Instance concernant les demandes faites par HDTV et YesTV Avis d

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Instance concernant les demandes faites par HDTV et YesTV Avis d
Instance concernant les
demandes faites par HDTV et YesTV
Avis d’audience publique CRTC 2007-17
Présentation par
l’Association canadienne des radiodiffuseurs
Le 12 février 2008
CAB Vision: The goal of the CAB is to represent and advance the interests of Canada’s
private broadcasters in the social, cultural and economic fabric of the country.
(Priorité à l’allocution)
GLENN O’FARRELL
Bonjour, Monsieur le Président et membres du Conseil. Mon nom est Glenn O’Farrell; je
suis le président et chef de la direction de l’Association canadienne des radiodiffuseurs
(ACR). Je suis accompagné aujourd’hui du vice-président de la réglementation et des
politiques à l’ACR, Jay Thomson, ainsi que de Stephen Armstrong d’Armstrong Consulting
et de Wayne Stacey, qui est le conseiller en ingénierie de l’ACR. Nous vous sommes
reconnaissants de nous avoir donné l’occasion de comparaître dans le cadre de cette instance
au nom de tous les membres de l’ACR, tant de grande et de petite taille, à travers le pays.
Monsieur le Président et messieurs les commissaires, l’ACR s’oppose fortement aux deux
demandes. Simplement dit, nous sommes d’avis qu’il s’agit des mauvaises demandes, pour les
mauvaises licences, au mauvais moment.
Pourquoi au mauvais moment? Parce que la profitabilité est à son niveau le plus bas – bien
en-deçà du niveau de 22% du BAII qui a caractérisé les marchés où de nouveaux services
ont été autorisés par le passé.
Les demandes comportent elles-mêmes de graves lacunes. Par exemple, HDTV déclare
qu’elle veut créer un réseau national par le biais duquel elle acheminera de la programmation
de sa base à Vancouver vers sept autres marchés à travers le pays, mais elle n’a pas fait de
demande en vue d’obtenir une licence de réseau. Elle veut avoir droit à la distribution dans
huit marchés locaux, mais ne propose pas d’offrir de la programmation locale. De plus, elle
veut la distribution nationale pour son service de télévision en direct, ce qui met en question
si ce qu’elle propose est vraiment un service de télévision en direct ou un réseau national de
télévision spécialisée.
La demande faite par YesTV comporte, elle aussi, de graves lacunes. Elle est appuyée par
très peu de financement; elle contient pour ainsi dire aucun renseignement sur le mode de
propriété et sa proposition en matière de programmation semble mieux convenir à une
entreprise axée sur la collectivité qu’à une licence pour un service de télévision en direct.
Mais, en plus des problèmes associés aux demandes comme telles, il existe des raisons
convaincantes sur le plan de la politique gouvernementale pour refuser d’accorder une
licence à tout nouveau service général, surtout un service HD, en ce moment.
• Premièrement, cette mesure serait prématurée étant donné les changements
notables qu’on apporte maintenant à la réglementation pour ce secteur. Il est
insensé d’ajouter des nouveaux concurrents au mélange avant que le cadre ne se
soit stabilisé.
• Deuxièmement, le secteur des services de télévision en direct se trouve dans un
état financier périlleux. Ses recettes publicitaires stagnent depuis 2003 et son taux
de rentabilité n’a jamais été aussi bas. Il ne s’agit simplement pas d’un secteur qui
puisse supporter des nouveaux arrivés en ce moment.
• Troisièmement, ni l’une ni l’autre requérante ne satisfait aux critères du Conseil
sur l’entrée en concurrence et la demande établie.
• Et finalement, ces demandes n’accélèreront pas la transition vers le numérique et
n’apporteront pas davantage de programmation véritablement HD au système
plus rapidement que le font les services autorisés en place. En fait, elles ne
réussiront qu’à fragmenter davantage les auditoires et les recettes publicitaires
dans un secteur qui fléchit déjà.
J’aborde maintenant chacun de ces facteurs dans un peu plus de détail.
Il est prématuré d’autoriser tout nouveau service de télévision en direct
L’ACR est d’avis qu’il est prématuré d’autoriser tout nouveau service de télévision en direct,
étant donné les vastes changements qui s’opèrent dans le milieu réglementaire :
• Dans sa décision sur la politique télévisuelle, le Conseil a modifié les limites
applicables à la publicité pour les services de télévision en direct, et celles-ci ne seront
pas complètement mises en œuvre avant septembre 2009.
• Il a également décidé que les signaux analogiques en direct doivent cesser en 2011
afin d’accélérer la transition au numérique.
• Le Conseil est sur le point d’entamer une audience sur l’ensemble du cadre
réglementaire visant les EDR et les services facultatifs, en plus d’apporter de vastes
changements au Règlement sur la distribution de radiodiffusion. Ces changements pourraient
vraisemblablement redéfinir la position réglementaire des services de télévision en
direct au sein du système de radiodiffusion canadien.
2
Chacun de ces enjeux est susceptible d’avoir des conséquences importantes pour le secteur
de la télévision conventionnelle. L’ACR est fermement d’avis que les radiodiffuseurs privés
du secteur de la télévision conventionnelle doivent avoir le temps de réfléchir à tous ces
changements et de les intégrer avant que le Conseil ne songe à autoriser de nouveaux arrivés
sur la scène des services en direct.
La situation financière périlleuse du secteur des services de télévision en direct
Comme le reconnaît le Conseil, les services de télévision conventionnelle éprouvent une
période difficile en ce moment. Dans la décision sur la politique télévisuelle qu’il a rendue en
mai dernier, le Conseil a pris note des défis que présentent la fragmentation de l’auditoire, les
changements technologiques, le déclin continu de l’écoute, les changements au sein du
marché de la publicité et les coûts associés à la transition au numérique.1 Les services
canadiens de télévision en direct ne sont pas seuls à cet égard, car la crise dans ce domaine
est un phénomène mondial. Les mêmes défis se posent en Australie, au Royaume-Uni et
même aux États-Unis, mais l’incidence de ces facteurs au Canada se manifeste nettement à
l’analyse des données.
L’ACR a joint, au mémoire qu’elle a présenté en octobre concernant l’Avis d’audience
publique de radiodiffusion 2007-10 (l’instance sur le cadre de réglementation des EDR), un
rapport élaboré par Armstrong Consulting. Je demande donc à Steve Armstrong de vous
parler de certaines de ses conclusions dans ce rapport.
STEPHEN ARMSTRONG
Le rapport de l’ACR se penchait sur le rendement financier du secteur de la télévision
conventionnelle de 2002 à 2006. Les bénéfices avant intérêts et impôts (BAII) ont chuté de
9,4 % en 2002 à un peu plus de 4 % en 2006.
Les BAII des stations de langue française ont diminué d’environ 11 % pour s’établir à 7 %.
Du côté des stations de télévision en direct de langue anglaise, ils ont chuté de 9 % à 3,4 %.
Les services de télévision conventionnelle en direct dans les petits marchés ont fait face à
une augmentation des dépenses et une diminution des recettes pendant cette période. Il en
est résulté une baisse encore plus raide de leur rentabilité; celle-ci est passée de 10,6 % en
2002 à -3,6 % en 2006.
1
Avis public de radiodiffusion CRTC 2007-53, Décision portant sur certains aspects du cadre de réglementation de
la télévision en direct, le 17 mai 2007, au paragraphe 12.
3
Selon les prévisions, le taux de rentabilité diminuera encore plus d’ici à 2011. Dans notre
rapport, nous prévoyons que la marge des BAII de l’ensemble du secteur des services de
télévision conventionnelle en direct reculera à -6,2 % en 2011. Encore une fois, les stations
des petits marchés seront les plus mal loties avec des BAII passant à -13,2 % en 2011.
GLENN O’FARRELL
Monsieur le Président, messieurs les commissaires, malgré les tentatives de HDTV de
camoufler ces données en montrant une image rose des prévisions pour l’ensemble de
l’industrie de la radiodiffusion, il est évident que le scénario pour le secteur de la télévision
conventionnelle présente une image sombre.
Par conséquent, nous sommes d’avis que l’ajout de deux nouveaux services autorisés qui
feraient augmenter davantage le prix de la programmation HD, fragmenteraient encore plus
l’auditoire, concurrenceraient avec les stations en place pour les mêmes recettes publicitaires,
et aurait des conséquences importantes et nuisibles pour la santé du secteur de la télévision
conventionnelle en direct.
Jay Thomson abordera maintenant le critère de l’entrée sur le marché.
JAY THOMSON
Ni l’une ni l’autre requérante ne satisfait aux critères sur l’entrée en concurrence et la
demande du marché
L’ACR est d’avis que ni l’une ni l’autre requérante n’a satisfait, ni même tenté de satisfaire, au
critère traditionnel du Conseil concernant l’entrée sur le marché.
L’incidence d’une nouvelle station sur les services en place est un des éléments clés dont le
Conseil doit tenir compte lorsqu’il examine la possibilité d’accorder une licence à une
nouvelle station de télévision en direct. 2 Le Conseil se penche sur la santé et la rentabilité du
marché comme tel, et sur la question de savoir si le nouveau service risque de soutirer des
auditoires et des recettes publicitaires des stations en place dans le marché visé. Dans des cas
précédents où le Conseil a examiné une demande en vue d’établir un nouveau service de
télévision en direct, le marché affichait généralement des BAII d’environ 22 %. Cependant,
aucun des marchés proposés par les requérantes aujourd’hui n’atteint ce taux des BAII.
2
Voir, par exemple, la décision de radiodiffusion CRTC 2004-98, Demandes concurrentes d’introduction de
nouveaux services de télévision en direct à Edmonton et Calgary, le 26 février 2004, au paragraphe 32.
4
En fait, comme vous pourrez le constater au tableau joint à notre présentation orale, chacun
des marchés proposés par HDTV a connu un BAII à un seul chiffre en 2006, sauf pour
Edmonton. Je peux vous assurer que nous n’en faisons pas état avec fierté. Nous ne sommes
pas opposés à la concurrence, mais nous nous devons d’être réalistes. Le système est de
toute évidence en péril et d’ajouter de nouveaux concurrents à ce point-ci ne viendrait en
rien arranger les choses.
HDTV a déclaré qu’étant donné qu’elle ne compte pas solliciter de la publicité locale, les
radiodiffuseurs locaux n’ont rien à craindre sur ce plan. Or, nous constatons d’abord que
HDTV ne s’est pas engagée à ne pas accepter de la publicité locale mais simplement à ne pas
en solliciter. Il y a une énorme différence entre les deux. De plus, même s’il est évident que la
publicité locale est essentielle pour les radiodiffuseurs locaux, la majorité des recettes des
services de télévision en direct est attribuable aux annonceurs nationaux, soit précisément le
marché que HDTV souhaite cibler. Par conséquent, nous ne sommes nullement rassurés de
la prétention de HDTV de ne pas solliciter de publicité locale.
Pour ce qui est de YesTV, elle propose de fonctionner en tant qu’entité autonome dans le
marché médiatique le plus concurrentiel du pays. Mais, ce marché ne peut pas supporter un
nouvel arrivé, car il n’a pas encore absorbé le dernier. SUN TV a connu des difficultés
financières depuis son lancement en 2003 sous le nom de Toronto One. L’ACR est d’avis
qu’il ne convient pas d’autoriser une nouvelle station de télévision en direct dans le marché
de Toronto alors que SUN TV peine encore à s’établir.
Finalement, ni HDTV ni YesTV n’ont pu démontrer qu’il existe une demande pour les
services qu’elles proposent, malgré le fait que le Conseil exige que les requérants démontrent
« clairement qu’il y a une demande et un marché pour la station et le service proposé. » 3
WAYNE STACEY
Ni l’une ni l’autre requérante ne viendra relancer la transition vers le numérique
Ces deux requérantes prétendent que l’approbation de leurs demandes viendra relancer la
transition du système canadien de radiodiffusion de l’analogue au numérique. Mais cela est
faux pour deux raisons. En premier, malgré les demandes pour des services HD, ni l’une ni
l’autre requérante ne semble proposer un véritable service 100% haute définition. Les deux
3
Avis public de radiodiffusion CRTC 2007-62, Appel de demandes de licence de radiodiffusion visant l’exploitation
d’entreprises de programmation de télévision numérique/haute définition (HD) en direct pour desservir l’ensemble
du Canada, le 11 juin 2007, à la page 1.
5
requérantes ont déclaré qu’elles convertiraient la programmation de définition standard en
amont pour une période non spécifiée de leur horaire, ce qui à notre avis ne vient ajouter
nouvelle programmation HD dans le marché. De plus, HDTV demande la distribution
analogique sur les systèmes de câble, la distribution numérique standard par les entreprises
de câble et les entreprises de distribution directe par satellite (SRD), ainsi que la distribution
HD tant au câble qu’aux SRD. Pour sa part, YesTV s’attend à la distribution de soit son
signal HD, soit son signal de définition standard par les EDR.
En deuxième lieu, en raison de contraintes touchant l’offre de programmation HD, ces
requérantes n’auraient pas un plus grand accès à la programmation 100% HD que ne l’ont
les radiodiffuseurs canadiens existants. Nos membres travaillent ardemment en vue de la
transition vers le numérique en 2011 et offrent de plus en plus de programmation HD
chaque année. Les consommateurs ne sont ainsi pas privés de la réception de
programmation HD - et ils en reçoivent davantage chaque jour. Ainsi, la fourniture de
programmation HD n’est pas en soi une raison d’approuver les demandes de nouvelles
requérantes – en particulier celles-ci.
GLENN O’FARRELL
Monsieur le Président et messieurs les commissaires, il s’agit ici de mauvaises demandes,
pour les mauvaises licences, au mauvais moment. Le service en direct est en crise partout
dans le monde et le Canada n’y fait pas exception. Les BAII sont à leurs plus bas niveaux
jamais enregistrés et l’avenir est sombre. Nous sommes en période de changements
réglementaires importants et d’une transition imposée vers le numérique qui, quoique
nécessaire, n’en demeure pas moins dispendieuse. L’ensemble de ces facteurs viennent
appuyer notre position qu’aucune licence ne devrait être autorisée à ce moment-ci, et que
quelle qu’autorisation que ce soit imposerait davantage de pressions à la baisse sur un secteur
déjà en déclin.
Il nous fera maintenant plaisir de répondre à vos questions.
6
Tableau 1: Profitabilité des télédiffuseurs privés conventionnels par marché,
lors du dépôt de demandes de nouvelles stations de télévision locales
aet lorsque les demandes de HDTV et YesTV ont été déposées.
Année
Marché
Nouveau
1995
1999
2000
2001
Calgary/Edmonton
Vancouver/Victoria
Toronto/Hamilton
Vancouver/Victoria
Craig
CHUM
Craig et Rogers
Channel M
Moyenne
23.2%
18.3%
23.5%
20.8%
21.5%
HDTV
HDTV
HDTV
HDTV
HDTV/YesTV
HDTV
HDTV
1.1%
9.1%
11.5%
-2.8%
4.9%
1.1%
n.a.
2006
Vancouver/Victoria
Calgary
Edmonton
Winnipeg
Toronto
Montréal
Halifax
Source: CRTC
BAII