de six marins du sous

Transcription

de six marins du sous
Les funérailles------------------------------------de six marins
du sous-marin allemand
A l’heure dite, M. l’abbé Honoré, aumônier
du Foyer du Soldat et du Marin, mobilisé, procéda
à la levée des corps en compagnie de M. le
pasteur Charbonnaud. Après que le prêtre catholique, revêtu de l’étole, eut prononcé les prières
de l’absoute, et récité le «Libéra», le pasteur
protestant eut une courte méditation sur la mort
et le salut apporté à l’humanité par le Christ.
A cette cérémonie, assistaient, outre le
médecin chef de l’hôpital, le commandant major
Guerillon et le médecin commandant Frédéric
Lefèvre, MM. le contre-amiral Platon, commandant la Marine; le commandant adjoint Le Gall, le
général de division Tencé, gouverneur de
Dunkerque; le chef d’Etat- Major commandant
Hugon, un officier de la marine britannique,
plusieurs officiers de la place; MM. Saugrain,
commissaire divisionnaire de la police spéciale,
Preuilh, commissaire central; Noël, commissaire
du premier arrondissement.
Dès que furent terminées les dernières
prières, les employés des Pompes Funèbres, sous
la direction de M. Le Roy, directeur, s’emparèrent
du cercueil de l’officier, qu’ils hissèrent sur le
premier corbillard stationné devant la porte. Un
détachement de canonniers du bataillon de la
côte, en armes, com-mandé par un premier
maître rendit les honneurs; puis le corbillard
s’éloigna de quelques pas; un second prit sa place
et on y déposa le deuxième cercueil.
Ainsi procéda-t-on pour les quatre autres, les
honneurs étant rendus à chaque fois par la
troupe, cependant que dans la foule massée sur
les trottoirs les hommes restaient découverts. Accompagné d’un acolyte, portant la croix, M.
l’abbé Honoré prit la tête du cortège qui
s’achemina lentement vers le cimetière, précédé
à une courte distance d’un détachement de
canonniers marins, baïonnette à l’épaule.
En tête du groupe des autorités civiles et
militaires qui suivraient le dernier corbillard,
avaient pris place le contre-amiral Platon et le
pasteur Charbonnaud, puis immédiatement derrière, les commandants Le Gall et Hugon et l'officier de la marine britannique ayant le grade de
lieutenant de vaisseau. Un peloton de marins
sans armes avait pris place à la suite des officiers.
Le cortège était fermé par un second groupe
en armes.
Ajoutons que deux marins, l’arme basse,
escortaient, placés de chaque côté, chacun des
six chars funèbres.
Sur tout le parcours, des rues des Chaudronniers et Clémenceau, de la place Jean-Bart, des
rues Gambetta, de Beaumont et de Furnes, une
foule considérable était massée, grave, silencieuse, ne manifestant extérieurement aucune
impression. On se découvrait néanmoins unanimement devant le défilé des cercueils.
L’aumônier catholique mobilisé, M. l’abbé
Honoré, directeur du Foyer du Soldat et
du Marin, récite les dernières prières.
Aux abords du cimetière, une foule immense
également: elle avait peine à circuler, notamment
dans la courte avenue qui y mène et où avaient
pris place de nombreuses marchandes de
chrysanthèmes.
A l’arrivée du premier char, le détachement
de tête qui avait pris position devant l’entrée, se
mit au port d’armes, tandis que les corbillards
entraient l’un derrière l’autre par la grande grille
latérale pour se placer à proximité de la grande
fosse creusée, comme nous l’avons dit, dans un
terrain jadis déjà occupé par des sépultures
allemandes. L’un après l’autre, les cercueils
toujours enveloppés du drapeau allemand sont
séparés et sont disposés côte à côte dans la fosse;
à la tête de chacun d’eux et au fur et à mesure est
plantée la croix de bois blanc et l’on y pose la
couronne; la grande couronne offerte par la
marine britannique est posée à la tête du premier
cercueil.
Le pasteur lit un texte méditatif où est
exaltée l’immortalité de l’âme; le prêtre catholique récite une dernière absoute et bénit les
cercueils, puis l’assistance qui se signe.
De brefs commandements se font entendre
dans le silence: les détachements en armes
remettent baïonnette au fourreau et s’en vont. Le
détachement sans armes reste auprès de la
tombe jusqu’à ce que la besogne des fossoyeurs
recouvrant de terre, les cercueils, se soit achevée.
Il était 15h30 quand tout fut fini.
Nord Maritime 30 octobre 1939.
Nota: Les lignes pointillées, représentent les zones
censurées par les autorités.