Formation - Les Scop

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Formation - Les Scop
Métiers
Les bons élèves de la formation
Plus de 6 % des Scop exercent des métiers de formation, contre 1,5 %
pour l’ensemble des entreprises. Une surreprésentation qui démontre notamment
que le statut coopératif est bien adapté aux activités de services intellectuels
appelés à se développer dans la nouvelle économie de la connaissance.
U
ne centaine de Scop parmi les
40 000 organismes de formation,
c'est a priori très peu. Mais, en réalité, 7 500 entreprises, dont 54 coopératives, d’après les chiffres de la Centrale des
bilans de la CG Scop, ont exercé en 2000
l'activité de formation à titre principal. Et
parmi ces dernières, seules 1 500 comptent
vraiment sur le marché. Le poids des
métiers de la formation est très nettement
supérieur dans les coopératives (6 % des
Scop en activité) que dans l’économie dans
son ensemble (1,5 % du nombre d’entreprises). Pourquoi ?
De l’association à la coopérative
Aux dires mêmes de nombreux dirigeants
de Scop de formation, il y a une adéquation évidente entre l'esprit coopératif
et le métier de formateur. Tout d'abord,
comme le souligne Michel Porta, responsable de la formation et des ressources
humaines à la CG Scop, « le statut associatif dont sont issues la majorité des Scop du
secteur les a habituées à échanger sur les
pratiques, l'évolution des métiers, les projets de promotion sociale et d'éducation…
Et c'est en général pour parfaire leur
métier de formateur que les associations
font le choix de se constituer
en Scop. » D'autre part, le
formateur, parce qu'il exerce à la fois un métier solitaire et collectif qui implique
indépendance, face-à-face
pédagogique et mise en
commun des ressources, est
particulièrement réceptif
aux notions de mutualisation et de participation.
De manière générale, le développement
récent des Scop de la formation – plus de
la moitié a moins de vingt ans d’existence
– confirme que le modèle Scop est bien
adapté aux activités intellectuelles qui
L'Ecole des métiers de l'information enseigne
les nouveaux métiers de l'édition et de la communication.
requièrent peu de capital et dont la
valeur ajoutée repose essentiellement sur
la ‘‘matière grise’’ des salariés.
S'adapter aux mutations
technologiques et sociétales
Mais cette adéquation ne suffit pas à faire
des entreprises pérennes. Il faut des projets et des innovations adaptés aux transformations de la société et aux demandes
du marché. Comme
les autres entreprises
du secteur, les Scop
de la formation sont
donc en innovation
permanente.
« Analyser les nouveaux besoins des
territoires, s'adapter
aux mutations technologiques et sociétales… tout cela fait partie de notre travail », revendique Patrick Lenancker, PDG
de la Scop Arpège. Située à Hazebrouck,
près de Lille, Arpège s’est développée sur
un créneau original qui représente aujourd’hui les trois quarts de son activité : l’ac-
Plus de la moitié
des Scop de formation
a moins de 20 ans
d’existence.
26 • mars / avril 2004
Participer 604
compagnement des salariés sur les aspects
comportementaux et relationnels. La Scop
intervient dans des entreprises pour traiter
des difficultés relationnelles dans une
équipe, pour favoriser l’adaptation des
salariés à de nouveaux contextes de travail, etc.
Autre forme d’innovation : les nouvelles
technologies. A l’École des métiers de l’information, ex-CFD, il s’agit d’apprendre les
nouveaux métiers de l’édition et de la communication. La Scop parisienne a introduit
dans ses programmes de formation les
nouveaux outils de la publication assistée
par ordinateur (PAO), l’utilisation des nouvelles technologies de l’information et de
la communication. Mais sans perdre son
originalité et sans renier ses valeurs : les
enseignements sont toujours polyvalents
et chaque formateur continue d’exercer
son métier de journaliste, de maquettiste… contribuant à enrichir le contenu des
formations dispensées. « Ainsi, on reste
vraiment à la pointe des changements et
des attentes du marché », explique François
Longérinas, PDG de la Scop.
Métiers
logique de fédération des Scop de la formation, ni créer des filiales. Elle privilégie
plutôt les liens dans le réseau et le développement de partenariats inter-Scop.
Quant à Patrick Lenancker, dirigeant d'Arpège et vice-président de la CG Scop, il ne
cache pas qu'il serait plus favorable à une
réflexion autour d'une fédération de services plutôt que d'une fédération d'organismes de formation.
L’Adrep, 150 salariés,
est spécialisée
dans les formations
d’utilité sociale,
auprès des
demandeurs
d’emploi.
MÉLINA GAZSI
Dernier exemple pour illustrer une tendance forte de ces dernières années : les
formations liées à la qualité et à la réduction du temps de travail. La société GRIEPS,
située en région Rhône-Alpes depuis
27 ans – et sous statut Scop depuis 6 ans –
a fortement développé son offre de formation dans les processus de qualité, d’accréditation, d’organisation et de mise en
place de la RTT. Tout en conservant son
cœur de cible, les personnels hospitaliers.
« Nous ne sommes pas
des marchands de formations »
Si l’on doit chercher une spécificité des
Scop de la formation par rapport aux
autres entreprises du secteur, elle est peutêtre à trouver dans l’importance accordée
à la notion d’ ‘‘utilité sociale’’. L’exemple de
l’Ecole de conduite française (ECF) est sans
doute le plus connu (cf. encadré). Mais
c’est aussi le cas de l’Adrep, importante
Scop de formation de la région Paca, qui
compte 150 salariés. « Nous ne sommes pas
des marchands de formations. Nous répondons aux besoins spécifiques des territoires, et à la demande des collectivités,
mettons en place
des cursus appropriés dont la palette
est très large », commente Michel Faure,
directeur du directoire de l'Adrep. De
la lutte contre l'illettrisme pour les primoarrivants, à l'apprentissage de la fonction
informatique et logistique, en passant
par la technique de vente, etc. Majoritairement destinées à un public de demandeurs d'emploi, les formations gratuites
sont dispensées sur les douze sites de
l'Adrep, dans une logique de développement local.
Malgré la capacité avérée des Scop de la
formation à innover, le phénomène de
concentration, qui sévit comme dans
d’autres secteurs économiques, appelle un
engagement autour de projets d’intercoopération. D’autant qu’après des
années de progression continue – à titre
d'exemple, 29 % des salariés ont suivi une
formation financée par leur employeur en
2000, contre 19 % sept ans plus tôt –
le marché accuse depuis deux ans un certain fléchissement, lié au ralentissement
économique conjoncturel et aux nouvelles
organisations du travail mises en place
avec les 35 heures.
Vers une fédération des Scop
des services ?
Mais comment fédérer des entreprises
qui travaillent, certes toutes dans la
formation, mais dans des univers de
métiers ou de savoir-faire très différents ?
Philippe Lebarbenchon, directeur des ressources humaines de l’Adrep, évoque sa
propre expérience : « Impliqués dès notre
création, en 1982, dans une démarche
de réseau associatif, nous avons créé en
1996 un groupement
d’intérêt économique
(GIE) réunissant des
associations aux compétences complémentaires afin de mieux
répondre aux besoins
des clients et mutualiser les coûts de gestion et d'organisation. Et tout naturellement, quand nous avons choisi le statut
coopératif en 1999, ce GIE a rassemblé des
Scop, au nombre de six aujourd'hui, qui
travaillent en réseau. »
Marie-Geneviève Lentaigne, directrice
financière de l’Ecole des métiers de l’information, ne souhaite pas entrer dans une
Comment fédérer des entreprises
qui travaillent dans des univers
de métiers ou de savoir-faire
très différents ?
Apprendre à conduire…
et à se conduire
A l’origine de l’Ecole de conduite
française (ECF), association née en
1969 et qui regroupe aujourd’hui de très
nombreuses auto-écoles indépendantes,
dont trois Scop, ECF Atlantique,
ECF Maine-et-Loire et ECF Limousin,
l’idée était de rassembler des moniteurs
auto-école autour des valeurs
pédagogiques.
« A partir du moment où il y avait
un examen,il devait y avoir aussi
un programme et des critères de qualité
de la formation », explique Jean-Pierre
Martin, PDG de l'ECF Atlantique - Club
d'éducation routière Centre Atlantique.
A son initiative, les adhérents de
l’association de la région PoitouCharentes et de Vendée se regroupent
en 1975 pour créer d’abord un centre
d’éducation routière, qui devient une
Scop en 1978 et prend le nom de Club
d'éducation routière Centre Atlantique
en 1982. Les 23 partenaires du début ont
fait florès, et ont développé au-delà
de l’activité auto-école, des formations
à vocation d’insertion sociale, voire
de « santé publique », comme le dit
volontiers Jean-Pierre Martin.
Ils sont actuellement 350 salariés dont
300 associés. Tous solidaires autour
des valeurs fondatrices, dont le rappel
dans le livret d’accueil 2004 du nouveau
co-entrepreneur‚ insiste sur les liens
indissociables du social et de
l’économique.
Participer 604 mars / avril 2004 •
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