Inauguration du 2e festival du cinéma israélien et du film juif

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Inauguration du 2e festival du cinéma israélien et du film juif
Inauguration du 2e festival du cinéma israélien et du film juif
Points de repères, points de passage ACJ, 15 novembre 2011
G. Tenenbaum pour l’ACJ
Mesdames, messieurs,
Chers amis,
Nous voici, pour la seconde fois, réunis à
l’occasion de ce festival de l’image organisé
par l’ACJ. Il y a deux ans, nous avions
choisi d’ouvrir une fenêtre sur le cinéma
israélien, expression privilégiée d’une société en mouvement, en interrogation, où
l’instabilité et l’angoisse du quotidien sont
telles que l’art devient l’urgence, à la fois
comme un refuge face au présent et comme
une fondation pour un avenir admissible.
Aujourd’hui, il nous a semblé pertinent d’y
adjoindre le film juif, qui reflète une autre
forme de questionnement et complète, à
travers le prisme diasporique, une réflexion
sur le monde actuel, ses cheminements et
ses dérives.
Notre Association Culturelle Juive, le
55 , ainsi nommé par nos anciens qui
ont posé leurs bagages dans cette maison de la rue des Ponts dès 1928, a traversé le vingtième siècle en vivant intensément toutes ses périodes, en participant, pour peu qu’elles lui aient semblé
justes, à toutes ses luttes, en épousant tous
ses espoirs, et en payant le prix fort pour
toutes ses horreurs.
Aujourd’hui, l’association maintient sa
tradition de militantisme et de vigilance
aux côtés des cercles de réflexion humanistes et des mouvements pacifistes.
Il y a deux ans, à cette même tribune, j’évoquais devant vous l’évolution de
l’engagement politique au cours du siècle
passé. Il y eut le temps des grandes théories
explicatives, voire prédictives, et ceux qui
y adhéraient étaient persuadés d’avoir raison.
Aujourd’hui, les combats idéologiques
sont moins bien définis, le décodage du
monde est plus complexe.
Faire de la politique, disions-nous il y a
deux ans, ce n’est sans doute plus avoir
raison, c’est peut-être simplement raison
garder.
Hasard ou nécessité, un grand mouvement associatif s’est créé l’année dernière
sur un Appel à la raison, concernant le
conflit du Proche-Orient, les perspectives
de paix, et la pérennité de l’État d’Israël.
C’est dans ce positionnement particulier
mais serein de Juifs diasporiques prêts à
participer au débat, comme nous invitait
en son temps Yaël Dayan, dans le respect de chacun mais sans appréhension,
que nous avons organisé ce festival, croisant les points de vue sur le judaı̈sme et
la judéité en Israël et en diaspora. Sentimentalement concernés par notre histoire
et notre culture, mais aussi universellement pris à partie en tant que citoyens du
monde, nous nous sommes investis, modestement mais fermement, dans la mission de
donner à voir, de chercher à comprendre,
et d’accueillir toutes les paroles.
Le vecteur cinématographique est l’un
des instruments les plus efficaces pour organiser ce partage. Touchant au cœur par
la prégnance de l’image, il laisse des traces
qui provoque la prise de conscience et enracine la réflexion.
Depuis quinze ans, le cinéma israélien
multiplie les succès publics et les récompenses, tout en interrogeant sans relâche la
société dont il émane. Parallèlement le film
juif diasporique traverse les cultures nationales d’un éclairage particulier, nourri de
mémoire et de rêves brisés.
Alors que, via d’âpres chroniques et des
portraits sans concession, les cinéastes israéliens portent un regard critique sur leur
société, le film juif, qui ne se laisse pas
définir en tant que genre, aborde le politique, le social ou le philosophique à travers l’intimité de destins individuels. Par
des moyens différents, ces deux courants
universalisent des problématiques essentielles. C’est cette complémentarité, complexe et diverse, déclinée au gré des choix
artistiques et des nécessités individuelles
ou historiques, qu’il nous a paru intéres-
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Points de repères, points de passage
sant, pour cette seconde édition de notre
festival, de souligner.
Dans un monde secoué par la technologie, désemparé face la dissolution des
valeurs, et bouleversé par les communautarismes, l’axe points de repères/points
de passages est apparu comme une voie
pertinente pour illustrer ces spécificités
cinématographiques.
En effet, alors que la société israélienne,
dont le support géographique est perpétuellement en question, est confrontée au
problème du passage — frontières intérieures ou extérieures, transitions multiples —, le monde juif diasporique, entre
tradition et assimilation, se pose inlassablement la question de l’identité et donc
des repères. Inversement, le problème identitaire — statuts du citoyen et de l’étranger — est au centre du débat politique
israélien, alors que les thèmes du voyage,
de l’errance et donc du passage, font partie intégrante de l’imaginaire juif dans les
nations.
Au sein même de ce festival, et concomitamment à la tenue du festival Cinéma
d’automne, Isura n lexrif, organisé par
l’Association de Culture Berbère, nous avons coorganisé avec l’ACB et Amitiés Tsiganes une soirée commune.
En effet, nos associations sont engagées
et se retrouvent sur le double terrain du
partage culturel et de la vigilance morale
et politique. Aujourd’hui, il nous semble
important, précisément au moment d’un
festival dédié à une culture spécifique,
de réaffirmer en commun les valeurs du
décloisonnement et de l’antiracisme — en
un mot, de la fraternité entre les composantes de la France. Nous sommes bousculés ensemble par certains discours politiques qui n’hésitent plus à désigner à la
vindicte populaire les gens du voyage et les
immigrés. Nous sommes effrayés ensemble
par la montée des extrêmes droites en Europe. Nous ressentons ensemble l’urgence
d’agir. Associations culturelles, c’est à travers notre solidarité et notre ouverture que
nous nous exprimons. Ensemble. Convaincus que la réunion de nos publics et la
comparaison de nos points de vues constituent à eux seuls un manifeste en faveur de la laı̈cité française et de la formidable ressource qu’apporte le partage
culturel à notre pays, nous proposons au
public lorrain une projection-débat du film
Jimmy Rivière dimanche 20 novembre, dès
16h au cinéma Caméo Saint-Sébastien,
en présence du réalisateur Teddy LussiModeste.
Notre festival, comme l’ensemble de notre action culturelle, ne pourrait avoir la
même ampleur sans l’indéfectible soutien
de nos partenaires publics et privés. Bruno
Cohen et moi-même saisissons l’occasion
d’exprimer ici une gratitude particulière
envers le Conseil Général, le Conseil Régional et la Ville de Nancy. Nous avons
également le plaisir de remercier l’Ambassade d’Israël en France, le Forum des
images, et bien sûr notre fidèle partenaire
le cinéma Caméo de Nancy, pour leur soutien amical. Enfin, nous tenons à saluer
toutes les bonnes volontés, parfois trop
discrètes, qui nous accompagnent et nous
apportent leur concours au quotidien.
Mais, en cette fin 2011, place au cinéma :
points de repères/points de passages, être
et reconnaı̂tre, passer et laisser passer,
voilà bien des problématiques qui interpellent largement au-delà du monde juif.
C’est toute notre ambition qu’à travers ces
projections et ces débats, vous puissiez y
trouver le plaisir du septième art et le bonheur de la discussion.
Bon festival à tous !

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