MARCHADIER Romain ERASMUS 2013-2014

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MARCHADIER Romain ERASMUS 2013-2014
MARCHADIER Romain
ERASMUS 2013-2014
Témoignage de mobilité
Lors de mon trajet vers Oulu, après 1 semaine à Helsinki, j’ai tout de suite compris où j’allais.
7 heures de train durant et après avoir vu le paysage d’été se transformer (un 28 août) et prendre une
couleur dorée caractéristique de l’automne au fur et à mesure du voyage. J’allais loin, et j’allais dans
un monde diffèrent… Si Helsinki me rappelait quelques villes côtières de France, elle n’avait déjà rien
d’une métropole au sens parisien du terme, en tout cas de visu, mais lorsque je suis arrivé à Oulu, il
m’a fallu un temps pour saisir exactement dans quel genre de ville je me trouvais. Si le CouchSurfing
des deux premiers jours m’a aidé à me repérer dans la ville, et même si je connaissais l’emplacement
de l’école, l’organisation des cours et de l’année scolaire nous fut expliquée, à tous les ERASMUS1, le 2
septembre. Lors d’un premier rendez-vous, nous furent rassemblés avec nos ‘kummis’ (tuteurs), et
nous sommes allés récupérer nos premières indications, faire signer le document administratifs ainsi
que remplir les différents bulletins d’adhésion proposés (NISO pour le sport ERASMUS et ESN pour les
sorties/soirées/voyages ERASMUS). Il nous a aussi été offert une carte SIM rechargée afin de pouvoir
se débrouiller lors des premiers jours. Les jours suivants, des présentations en amphi au campus
(l’école d’architecture est la seule à être encore en centre-ville) nous expliquent le fonctionnement de
l’année académique, des différentes démarches (enregistrement à la Police, à la poste, …) et des
traditions de base, ainsi que des jours fériés et de la vie étudiante dans son ensemble. On nous remet
aussi les clés des appartements après dépôt de caution. Les locations pouvant être fournies en
couverts et en linge de maison ou non, le NISO se propose pour une Survival room, sorte de grand
bazar ou chacun peut prendre un item par type d’objet (fourchette, drap, …) histoire de palier les
éventuels manques, et ce, gratuitement.
Suite à cela, nous commençons assez vite les cours (les archis commenceront alors que les
présentations ne seront pas tout à fait terminées) avec l’introduction du système de l’école,
puisqu’elle est détachée physiquement du site du campus (environ 30min de vélo).
L’année se déroulera en deux semestres. La première partie est basée sur un projet de design
urbain (Urban Space Design) en groupe de 4 à l’échelle de l’agglomération ainsi que du détail en
terme de lumière et de design d’un espace en Urban Space Detailing pour une échelle intermédiaire
de l’ordre de la place publique et enfin de la conception de mobilier urbain en Design in Urban
Context à 2, qui serait pour ma part un trottoir skatable. La seconde partie de l’année, plus
individuelle, comprend un exercice de projet d’architecture contemporaine, à savoir la conception
d’un musée Guggenheim qui suivrait les règles du concours existant à Helsinki et le détail d’un des
espaces du musée en Lightning & Interior Design. S’ajoutent à cela un workshop Home for fire, en lien
avec des étudiants et professeurs de Trondheim (Norvège) en hiver, reposant sur la construction en
glace et neige. De plus, une compétition sur le thème d’un nouvel éclairage pour une nouvelle vision
d’Oulu l’hiver fut lancée. Les semaines de cours ne se ressemblent pas car l’agenda est toujours
diffèrent, avec toutefois quelques points communs comme les cours oraux souvent donnés le matin
de 10h15 (les 15 minutes étant une tradition permettant de prendre le café) à 12h15 le lundi, mardi
1
L’ENSACF n’ayant pas d’accord d’échange avec l’Université d’Oulu, la mobilité décrite dans ce texte a été faite
dans le cadre d’un accueil Free mover (hors convention Erasmus+).
et mercredi, les après-midi et les jeudis et vendredis sont plutôt consacrés à la recherche personnelle,
beaucoup plus présente qu’en France. A ce titre, la médiathèque a une toute autre dimension : Ipads
en libre-service pour consultation des ebooks, tableau interactif à libre disposition, ordinateurs de
recherche et de travail, imprimante A4 et A3 noir et blanc gratuite, poufs de détente et de lecture, …
De plus, un bâtiment entier appelé Kasino nous était réservé pour travailler en groupe et permettait
une très bonne entente du groupe même si cela nous séparait des finlandais qui préféraient rentrer
chez eux au plus vite.
Pour le reste de l’école, un atelier, ouvert tous les jours et dont les machines sont en libre accès
permet de travailler le bois, le métal, mais aussi de peindre les maquettes. On trouve aussi un studio
photo en accès libre où il est même possible d’emprunter le matériel… Une ambiance très très
agréable pour travailler avec envie et motivation !
Côté commodités, on trouve aussi une mini cafeteria qui permet de se restaurer à midi et de prendre
une collation à 10h ou à 16h.
Le début d’année fut aussi marqué, pour ceux qui étaient déjà arrivés, par un
workshop/détente/rencontre à Hailuoto, île naturelle à proximité de la ville pour quelques jours de
travail sur le thème du vent en lien avec des artistes en mode décontracté et échanges avec les
organisateurs, les professeurs, les étudiants finnois et ERASMUS.
Suite à cela, et après arrivée de tout le monde, nous serions une équipe de 23 personnes, liées bien
au-delà de cette année :
Au 1er semestre :
1 allemande
1 australien
1 brésilien
1 bulgare
1 fille et 3 garçons espagnols
2 filles et 1 garçon français
1 iranien (en Master à l’école)
1 irlandais
1 italienne
1 kosovar (en Master à l’école)
1 mexicaine
1 polonaise
1 vietnamien (en Master à l’école)
Auxquels s’ajouteront au 2nd semestre:
1 australien
1 hongrois
1 mexicaine
1 turque
Ce groupe est bien entendu composé aussi de finlandais qui ne seront que 8 au premier semestre et
une multitude au second. L’organisation de l’année est très intéressante du point de vue des
rencontres et des échanges entre ERASMUS, ce qui nous montre les différentes façons de travailler
ainsi que les manières de concevoir un projet en fonction des pays mais aussi les façons de gérer un
conflit de divergence d’opinion ou bien de précision et qualité dans le rendu lorsque l’éloquence ne
fait pas tout et que la culture rentre en jeu…
La ville en elle-même est la 5ème de Finlande, tout nouvellement reliée avec ses 3 plus proches
voisines afin de former ce que l’on appellerait en France une communauté de communes (base du
projet du 1er semestre). Elle est découpée en deux parties distinctes par la rivière Oulu sur laquelle
est implanté le barrage et l’usine hydroélectrique.
Au Nord, on trouve le campus et les résidences ERASMUS de ceux qui y travaillent. Entre ce
campus et la rivière, on trouve une zone nommée Alpilla, résidence des ERASMUS en archi et d’autres
étudiants au campus (15min en vélo). Sur les rives nord de la rivière se déploie Tuira qui devient
Toppila lorsqu’elle rejoint la mer Baltique. Vient alors une succession d’îles que l’on emprunte pour se
rendre de l’autre côté de la rivière et rejoindre le centre-ville. Le trajet direct ne se compose que de 2
îles, l’une étant dédiée au stade, l’autre à un café/parc. La voie cyclable, complètement détachée du
réseau routier, passe par 4 îles en enjambant la rivière par de multiples ponts. Il est donc magique
chaque matin (ainsi que chaque soir) de prendre le vélo pour profiter des différentes couleurs et
ambiances que créent le temps et les saisons, mais c’est aussi beaucoup plus sain et moins cher que
le bus dont le tarif prohibitif de 3.1€ freine tous les étudiants et les converti au vélo, souvent par
n’importe quel temps (y compris -30°).
Au Sud de la rivière, on trouve Myllytulli sur les bords est, sorte de gigantesque parc vert
ponctué de musées, et à l’Ouest, côté mer Baltique, la ville même, ou ce qu’on qualifierait de centreville en France. La différence reposant principalement sur le caractère relativement nouveau de
l’organisation de la ville, la place du marché offre un espace public tourné vers la mer avec pour
protection quelques iles afin de la couper du vent, mais aussi amenant des équipements tels qu’un
théâtre et une bibliothèque. Plus au Sud-Est, on trouve la gare qui coupe le centre-ville en deux,
dégageant la partie principale à l’Ouest, et Raksila, cimetière et zone résidentielle à l’Est. Toute la
partie sud est la zone commerciale avec les concessionnaires auto ainsi que les pôles technologiques
mais aussi le port industriel (le port de pêche étant négligeable). En continuant au Sud, on trouve
Oulunsalo, aux airs de village en brique, petite sœur d’Oulu, qui mène à l’île d’Hailuoto par laquelle
on accède grâce à un ferry par temps estival, ou bien par route sur glace en hiver (frissons assurés !).
Kiiminki, seconde ville de la communauté, est connue pour ses rapides et se situe à l’Est de la ville
alors qu’Haukipudas se situe au Nord. Ces 4 villes forment donc le pôle attractif nord de la Finlande
(sachant que plus au Nord, on dépasse le cercle polaire et qu’on y croise plus grand monde, c’est la
Laponie, pays du Père Noël, des rennes, des forêts et des moustiques !).
L’intégration à la vie finlandaise, après avoir entendu beaucoup de préjugés, n’est pas si
difficile qu’il y parait. La règle d’or demeurant le respect et la modestie, les comportements
d’Européens moyens paraissent assez décalés avec la réalité finlandaise, mais une fois que l’on a
compris cela, le retrait naturel des habitants paraît assez logique. Il ne s’agit pas d’une sorte
d’antipathie à l’égard des étrangers mais d’une sorte de réserve voire de timidité au contact des
autres. Les gens sont cependant beaucoup plus ouverts autour d’une bière, et deviennent des amis
sur qui l’ont peut compter aussitôt que l’on acquiert leur confiance, ce qui se fait avec un peu plus de
temps qu’en France. L’ERASMUS étant une sorte de melting-pot où toutes les nations se rencontrent,
j’ai été assez surpris que les finlandais ne soient pas ceux que j’ai côtoyé le plus au début, et pour
remédier à cela, j’ai décidé de participer à l’intégration de première année, qui dure un an, et
pendant laquelle on doit accomplir un certain nombre de tâches pour acquérir des points sur son
passeport (fuksipassi) afin de mériter en fin d’année l’honneur de porter le TekkariLakki (béret de
marin avec cordelette sur laquelle on fait un nœud par an, trouvant sa source dans les étudiants en
technique depuis l’occupation suédoise) juste après avoir perdu son statut de fuksi (1ère année) en
plongeant dans l’eau gelée de la rivière Oulu. Cette intégration permit de rencontrer beaucoup plus
de finlandais, de me faire des amis mais aussi de découvrir la vraie tradition plutôt que les simulacres
destinés aux ERASMUS. Ainsi, j’ai pu expérimenter le rituel de passage des étudiants d’architecture de
l’Ecole d’Oulu depuis l’intérieur sans faux semblants et avec beaucoup d’amitié de la part des autres
fuksis jusqu’à la dernière semaine intense appelée Vappu qui couronna l’année et marqua la
transition tant attendue.
Ainsi, j’ai pu tester les sit-sit, sorte de repas chantant, les saunas traditionnels, la nage dans
l’eau glacée, les différentes compétitions (de luge, de talents,…) et j’ai pu rencontrer la culture Sami,
la cuisine (certes assez classique mais possédant certains bijoux) mais aussi et surtout un mode de vie
qui fait de cette expérience plus qu’une succession de sentiments et de découvertes mais une réelle
remise en question de notre mode de vie bien qu’occidental lui aussi, qui s’est éloigné des choses
simples et du rapport à la nature pour conférer à la ville un rôle abrutissant et réducteur sur
l’homme.
En bref, une année aussi intense en découvertes qu’en apprentissage de l’architecture et une
réelle envie de retourner dans ce pays qui m’a beaucoup plus apporté qu’une expérience ERASMUS !