La décentralisation et l`externalisation modifient

Transcription

La décentralisation et l`externalisation modifient
La décentralisation et l’externalisation modifient-elles
les frontières de l’action territoriale ?
Atelier n°20
Bernard FALCAND, CFTC, membre du bureau national d’orientation du CNFPT,
Jean-Charles GLATIGNY, Secrétaire Général FAFPT,
L’atelier était animé par Bernard FALCAN.
De la salle, CGT
Il est paradoxal de constater que le champ de compétence se développe tout en confiant
l’exécution de ces compétences supplémentaires à des acteurs extérieurs :
l’élargissement des compétences ne signifie pas l’élargissement du statut, qui est de plus
en plus central dans le débat sur l’efficacité du Service Public. Selon la CGT, la question
de l’efficacité de l’externalisation doit donc être approchée en termes financiers mais
également selon une approche développement durable qui a tendance à être oubliée
dans la définition du cahier des charges. Les règles présidant à l’externalisation ne doivent
pas s’appuyer sur le seul critère de la rentabilité, sachant que le champ d’intervention des
collectivités territoriales s’est accru par le jeu de la décentralisation.
De la salle, FO
L’expression gestion directe/gestion déléguée a occasionné un débat politique dans les
années 80. La considérable évolution des compétences des collectivités territoriales, ainsi
que l’émergence de l’intercommunalité, ont néanmoins conduit à dépolitiser ce débat. La
décision d’externaliser, qui s’appuie sur un pacte fiscal et budgétaire négocié
préalablement aux élections, se prend désormais à l’échelle de l’intercommunalité et non
plus à l’échelle de la commune. Face à la tentation de l’externalisation, les fonctionnaires
territoriaux sont jusqu’à présent apparus comme des acteurs pertinents pour conduire des
projets d’origine intercommunale. La période 2008-2014 sera plus complexe en raison de
la réduction des marges de manœuvre financière.
Strasbourg, les 3 et 4 décembre 2008
1
De la salle, CFDT
Un premier aspect de la décentralisation est de favoriser l’émancipation des collectivités
territoriales de la tutelle de l’Etat. Un deuxième vise à organiser différemment l’exercice de
la compétence. J’estime donc que le champ de l’action territoriale n’a pas tant été redéfini
que réorganisé.
Le terme externalisation souligne à mes yeux la délégation temporaire d’une activité, par
opposition à la privatisation. A ce titre, l’externalisation est généralement confiée au
secteur associatif. J’estime donc que la notion d’intercommunalité manque au libellé du
débat qui nous intéresse. En outre, et compte tenu des impératifs de rendement auxquels
sont soumis les entreprises privées, j’ai du mal à situer l’équilibre économique des
activités externalisés.
René RAIGNAULT
La décentralisation n’est pas un acte de gestion mais une doctrine que la France s’est
donnée lorsqu’elle a considéré que les élus territoriaux étaient à même d’assumer
certaines responsabilités. Le transfert de compétences n’est donc qu’un corollaire de cette
volonté. La décentralisation me semble donc participer de l’élargissement de l’action
territoriale comme en atteste la forte progression du nombre d’agents.
Il faut par ailleurs demeurer prudent sur la notion de rentabilité des activités externalisées.
Il est en effet difficile de comparer le coût d’une production avec celui d’un service public
d’intérêt général dont la rentabilité ne saurait simplement s’exprimer en euros mais
également en termes sociaux.
Henri BEGORRE
Il convient tout d’abord de préciser la notion de collectivité territoriale et de
décentralisation. Une collectivité territoriale est un établissement chargé d’exercer la
puissance publique à un échelon approprié en fonction des attributions qui lui sont
confiés. Le terme d’externalisation recouvre pour sa part des réalités diverses en fonction
des compétences mises en place à l’échelle de l’exécutif local. Le premier point-clé dans
le fonctionnement d’une collectivité est la gouvernance mise en place pour l’exercice des
missions, le deuxième point clé étant le mode de gestion pratique des services. Une
même forme de gouvernance peut donc aboutir à une gestion en régie ou déléguée par
contrat à des entreprises sous le contrôle de la collectivité.
Il faut par ailleurs veiller à la terminologie employée. En effet, le public interprète souvent
la délégation de Service Public comme une privatisation alors qu’il s’agit simplement d’un
contrat passé entre la Collectivité et une entreprise selon les conditions de mise en œuvre
Strasbourg, les 3 et 4 décembre 2008
2
définies par la Collectivité, qui contrôle a posteriori les conditions de réalisation de ce
contrat.
En revanche, des confusions interviennent régulièrement sur la mise en œuvre des
actions et le rôle de maitrise d’ouvrage qui échoit à la Collectivité. S’il me semble que
déléguer la maitrise d’ouvrage et la gouvernance ne peuvent pas être délégués, il n’en va
pas de même pour la gestion des actions concrètes qui, à mon sens peuvent être
déléguées sous réserve toutefois d’un cahier des charges précis et d’un contrôle de la
collectivité délégante.
Certains agents n’étant pas formés à l’exercice de leur mission, la question de la
formation des agents fonctionnaires territoriaux doit également être envisagée.
De la salle, CFE-CGC
L’externalisation doit reposer sur des problématiques bien précises. Ainsi, une
problématique telle que l’externalisation de la gestion des ressources humaines peut
s’avérer paradoxale pour la fonction publique. En revanche, l’externalisation peut
également permettre de revenir vers le cœur de nos métiers et il convient à ce sujet de se
demander si une équipe élue peut externaliser les compétences dédiées de la fonction
publique territoriale.
De la salle
La question de l’externalisation s’est posée en Rhône-Alpes lors du transfert de
l’attribution des bourses en matière sanitaire et sociale. Face à l’importance du nombre de
dossiers à instruire, la Région avait en effet le choix de recruter du personnel ou
d’externaliser l’examen. Bien que le contentieux à ce sujet ne soit pas externalisé, nous
rencontrerons des difficultés profondes si le nombre de litiges continue à augmenter dans
les proportions actuelles.
De la salle, FA FPT
Bien souvent, la décentralisation sert de levier à l’externalisation. Il faut donc s’interroger
sur le périmètre du Service Public et du service d’intérêt général, ainsi qu’au sujet de
l’impact de l’externalisation sur l’image de la fonction publique. En effet, l’externalisation a
pendant longtemps été présenté comme un moyen de résoudre un manque de
compétence des agents publics dans une matière bien précise or cet argument ne tient
plus à mes yeux. Il serait donc opportun de pouvoir définir le périmètre des différents
services de façon à ce que les collectivités conservent la maitrise de ce qu’elles financent.
Strasbourg, les 3 et 4 décembre 2008
3
Un intervenant
Présenter l’externalisation comme une réponse aux manques de moyens financiers
m’étonnera toujours. La raréfaction des moyens devrait en effet poser la question du
champ de compétence du Service Public, qui doit en permanence s’interroger sur la
meilleure gestion des deniers publics. S’agissant d’activités régulières par exemple, il me
semble que la collectivité, non soumise à la TVA, est capable de produire moins cher
qu’une entreprise. En outre, l’intercommunalité devait servir à mutualiser les activités qui
ne semblaient pas pertinentes à l’échelle communale.
Henri BEGORRE
Les externalisations pratiquées aujourd'
hui ne vont pas seulement dans le sens d’une
délégation à de grandes entreprises du CAC 40 mais bien souvent à de petites structures
ou à des acteurs issus du secteur associatif.
Bernard FALCAND
Il était effectivement important de préciser les notions d’externalisation et de
décentralisation, qui sont bien différentes de la privatisation. Je voudrais désormais
revenir sur le sujet de la compétitivité.
Didier LAMARZELLE
Derrière l’intérêt public se trouve souvent la carence d’initiative privée. Un écueil se pose
toutefois lorsque, sur un même métier, s’instaure une concurrence entre secteur privé et
secteur public. Il faut également tenir compte du coût de production du service. La notion
de rentabilité nous impose donc une réflexion sur les priorités du secteur public et sur
l’emploi des fonds de la collectivité.
De la salle, CFDT
Le manque de compétence est souvent employé pour justifier le recours à
l’externalisation. Nous devons donc adapter la formation de la fonction publique au monde
moderne au risque de « laisser passer le train ».
De la salle
Il faut distinguer les services rendus par la compétence de ceux concédés sous la
pression des administrés. Il n’est, par exemple, pas utile pour une collectivité de gérer
directement un Zénith. Il faut alors se poser la question de la gouvernance, de la rédaction
Strasbourg, les 3 et 4 décembre 2008
4
du cahier des charges et du suivi de la délégation de service public ainsi concédée. Les
contrats de partenariat public-privé, qui permet une gestion pilotée des activités
déléguées, me semblent également constituer une modalité intéressante. Elle implique
cependant une véritable implication de la collectivité en termes de formation et de
compétences des agents.
De la salle, CGT
Il n’existe pas de service public par nature ; tout est question de volonté politique.
L’externalisation n’est donc pas tant une question de nature du service que de volonté
politique de rendre ce service. A cet égard, le répertoire des métiers du CNFPT est un
outil pertinent pour former des agents efficaces et compétents.
Bertrand VINET
La gestion des bâtiments en régions est tout à fait symptomatique des préoccupations que
vous venez d’exprimer en termes d’externalisation, et particulièrement concernant le
transfert de compétences. En la matière, les collectivités se trouvent en effet confrontées
à la question de savoir jusqu’où déléguer leur compétence
De la salle, CFTC
Pour conclure, je rappelle que décentralisation et externalisation sont des politiques que
nous sommes contraints d’appliquer. Les syndicats demeureront par conséquent très
vigilants, et notamment sur le respect des statuts.
Document rédigé par la société Ubiqus
Strasbourg, les 3 et 4 décembre 2008
5