utilisation de matériaux absorbants dans la lutte contre la pollution
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utilisation de matériaux absorbants dans la lutte contre la pollution
UTILISATION DE MATÉRIAUX ABSORBANTS DANS LA LUTTE CONTRE LA POLLUTION PAR LES HYDROCARBURES GUIDE D’INFORMATIONS TECHNIQUES 8 Introduction Dans le cadre d’une lutte antipollution suite à un déversement d’hydrocarbures, les absorbants peuvent être une ressource utile lorsque les autres méthodes de récupération sont inappropriées. Ils doivent toutefois être employés avec modération afin de minimiser les problèmes secondaires, notamment la production de quantités excessives de déchets susceptibles d’accroître considérablement le coût de la dépollution. Ce document traite des types d’absorbants disponibles et des moyens de les utiliser efficacement dans le cadre d’une lutte antipollution. Il est conseillé de le lire en conjonction avec d’autres Guides d’Informations Techniques de cette série publiée par l’ITOPF, notamment ceux consacrés à l’utilisation de barrages, aux techniques de nettoyage des littoraux et à l’élimination des hydrocarbures et des débris. Généralités Les absorbants d’hydrocarbures sont des produits d’origine végétale, animale, minérale ou synthétique très divers, conçus pour une récupération sélective des hydrocarbures et non de l’eau. Leur composition et leur configuration dépendent de la matière employée et de l’usage prévu dans le cadre de l’opération de lutte antipollution. Bien que les absorbants soient couramment employés en cas de déversement, il convient de veiller à minimiser les usages inappropriés et excessifs pouvant causer d’importantes difficultés logistiques au niveau du risque de contamination secondaire, de la collecte, du stockage et de l’élimination. Chacun de ces aspects représente une proportion considérable du coût global des opérations de nettoyage. Les absorbants synthétiques, en particulier, doivent être employés avec modération, en veillant à en exploiter pleinement les capacités afin de minimiser les problèmes ultérieurs d’élimination des déchets. En règle générale, l’emploi d’absorbants est plus efficace aux derniers stades d’une opération de nettoyage du littoral (Figure 1) et dans le cas de petites flaques d’hydrocarbure difficiles à récupérer au moyen d’autres techniques de dépollution. Les absorbants ne sont pas appropriés en haute mer et sont généralement moins efficaces en présence d’hydrocarbures à plus forte viscosité, tels que le fioul lourd, et d’hydrocarbures vieillis et émulsionnés. Certains ont toutefois été conçus spécifiquement pour les hydrocarbures visqueux. Principe d’action des absorbants Un absorbant est une matière qui attire les hydrocarbures de préférence à l’eau : elle doit être à la fois oléophile et hydrophobe. Elle agit soit par adsorption soit, plus rarement, par absorption. Dans le cas de l’adsorption, l’hydrocarbure ou autre liquide à récupérer est retenu à la surface de la matière et non pas à l’intérieur, comme dans le cas de l’absorption. La majorité des produits disponibles pour la lutte antipollution agissent par adsorption ; peu agissent vraiment par absorption. Absorption Le liquide se diffuse à l’intérieur de la matrice d’une matière absorbante solide selon un processus analogue à l’action capillaire, la faisant ainsi gonfler et se combinant avec elle de telle sorte qu’il ne pourra ni fuir ni être expulsé sous l’effet d’une pression ou d’une torsion quelconque. Les produits disponibles 2 5Figure 1 : Barrage absorbant en polypropylène utilisé pour récupérer les hydrocarbures libérés pendant les opérations de lavage par jets d’eau (flushing). pour la lutte antipollution sont en polymères techniques avec une surface de contact importante pour favoriser une absorption rapide. Étant donné qu’ils peuvent réduire la surface de contact du liquide, les produits d’absorption conviennent à la récupération d’hydrocarbures volatils. Bien que les matières absorbantes soient, en théorie, capables de récupérer les fiouls légers et certains pétroles bruts, l’absorption peut nécessiter beaucoup plus de temps qu’il n’est réalisable ou souhaitable en pratique. Par conséquent, elles conviennent davantage à la récupération de liquides à faible viscosité et de produits chimiques déversés, notamment de substances nocives et potentiellement dangereuses. Voir, à ce sujet, le Guide d’Informations Techniques : Intervention en cas d’accident chimique en mer. Ainsi, les produits agissant par absorption sont moins fréquents que les produits agissant par adsorption dans les opérations de lutte antipollution. Adsorption Bien que ce Guide d’Informations Techniques soit principalement consacré aux produits agissant par adsorption, le terme générique « absorbant » est adopté pour minimiser les risques de confusion. Les divers mécanismes qui permettent à une matière d’adsorber les hydrocarbures sont décrits ci-dessous. Mouillabilité Une bonne adsorption demande que l’hydrocarbure mouille la matière et donc s’étale à sa surface de préférence à l’eau. Un liquide mouille un solide si sa tension de surface est inférieure à la tension de surface critique (ƴc) du solide. Par conséquent, pour UTILISATION DE MATÉRIAUX ABSORBANTS DANS LA LUTTE CONTRE LA POLLUTION PAR LES HYDROCARBURES remplir les critères requis, un absorbant doit avoir une valeur ƴc inférieure à celle de l’eau et supérieure à celle de l’hydrocarbure. La tension de surface de l’eau de mer est de l’ordre de 60 à 65 mN/m. Pour les hydrocarbures, cette valeur varie en fonction de la composition mais se situe généralement aux alentours de 20 mN/m. Ainsi, par exemple, un PTFE (polytétrafluoroéthylène, type Téflon®) d’une valeur ƴc de 18 mN/m n’adsorbe ni les hydrocarbures ni l’eau tandis qu’un polypropylène avec une valeur ƴc de 29 mN/m est un absorbant idéal pour les hydrocarbures. Un grand nombre de solides naturels et synthétiques ont des valeurs ƴc appropriées. Les solides d’origine minérale qui ne possèdent pas la valeur requise peuvent être modifiés au moyen de traitements de surface divers, y compris chauffés, pour produire l’état désiré. La vermiculite exfoliée en est un exemple. Les propriétés oléophiles de plusieurs matières, notamment les mousses absorbantes et les fibres en vrac, peuvent être améliorées après un mouillage ou une imprégnation préalable à l’huile. Action capillaire Avec certaines matières, l’adsorption se produit par action capillaire. Bien que cela dépende également des tensions de surface relatives du solide et du liquide, la viscosité de l’hydrocarbure influe considérablement sur la vitesse de pénétration dans la structure de l’absorbant. La pénétration peut être rapide (quelques secondes) pour les hydrocarbures à faible viscosité, tels que les pétroles bruts légers, ou lente (plusieurs heures) à négligeable pour les hydrocarbures à viscosité forte, tels que le fioul lourd ou les hydrocarbures vieillis. L’action capillaire est particulièrement importante dans le cas des absorbants à base de mousse. Les mousses à pores fins récupèrent facilement les hydrocarbures à faible viscosité, mais les pores sont rapidement bouchés par les hydrocarbures plus épais. Inversement, les mousses à structure cellulaire grossière sont efficaces avec les hydrocarbures visqueux mais incapables de bien retenir les hydrocarbures à faible viscosité. Cohésion / adhésion La cohésion est l’attraction d’une matière vers elle-même, l’empêchant ainsi de s’étaler sur une surface solide, tandis que l’adhésion est l’attraction d’une matière vers une autre. Les absorbants dépendent à la fois de l’adhésion de l’hydrocarbure à la 5Figure 2 : Barrages absorbants de fortune, en paille et filet. Peu coûteux et faciles à confectionner, ces barrages peuvent procurer une protection efficace à court terme lorsqu’ils sont déployés dans des zones appropriées. GUIDE D’INFORMATIONS TECHNIQUES 8 surface de l’absorbant et des propriétés cohésives de l’hydrocarbure qui permettent la rétention de plus grandes quantités de polluant. Si l’absorbant se présente sous forme d’écheveaux lâches, la cohésion de l’hydrocarbure parmi les éléments absorbants peut servir à produire une masse solidifiée qui retarde l’étalement du polluant et facilite ainsi la récupération du mélange hydrocarbure + absorbant. La cohésion est plus importante pour les hydrocarbures plus visqueux. Surface de contact En plus des caractéristiques de mouillabilité, d’étalement et de capillarité d’un absorbant particulier, son taux et sa capacité d’absorption sont directement liés à la surface de contact exposée. Un absorbant efficace doit avoir un ratio surface de contact/volume élevé, surfaces externes et surfaces internes disponibles comprises. Pour les hydrocarbures visqueux incapables de s’écouler rapidement dans un absorbant, la performance sera déterminée par la surface de contact externe disponible. Par exemple, la surface de contact externe relative disponible de brins d’absorbant en vrac est supérieure à celle d’un barrage de confinement, d’où la probabilité d’un taux d’adsorption supérieur et d’une plus grande efficacité avec les hydrocarbures visqueux. Contrairement aux produits absorbants, les produits adsorbants doivent être utilisés avec prudence en présence de liquides volatils. L’étalement du liquide sur la surface de contact interne et externe d’un produit adsorbant peut accroître les émissions de vapeurs, avec les risques d’incendie et/ou de danger pour la santé humaine que cela représente. Matières et formes des absorbants Matières Des matières très diverses peuvent être utilisées comme absorbant. Parmi elles, les matières d’origine végétale ou animale, dont l’écorce, la tourbe, la sciure de bois, la pâte à papier, la bagasse (déchets du traitement de la canne à sucre), le liège, les plumes de poulet, la paille (Figure 2), la laine et le cheveu ; les matières d’origine minérale, telles que la vermiculite et la pierre ponce ; et les matières synthétiques, comme que le polypropylène (Figures 3, 4 et 5) et autres polymères. 5Figure 3 : Lanières de polypropylène enveloppées dans un filet. La structure hétérogène et lâche du barrage peut permettre à l’hydrocarbure d’y pénétrer facilement ; les surfaces internes peuvent ainsi adsorber le polluant mais l’enveloppe en filet risque d’être facilement endommagée. 3 5Figure 4 : Entaille pratiquée à la surface d’un barrage absorbant continu et homogène pour en révéler l’usage partiel. Le volume interne reste non souillé, soit parce que le barrage n’a pas été déployé suffisamment longtemps, soit parce que l’hydrocarbure est trop visqueux pour pénétrer dans la structure. 5Figure 5 : Les absorbants continus plats, tels que ce tapis posé sur un littoral, sont caractérisés par un ratio surface de contact/ volume élevé. L’emploi massif d’absorbants de cette manière doit être mis en balance avec la production de volumes considérables de déchets potentiellement non pollués. Les absorbants synthétiques sont généralement les plus efficaces pour la récupération d’hydrocarbures. Dans certains cas, un ratio poids d’hydrocarbure/absorbant de 40:1 peut être obtenu, comparé à 10:1 pour les produits d’origine végétale et animale. Ce ratio peut descendre jusqu’à 2:1 pour les matières d’origine minérale. En dépit de leur capacité adsorptive limitée, les matières d’origine végétale, animale et minérale peuvent être intéressantes du fait qu’il s’agit souvent soit de matières abondantes dans la nature, soit de déchets dérivés de procédés industriels. Elles peuvent être facilement achetées à bas prix ou très faciles à trouver. Matières Vrac • Végétales ou animales – y compris écorce, tourbe, sciure de bois, pâte à papier, liège, plumes de poulet, paille, laine et cheveux • Minérales – vermiculite et pierre ponce • Synthétiques – principalement le polypropylène L’efficacité relative des différents absorbants a été testée par Avantages Inconvénients • Souvent naturellement abondantes ou largement disponibles sous forme de déchets dérivés des procédés industriels • Peuvent être peu coûteuses • Peuvent servir à protéger la faune sur les reposoirs • Difficiles à contrôler, peuvent être dispersées par le vent • Difficiles à récupérer • Le mélange hydrocarbure + absorbant peut être difficile à pomper • L’élimination du mélange hydrocarbure + absorbant est plus limitée que celle de l’hydrocarbure seul Enveloppées • Toutes les matières ci-dessus peuvent être enveloppées dans des mailles fines ou des filets • Plus faciles à déployer et à récupérer que les absorbants en vrac • Un barrage enveloppé a une plus grande surface de contact qu’un barrage continu • La résistance de la structure est limitée à celle du filet ou de la maille fine • Les barrages en matière d’origine animale ou végétale peuvent vite devenir saturés, s’alourdir et couler. La rétention des hydrocarbures est limitée Continues • Synthétiques – principalement le polypropylène • Stockage au long terme • Relativement faciles à déployer et à récupérer • Taux élevé de récupération d’hydrocarbures à condition d’être utilisées à pleine capacité • Efficacité limitée pour les hydrocarbures vieillis ou plus visqueux • Ne se décomposent pas facilement, ce qui limite les options d’élimination Fibres • Synthétiques – principalement le polypropylène • Efficaces sur les hydrocarbures vieillis et plus visqueux • Moins efficaces sur les hydrocarbures frais légers et moyens 5Tableau 1 : Les avantages et les inconvénients des diverses matières absorbantes disponibles 4 UTILISATION DE MATÉRIAUX ABSORBANTS DANS LA LUTTE CONTRE LA POLLUTION PAR LES HYDROCARBURES 5Figure 6 : Des villageois confectionnent des écheveaux avec des brins de polypropylène. La fabrication d’absorbants à partir de matériaux disponibles localement peut être rentable en termes de prix ainsi que d’efficacité du transport. 5Figure 7 : Écheveaux tendus en travers d’un estuaire pour capter les hydrocarbures flottants. La structure ouverte et la grande surface de contact du matériau sont particulièrement adaptées à la récupération des hydrocarbures visqueux. plusieurs organisations en vue d’évaluer la quantité d’hydrocarbures pouvant être retenue par un poids donné de telle ou telle matière. Bien que les résultats de ces tests puissent être utiles pour le classement comparatif de l’efficacité d’un absorbant par rapport à un autre, ils sont effectués en laboratoire ou dans des conditions de terrain contrôlées et peuvent donc être trompeurs. Dans des conditions naturelles, les absorbants subissent les effets imprévisibles des vents, des vagues et des courants, d’où l’improbabilité de performances égales à celles obtenues en laboratoire. Absorbants continus Formes Commercialisés sous diverses formes, en fonction de leur composition et de l’usage prévu, les absorbants peuvent néanmoins être divisés en quatre types principaux : les matières en vrac, souvent sous forme de particules ; les matières enveloppées, sous forme de coussins ou de boudins ; les matières continues, sous forme de tapis, de feuilles, de barrages ou de rouleaux ; et les fibres en vrac combinées pour former des écheveaux ou des balais (Tableau 1). D’autres types d’absorbants peuvent être disponibles pour des applications spécifiques. Absorbants en vrac La plupart des matières citées ci-dessus sont commercialisées en tant qu’absorbant en vrac et sont utiles pour la récupération d’hydrocarbures dans le cas de déversements de petite ampleur à terre. Principalement en raison des difficultés de contrôle de leur application et de leur collecte, leur utilisation dans l’environnement marin doit être limitée aux situations spécifiques décrites dans la section ci-dessous consacrée à l’emploi d’absorbants sur les littoraux. Absorbants enveloppés Les matières absorbantes en vrac sont souvent enveloppées dans un textile, une grille ou un filet pour former un boudin, un coussin ou une chaussette, plus facile à déployer, à contrôler et à collecter par la suite que la matière en vrac seule. Les produits absorbants enveloppés varient en forme et en volume, bien que les boudins soient la forme la plus courante (à ne pas confondre avec le barrage continu décrit ci-dessous). Un absorbant enveloppé est généralement réalisé à partir de matières d’origine végétale, animale ou minérale facilement disponibles, comme la paille (Figure 2), mais peut également être composé d’éléments individuels en matière synthétique, comme le polypropylène (Figure 3). GUIDE D’INFORMATIONS TECHNIQUES 8 Un absorbant cylindrique continu, ou barrage absorbant, diffère du boudin en matière en vrac enveloppée décrit à la section précédente en ce qu’il est plus homogène, avec un ratio surface de contact/volume inférieur, signifiant que l’hydrocarbure peut moins facilement pénétrer à l’intérieur du barrage (Figure 4). Les absorbants continus plats, tels que les feuilles, les rouleaux et les tapis, sont caractérisés par leur ratio surface de contact/volume élevé (Figure 5). Les absorbants continus sont principalement fabriqués à partir de matières synthétiques, le polypropylène extrudé-soufflé tissé étant l’une des matières les plus couramment utilisées dans les opérations de lutte antipollution. Des absorbants réalisés à partir d’autres matières, telles que le polyuréthane, le nylon et le polyéthylène, sont toutefois utilisés occasionnellement. Fibres absorbantes en vrac Bien qu’efficaces sur une large gamme d’hydrocarbures, les absorbants en vrac, enveloppés et continus, le sont moins pour la récupération des hydrocarbures davantage vieillis et à forte viscosité. Des pelotes de fibres absorbantes en vrac permettent la récupération de ces hydrocarbures par une combinaison d’adhésion à une grande surface de contact et de cohésion à l’intérieur de l’hydrocarbure lui-même. Il s’agit principalement de brins de polypropylène attachés ensemble pour former des écheveaux, également appelés pompons (Figure 6). Plusieurs écheveaux individuels peuvent être reliés les uns aux autres le long d’une corde pour former des pièges à hydrocarbures visqueux, ou des « barrages en écheveaux » (Figure 7). Les récupérateurs à cordes utilisent une forme de ruban en bande continue faisant souvent plusieurs mètres de longueur pour récupérer et collecter les hydrocarbures. Le Guide d’Informations Techniques : Utilisation des barrages dans la lutte contre la pollution par les hydrocarbures contient de plus amples informations à ce sujet. Les écheveaux pour hydrocarbures visqueux ont également été utilisés avec succès pour détecter les hydrocarbures coulés et sous la surface, soit par suspension dans la colonne d’eau à partir de flotteurs et d’ancres, soit par balayage ou chalutage du fond marin, fixés à un châssis métallique. La présence d’hydrocarbures dans la mer est indiquée par la souillure de l’absorbant, ce qui permet ensuite aux méthodes plus quantitatives de se concentrer 5 sur les zones identifiées. Le Guide d’Informations Techniques : Échantillonnage et suivi des déversements d’hydrocarbures en mer traite de ce sujet plus en détail. ce qui réduit le volume de matière inutilisée au centre du barrage tout en maintenant son efficacité. Une autre solution consiste à employer des écheveaux. Critères de sélection des absorbants Les feuilles d’absorbant peuvent devenir rapidement saturées lorsqu’elles sont mises en contact avec des quantités même faibles d’hydrocarbure. Par conséquent, leur utilisation doit être limitée aux accidents de petite ampleur avec quantité limitée d’hydrocarbure à récupérer. D’autres facteurs, en plus de la forme et de la sélectivité, influent sur l’efficacité des absorbants. Flottabilité Pour être efficaces en présence d’hydrocarbures flottants, les absorbants doivent posséder et conserver une haute flottabilité, c’est-à-dire continuer de flotter même lorsqu’ils sont saturés d’hydrocarbure et d’eau. Plusieurs matières d’origine naturelle, comme la paille et la sciure de bois, ont une bonne flottabilité initiale mais finissent par se saturer et par couler. Dans certains cas, cependant, la flottabilité peut nuire à l’efficacité d’un absorbant. Par exemple, certaines matières plus légères et moins denses peuvent rester au-dessus d’hydrocarbures lourds et visqueux. Dans de tels cas, il peut être nécessaire de procéder au brassage manuel de l’absorbant et de l’hydrocarbure afin de favoriser la saturation et de permettre une récupération efficace. La flottabilité des absorbants en mousse est directement liée au ratio de cellules enveloppées/cellules ouvertes ; plus les cellules ouvertes sont nombreuses, plus la capacité d’ad-/absorption est élevée aux dépens de la flottabilité. Saturation Les absorbants peuvent devenir rapidement saturés d’hydrocarbures. Même un déversement de relativement faible ampleur peut vite dépasser les capacités d’un barrage absorbant, qui finit par libérer de l’hydrocarbure et contaminer la ressource qu’il est sensé protéger. Une fois saturés, les absorbants ne peuvent plus récupérer d’hydrocarbures et doivent être collectés aussi rapidement que possible pour éviter tout risque ultérieur d’écoulement dû à la saturation. Le niveau de saturation peut être difficile à établir et nécessite souvent que le barrage soit ouvert. Les cas de saturation incomplète sont fréquents avec les hydrocarbures visqueux ; les barrages sont collectés et jetés précocement, laissant les couches intérieures inutilisées (Figure 4). Un tel gaspillage inutile peut être évité ou réduit en utilisant un barrage absorbant de petit diamètre, Rétention des hydrocarbures L’un des aspects cruciaux de la performance générale d’un absorbant réside dans sa capacité de rétention des hydrocarbures. Certaines matières absorbent rapidement les hydrocarbures mais, à défaut d’être récupérées à temps, risquent d’en libérer une grande partie sous l’effet du vent, des vagues et des courants. De même, certains absorbants libèrent des hydrocarbures lorsqu’ils sont soulevés de l’eau, en raison de la déformation causée par le poids du liquide récupéré, qui entraîne à son tour l’expulsion d’hydrocarbure de l’intérieur des pores ou des surfaces internes. La rétention des hydrocarbures peut être particulièrement problématique avec les absorbants à faible résistance inhérente, notamment ceux réalisés à partir de matières végétales ou animales. Les absorbants à pores fins, tels que la vermiculite et certaines mousses, possèdent généralement de bonnes caractéristiques de rétention des hydrocarbures. Ils ont pour inconvénient d’être peu performants au niveau de la récupération des hydrocarbures visqueux. Les écheveaux peuvent devenir rapidement saturés d’hydrocarbures, principalement en raison de leur grande surface de contact. Ils peuvent cependant libérer de l’hydrocarbure au moment d’être soulevés de la surface de l’eau. Le taux de libération de l’hydrocarbure dépend directement de sa viscosité : les hydrocarbures plus légers et moins visqueux s’écoulant plus rapidement. Résistance et durabilité La durabilité d’un absorbant est importante dans les situations où il peut être laissé en place longtemps avant d’être collecté. Les barrages absorbants peuvent commencer à se dégrader et à se décomposer en quelques heures seulement sous l’effet de divers facteurs environnementaux, tels que l’action des vagues ou l’abrasion sur les rochers. La résistance de certains barrages absorbants, particulièrement ceux composés de matière en vrac enveloppée, dépend de la durabilité de l’enveloppe, qui risque de se briser et de s’ouvrir par mauvais temps. Lorsque ces barrages sont endommagés, leur contenu se perd facilement et peut devenir une source secondaire de contamination. Fermentation Certains absorbants d’origine végétale ou animale peuvent fermenter lorsqu’ils sont laissés en contact prolongé avec l’eau. En plus d’altérer leur composition et leur efficacité en matière de récupération sélective des hydrocarbures, ce phénomène peut causer des problèmes de récupération, de stockage et d’élimination du mélange absorbant + liquide résultant. Coût 5Figure 8 : Les matériaux absorbants sont, de par leur nature, des produits encombrants. Le stockage et le transport avant, pendant et après une lutte antipollution à la suite d’un déversement peuvent poser des problèmes de logistique et de coût. 6 Le coût des produits absorbants varie considérablement et dépend principalement de la matière employée. Les matières d’origine végétale, animale et minérale sont comparativement moins coûteuses que les produits synthétiques. Il convient cependant de trouver un compromis entre ce faible coût unitaire et les quantités supplémentaires requises en raison de leur faible efficacité relative. UTILISATION DE MATÉRIAUX ABSORBANTS DANS LA LUTTE CONTRE LA POLLUTION PAR LES HYDROCARBURES Les coûts supplémentaires occasionnés par l’élimination de plus grandes quantités de matière doivent également être pris en compte dans la sélection du produit le plus approprié. En dépit du coût élevé des produits synthétiques, ils sont souvent nettement plus efficaces et, dans certains cas, réutilisables. Disponibilité, stockage et transport Bien qu’intéressants de par leur performance, les absorbants synthétiques ne sont pas toujours immédiatement disponibles sur le lieu du déversement. S’ils sont parfois moins efficaces, les absorbants d’origine végétale, animale et minérale sont plus largement disponibles et peuvent s’imposer en tant que solution pragmatique. La nécessité de prétraiter certains produits d’origine animale ou végétale avant de pouvoir les utiliser efficacement comme absorbants peut toutefois limiter leur disponibilité en cas d’urgence. Les absorbants sont encombrants par nature (Figure 8) et l’espace requis pour leur stockage en grandes quantités peut être considérable. Lorsque l’espace est limité et que d’importantes quantités d’absorbants sont requises, le stockage n’est parfois possible qu’en extérieur. Il est alors nécessaire de prévoir une protection contre la lumière du soleil afin de prévenir la dégradation par les UV, notamment dans le cas des absorbants synthétiques. Le stockage d’absorbants d’origine animale ou végétale doit tenir compte du potentiel de détérioration par conditions humides, ainsi que du risque d’endommagement dû à la moisissure, aux rongeurs ou aux insectes. À l’instar du stockage, le transport d’importantes quantités d’absorbants peut causer des problèmes de logistique, à la fois entre l’entrepôt et un centre de distribution dans le voisinage général du déversement et entre le centre de distribution et le lieu d’utilisation des absorbants. Le transport de cargaisons entières d’absorbants par avion jusqu’au lieu d’un déversement est particulièrement peu susceptible d’être rentable. Utilisation d’absorbants en frange littorale autant que possible afin de minimiser les problèmes secondaires liés à l’élimination (Figure 9). Par conséquent, l’utilisation massive d’absorbants sur les littoraux doit être limitée aux situations dans lesquelles d’autres techniques seront probablement inefficaces ou impossibles à mettre en œuvre. Les hydrocarbures présents sur les plages de sable, par exemple, peuvent généralement être récupérés sans utiliser trop d’absorbants, par des travailleurs munis de pelles ou au moyen de tranchées. En revanche, lorsque les hydrocarbures sont retenus contre la côte, inaccessibles autrement qu’à pied, et qu’il est impossible de déployer des écrémeurs et des pompes, il est très difficile de récupérer les hydrocarbures fluides sans l’aide d’absorbants. Un grand nombre des problèmes de disponibilité, de transport et de stockage des absorbants, avant et après leur utilisation, restent néanmoins valables. Ancré près du littoral, un barrage absorbant peut être efficace pour capter le ruissellement des opérations de lavage à terre, par exemple pendant le lavage haute pression de rochers pollués (voir la page de couverture) ou dans la zone intertidale, pour récupérer les hydrocarbures remis à flot/remobilisés. Parfois appelé « nettoyage passif », l’usage de barrages absorbants et à écheveaux peut être très efficace pour piéger les hydrocarbures mobilisés marée après marée dans les zones très sensibles, notamment les marais maritimes et les mangroves, où d’autres techniques de dépollution risquent de causer des dommages supplémentaires inacceptables. Cette technique peut également être employée pour récupérer les hydrocarbures libérés des enrochements au fur et à mesure des marées successives. Les filets à mailles fines utilisés comme parepoussière pour les échafaudages ont également été utilisés de la sorte pour capter les hydrocarbures visqueux libérés des littoraux comprenant blocs, galets et sable grossier. Une extrémité du filet est fixée au littoral tandis que l’autre est laissée libre de bouger au gré des mouvements de la mer. Si les conditions environnementales sont adéquates, et plus particulièrement si la vitesse d’écoulement de l’eau à travers le barrage n’est pas trop élevée, un barrage à écheveaux peut également être efficace tendu en travers de prises d’eau, pour restreindre l’entrée d’hydrocarbures flottants très visqueux (Figure 7). Les absorbants peuvent jouer plusieurs rôles utiles dans les opérations de nettoyage en frange littorale. L’utilisation d’importantes quantités d’absorbants doit toutefois être évitée En règle générale, l’utilisation d’absorbants en conjonction avec les techniques de lavage du littoral pendant la phase de nettoyage fin est préférable à l’emploi d’absorbants pour essuyer les rochers dès le départ, étant donné que cette dernière technique génère de grandes quantités de déchets à éliminer. Les absorbants 5Figure 9 : Emploi massif d’absorbants pour récupérer des hydrocarbures sur une plage de sable dur. L’utilisation d’absorbants doit être proportionnée à l’échelle de la contamination, présenter un avantage appréciable pour la lutte antipollution et ne pas ajouter une quantité de déchets excessive nécessitant d’être éliminée. 5Figure 10 : Les matières particulaires absorbantes d’origine animale et végétale, telles que la tourbe ou l’écorce, peuvent être appliquées sur les littoraux rocheux d’importance pour la faune sauvage (par ex. les manchots et les phoques), afin de minimiser la contamination des pelages et des plumages lorsqu’ils viennent à terre. GUIDE D’INFORMATIONS TECHNIQUES 8 7 5Figure 11 : Feuilles absorbantes en mer. Un effort considérable sera nécessaire pour les récupérer ultérieurement et éliminer la contamination secondaire. L’utilisation d’un barrage de confinement et d’écrémeurs peut être un moyen plus efficace de récupérer les hydrocarbures que l’utilisation d’absorbants. 5Figure 12 : Barrage absorbant remorqué en U derrière deux navires, dans le but de récupérer une irisation (film d’hydrocarbures très mince) en mer. La saturation du barrage en eau de mer limite son efficacité et l’absence de jupe limite la capacité de confinement de la pollution. On voit ici l’hydrocarbure s’échapper du barrage. peuvent néanmoins être utiles pour collecter de petites quantités d’hydrocarbures résiduels qui seraient autrement difficiles à récupérer moyennant un coût et un effort raisonnables. Les mares intertidales contaminées sont, quant à elles, particulièrement adaptées au nettoyage au moyen d’absorbants, par exemple d’écheveaux de polypropylène capables de récupérer des hydrocarbures à la fois visqueux et vieillis. L’emploi d’absorbants pour récupérer une irisation n’est généralement pas nécessaire dans la plupart des climats étant donné la tendance des irisations à se dissiper naturellement. contrôler que le déversement d’origine. L’utilisation massive d’absorbants en vrac en frange littoral n’est généralement pas préconisée, notamment en raison des difficultés de contrôle de l’application du produit et de sa récupération ultérieure. Certaines situations peuvent toutefois se présenter, dans lesquelles la récupération n’est pas envisagée, rendant cette méthode avantageuse. Par exemple, les produits d’origine végétale, tels que la tourbe ou l’écorce, peuvent être étalés sur des littoraux pollués pour adsorber les accumulations d’hydrocarbures. Ils procurent également une mesure de protection de la faune locale, particulièrement les mammifères et les oiseaux marins vulnérables, dont les phoques ou les manchots, sur leurs reposoirs (Figure 10). Dans certains pays, des absorbants en vrac d’origine végétale, animale et minérale sont utilisés pour la phase de nettoyage fin, sachant que même s’ils ne sont pas récupérés, le mélange absorbant + hydrocarbure sera éliminé dans le temps par les processus naturels, qui entraînent également sa distribution sur une zone importante, ainsi que la décomposition graduelle de l’hydrocarbure. Utilisation des absorbants en mer L’utilisation d’absorbants en premier recours lors d’un déversement d’hydrocarbures de grande ampleur doit être découragée. En plus des problèmes de contrôle du produit à la surface de l’eau et de volumes accrus de déchets pollués nécessitant d’être éliminés (Figure 11), l’application d’absorbants sur une nappe d’hydrocarbures n’atténue pas les problèmes inhérents aux opérations de confinement et de récupération en mer. Le mélange hydrocarbure + absorbant résultant entravera probablement le fonctionnement des récupérateurs et continuera de subir les effets du vent, des courants et des vagues, provoquant la fragmentation des nappes qui ne seront pas plus faciles à 8 Application L’utilisation d’absorbants en vrac en mer soulève plusieurs problèmes d’efficacité et de sécurité en raison des inconvénients inhérents à l’épandage de produits pulvérulents ou particulaires. Le moindre vent est susceptible d’éloigner le produit de la nappe, causant ainsi gaspillage et pollution supplémentaire. Des soufflantes sont parfois utilisées pour épandre des absorbants en vrac sur un déversement ; le personnel chargé de ces activités doit alors se protéger les yeux contre la poussière et prendre des précautions contre toute inhalation ou ingestion accidentelle. Sans brassage adéquat de l’absorbant dans l’hydrocarbure, l’absorbant risque de tout simplement flotter au-dessus de l’hydrocarbure et de n’avoir que très peu d’efficacité. Pour surmonter ces obstacles, plusieurs dispositifs spéciaux ont été conçus permettant de décharger les absorbants pulvérulents et particulaires par-dessus bord d’une manière contrôlée. Pour être avantageux, ces dispositifs doivent être facilement accessibles depuis le site d’un déversement. Ils ne sont cependant pas largement disponibles. Un barrage absorbant est beaucoup plus facile à déployer qu’un absorbant en vrac. Or, les limitations imposées sur l’utilisation des barrages de confinement par les courants, les vents et l’état de la mer s’appliquent encore davantage aux barrages absorbants. Étant donné qu’ils sont relativement légers, surtout immédiatement après le déploiement, ils peuvent être soulevés par le vent et nécessitent donc d’être arrimés ou ancrés. Certains modèles sont disponibles avec points d’arrimage. Afin de combiner les avantages des absorbants avec ceux d’un barrage de confinement conventionnel, certains fabricants ont réalisé des barrages absorbants avec jupe lestée. Pour les déversements de moindre ampleur, par exemple dans les ports de plaisance ou de pêche, ils peuvent faciliter à la fois le confinement et la récupération. Ce type de barrage est commercialisé comme un produit jetable ne pouvant pas être réutilisé et entraînant donc des frais d’élimination. Le remorquage d’un barrage absorbant pour la récupération de films d’hydrocarbures minces ou d’irisation à la surface de l’eau (Figure 12) est généralement considéré comme une utilisation inefficace de ressources puisque l’irisation tend à s’évaporer ou à se disperser facilement. En outre, les effets des vagues et de la turbulence aboutissent souvent à la saturation du barrage UTILISATION DE MATÉRIAUX ABSORBANTS DANS LA LUTTE CONTRE LA POLLUTION PAR LES HYDROCARBURES absorbant par l’eau, limitant ainsi sérieusement la récupération d’hydrocarbure. La saturation est davantage visible dans le cas des barrages composés de matière absorbante en vrac et moins lorsque le barrage contient une matière homogène continue. Par ailleurs, les forces imposées par le remorquage sont susceptibles d’être trop importantes pour la plupart des barrages et de causer leur déchirement, avec libération de la matière absorbante et perte de tout hydrocarbure confiné. Les feuilles et les coussins absorbants sont encore plus susceptibles d’être emportés par le vent que les barrages absorbants car ils ne sont pas conçus pour être arrimés ou ancrés et ne pourraient pas l’être sans grandes difficultés. L’utilisation massive de feuilles ou de coussins absorbants en mer n’est pas une technique recommandée en raison du risque d’étalement sur une grande surface. Par ailleurs, bien que leur collecte soit plus facile que celle des absorbants en vrac, elle nécessite une récupération manuelle lente et inefficace. Les feuilles, coussins et autres formes d’absorbants flottants échoués sur les plages peuvent rapidement être enfouis par les mouvements du substrat sous l’effet des marées successives et être difficiles à localiser ultérieurement (Figure 13). Utilisation en conjonction avec d’autres techniques de nettoyage Une bonne gestion de la lutte antipollution et du personnel d’intervention est nécessaire pour veiller à ce que les techniques de nettoyage employées ne se neutralisent pas les unes les autres. Il est important de ne pas oublier, lors de l’utilisation d’absorbants, que la tension superficielle de l’hydrocarbure et de l’eau peut être considérablement altérée par les agents tensioactifs présents dans les dispersants. Par conséquent, l’emploi de dispersants ou d’autres produits chimiques de dépollution peut empêcher les absorbants de fonctionner comme prévu. En effet, ils peuvent diminuer à la fois leurs propriétés oléophiles et hydrophobes, ce qui aurait pour effet une augmentation de la quantité d’eau et une réduction de la quantité d’hydrocarbure récupéré considérables. Ainsi, pour être efficaces, les absorbants ne doivent pas être employés en conjonction avec des dispersants au cours d’opérations de lutte antipollution. De même, les absorbants ne sont pas compatibles avec la récupération mécanique d’hydrocarbures au moyen d’écrémeurs. Les absorbants en vrac et feuilles absorbantes peuvent bloquer ou sérieusement restreindre les seuils et les pompes. Les barrages absorbants peuvent, quant à eux, restreindre l’écoulement de l’hydrocarbure vers un écrémeur. Récupération À moins d’être récupéré à la surface de l’eau, un absorbant devient un polluant au même titre que l’hydrocarbure proprement dit. Des particules d’absorbant en vrac peuvent être emportées sur de grandes distances et nuire à la faune, principalement par ingestion. Leur utilisation est tout particulièrement déconseillée à proximité des installations de mariculture en raison de leur ressemblance avec les aliments pour poissons. La récupération de tout mélange hydrocarbure + absorbant à la surface de la mer présente plusieurs difficultés. Le mélange peut être plus visqueux et encombrant que l’hydrocarbure seul, et seuls certains appareils (pompes et écrémeurs) puissants sont adaptés. Si le produit ne peut pas être pompé, les réservoirs de stockage à bord des navires antipollution deviennent superflus et un plus grand dispositif de stockage sur le pont est nécessaire. L’utilisation de filets de pêche de type senne a été tentée pour GUIDE D’INFORMATIONS TECHNIQUES 8 5Figure 13 : Feuilles absorbantes échouées sur le littoral à marée haute, après déploiement en mer. À moins qu’elles ne soient collectées rapidement, le mouvement du sable lors des marées successives couvrira les feuilles et compliquera leur récupération. la récupération de mélanges absorbant en vrac + hydrocarbure. Or, les problèmes rencontrés au niveau de la récupération de l’hydrocarbure seul, notamment le colmatage et les ondes réfléchissantes, sont les mêmes avec cette méthode. Les filets pollués doivent également être récupérés, stockés et nettoyés ou éliminés. Dans ces situations, les options de récupération peuvent être limitées à une collecte a l’aide d’outils manuels ou de grappins mécaniques, peu efficaces et intensive en main-d’œuvre. La récupération des barrages et des feuilles d’absorbants à la surface de l’eau est tout aussi chronophage et intensive en maind’œuvre. En particulier, l’accroissement du poids d’un barrage absorbant saturé peut rendre le halage difficile. Autres utilisation des absorbants Bien qu’ils servent surtout à éponger les petits déversements d’hydrocarbures à terre et à bord des navires, les absorbants sont aussi très utilisés dans des fonctions auxiliaires, par exemple pour améliorer la sécurité des travailleurs et limiter la contamination. Les tapis absorbants peuvent être utilisés pour minimiser le risque de glissade à bord des navires antipollution et aux points de décontamination de l’équipement, ainsi que pour séparer les secteurs souillés des secteurs propres aux postes de nettoyage. Des tapis absorbants sont également souvent placés sur le seuil des cabines des navires ou des centres de commande à terre, pour décontaminer les chaussures. Comme pour tous les scénarios exposés ci-dessus, l’absorbant doit être utilisé à sa pleine capacité avant d’être jeté afin d’éviter le gaspillage. Dans le secteur de la mariculture, des feuilles d’absorbant ont été employées avec succès pour récupérer des hydrocarbures flottants et des films d’hydrocarbure à la surface de l’eau à l’intérieur de cages à poissons, où les feuilles polluées sont confinées et donc faciles à récupérer. Par conditions relativement calmes, les barrages absorbants peuvent être employés pour entourer l’extérieur d’une cage à poissons ou autre ressource vulnérable dans le but de réduire les risques de contamination. Diverses matières absorbantes, des fibres aux matières minérales en vrac, ont également été employées dans la réalisation de filtres conçus pour empêcher les hydrocarbures d’être entraînés dans les prises d’eau de mer qui alimentent diverses installations à terre, telles que les écloseries et les salines des marais salants. 9 Stockage, transport et élimination des absorbants usés Stockage temporaire et transport des produits pollués Une fois récupérés, les absorbants employés en mer doivent être stockés à bord d’un navire antipollution, puis stockés à terre avant l’élimination finale. Étant donné qu’un absorbant saturé, et plus particulièrement un barrage, est comprimé par le poids du matériau qui repose dessus, l’hydrocarbure adsorbé risque de fuir sous l’effet de la compression. Par conséquent, le stockage à bord doit être confiné pour veiller à ce que ce polluant échappé ne contamine pas les ponts ou les passerelles, les rendant dangereux, ou ne s’écoule pas par-dessus bord, entraînant une recontamination. Les absorbants pollués doivent également être déchargés avec soin pour minimiser la contamination des quais et des jetées (Figure 14). 5Figure 14 : Les hydrocarbures s’échappant d’un barrage absorbant sont une source de contamination secondaire. Les débris et les produits pollués, y compris les absorbants, débarqués à terre et récupérés sur le littoral doivent normalement être temporairement stockés pendant que la logistique de transport et d’élimination est organisée. Dans les cas d’un déversement de grande ampleur, la quantité de produit collecté peut dépasser la capacité des installations de traitement ou d’élimination disponibles dans la région. L’usage excessif d’absorbants aggrave le problème (Figure 15), nécessitant un plus grand site de stockage temporaire qui, dans de nombreux pays, doit être agréé. Préalablement au transport des absorbants souillés, autant d’hydrocarbure libre que possible est généralement collecté (Figure 16) et, dans l’idéal, les absorbants sont comprimés pour minimiser le volume et optimiser la logistique de transport. Les hydrocarbures et l’eau libérés par la compression des absorbants doivent être récupérés et les sites de stockage temporaires doivent être entourés d’un dispositif de confinement pour empêcher la fuite de tout liquide. Voies d’élimination 5Figure 15 : Absorbants usés empilés sur un site de stockage temporaire. La compression causera l’essorage du barrage et l’écoulement de l’hydrocarbure récupéré. Il sera dès lors nécessaire de veiller à éviter une contamination secondaire. Les options d’élimination disponibles pour les absorbants pollués sont relativement limitées par rapport à celles des hydrocarbures liquides récupérés. Même les petites quantités d’absorbant présentes dans le flux de déchets peuvent exclure l’élimination par certaines voies, par exemple en tant que stock d’alimentation dans les raffineries. Réutilisation En théorie, certains types d’absorbant peuvent être réutilisés à condition de pouvoir en extraire l’hydrocarbure. Cela peut être accompli par compression au moyen d’une essoreuse à rouleaux (comme dans les systèmes de récupérateur à cordes), par extraction centrifuge ou par extraction par solvant. La compression est généralement l’option la plus pratique et convient à certains produits synthétiques. Le nombre de cycles de réutilisation possibles avant que l’absorbant ne devienne inutilisable parce qu’il est déchiré, écrasé ou généralement détérioré doit toutefois être pris en compte. 5Figure 16 : Étendage d’un écheveau absorbant pour permettre à l’hydrocarbure de s’écouler dans un bac afin de minimiser la quantité d’hydrocarbure libre dans les déchets. 10 Les autres facteurs à prendre en considération en ce qui concerne la réutilisation des absorbants sont la contamination des déchets d’hydrocarbure par les particules d’absorbant détachées pendant la compression, le taux de réduction de la capacité d’adsorption et le pourcentage d’hydrocarbure pouvant être collecté avec des niveaux raisonnables de main-d’œuvre et de matériel. Cela dit, certains absorbants gagnent en efficacité lorsqu’ils sont employés plusieurs fois, notamment sur les hydrocarbures plus visqueux. UTILISATION DE MATÉRIAUX ABSORBANTS DANS LA LUTTE CONTRE LA POLLUTION PAR LES HYDROCARBURES Incinération L’incinération des absorbants contaminés peut être une option viable à condition qu’ils soient en matière combustible et ne contiennent pas des quantités excessives d’eau. Ce dernier critère exclut souvent l’incinération des absorbants usés d’origine animale et végétale car ils ont tendance à être moins sélectifs en termes de récupération des hydrocarbures vis-à-vis de l’eau, et peuvent donc contenir trop d’eau. Bien que des incinérateurs soient parfois disponibles dans le pays où un accident se produit, leur capacité est généralement fonction de la demande intérieure et ils risquent d’être dépassés par l’afflux soudain de grandes quantités de déchets pollués typique d’un déversement de grande ampleur. Parmi les différents types d’incinérateurs disponibles, les fours tournants et les fours à creuset ouvert sont les plus appropriés pour d’importantes quantités de macro-déchets solides. Les plus gros macro-déchets, tels que les barrages absorbants pollués, doivent être retirés du flux de déchets et réduits en taille avant d’être incinérés. La valeur calorifique élevée des absorbants synthétiques peut rendre le contrôle de la température du four difficile ; il convient parfois de brasser les absorbants souillés dans un flux de déchets contenant des matières moins combustibles pour stabiliser la vitesse d’alimentation. La combustion totale d’absorbants synthétiques et d’origine animale et végétale permet d’obtenir une réduction importante du volume de produits à enfouir. En revanche, l’incinération de produits d’origine minérale élimine le contenu d’hydrocarbures mais ne réduit pas considérablement le volume pour l’élimination finale. L’incinération est normalement strictement contrôlée et une température de combustion élevée ainsi qu’une surveillance étroite des gaz d’échappement sont nécessaires pour éviter de libérer des dioxines toxiques, des hydrocarbures polycycliques aromatiques et de l’acide chlorhydrique dans l’atmosphère, particulièrement dans le cas des absorbants synthétiques. Le coût de l’incinération est souvent considérablement plus élevé que celui d’autres techniques d’élimination, facteur qui doit être pris en considération si cette méthode est sélectionnée. Enfouissement L’élimination des absorbants par enfouissement est elle aussi, en règle générale, strictement contrôlée par des règlements locaux ou nationaux. Dans certains pays, les absorbants souillés sont traités en tant que déchets dangereux et l’utilisation de décharges dédiées aux matières dangereuses peut être nécessaire, avec les hausses de coût du transport et de l’élimination que cela entraîne. Les décharges modernes sont généralement entourées d’une membrane imperméable pour empêcher le ruissellement. Néanmoins, dans certains pays où ce type de protection n’est pas régulièrement employé, il convient de prendre des mesures de prévention contre la contamination des eaux souterraines et de surface voisines. Biodégradation Les absorbants d’origine animale et végétale ont généralement l’avantage d’être biodégradables. Selon les règlements locaux régissant l’élimination des déchets et en présumant une teneur en hydrocarbures relativement faible, l’élimination de ces types d’absorbants par épandage agricole peut être autorisée. L’absorbant souillé est épandu sur une grande superficie de terre et se dégrade naturellement. La dégradation peut prendre plusieurs années, bien qu’il soit possible de l’accélérer par aération, au moyen d’outils agricoles, et par application d’engrais. Le compostage de certains absorbants d’origine animale ou végétale peut également être une voie d’élimination viable. L’essentiel • L’emploi massif d’absorbants doit être vivement découragé à la fois à terre et en mer car il génère des volumes excessifs de déchets pollués à éliminer. • L’emploi d’absorbants peut néanmoins être approprié et efficace dans certaines situations, principalement lors des opérations de nettoyage du littoral ou lorsque les autres techniques sont exclues. • L’emploi d’absorbants en haute mer pour récupérer les hydrocarbures sur l’eau est considéré comme un usage très inefficace de ressources en raison des difficultés d’épandage précis du produit sur l’hydrocarbure et, plus important encore, des difficultés de collecte du produit souillé. • Les opérations utilisant des techniques de lutte telles que les dispersants et les écrémeurs sont incompatibles avec les absorbants ; une gestion soignée de la lutte antipollution est nécessaire pour éviter que les différentes techniques ne s’entravent les unes les autres. • Les absorbants sont encombrants à stocker et à transporter. Les dispositions de stockage doivent être soigneusement étudiées pour prévenir les dommages dus aux rongeurs, aux insectes, à la moisissure, à l’humidité, aux rayons ultraviolets ou au feu. • Des matériaux d’origine animale, végétale ou minérale à faible coût, disponibles localement, peuvent être une option plus rentable que les absorbants synthétiques en réserve, en dépit d’une efficacité de récupération inférieure pour le même poids d’absorbant. • Un usage excessif et inefficace d’absorbants peut causer une contamination secondaire et créer d’importants problèmes logistiques et financiers pendant le stockage temporaire, le transport et l’élimination du produit pollué. Par conséquent, la mobilisation d’absorbants des réserves doit être contrôlée et la main-d’œuvre attentivement supervisée pour éviter ces problèmes. GUIDE D’INFORMATIONS TECHNIQUES 8 11 1 Observation aérienne des déversements d’hydrocarbures en mer 2 Devenir des déversements d’hydrocarbures en mer 3 Utilisation des barrages dans la lutte contre la pollution par les hydrocarbures 4 Utilisation des dispersants dans le traitement des déversements d’hydrocarbures 5 Utilisation des récupérateurs dans la lutte contre la pollution par les hydrocarbures 6 Reconnaissance des hydrocarbures sur les littoraux 7 Nettoyage des hydrocarbures sur les littoraux 8 Utilisation de matériaux absorbants dans la lutte contre la pollution par les hydrocarbures 9 Traitement et élimination des hydrocarbures et des débris 10 Direction, commandement et gestion des déversements d’hydrocarbures 11 Effets de la pollution par les hydrocarbures sur les pêches et la mariculture 12 Effets de la pollution par les hydrocarbures sur les activités sociales et économiques 13 Effets de la pollution par les hydrocarbures sur l’environnement 14 Échantillonnage et suivi des déversements d’hydrocarbures en mer 15 Préparation et soumission des demandes d’indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures 16 Planification d’urgence en cas de déversement d’hydrocarbures en mer 17 Intervention en cas d’accident chimique en mer L’ITOPF est une organisation à but non lucratif, fondée au nom des armateurs du monde entier et de leurs assureurs. Sa mission : contribuer à l’efficacité des interventions de lutte contre la pollution en cas de déversements en mer d’hydrocarbures, de produits chimiques et autres substances dangereuses. De l’intervention d’urgence à la formation, l’éventail de services proposés comprend également l’apport de conseils techniques en matière de nettoyage, l’évaluation des dommages causés par la pollution et l’aide à la préparation de plans d’intervention en cas de déversement. Source d’informations exhaustives sur la pollution marine par les hydrocarbures, l’ITOPF publie ce document dans le cadre d’une série de guides basés sur l’expérience de son personnel technique. L’information qu’il contient peut être reproduite avec la permission expresse préalable de l’ITOPF. 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