitude j uridique sur certainsschémas«limite »àexpertiser : • • • • • Momentum ignition : accompagner / déclencher une bulle de trèscourt terme en espérant attirer dessuiveurs,puisdéboucler la position Fixation indirecte du priximporté sur un darkpool Sondagesde carnet Quote-stuffing : envoi d’ordresen grand nombre,souvent répétitifs,sanslogique économique,pour perturber ou freiner la lecture du carnet par lesautresparticipants, sonder de manière répétée leursintentions,ou masquer sespropresanticipations «Smoking »: envoi d’ordrespassifsattractifsen espérant déclencher desordres«au marché »,et repositionnement àun niveau plusélevé avant d’être «tapé » Un schém a caractérisé:le spoofing /layering : faire sem blantde vendre avantd’acheter 15 sec ) (Départ+ 17 S x 8645 (Lim 17.35) S x 9938 (Lim 17.35) Un schém a àapprofondir :exem ple de «quote-stuffing » présum é–oscillations d’ordres entre différentes lim ites de prix sans logique économ ique apparente Sell orders Conclusions /enjeux Risque systémique dûàla vitesse et àl’automatisation : il est largement admis,et lesremèdesfont relativement consensus (contrôlesàdiversniveaux,circuit-breakers… ) – Réglementation ESMA prévue fin 2011 Efficacité,intégrité : Ilest difficile de porter un j ugement sur le HFT en général.Leseffetssur l’efficacité sont controversés,lesrisquessur l’intégrité sont avérésmaissansdoute dûsàune minorité. – Au regard de l’effet sur l’efficacité de marché • Stratégie 1 : market-making classique avec une trèsforte présence aux meilleureslimites– trèsforte activité dansle carnet d’ordrescréant une certaine instabilité,maisapportant réellement une liquidité disponible, même trèstransitoire ; • Stratégie 2 : repositionnement en permanence àdeslimiteséloignéespour bénéficier desraresordrestrès agressifset peu informés– forte perturbation du carnet d’ordreset stressdesinfrastructures,peu d’apport réel de liquidité • On voit que le bilan «coûtsavantages»pour l’efficacité du marché de la première stratégie est plusfavorable que celui de la seconde – Et encore plusau regard de l’intégrité de marché • Comme dansle reste desactivitésde marché,il appartient au régulateur d’identifier et de sanctionner la minorité d’acteursqui commet des manquementsàla réglementation. Conclusions /enjeux Efficience : – Infrastructuresde marché et régulateursdevraient réfléchir àla microstructure de marché (tarification,ticksize)capable de favoriser lesstratégiesqui ont une plus-value réelle en termesd’efficience,et en touscassupérieure àleursinconvénientsen termes de «bruit »et d’autresexternalités Intégrité : enj eu de surveillance maj eur – – – – La réflexion sur la qualification j uridique de certainsschémassera poursuivie,et tranchée par la j urisprudence.En tout état de cause,lesintervenantsqui mettent en œ uvre de telsschémas prennent un risque. L’AMF investit beaucoup pour détecter lesschémasrépréhensibles,ou qui soulèvent desinterrogations,et travaille d’oreset déj àsur certainesconfigurations Néanmoins,pour construire une surveillance àl’échelle de certaines stratégies possibles(cross-markets),lesenj euxde coordination internationale et les investissementssont considérables Dèslors: • • • Ou bien (first best ?)le système est capable d’organiser une surveillance trèsefficace, cross-markets,du HFT -maiscomment l’organiser et la financer ? Ou bien (second best ?)un moyen de garantir àmoindre coût une capacité de surveillance plusélevée serait de freiner l’activité par une action sur lesticksize,les tempsde latence,lesfees… maisalorstout le secteur est pénalisé du fait de l’activité possible d’une minorité Ou encore… assumer que lespossibilitésde surveillance dansce contexte sont limitéeset que le marché est vulnérable,maisavec un risque d’éviction destraders «fondamentaux»et du retail