Nikolaus Harnoncourt, Chamber Orchestra of Europe
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Nikolaus Harnoncourt, Chamber Orchestra of Europe
André Larquié président Brigitte Marger directeur général mercredi 1er et jeudi 2 décembre - 20h salle des concerts concert anniversaire Nikolaus Harnoncourt a choisi de fêter ses 70 ans avec le Chamber Orchestra of Europe, d’abord à la cité de la musique, puis quelques jours plus tard à Amsterdam et à Vienne avec le même programme. Joseph Haydn Symphonie n° 100 en sol majeur, Hob 1 : 100 « militaire » adagio/allegro, allegretto, menuet (moderato), presto durée : 27 minutes Béla Bartók Divertimento pour orchestre à cordes, Sz 113 allegro non troppo, molto adagio, allegro assai durée : 25 minutes entracte Antonin Dvorák Danses slaves, livre 2, op 72 molto vivace (odzemek), allegretto grazioso (doumka), allegro (skocna), allegretto grazioso (doumka), poco adagio (spacirka), moderato quasi minuetto (polonaise), allegro vivace (kolo), grazioso e lento ma non troppo (sousedska) durée : 35 minutes Nikolaus Harnoncourt, direction Chamber Orchestra of Europe partenaire de la cité de la musique concert diffusé sur France Musiques le dimanche 12 décembre à 12h30 Nikolaus Harnoncourt - Chamber Orchestra of Europe Joseph Haydn Symphonie n° 100 "militaire" composition : 1793 ; création : le 10 février 1794 à Londres ; effectif : 2 flûtes, 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons, 2 cors, 2 trompettes, timbales, cordes. Délivre-t-elle des « messages » ou se confine-t-elle derrière la « vérité des masques », la Musique ? Ce n’est certes pas le programme de ce soir qui permettra de lever une telle ambiguïté ! Pourquoi, par exemple, en 1794, ivre de gloire, le sagace Joseph Haydn assène-t-il à son auditoire londonien les tonnerres d’une symphonie qu’on surnomma, spontanément, « militaire »? Certes, ce n’était pas la première fois que l’on pimentait quelque musique avec un bastringue (triangle, cymbales, grosse caisse) que l’on qualifiait tantôt de « turc », tantôt de « guerrier ». Mais il s’agisssait toujours de pièces dont le pittoresque ne prospectait pas au- delà de quelque bonne humeur. Avec la Symphonie n° 100, c’est, au contraire, intégré au climat monumental de toutes les précédentes symphonies de Haydn que surgit un fracas qui n’a plus rien de malicieux, mais qui ajoute et incorpore aux ingrédients déjà si divers d’une musique née d’une variété de sources sans précédent l’annexe redoutable d’effets jusque-là concédés au plein air… Haydn s’y était astreint dès l’année précédente, à Vienne, et l’œuvre ne fut achevée qu’à Londres, juste avant sa création, signe probable de complexes mises au point. En fait, le contexte historique nous dit assez d’où vient cette bourrasque : depuis 1792 l’Autriche guerroie en Belgique contre l’essor de la France révolutionnaire (on vient de guillotiner Louis xvI) tandis qu’à l’Est, la Russie trouve un équilibre avec son adversaire de toujours, la Turquie : menace nouvelle pour l’Empire (en 1793, la toute proche Pologne sera envahie par Russes et Prussiens). Haydn est l’incarnation sublime des couches populaires profondes : par là même à la fois nationaliste et pacifiste. Cette menace croissante élevée contre les grands systèmes du XVIIIe (qui ont suscité son œuvre autant que sa « carrière »), il en souffre et il en donne ici une vision effroyable (explosion de la batterie dans le second mouvement qui avançait aux notes de programme | 3 Nikolaus Harnoncourt - Chamber Orchestra of Europe accents d’une romance plutôt pimpante). Pourtant l’art de vivre (menuet) et la conjonction « naturel-science supérieure » (premier mouvement) confirment les conquêtes de l’esprit… Dans le finale, « le plus tendu chez Haydn symphoniste » (Vignal), Haydn montre, in extremis, que l’énergie gaspillée par les guerres peut être triomphalement rendue à des réussites savantes parce que pacifiques où se conjugueraient la verve populaire, l’optimisme des Lumières et la monumentalité classique. Cette incorporation aussi brusque que triomphale de ce qui n’était que férocité guerrière frappa davantage que des pages et des pages de philosophie ! Béla Bartók Divertimento, Sz 113 composition : 1939 ; commande de Paul Sacher ; création : le 11 juin 1940 à Bâle par l’Orchestre de chambre de Bâle ; effectif : 10 violons 1, 10 violons 2, 7 altos, 6 violoncelles, 4 contrebasses ; éditeur : Boosey & Hawkes. Autre pacifiste, celui-ci illustrant le militantisme du xxe siècle : Béla Bartók. Lorsqu’après le succès imprévu de la Musique pour cordes, percussion et célesta (1937) puis de la Sonate pour deux pianos (1938) Paul Sacher lui commande une nouvelle musique (pour cordes seules, cette fois), Bartók reprit les mêmes données, à l’envers. Alors que les premières œuvres de cette trilogie émergeaient des angoisses chromatiques pour affirmer la puissance inspiratrice, galvanisante, du chant populaire, le Divertimento pour cordes se montre riche, d’emblée, de toute la puissance supposée aux peuples heureux. Ce n’est que le molto adagio central qui, renchérissant sur les effets hallucinants de la Musique pour cordes, rappellera longuement – par la prostration, les ténèbres et l’effroi – les menaces laissées entière, par les piètres Accords de Münich. De là, peut-être, le caractère pathétiquement laborieux qu’a l’explosion « joyeuse » d’un finale qui, comme souvent chez Bartók, n’arrive pas à se convaincre que le propos est bouclé et qui, donc, argumente encore et encore… Quatorze jours plus tard, le 3 septembre 1939, Hitler envahissait la Pologne. 4 | cité de la musique Nikolaus Harnoncourt - Chamber Orchestra of Europe Antonin Dvorák Danses slaves, op 72 composition : 1886; création des n° 1, 2 et 7 le 6 janvier 1887 à Prague sous la direction du compositeur ; effectif : 2 flûtes, 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons, 4 cors, 2 trompettes, 3 trombones, timbales, 2 pianos, cordes. Après ces deux œuvres-manifeste, les Danses slaves de Dvorák (1886) sonneront-elles avec innocence ? Toujours le musicien de Bohême avait pris fait et cause pour les opprimés et les nationalismes naissants, allant jusqu’à faire, de sa Symphonie « du nouveau Monde » (1892) un fulminant hommage à la minorité noire américaine. On sait, par ailleurs, quelle fut son implication dans les mouvements séparatistes tchèques. Cette veine politique peut sembler discrète dans la première série de Danses slaves (1878) mais ces jolies vignettes (elles surent séduire Brahms et assurer la gloire internationale de son protégé) intervenaient après plus de vingt ans de création parfois acerbe ! La parution d’un second ensemble, presque dix ans plus tard, signale donc au moins une insistance à laquelle on doit prêter attention : s’y affirme sous les dehors les plus riants, cette conscience pan-slaviste qui, plus tard, soulèvera aussi Janácek (adaptateur impénitent de sujets russes), pan-slavisme qui apparaît, dès lors, comme une des nombreuses manifestations du rejet de l’hégémonie des Habsbourg. Certes, tout semble, ici, sacrifié au pittoresque le plus charmeur, mais il s’agit de propagande pour l’exportation. Dès lors, ne dit-on pas que l’on prend plus de mouches avec du miel qu’avec du vinaigre ? Marcel Marnat notes de programme | 5 Nikolaus Harnoncourt - Chamber Orchestra of Europe biographies Nikolaus Harnoncourt Né à Berlin en 1929, Nikolaus Harnoncourt étudie le violoncelle avec Paul Grummer, puis avec Emmanuel Brabec à la Musikakademie de Vienne à partir de 1948. De 1952 à 1969, il est violoncelliste à l’Orchestre symphonique de Vienne (Wiener Symphoniker). En 1972, il devient professeur au Mozarteum de Salzbourg, position qu’il occupe jusqu’en 1993. Très tôt il s’intéresse à la musique ancienne. Il commence une collection d’instruments anciens et entreprend des recherches musicologiques poussées, les enrichissant par sa pratique de la viole de gambe. En 1953, il fonde le Concentus Musicus de Vienne rassemblant principalement des musiciens du Wiener Symphoniker. En 1964, leur enregistrement des Concertos Brandebourgeois de J.S. Bach marque une révolution dans le monde musical. Il est suivi un an plus tard de la première 6 | cité de la musique version originale de la Passion selon Saint Jean et des Suites pour orchestre de Bach. Avec cet ensemble, Nikolaus Harnoncourt a achevé de graver l’intégralité de la musique religieuse de Mozart, et entrepris d’enregistrer les Symphonies de Haydn. Aujourd’hui, Nikolaus Harnoncourt a plus de trois cents disques à son actif, dont la plupart ont été récompensés par la critique internationale. Il se consacre aux musiques du XVe au XVIIIe siècle, interprétant essentiellement des œuvres de Monteverdi, Haendel, Bach et Mozart. Avec Gustav Leonhardt, il enregistre l’intégrale des Cantates de Bach de 1970 à 1989, l’une des plus ambitieuses aventures de la discographie (65 heures de musique en 45 volumes). Depuis quelques années, il explore également les répertoires des XIXe et XXe siècles. Il fait ses débuts à l’opéra en 1971 lors des Festwochen de Vienne avec Il Ritorno d’Ulisse in Patria de Monteverdi, puis dirige la même année l’Orfeo de Monteverdi à Amsterdam. Les années suivantes, il ressuscite de nombreux chefs-d’œuvre de l’opéra : Haendel (Jephta, Belshazzar et Saul), Rameau (Castor et Pollux) et Purcell (Didon et Enée). De 1975 à 1979, il entreprend avec Jean-Pierre Ponnelle un cycle Monteverdi à l’Opéra de Zurich (Orfeo, Il Ritorno d’Ulisse et L’Incoronazione di Poppea), puis en 1980 un cycle Mozart avec ce même metteur en scène (Idoménée, L’Enlèvement au Sérail, La Flûte enchantée). Nikolaus Harnoncourt est aussi fréquemment l’invité de prestigieux orchestres symphoniques. En 1990 et 1991, il enregistre l’intégrale des Symphonies de Beethoven avec The Chamber Orchestra of Europe, qui connaît un accueil de la critique sans précédent : six récompenses de la presse française (ffff de Télérama, Diapason d’Or, Choc du Monde de la Musique, 10 de Répertoire, Référence de Compact, Classique d’Or RTL), le Deutsche Nikolaus Harnoncourt - Chamber Orchestra of Europe Schallplattenkritik Preis, le Prix Caecilia, le Gramophone Award « for the best orchestral recording of the year » et le Gramophone Award « Record of the Year ». Avec ce même orchestre, il a, en 1992, entamé une intégrale des Symphonies de Mendelssohn et complété son exploration de Beethoven avec la Missa Solemnis, Fidelio, le Concerto pour violon (1993) et Les Créatures de Prométhée (1994). Nikolaus Harnoncourt a également entamé une collaboration régulière avec le Berliner Philharmoniker avec lequel il a notamment enregistré les Symphonies de Schumann et de Schubert, Le Freischütz de Weber, l’intégrale des Symphonies de Brahms, ainsi que des valses de Strauss. Depuis 1972, Nikolaus Harnoncourt enseigne l’interprétation de la musique ancienne au Mozarteum et donne des conférences à l’Institut musicologique de l’Université de Salzbourg. Il dirige également le festival Styriarte de Graz depuis 1985 et est l’auteur de deux recueils de textes, traduits en français, qui sont le résultat d’une longue réflexion sur les questions de l’interprétation : Le Discours musical et Le Dialogue musical. Chamber Orchestra of Europe Le Chamber Orchestra of Europe (COE) a été fondé en 1981 et rassemble 50 musiciens provenant de 15 pays d’Europe. L’Orchestre se produit principalement en Europe continentale. Il a établi une étroite collaboration avec les villes de Berlin (Kammermusiksaal der Philharmonie), Francfort (Alte Oper), Graz, Cologne, Salzbourg et Paris (cité de la musique). Les musiciens entretiennent des relations très étroites avec leur directeur artistique Claudio Abbado, ainsi qu’avec Nikolaus Harnoncourt et Paavo Berglund. Le Chamber Orchestra of Europe a enregistré plus de 200 œuvres pour les 10 maisons de disques les plus importantes au monde. Pour la saison 1999/2000, outre une tournée destinée à célébrer les 70 ans de Nikolaus Harnoncourt, le Chamber Orchestra of Europe a prévu de jouer avec Martha Argerich, Paavo Berglund, George Benjamin, Herbert Blomstedt, Frans Brüggen, Myung-Whun Chung, Heinz Holliger, Emmanuel Krivine, Kent Nagano, Gianandrea Noseda, Murray Perahia et András Schiff. L’COE bénéficie du soutien de CGU France (concert du 1er décembre) et de la Société Foncière Lyonnaise (concert du 2 décembre). flûtes Jaime Martin Josine Buter hautbois Jonathan Kelly Rachel Frost clarinettes Lynsey Marsh Ruth Ellis bassons Matthew Wilkie Christopher Gunia notes de programme | 7 Nikolaus Harnoncourt - Chamber Orchestra of Europe cors Joseph Rappaport Stephen Stirling Håkan Rudner Elizabeth Randell Aki Saulière Jan Harshagen Henriette Scheytt Peter Richards Vesna Stankovic Martin Walch trompettes Nicholas Thompson altos Julian Poore Jane Atkins Beatrice Muthelet trombones Pascal Siffert Hakan Bjorkman Dorle Sommer Helen Vollam Geneviève Strosser Charlotte Walterspiel trombone basse Stephen Wright Nicholas Eastop timbales violoncelles Geoffrey Prentice William Conway Henrik Brendstrup percussion Kim Bak Dinitzen Jeremy Cornes Sally Jane Pendlebury Neil Percy Howard Penny Chris Thomas Michael Stirling violons contrebasses Marieke Blankestijn (solo) Enno Senft Fiona Brett Martin Heinze Francis Cummings Denton Roberts Barbara Doll Lutz Schumacher Christian Eisenberger Alexander Gheorghiu Lucy Gould Kolbjørn Holthe Hanno de Kogel technique régie générale Sylwia Konopka Joël Simon Fiona McCapra régie plateau Sonja Maria Marks Stefano Mollo Benjamin Nabarro 8 | cité de la musique Jean-Marc Letang régie lumières Marc Gomez