gerer le risque projet la dimension humaine

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gerer le risque projet la dimension humaine
GERER LE RISQUE PROJET
LA DIMENSION HUMAINE
CHANSON Bernard, [email protected], Directeur Général de Qualisys
Mots clés : Risque Projet Humain Psychologie Attente Intégration
RESUME
Réussir un projet c’est satisfaire toutes les attentes de toutes les parties
prenantes au projet. Celles relatives aux coûts, aux délais et à la qualité. Mais aussi
toutes les autres. Sans oublier les siennes propres !
Qui a ces attentes ? Quelles sont-elles ? Comment se forment-elles ? Dans quelle
mesure est-il possible de les satisfaire ? Quels sont les outils, les démarches les plus
adaptées ?
En faisant référence à des modélisations structurantes (cycle de vie et méta modèle
de projet, PNL), cette présentation tente d’éclairer quelques-uns uns de ces points
avant d’esquisser quelques lignes directrices du management de demain.
Congrès francophone du management de projet 2004 « Projets, Entreprise, Intégration »
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Un mandarin était amoureux d’une courtisane
« Je serai à vous, dit-elle, lorsque vous aurez passé cent nuits à m’attendre,
assis sur un tabouret, dans mon jardin, sous ma fenêtre. »
Mais, à la quatre-vingt-dix-neuvième nuit,
le mandarin se leva, prit son tabouret sous le bras et s’en alla.
..Faire attendre : prérogative constante de tout pouvoir,
« passe-temps millénaire de l’humanité ».1
1
Fragments d’un discours amoureux (Roland Barthes)
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1 INTRODUCTION
« Et si je me trompais ? ».
Depuis mon premier projet d’envergure il y a … bien longtemps, jusqu’à aujourd’hui, j’ai
toujours aimé les projets. Et j’ai toujours cru les réussir grâce à ma capacité de mettre sous
contrôle les situations.
Coûts, délais, qualité tout y était. J’étais à chaque fois satisfait d’avoir accompli ma mission.
Et pour quelques temps, … satisfait de moi-même.
Puis, on recommence, pour prendre un projet plus grand, plus complexe, plus important.
Toujours en recherche d’un challenge nouveau permettant de se prouver sa maîtrise.
Jusqu’au jour où on a la chance de décrocher LE projet : celui où il faut manager des gens
plus « gradés » que vous, et ayant plus de connaissances et d’expérience que vous dans les
domaines couverts par le projet. Un projet transversal couvrant des domaines fonctionnels
que vous n’avez jamais abordé et pour lequel vos interlocuteurs et clients sont les N°2 ou 3
du Groupe international dont vous faites partie.
Alors vous vous demandez comment prendre le contrôle de la situation. Est-il vraiment
possible de la contrôler ? Est-ce même souhaitable ? Peut-on réussir sans être plus
compétent que ceux qu’on manage? Quelles sont les choses qui sont sous mon contrôle et
dont je suis réellement responsable et celles qui ne le sont pas ?
Afin d’atteindre les buts que vous vous êtes fixés, il faut vous rendre à l’évidence : L’Autre
pourra toujours échapper à votre contrôle. De manière consciente ou inconsciente, l’homme
constitue le facteur de risque permanent voire unique vis-à-vis de la réussite des projets.
Quelles que soient les méthodes, outils, démarches que vous pourriez utiliser ! Il faut donc
trouver des moyens de réussir autrement que par le contrôle.
Mon expérience m’a amené à conclure que le moyen le plus efficace pour réussir le projet
est de faire que les attentes des individus soient satisfaites en même temps que celles
du projet.
C’est le point de vue que nous proposons dans cette présentation.
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2 LE RISQUE PROJET
2.1. DEFINITION
Tous les dictionnaires sont d’accord.
Dans le langage courant :
•
Un risque, c’est un danger éventuel, plus ou moins prévisible, une menace.
•
Un projet, c’est « l’image d’une situation, d’un état que l’on pense atteindre » (Petit
Robert), c’est « ce qu’on a l’intention de faire » (Petit Larousse).
Le risque projet, c’est donc ce qui menace ou compromet une situation, un état que l’on
pense atteindre ou ce que l’on a l’intention de faire.
« Penser atteindre », « (avoir l’) intention de faire » : il n’y a pas de risque sans projection
dans le futur et donc sans attente.
Le risque projet c’est de façon très générale ce qui peut faire que nos attentes ne
soient pas satisfaites.
En prenant pour référence une modélisation du process projet, nous allons situer et préciser
ce sur quoi portent les attentes et identifier localiser les domaines de risque correspondants.
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2.2. LE MODELE DE PROJET
Qu’il s’agisse de « fuir » une situation jugée à certains égards insatisfaisante, ou qu’il
s’agisse de viser une situation nouvelle jugée plus satisfaisante (celle de concurrents par
exemple), le projet est essentiellement un processus formalisé de changement, de
transformation dont le bon déroulement permet de satisfaire des attentes, elles-mêmes
formalisées.
Il vise à modifier, par une action organisée, une situation existante pour atteindre une
situation future souhaitée.
Ce n’est bien sûr pas le seul instrument dont nous disposons pour opérer une modification
de situation. Un bon plan d’actions est parfois largement suffisant surtout lorsque le
changement ne met en jeu que soi-même.
Mais la formalisation d’un projet s’impose dès lors que les implications et les attentes sont
collectives et représentent un enjeu important.
• Importance de l’impact, du coût global (coût financier, durée), du nombre de personnes
concernées ;
•
Transversalité des objectifs ;
•
Nécessité politique d’afficher une forte visibilité ;
•
Etc.
En fait, c’est la formalisation qui fait le projet … et qui fait aussi son coût2.
2
Au moment de décider de créer un projet, on veillera à vérifier que les attentes que l’on a justifient bien
le coût de cette formalisation.
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Cette formalisation est représentée ci-dessous, dans sa forme la plus élémentaire.
O
S
S'
A
Figure 1
On considère une Situation de départ S. On appelle Situation, un ensemble de produits
(équipements), de personnes et de process en interaction réalisant leurs fonctions dans un
cadre de contraintes déterminé. (Nota : on peut indifféremment appeler Situation ou
Solution cette configuration de produits, de personnes et de process dont le fonctionnement
en interaction permet de résoudre un problème exprimé en termes de fonctions à réaliser et
de contraintes à respecter)
Pour des raisons (finalités) qui sont explicitées au niveau des Objectifs O, on souhaite
mettre en place une nouvelle Situation S’ (situation résultat) qui associera de nouveaux
équipements, de nouvelles personnes dans le cadre de nouveaux process afin de réaliser un
nouvel ensemble de fonctions dans un nouveau cadre de contraintes. La mise en place de
cette nouvelle situation S’ nécessite le déroulement ordonné d’Actions portant sur les
différents composants de la Solution (telles que l’acquisition de nouveaux produits, la
conception et le développement de nouveau programmes, l’élaboration de nouveaux
process, la formation des personnes etc..).
Cette modélisation primitive constitue la ligne de base, la ligne directrice de tout projet.
Elle montre clairement, de par la dépendance linéaire S-A-S’-O que :
•
Ce sont les Objectifs (en termes de finalité) qui sont premiers et non la Solution ou
Situation future qui n’est que le moyen imaginé pour satisfaire les objectifs.
•
Ce sont donc les objectifs qui constituent le vrai levier du changement. (Par voie de
conséquence, ce sont eux qui donnent au chef de projet toue sa légitimité et tout son
pouvoir : « Tant que l’entreprise veut, le chef de projet peut »).
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•
Cette modélisation primitive doit être complétée comme suit :
CONTEXTE
O
M
S
S'
A
EFFETS NON VISES
Figure 2 : Meta Modèle de Projet
La situation S de départ s’inscrivait dans un Contexte donné, une conjoncture qui évoluera
pendant le temps du projet et dont il faudra tenir compte en permanence (certaines
évolutions de conjoncture pouvant invalider totalement le projet).
La réalisation des actions nécessite l’allocation de Moyens (financiers, humains,
organisationnels, logistiques -équipements, installations, locaux et services- et en temps).
Le déroulement des Actions, la mise en place de la Situation S’ cible qui vise à satisfaire les
Objectifs visés peuvent également avoir des Effets non Visés3 qui peuvent contrecarrer
l’atteinte des Objectifs.
3
Aspect qui a souvent été ignoré mais qui nous est devenu plus familier avec l’approche écologique et la
notion de développement durable
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2.3. DOMAINES DE RISQUES
En première analyse, par simple lecture des liaisons de dépendance figurant dans le Meta
Modèle de Projet, on voit que les domaines de risque principaux sont :
•
La Solution envisagée, vis-à-vis de la finalité du projet. Elle peut ne pas être en
cohérence avec les buts poursuivis, ou bien être mal conçue, ou encore mal réalisée.
•
Les Actions entreprises, vis-à-vis de la création de la Solution envisagée. Elles peuvent
être mal définies, coordonnées, suivies.
•
Les Moyens pour le déroulement des Actions. Ils peuvent avoir été mal évalués, décidés
avec retard, voire non alloués.
•
Très en amont, c’est l’analyse incorrecte de la Situation de départ qui peut faire que les
buts du projet ont été mal définis, la solution mal imaginée.
•
Le Contexte est un domaine de risque pour l’ensemble des composantes du projet. Des
événements peuvent se produire dans le contexte du projet, de nature à invalider
l’intégralité du projet. Exemple : Faire Eurotunnel sans prendre en compte les réactions
tarifaires des Compagnies de ferry-boats, des transporteurs aériens, les nouvelles offres
de transport de voyageurs et de fret etc.
•
Les Effets non visés, peuvent compromettre les Objectifs poursuivis. Du fait même du
déroulement des actions, du fait même de la concrétisation de certains éléments de la
solution, du fait même de l’atteinte d’une partie des objectifs, il peut y avoir des
incidences sur l’environnement qui n’ont pas été prévues et qui ne sont pas souhaitables
(non inscrites dans la finalité du projet).
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2.4. LA DIMENSION HUMAINE DU RISQUE PROJET
En seconde analyse, il faut bien se rendre à l’évidence :
•
si la Solution envisagée a été mal conçue ;
•
si les Actions entreprises ont mal été définies, coordonnées, réalisées, suivies ;
•
si la Situation de départ a été incorrectement analysée ;
•
si le Contexte n’a pas été pris en compte ;
•
si les Moyens n’ont pas été convenablement estimés et/ou alloués ;
•
si les Effets non-Visés n’ont pas été explorés ;
… qui en est le responsable ?
Y a t’il un autre facteur de risque que l’Homme ?
Alors qu’existent des méthodes rigoureuses de conduite de la réflexion, de la décision et de
l’action, comment se fait-il qu’autant de projets soient des échecs ?
Dans ce document, nous faisons l’hypothèse qu’il existe des facteurs de risque,
intrinsèquement liés à la personnalité des individus.
Tout particulièrement, ne pas prendre en compte :
• les attentes individuelles ;
•
les modes de fonctionnement spécifiques à chacun
C’est prendre le risque de ne pas satisfaire les attentes du projet.
Pour que le projet réussisse il faut que :
• les attentes individuelles puissent trouver une réponse à travers la satisfaction de
l’attente collective.
•
Les modes de fonctionnement individuels puissent s’intégrer dans le processus collectif
de changement.
Dans cette présentation, nous aborderons uniquement les aspects liés à la gestion des
attentes.
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2.5. LES ATTENTES INDIVIDUELLES
Adoptons ce postulat de la PNL4 : De façon consciente ou inconsciente, chaque individu fait
à chaque instant ce qui est le meilleur choix pour lui, c'est-à-dire, ce qui satisfait le mieux ses
critères, ses valeurs et ses croyances personnels. Placé devant des choix à faire, sa
décision et ses actions iront toujours vers l’option qui maximalise la satisfaction de ses
critères (ou qui en minimalise l’insatisfaction).
Ainsi, placé devant un projet dans lequel il pourrait être appelé à participer, il le pèsera,
consciemment ou non, à l’aune de ses critères :
« Le rôle qui m’est proposé, les actions que je pourrais y mener, la contribution à la solution
que je pourrais apporter, l’environnement dans lequel j’aurais à évoluer, sont-ils de nature à
satisfaire mes critères personnels ? Suis-je en accord avec la finalité du projet ? Aurai-je les
moyens de réaliser ce que je m’imagine faire etc. ».
La personne se construit une représentation mentale le mettant en scène dans une
situation future. Cette image suscite en lui une émotion soit agréable, soit désagréable
selon que la situation future satisfait ou non ses critères et valeurs personnels5.
Le sentiment d’attente naît à partir de l’instant où cette représentation mentale devient
« atteignable », c'est-à-dire qu’une concrétisation est programmée6 dans le futur de la
personne.
Comme on le voit, sur le plan psychologique, l’attente est un sentiment, une émotion qui,
comme toutes les émotions, a pour origine et support une représentation mentale.
Nota : de la même façon qu’il ne peut y avoir d’idée, de concept, sans mots, il ne peut y avoir
d’attente sans représentation de la chose physique. On ne peut pas avoir un sentiment de
satisfaction si on n’imagine pas déjà ce qui devra exister pour que l’on soit satisfait.
Corollaire : On ne peut pas avoir une idée claire de son attente, de son besoin7 si on n’a pas
déjà une idée de la solution qui le satisfera. Au fur et à mesure que les choses se
concrétisent, la représentation mentale de ce qui est vraiment considéré comme satisfaisant
les critères s’affine.
4
Programmation Neuro Linguistique
5
Exemples de critères et valeurs personnels : Maîtriser, Se sentir utile, Atteindre des résultats
visibles, Se montrer original, Développer ses connaissances, Montrer sa valeur, Créer, Trouver des
solutions, Contrôler, Etablir une relation harmonieuse etc.
6
Si elle n’est que programmable, il s’agit d’espoir et non d’attente
7
i.e. Attente = Besoin de satisfaire un ou plusieurs critères
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2.6. LES ATTENTES PROJET
Ce qui a été dit précédemment pour l’individu est également vrai pour l’entreprise.
L’entreprise cherche à maximaliser la satisfaction de ses critères ou à minimaliser leur
insatisfaction. Pour une entreprise commerciale, il s’agit toujours, à la base, des mêmes
critères : accroître le chiffre d’affaires, la marge, le taux de pénétration sur un marché. Dans
ce but, l’entreprise décide d’adopter telle ou telle stratégie qui orientera le choix des solutions
envisagées : conquête de nouveaux marchés, absorption de concurrents, création de
partenariats, réduction des coûts, augmentation de la productivité, développement de la
notoriété, amélioration de l’image, création de nouveaux produits et services etc.
2.7. GERER LES ATTENTES
Ce que nous avons dit pour l’individu d’un côté, l’entreprise de l’autre, est vrai pour chacune
des structures d’organisation intermédiaires qui les relient l’un à l’autre. En veillant à rester
cohérent avec les finalités du projet, chaque entité (direction, département, service etc.) va
décliner la solution globale en cherchant à maximaliser ses propres critères (de gestion, de
performance, sociaux etc.)
On le voit bien : ce mécanisme de déclinaison des objectifs (finalités et type de solution) à
travers la structure permet de garantir que chacun des niveaux de l’organisation aura une
solution adaptée à ses propres critères tout en contribuant à la construction de la solution
globale et à la satisfaction des critères de l’entreprise. Ceci est vrai jusqu’au niveau le plus
fin de l’organisation : la personne.
Gérer les attentes c’est essayer de satisfaire les attentes individuelles dans le cadre des
attentes collectives. Gérer les attentes projet, c’est, en veillant à respecter les finalités du
projet, permettre à chacun d’apporter sa contribution à la solution globale, dans le respect de
ses critères personnels.
Gérer les attentes comporte un volet organisationnel et technique que nous ne
développerons pas8.
En revanche nous intéresserons au volet psychologique de cette gestion. A l’évidence, on ne
peut parler de méthode de gestion des attentes tout comme on ne peut parler de méthode
de management : il n’existe pas de mode d’emploi dont l’application stricte selon un ordre
déterminé conduirait à un résultat certain.
8
Dans ce volet pour lequel la littérature est abondante, on trouve les nombreuses démarches,
méthodes et outils couvrant la gestion des projets, l’expression du besoin, la conception, le
développement et la mise en place de la solution.
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Cependant, il existe en psychologie, une démarche générale de gestion des émotions qui est
donc applicable à l’attente.
Les étapes de cette démarche sont les suivantes :
•
Identifier, derrière l’attente, les critères personnels qui sont en jeu et les définir
précisément9
•
Identifier des situations concrètes dans lesquelles ces critères ont été remplis pour
comprendre clairement quels sont les moyens qui permettent à la personne de les
satisfaire.
Exemple : Si l’attente d’une personne est de faire un travail créatif, on peut, suite à un
questionnement et à l’analyse des situations concrètes qu’elle cite, comprendre que la
personne aime traiter les problèmes complexes (multi-contraintes) en ayant la possibilité de
leur apporter une solution originale ou bien faire preuve de ses capacités d’adaptation, face
à des interlocuteurs difficiles.
•
Imaginer de nouvelles situations10 satisfaisant à la fois les mêmes critères et les critères
projet et les proposer pour validation à la personne
•
Choisir la situation finale et la planifier
•
Vérifier auprès de la personne que la situation ainsi programmée la satisfait11.
Voyons comment concrètement cette démarche est applicable dans quelques étapes clefs
du cycle de vie des projets.
9
En se servant par exemple des techniques de la PNL (questionnement, recherche de l’équivalence
complexe, hiérarchisation des critères).
10
Dans notre cas, il s’agit de trouver des situations dans le cadre du projet et donc satisfaisant aussi
les critères du projet.
11
Il s’agit comme le dit la PNL de « faire un pont vers le futur ».
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3 GERER LES ATTENTES DANS LE CYCLE PROJET
3.1. LE CYCLE PROJET
Le projet se déroule selon un cycle dont les étapes principales sont rappelées brièvement cidessous:
•
Définir le projet (cadrage)
Définir les finalités
Définir les axes de solution
Définir l’enveloppe des moyens globaux (budget, délais)
•
Lancer le projet au niveau de l’entreprise
Choisir le chef de Projet
Définir et officialiser la mission
•
Organiser le projet
•
Lancer la planification
Tenir une Réunion de lancement
Détailler la solution
Ré-évaluer les moyens
Planifier les livrables
•
Manager et suivre la réalisation
Lancer la réalisation
Gérer les actions
Gérer l’information
Gérer les livraisons
Gérer les moyens
•
Rendre compte et communiquer
•
Clore le projet
Effectuer la recette finale
Organiser la réunion de clôture
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La gestion des attentes, même si elle est présente à chaque instant de la vie du projet, est
centrale dans les phases ou activités :
•
De définition des finalités et des axes de solution
•
De gestion des livraisons
•
D’organisation des moyens humains
Ce sont donc ces phases que nous allons étudier plus particulièrement sur le plan de la
gestion des attentes.
3.2. DEFINIR FINALITES ET AXES DE SOLUTION
Toutes les entreprises de type commercial ont les mêmes buts finaux: accroître le chiffre
d’affaire, la marge, le taux de pénétration sur un marché. Seuls les types de solutions
envisagées pour le faire sont différents. On peut imaginer absorber des sociétés, étendre
ses territoires, se développer à l’étranger, créer de nouveau produits ou services, augmenter
sa force commerciale, réduire ses coûts etc.
Cependant, il est extrêmement difficile d’obtenir un consensus global portant à la fois sur
l’énoncé du problème (l’analyse de la situation de départ et du contexte), la finalité du projet
et sur le type de solution à adopter.
Ceci, pour de multiples raisons :
•
Chaque personne a sa vision du monde qu’il aura tendance à reproduire dans l’exercice
de sa fonction en entreprise. Aussi bien dans l’identification des problèmes que dans leur
traitement. Ce qui sera vu comme un problème pour l’un sera une opportunité de
développement pour un autre. Là où certains dans l’entreprise vont penser que face à
une difficulté, il faut se diversifier, innover, d’autres vont préconiser de se recentrer sur
ses compétences de base, ses savoir-faire distinctifs12.
•
Chaque personne a un rôle, une compétence et des intérêts dans l’entreprise : par
exemple, pour développer le chiffre d’affaires, le financier aura peut être envie de
développer des prises de participation dans d’autres entreprises du secteur, le directeur
commercial voudra recruter de nouveaux vendeurs, le responsable de communication
songera à développer la notoriété de l’entreprise par l’image. Tout ceci afin de satisfaire
des critères soit avouables, soit cachés.
12
Voir par exemple le cas de l’entreprise TATI qui s’était diversifiée (articles mode, bijoux, etc..) au
risque d’une perte d’image avant de se recentrer sur son plus distinctif : savoir acheter en négociant
bien les prix.
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Pour obtenir le consensus, il faut adopter des méthodes :
•
Qui associent en permanence énoncé du problème, expression du besoin et choix des
orientations de solution. Une cohérence nette doit émerger reliant problème, but
poursuivi et solution envisagée. Cette cohérence doit être perçue de tous pendant le
temps du projet.
•
Qui permettent à toutes les parties prenantes d’exprimer leur point de vue, en pleine
responsabilité. Ce sont donc des méthodes participatives permettant de
contractualiser sur des points de consensus13.
3.3. GERER LES LIVRAISONS
Nous avons vu que l’attente varie en fonction même de l’avancement des réalisations. Ceci
est un point crucial des projets puisqu’il faudra gérer ces évolutions à la fois sur les plans
techniques (gestion des versions, des configurations) et humain (gérer l’attente du client ;
gérer le moral des équipes).
Sur le plan humain, il faut accepter, comme une chose naturelle, que le client « change
d’avis ». La problématique des projets c’est justement cela : comment passer de
représentations mentales abstraites, souvent idéalisées, à une réalité concrète, que l’on doit
atteindre avec des moyens limités, tout en maintenant la satisfaction du/des client(s) à
chacune des étapes de la concrétisation. Plus le projet avance, plus le client, au vu des
livrables intermédiaires, va savoir ce qu’il veut ; et plus il sera impatient de l’obtenir. Tout le
temps qui sera passé, tout l’argent qui sera dépensé à réaliser une attente qui n’est plus la
sienne est du temps et de l’argent qu’il considèrera perdu.
D’un autre côté, l’équipe de réalisation se trouve « dérangée » par les modifications
demandées par le client. Peu importe que le client accepte de payer davantage son
fournisseur pour que l’on défasse et refasse. Par la modification de son besoin, le client
compromet la satisfaction des attentes de chaque réalisateur, il risque de « casser » le jouet
que chacun s’est créé en changeant la situation dans laquelle il parvenait à satisfaire ses
critères. De là vient parfois (souvent ?) l’inertie de certaines équipes de développement.
Il faut donc introduire dans le projet :
•
Une culture dans laquelle le changement doit être accepté parce qu’il est naturel.
•
En revanche ses étapes doivent être négociées. Pour cela, il faut passer des contrats
avec le client mais aussi avec l’équipe : accepter des changements planifiés.
•
Des méthodes permettant au client de se rendre compte concrètement et périodiquement
de l’état d’avancement des réalisations (maquettage, prototypage, visites de chantier,
reportages etc.)
13
Voir par exemple les méthodes de management de la qualité du Professeur SHIBA
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3.4. ORGANISER LES MOYENS HUMAINS
En termes d’organisation, gérer un projet autour des attentes des parties prenantes
nécessite la mise en œuvre d’un management en responsabilisation.
Seul l’individu peut réellement connaître ses attentes. Il est responsable de savoir comment
les satisfaire et de faire le nécessaire pour cela. Il est aussi le seul à savoir si elles sont
satisfaites.
Pour être sûr que les attentes collectives seront satisfaites, il est nécessaire de
responsabiliser l’individu sur ses contributions (propositions et actions).
Le chef de projet a pour mission :
•
De faciliter la prise de conscience, par la personne, des critères qui sont importants pour
elle ;
•
De lui apporter une information claire sur les situations projets dans lesquelles les
critères recherchés pourraient être satisfaits ;
•
D’amener la personne à prendre des engagements d’action ;
•
De responsabiliser la personne sur ses engagements.
La responsabilisation est crée sur les bases suivantes :
•
Une différenciation nette des acteurs du projet sur leurs rôles et leurs compétences
•
Une grande autonomie de décision et d’action à l’intérieur des pôles de responsabilité
définis.
•
Une intégration forte des mêmes acteurs sur les finalités du projet, sur la solution future
•
L’adoption de modes de fonctionnement favorisant la responsabilisation
3.4.1. Différenciation sur les rôles et compétences
La différenciation des acteurs sur leurs rôles et compétences est nécessaire pour :
•
Garantir l’efficacité du fonctionnement du projet : savoir rapidement qui a compétence et
autorité pour traiter de tel sujet.
•
Offrir une structure d’organisation qui servira de base aux différents outils permettant la
responsabilisation des acteurs.
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Chacun à sa place ; c’est à dire à celle qui lui permettra de développer sa valeur ajoutée
propre. Il faut donc nécessairement comprendre les attentes individuelles et par conséquent
prendre conscience des critères en fonction desquels la personne agit. Ou plus précisément,
faire que la personne accède à ses propres critères.
Pour cela, le chef de projet doit lui communiquer une vision précises du projet pour que la
personne puisse voir comment elle va contribuer à la finalité, aux résultats, aux actions. A
partir du moment où elle est en mesure de se forger une représentation claire de sa
participation au projet, elle comprend elle-même si elle a un intérêt dans le projet. Par un
questionnement adapté14, le chef de projet met en lumière les critères importants pour la
personne et les fait valider par elle. En termes de méthode, cela consiste plus, là comme
ailleurs, à renvoyer la personne à elle-même, à ses propres décisions. C’est le premier acte
de responsabilisation des acteurs du projet. Une fois que la représentation du projet est
claire pour la personne, à un niveau suffisant pour qu’elle puisse développer une attente,
c’est à elle de prendre ses responsabilités en disant « Oui je veux en faire partie ». A partir
de ce moment là il faut être prêt, en prenant sa casquette d’organisateur, à tailler le projet
autour des individualités, tout en conservant en point de mire les attentes collectives du
projet. Les frontières et limites des domaines de responsabilité doivent être taillées en
fonction des attentes et aussi des capacités, des compétences propres de chacun. Par
exemple, quelqu’un qui est attiré par l’innovation peut trouver un intérêt à assurer la veille
technologique du projet en participant à des salons etc.. en plus de sa fonction de
production.
La différenciation sur les rôles et compétences est matérialisée dans la structure
d’organisation du projet en pôles de responsabilité.
3.4.2. Autonomie de décision et d’action
Il n’y a pas de responsabilité sans liberté15. Responsabiliser suppose que chacun puisse
décider lui-même des actions qu’il doit mener.
Par conséquent, cela suppose que la personne puisse disposer librement des informations
dont elle a besoin pour définir et décider de l’action à mener.
•
Informations permettant de définir le contenu « technique » de l’action
•
Information sur les moyens dont elle dispose pour mener l’action
14
15
Le questionnement orienté critères de la PNL
«Si vraiment l'existence précède l'essence, l'homme est responsable de ce qu'il est. Ainsi, la première démarche de
l'existentialisme est de mettre tout homme en possession de ce qu'il est et de faire reposer sur lui la responsabilité totale de
son existence.»
«Quand nous disons que l'homme est responsable de lui-même, nous ne voulons pas dire que l'homme est responsable de sa
stricte individualité, mais qu'il est responsable de tous les hommes.»
(Jean-Paul SARTRE, L'existentialisme est un humanisme, 1946 [coll. «Folio/Essais», Gallimard,
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•
Informations sur les répercussions (effets non visés) que peut avoir son action sur le
projet.
En termes de management, cela nécessite que soit mis en place :
•
Une culture de responsabilité vis-à-vis de l’information : Les pôles de compétence ont la
responsabilité totale de l’information concernant leur domaine (collecte, traitement,
archivage, diffusion). Ils ont également la responsabilité de ne pas conserver une
information qui concerne autrui. (voir ci-dessous).
•
Un management rigoureux de l’information : l’information entrante dans le projet, quel
que soit son point d’entrée, est redirigée vers qui de droit (autre pôle, chef de projet,
etc.). En particulier, aucune information ne doit être retenue pour traitement par le chef
de projet ou par un pôle de compétence non concerné. De la même façon, toute
demande d’information doit être servie par le pôle de compétence, sous sa
responsabilité, le chef de projet ou tout autre pôle s’interdisant d’y répondre.
•
Une gestion transparente des moyens du projet : Chaque pôle doit avoir une idée claire
des moyens dont il dispose et des réponses précises et argumentées sur ses demandes
de moyens nouveaux.
•
Une culture d’ouverture et de communication au sein du projet : Chaque pôle de
responsabilité doit pouvoir s’assurer des répercussions de ses actions ou décisions sur le
projet ; en particulier, lorsqu’il s’agit d’options à prendre pouvant avoir une portée
dépassant les limites de son domaine (adoption de standards, choix de technologies) il a
la responsabilité de provoquer une prise de décision collective.
3.4.3. Intégration sur les objectifs du projet
L’efficacité résultant du fonctionnement par pôle ne doit pas nuire à l’atteinte des objectifs de
projet.
Afin d’éviter le risque de divergence introduit par la différenciation et le fonctionnement
autonome des pôles, il est nécessaire :
•
Que les objectifs (finalité et solution globale future) aient été complètement acceptés et
intégrés ;
•
Que le chef de projet ait mis en place des dispositifs d’intégration :
Elaboration et présentation périodique aux acteurs du projet d’un planning général
mettant en évidence les interactions et les contributions respectives des différents
pôles.
Communication interne et externe axée sur le projet global, ses objectifs. En
particulier, création d’événements de communication permettant de regrouper les
différents pôles autour d’une maquette présentant concrètement l’état
d’avancement du projet.
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Arbitrages clairement pris en fonction des objectifs du projet.
Demandes systématiques faites aux pôles de justifier leurs solutions au regard des
objectifs du projet
3.4.4. Des modes de fonctionnement responsabilisants
Autonomes, ayant accepté leurs rôles et adhéré aux objectifs du projet, les acteurs du projet
seront responsabilisés sur les engagements pris. Cette responsabilisation est obtenue en
demandant au « client » de l’engagement pris de dire, face à son « fournisseur » et face aux
autres acteurs du projet, si l’engagement a été respecté. Cette mise sous « projecteur » a
lieu pendant les réunions d’avancement du projet, lors de la revue du planning des livrables
internes ou externes de chaque pôle ou lors de la revue détaillée du portefeuille d’actions du
projet.
En fait, chaque acteur du projet est considéré comme un client ou fournisseur d’un autre
acteur du projet, qu’il soit interne ou externe à l’équipe projet. La livraison du système final a
été décomposée en éléments de fournitures intermédiaires (documents, logiciels, matériels
etc.) qui sont autant de livrables pour lesquels il existe un fournisseur et au moins un client.
Les plannings sont établis par les acteurs du projet : chaque ligne concerne un livrable dont
la composition et la date devront être convenus (négociés) entre le fournisseur et le client de
ce livrable. Toute modification ultérieure d’une ligne de planning doit être acceptée par le
client concerné.
Au cours des réunions d’avancement, le chef de projet doit veiller à ce que :
•
Tout problème soit placé sous la responsabilité d’un acteur (qui devient alors fournisseur)
pour action ;
•
Pour toute action arrivée à échéance, le livrable correspondant a été accepté par son
client.
3.4.5. Le chef de projet, risque majeur
Comme nous l’avions souligné dans la première partie de ce document, il n’y a de risque
qu’humain.
De par sa position, le chef de projet est le seul à pouvoir mettre en place un type de
management permettant de prendre en compte les attentes des différents acteurs du projet
ainsi que leurs modes de fonctionnement.
A ce titre, il constitue le facteur de risque majeur du projet.
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4 CONCLUSION
Réussir un projet c’est réussir avec les hommes du projet.
En faisant que leurs attentes puissent trouver des réponses dans le projet, à travers leur
participation aux actions, aux résultats et aux finalités du projet.
Obtenir que cette participation contribue réellement à la satisfaction des attentes collectives
ne peut être fait qu’en pratiquant un management responsabilisant. C’est à dire un
management facilitant la prise de conscience par chacun des conséquences de ses actions
et prises de décision.
La gestion des attentes constitue un premier pas vers la gestion complète des émotions dont
on commence timidement à parler dans les séminaires de management.
Mais à quand une vraie prise en compte de cette dimension dans les pratiques managériales
des entreprises ?
Les freins sont encore nombreux. Ne perdons pas de vue que pendant ces dernières
décennies, le manager de type « Amstrad » était le modèle dominant, capable de réfléchir
aussi vite et de trancher aussi froidement que les machines.
Tout ceci a bien évolué.
Même si, ici ou là, le chef est parfois encore celui « qui sait plus », « qui fait mieux », « qui
décide plus vite et sans état d’âme », la tendance est plutôt à l’autonomisation des
subordonnés dont on souhaiterait qu’il soit en mesure de traiter eux-mêmes le fond des
problèmes qu’ils rencontrent, de décider eux-mêmes du type de formation dont ils ont
besoin, d’évaluer et d’estimer eux-mêmes les moyens qui leur semblent nécessaires etc.
Manager aujourd’hui c’est avoir des compétences affirmées en management par la
responsabilisation.
Manager demain alliera vraisemblablement responsabilisation individuelle et respect de la
personne, considérée dans sa totalité (aspects émotionnels inclus). L’efficacité des
techniques de responsabilisation sera vraisemblablement accrue16 et devra être
contrebalancée par une attitude de compréhension et de soutien de la part du manager
(coaching).
16
Par l’utilisation de méthodes et techniques accélérant la prise de conscience
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5 BIBLIOGRAPHIE
Josiane de Saint Paul « Choisir sa vie » InterEditions
P. Watzlawick, J. Helmick Beavin, Don D. Jackson, « Une logique de la communication »,
Points
P. Watzlawick, « Le langage du changement », Points
Daniel Goleman, « L’intelligence émotionnelle », Robert Laffont
Claude Lévy-Leboyer, « Evaluation du personnel », Editions d’Organisation
Eric Albert, Jean-Luc Emery, « Au lieu de motiver, mettez-vous donc à coacher ! », Editions
d’Organisation
Eric Albert, Jean-Luc Emery, « Le manager est un psy », Editions d’Organisation
Richard Bandler, John Grinder, « Les secrets de la communication », Actualisation
Fernand Poncet, « l’intégration de systèmes en informatique », Hermes
J.P. Calvez, « Spécification et conception des systèmes », Masson
Jean-Louis Lemoigne, « Les systèmes de décision dans les organisations », PUF
Jim McCarthy, « 54 règles d’or pour un grand logiciel », Microsoft Press
Claude Lévy-Leboyer, « Psychologie des organisations », PUF
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