livre 103 OK:Mise en page 1 - Sainte

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livre 103 OK:Mise en page 1 - Sainte
LYON
SAINT-PAUL
LES MISSIONS
LA SOLITUDE
LA VERPILLIERE
103
som
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ONS
08
ÉLOGE DE LA LOINTEUR
RENAUD CAMUS
12
LES ÉTUDES SCOLAIRES
ONT-ELLES UNE ÂME ?
XAVIER DUFOUR
20
POUR UNE CULTURE SCOLAIRE
GUY COQ
LES
YEUX
FERTI
LES
28
L’ÉNIGME DU TRIPTYQUE
DE LA TOUR-DU-PIN
JEAN-LUC GAUCHON
RE
FLEXI
ONS
COL
LEGE
48
CINÉ CLUB
AMADEUS
58
TRAVAUX D’ÉLÈVES
LES VALEURS DES JEUNES
DE 15 À 24 ANS
74
RÉQUISITOIRE CONTRE
L’INDIFFÉRENCE
IN
MEMO
RIAM
94
EN MÉMOIRE
D’UN BÂTISSEUR
LE PÈRE PERROT
XAVIER DUFOUR
76
ÉCHANGES
LES ÉTATS-UNIS
L’ALLEMAGNE
82
VOYAGE PÉDAGOGIQUE
87
10E ANNIVERSAIRE
JUMELAGE AVEC LE LIBAN
NOU
VEL
LES
104
LYON
110
LA VERPILLIÈRE
117
CARNET
Les exigences paradoxales de la vie démocratique conduisent
parfois à des impasses ou des enfers.
Le consommateur exige de son épicier, le patient de son
médecin, le citoyen de l’Etat, des services de meilleure qualité,
plus rapides, moins chers, générant davantage de plaisirs.
Pourtant la complexité que cela engendre paralyse bien souvent
notre société, nous rendant incapables de décider du fait d’un
excès de précaution, ou rendant les moins argentés ou les moins
éduqués incapables d’accéder aux produits issus de ces
avancées techniques. En fait de plaisirs nous obtenons angoisses
ou frustrations.
Transposée dans l’éducation, l’exigence aveugle fait naître
un même paradoxe : on veut que l’élève apprenne plus en moins
de temps et plus efficacement, que les parents soient sans faille
sous peine de sanction juridique ou financière, que les
professeurs s’en tiennent à l’essentiel, ne se laissent pas aller à
des digressions... On en arrive paradoxalement pour y parvenir
à diminuer l’exigence intellectuelle, à oublier la soif spirituelle
pour être intraitable sur les procédures à acquérir. Pour éviter
l’horrible élitisme, on s’interdit la recherche de l’excellence et
on privilégie les techniques d’apprentissage, plus rassurantes
dans l’immédiat, mais sans fécondité véritable pour cette vie ou
après.
Pourtant le désir d’être le meilleur, de choisir le meilleur,
est un désir fondamental, même s’il peut être dévoyé quand il
conduit à privilégier ceux qui ont des facilités aux dépens de
ceux qui ont plus de peine ; et de ce point de vue le collège
unique a ceci de préjudiciable qu’il ne trace qu’une unique voie
EDI
TO
d’excellence. Mais à ne pas prendre le risque de la question, à
ne pas savoir prendre son temps dans les méandres d’une
digression, à se rassurer avec des techniques scolaires, à vouloir
des familles sans faille, la relation pédagogique se dessèche et
ce sont les plus forts qui s’en sortent. La parabole des talents
nous apprend une autre hiérarchie : non entre ceux qui ont reçu
un talent et ceux qui en ont reçu dix, mais entre ceux qui font
ou non fructifier leurs talents. L’enfant à qui on n’aura pas
demandé en proportion des richesses qui sont en lui connaîtra
« des pleurs et des grincements de dents », et pas dans l’au-delà.
Nous serons donc maristes et fidèles à ce que nous
transmettent les pères si nous savons aider à éclore au cœur de
chacun le désir de se donner entièrement, que si nous osons
demander à chacun d’être fidèle à la merveille qu’il est
profondément (psaume 138). Cela ne va pas sans passion, ni
sans patience. Dans les deux cas un lot de souffrance. Mais
avant d'être une espérance pour l'avenir, la vie éternelle est,
pour le présent, une exigence, disait le cardinal de Lubac
MARC BOUCHACOURT
ÉLOGE DE LA LOINTEUR
LES ÉTUDES SCOLAIRES
L’ÉNIGME DU TRIPTYQUE
DE LA TOUR-DU-PIN
ré
flex
ions
ÉLOGE DE LA
lointeur
Sous ce titre Lyon Mariste propose à votre réflexion
un texte ayant trait à la conduite scolaire.
MARC DU SAUNE : Mais dans une situation où il s’agit d’amener à
la culture et à la connaissance beaucoup d’élèves qui par leurs
origines y sont souvent très étrangers, est-ce que vous ne craignez
pas que cette espèce de distance, de distanciation, que vous
recommandez chez les professeurs – je sais que vous détestez
qu’on dise profs, et plus encore peut-être, enseignants – n’accroisse
encore le sentiment, chez les élèves dont je parlais, qu’ils sont
étrangers à la culture, qu’elle ne les concerne pas, qu’elle n’est pas
faite pour eux, qu’elle est décidément trop éloignée ? Ou bien, pour
poser ma question autrement, ne peut-on pas envisager que ces
profs auxquels vous semblez reprocher un certain relâchement de
langage, de tenue vestimentaire et d’attitude sociale, adoptent ces
partis que vous réprouvez justement pour aller au-devant de leurs
élèves, pour abréger la distance qu’il y a entre eux et la culture,
entre eux et la connaissance ?
RENAUD CAMUS : Oh, je veux bien leur reconnaître ces bonnes
intentions, si vous voulez, même si je suis convaincu qu’elles sont
fourvoyées. Je suis convaincu que c’est une erreur de vouloir
toujours rapprocher l’enseignement de l’enseigné. Ce n’est pas du
même qu’il faut prodiguer à l’élève. Le même, il en aura toujours
assez. C’est le lointain qu’il faut lui apprendre à aimer, le
dissemblable, le non-coïncidant : le mot qu’il ne comprend pas
RÉFÉ
REN
CE
dans une phrase, la phrase qu’il ne comprend pas dans un texte,
le nom qu’il ne connaît pas dans une liste, le geste que lui n’aurait
pas fait dans une situation donnée, l’idée qui ne lui serait pas
venue, la tournure syntaxique ou stylistique que jamais ne lui
aurait dictée la simple expression de lui-même.
On apprenait récemment, sans surprise, mais sans gaieté, que
les lycéens réclament à présent des journaux qui leur ressemblent
davantage, des journaux mieux vulgarisés, des journaux qui ne
leur apprennent, en somme, que ce qu’ils savent déjà ; ou du moins
qui ne lâchent pas un instant le bras de leur ignorance, pour mieux
la guider. Mais si la connaissance doit éternellement s’aligner sur
l’ignorance, ne pas la lâcher d’une semelle, elle a tôt fait de se
confondre avec elle, de se réduire à elle. Je crois que, pour rester
vivante, la connaissance exige toujours de ceux qui aspirent à elle
un saut dans l’inconnu, au contraire, un lâchage mesuré de soimême, une acceptation heureuse du dépaysement. Et puis il y a les
dictionnaires, que diable, les encyclopédies, Internet, la curiosité,
les questions, la recherche, les voyages, le temps ! Si l’on prétend
interdire les mots que tout le monde ne connaît pas, il y aura de
moins en moins de mots, le vocabulaire se réduira comme peau de
chagrin, ainsi qu’on l’a vu faire déjà à la syntaxe, qui dispose
toujours de moins en moins de formes, de moins de temps, de
moins de mode, alors que les modes grammaticaux sont des modes
de la présence et de la perception, des façons d’être au monde et
de l’appréhender. L’art est lointain, voilà ce qu’est l’art : la culture
est autre chose, la littérature ne nous parle pas de nous, ou bien,
si elle nous parle de nous, c’est par un détour à travers autre chose,
l’autre, un autre qui est la forme, les formes, la distance, l’écart
10
avec soi-même. Pardonnez-moi de citer une fois de plus la
phrase d’Adorno que je trouve si juste et si belle, et que je
plaçais en exergue d’un chapitre d’Esthétique de la solitude 1, il
y a déjà quinze ans de cela : « L’étrangeté au monde est un
aspect de l’art : celui qui perçoit l’art autrement que comme
étranger au monde ne le perçoit pas du tout. » 2
On dit toujours des grandes liturgies religieuses, ou bien des
fastes du pouvoir, surtout du pouvoir monarchique, qu’ils sont du
théâtre, des mises en scène de théâtre, des emprunts aux arts de
la scène. Mais c’est le contraire qui est vrai : c’est le théâtre qui est
un emprunt aux rites d’échange avec les dieux, même si cet
échange est fictif, et même s’il n’est en rien un échange. C’est l’art
qui imite, non pas tant la nature que les protocoles inhérents à tout
pouvoir dès lors qu’il n’est pas la force pure ; et d’abord inhérents
au pouvoir sur soi-même, sur les événements, sur la peur, sur
l’horreur, sur l’injustice, sur les émotions trop fortes. C’est la
culture, c’est l’enseignement, c’est l’éducation qui figurent en
chacun de leurs modes, en chacune de leurs inflexions, la sortie de
soi, le décollement d’avec le moi, l’insoumission au destin passif,
l’inasservissement à la fatalité, que celle-ci soit psychologique,
économique, intellectuelle ou sociale.
M. DU S. : En somme, vous recommandez un enseignement aussi
formalisé, solennel, pompeux, distant, que la tragédie classique, ou
que l’administration de la justice dans ces palais que vous aimez
tant...
1
Renaud Camus, Esthétique de la solitude, P.O.L, 1990
Theodor Adorno, Aesthetische Theorie, Suhrkamp Verlag, Francfort-sur-le-Main,
1970. Traduction française, Théorie esthétique, Klincksieck, 1974
2
11
R. C. : Non. Je n’irai pas jusque là. Mais je crois en effet qu’il faut
y mettre des formes, pour enseigner. Des formes tempérées par la
gentillesse, bien sûr, par la patience, la compréhension, l’attention
particulière ; mais des formes, oui, des formes spatiales sinon
architecturales, du rituel, de la non-coïncidence avec soi-même,
j’en reviens toujours à cela, et que ce soit pour les élèves aussi
bien que pour les professeurs. Vous savez que j’aime à parler de la
lontanànza de l’art, ce que je suis tenté de traduire par sa lointeur,
ou sa lontanité, je ne sais pas : ces deux néologismes me plaisent
autant l’un que l’autre. Les professeurs doivent être des maîtres de
lointeur, pas de proximité. Leur mission n’est pas de rendre le
monde plus petit, mais plus grand RENAUD CAMUS, ENTRETIEN
AVEC
MARC DU SAUNE
La dictature de la petite bourgeoisie,
éd. Privat, 2005
LES ÉTUDES
SCOLAIRES ONT-ELLES
UNE
Libres réflexions sur un aphorisme
Le père Perrot n’aimait pas les longues déclarations : la
concision, voire l’ellipse, étaient la marque propre de cet homme
pudique et rude. Il n’a laissé aucun traité de pédagogie, préférant
accomplir une œuvre éducative et la confier vivante à ses
successeurs. Il laisse pourtant à la postérité quelques aphorismes,
ciselés jusqu’à l’épure, riches et suggestifs, un peu à l’image des
oeuvres architecturales qu’il conçut de conserve avec Georges
Adilon. C’est l’une de ces paroles glanées dans les éditoriaux de
Lyon-Mariste que je voudrais interroger ici : de l’enseignement elle
évoque la visée et les sources profondes ; dans le brouhaha des
réformes qui se bousculent et se neutralisent, ce propos nous
ramène à l’essentiel de l’acte éducatif.
« A la culture de la réponse et de la banalisation, soucieuse de
sécurité, substituer celle de l'interrogation et de l'admiration, motrice
de la vie spirituelle. L'aspect parcellaire des disciplines quant à leur
objet propre dans la culture ne peut cacher le fait que chacune porte
la visée globale de l'interrogation humaine. »
Ce propos très dense place l’activité intellectuelle, donc
l’ensemble de la culture scolaire et universitaire, entre deux pôles
unifiant, l’un du côté de la source de la vie intellectuelle, l’autre du
côté de sa finalité ultime.
13
ÂME ?
du père Perrot
La source de l’interrogation humaine
Quelle est la source du savoir, le moteur secret de toute
culture, sinon « l’interrogation et l’admiration » comme l’avaient
souligné les Grecs ? Il n’y aurait aucun progrès de la connaissance
sans un émerveillement gratuit et une générosité de l’esprit.
Einstein le disait à sa façon: « La plus belle et la plus profonde
émotion que nous puissions expérimenter est la sensation
mystique. C'est la semence de toute science véritable ».
A cette disposition à l’émerveillement correspond dans l’ordre
moral la vertu d’humilité : le réel que la culture explore et enrichit
apparaît toujours plus vaste que ce que saisit l’esprit humain. En
avançant dans la contemplation de l’être, l’esprit est saisi par son
caractère inépuisable. Ainsi Newton avouait-il à la fin de sa vie :
« Il me semble que je n’ai jamais été qu’un enfant jouant sur une
plage, m’amusant à trouver ici ou là un galet plus lisse ou un
coquillage plus beau que d’ordinaire, tandis que, totalement
inconnu, s’étendait devant moi le grand océan de la vérité... »
On est loin de la vision positiviste selon laquelle seules les
procédures purement descriptives de la science, c’est-à-dire
l’organisation des faits en lois générales, ont valeur de
connaissance. Dans cette perspective, le seul critère de vérité
consiste dans l’efficacité des prédictions. Il convient de s’y arrêter
un instant puisque si le positivisme est largement remis en cause
chez les scientifiques, il n’en a pas moins contribué à la
représentation dominante de la connaissance dans la société.
14
On sait que le positivisme et son durcissement scientiste n’ont
produit aucune découverte notoire. Peu de grands noms de la
science moderne se reconnurent dans la vision d’Auguste Comte
et les prédictions de celui-ci furent largement infirmées
(ainsi lorsqu’il refusait la théorie atomique qu’il jugeait trop
métaphysique !). Pire encore, ce que le positivisme a produit dans
le grand public fut bien le contraire du but recherché, à savoir
l’effacement de la science, réduite à une somme de techniques
sans âme, hors du champ de la culture.
C’est sans doute dans les sciences humaines que le
positivisme eut le plus d’impact. Jusqu’à influer sur la naissance
de la psychanalyse qui lui est pourtant si étrangère dans son
principe (interpréter une maladie non par des causes organiques
mais par le rapport du malade à lui-même, c’est-à-dire selon des
considérations de sens plutôt que de mécanismes). On lit ainsi sous
la plume de Freud que « dès lors qu’un homme s’interroge sur le
sens et la valeur de sa vie, il est malade » 1. Une telle déclaration
résume parfaitement la misère d’une culture qui renonce à
l’interrogation sur le sens.
Or, ce renoncement est à l’œuvre dans les programmes
scolaires, contribuant efficacement au dessèchement des esprits.
Ainsi l’enseignement des Lettres fortement influencé par la
linguistique dans les programmes de français. On a voulu
privilégier l’analyse formelle, structurelle des textes, au détriment
de leur sens. Pouvait-on davantage dégoûter les élèves de la
lecture ? Car à quoi bon lire, s’il s’agit d’inventorier les figures de
style, plutôt que d’enrichir, d’affiner le sens de l’expérience
humaine ? Le propre des grands auteurs n’est-il pas de nous révéler
à nous-mêmes, de sorte que « les chefs-d’œuvre nous lisent plutôt
que nous ne les lisons » ?
On pourrait situer à ce niveau l’impact de l’inculture
religieuse chez les maîtres comme chez les élèves. Comment a-ton pu penser libérer les esprits en les sevrant des grandes
1
Freud, Lettre à Marie Bonaparte, Briefe, 1873-1939, Frankfurt am Main, 1960.
15
interrogations spirituelles portées par les religions ? Qui ne voit
par exemple la supériorité intellectuelle, artistique, philosophique
que confère l’éducation juive à ses enfants ? Comment ne pas
comprendre que la rumination des textes bibliques ou du Talmud,
la confrontation critique des interprétations, acquises dès le plus
jeune âge, constituent la meilleure formation à la sagacité
intellectuelle ? Or en serait-il de même si les questions religieuses
ne concernaient pas le sens de la destinée humaine ?
La source de la culture, c’est l’inquiétude du sens, le
saisissement d’un esprit face à sa propre énigme, entre l’angoisse
et l’émerveillement.
L’horizon de la culture
La deuxième partie de la citation du père Perrot nous ouvre
à l’horizon du savoir. Quelle est la finalité des discipline scolaires,
sinon « la visée globale de l’interrogation humaine », c’est-à-dire
la Vérité, ultime, intégrale, comme promesse de sens ? Car tout
enseignement qui se résoudrait au caractère partiel de ses résultats
ne pourrait que désespérer l’intelligence, qui vise toujours au-delà
des savoirs particuliers. Dans une lettre à son ami Bredin, le grand
Ampère confiait : « Je ne trouve que des vérités, enseigne-moi la
Vérité ».
Car les disciplines particulières n’ont d’autre valeur que
d’aiguiser le désir de la vérité, du bien, du beau... « L’homme ne
vit pas seulement de pain... » dit l’Evangile et Dostoïevski ajoute
que « seule la beauté lui est indispensable ».
On sait combien on tarit le désir de vérité d’un élève en ne
lui proposant que des savoirs « procéduraux », des recettes, etc.
Il faut donc lutter contre une approche utilitariste des études
scolaires et les fausses pédagogies de la « motivation » pour
lesquelles c’est lorsqu’un enfant comprend l’« intérêt »
d’une discipline qu’il en trouve le goût. Laissons cette logique
de Caisse d’Epargne aux rusés et préférons la logique de la vie
qui toujours donne raison au généreux plutôt qu’au calculateur.
Plus une connaissance est gratuite, plus elle s’avère féconde.
16
Ainsi, l’enseignant doit-il porter le souci de la relativité de sa
discipline, c’est-à-dire être capable de la situer par rapport aux
autres modes de connaissance, plutôt que de s’enfermer dans un
discours autosuffisant.
Relativité de son objet d’abord : chaque discipline, chaque
savoir explore l’être sous un certain rapport. La physique étudie le
monde matériel sous l’angle du mécanisme, la mathématique sous
l’angle de la relation, la philosophie sous l’angle de l’être, la poésie
sous l’angle sensible, symbolique... Relativité de sa méthode
ensuite : la méthode des sciences humaines n’est pas la méthode
expérimentale des sciences naturelles, etc. Relativité de son
niveau de « vérité » enfin, c’est-à-dire de son degré d’adéquation
au réel, de sa pénétration du réel. La « vérité historique » n’est pas
la vérité des sciences de la nature, la vérité des sciences
expérimentales n’est pas la vérité des mathématiques...
Ainsi, par delà la variété des approches spécifiques, c’est
l’unité du réel qui est visée. S’il faut distinguer les plans, il convient
de ne pas les opposer, et de veiller à les articuler. Par exemple,
l’homme de la philosophie, de la biologie, de la sociologie, de la
psychologie, des sciences humaines... est bien le même homme.
Oublier l’unité de cet objet, l’homme en l’occurrence, c’est le
sacrifier à ses réductions : n’est-ce pas la tendance lourde des
sciences humaines que de ne voir en l’homme seulement le rouage
économique, l’atome social, le sujet de conflits psychiques, etc.
De même, la nature étudiée par les sciences naturelles, la
philosophie, la théologie, est-elle une et même nature, diversement
appréhendée. Un professeur de biologie étudiant les théories
darwiniennes de l’évolution ne devrait donc pas être surpris que
ses élèves lui posent des questions situées sur d’autres plans :
philosophique, voire religieux, puisque c’est bien du même monde,
par-delà la variété des approches. C’est bien à l’enseignant
d’apprendre à distinguer les différents plans, puis de suggérer
comment on peut les articuler : « distinguer pour unir ».
Mieux, par delà la pluralité des objets (le monde, l’homme,
Dieu...), la connaissance vise la totalité du réel. L’esprit n’est à
17
demeure que quand il se meut dans l’absolu comme un Descartes
l’avait si profondément saisi. De ce point de vue, le seul objet
propre de l’intelligence est le vrai inconditionné, l’Un ou Dieu,
selon la métaphysique à laquelle on se réfère.
Souligner la relativité des disciplines, ce n’est certes pas les
disqualifier, mais au contraire les ouvrir à plus large qu’elles, à la
totalité du réel. Ainsi l’enseignant de telle matière est-il vraiment
un éveilleur s’il prépare l’esprit d’un élève à accueillir plus grand
que sa seule discipline.
Un regard chrétien sur les disciplines
profanes 2
Puisque nous sommes dans une école « à vocation
chrétienne » comme l’aimait à dire le père Perrot, je me
demanderais pour terminer ce que pourrait être une perspective
chrétienne sur l’instruction profane.
Tout d‘abord, il est de bonne théologie de souligner
l’autonomie relative des disciplines et de leurs méthodes. La
science, l’art, la culture, sont, pour une part en tout cas,
indépendantes d’une option philosophique ou métaphysique
particulière. C’est même cette émancipation de la science, de
l’art... qui en a permis la fécondité et l’essor au XVIIe siècle. C’est
lorsqu’ils ont oublié cette marge d’autonomie que les théologiens
ont mis en péril le difficile équilibre entre foi et raison qui
constitue l’un des piliers de la culture occidentale. Car la Bible n’a
pas compétence dans l’ordre des sciences naturelles, elle vise une
tout autre profondeur, le sens même de l’homme, de sa présence
au monde, de son lien à l’Absolu.
2 Ces derniers propos prolongent le cadre strict de la citation du père Perrot et
s’inspirent par ailleurs d’une conférence de Jean-Noël Dumont intitulée « Des
connaissances profanes à la connaissance de Dieu », publiée dans Xavier Dufour,
Enseigner, une œuvre spirituelle, textes de référence sur l’éducation, Parole et Silence,
2005.
18
Cependant, il faudra s’interroger jusqu’à quel point les
diverses approches du réel sont indépendantes les unes des
autres ; la science peut-elle se passer d’une philosophie de la
nature ? L’étude de la littérature ne renvoie-t-elle pas à une
anthropolgie implicite ?
Une fois cette autonomie relative des disciplines évaluée, le
chrétien pourra s’interroger sur le juste usage qu’il doit faire des
vérités naturelles dévoilées par les disciplines. Car il est de bonne
théologie aussi de s’efforcer de sanctifier tout le labeur humain,
particulièrement la culture profane.
Paradoxalement (le christianisme est par nature paradoxal),
cet usage doit être pensé selon deux directions contradictoires,
jusqu’à faire apparaître une tension constitutive du mouvement de
la connaissance.
D’un côté, il faut s’émerveiller sur ce dont l’esprit humain est
capable, son pouvoir de pénétration du réel, le génie créatif de l’art
et des civilisations. L’esprit sera ainsi conduit à ce saisissement de
gratitude devant le don que constituent le monde et ses objets, mais
plus encore devant le don de l’esprit humain lui-même, assez vaste
pour contenir l’univers. « Pensée fait la grandeur de l’homme » 3
remarque Pascal et le savant Louis De Broglie en écho souligne
que « le plus mystérieux est qu’un peu de science soit possible ».
Passant des objets les plus singuliers aux plus généraux, des
impressions éphémères aux principes universel, l’esprit s’élève par
son propre mouvement aux « questions éternelles » dont parle
Dostoïevski.
Mais en même temps, il faut constater l’inachèvement de tout
savoir naturel, et d’une certaine façon sa vanité. A quoi bon
consacrer sa vie à connaître les mystères de la création, si les
fondements derniers nos échappent sans cesse ? « J’ai mis tout
mon cœur à comprendre la sagesse et le savoir, la sottise et la folie
et j’ai compris que tout cela aussi est recherche de vent » 4 dit
3
4
Brunschvicg, 346
Ecclésiaste 1, 17
19
l’Ecclésiaste. Pire encore, que peut valoir une connaissance qui,
aussi bien intentionnée soit-elle, ne cesse d’ouvrir des chemins
aux pires barbaries ? L’épreuve moderne du mal, d’Auschwitz
au Goulag, est la pierre de touche de tout rationalisme. Dans son
obsession d’autonomie, la raison raisonnante tourne vite au délire
idéologique. Face à ce naufrage, l’esprit est inéluctablement
conduit à une crise.
Mais cette crise peut être salutaire, qui conduit la raison au
seuil d’une conversion, de l’intelligence discursive à l’intelligence
du cœur, de « l’ordre de l’esprit à celui de la charité ». Ainsi
Pascal, dédaignant les mathématiques où il excellait, répond-il aux
invitations de Pierre de Fermat : « pour la géométrie je ne ferai
pas un pas de plus. »5 Serait-ce que la philosophie est seule digne
d’estime ? « Se moquer de la philosophie, c’est vraiment
philosopher » rétorque Pascal, ramenant celle-ci à sa vérité
dernière : révéler au savoir son propre néant : « La dernière
démarche de la raison est de reconnaître qu'il y a une infinité
de choses qui la surpassent ; elle n'est que faible, si elle ne va
pas jusqu'à connaître cela. » 6
Aussi la vraie tâche d’une vie n’est-elle pas la connaissance,
mais la charité, c’est-à-dire la réconciliation de la vérité et de
l’amour. « Il faut que l’amour procède de la vérité pour que la
connaissance fructifie en amour » 7 écrivait Maritain. Toute
connaissance doit concourir à ce but, sous peine de sombrer dans
l’orgueil et le désespoir. Combien d’intelligences vives, pénétrantes,
se sont-elles enlisées dans les sables du cynisme et de la
désillusion, faute de n’avoir pu accéder à cette « intelligence du
cœur » qui est bien le cœur de l’intelligence ?
Ce que le grand Bossuet avait jadis résumé en une formule
définitive : « Malheur à la science qui ne se tourne pas à aimer. »
XAVIER DUFOUR
Œuvres complètes, Lafuma, Seuil, 1963, p. 282
Brunschvicg, 267
7 De l’esprit d’oraison, Parole et Silence, reéd. 1998, p.17
5
6
Pour une
CULTURE
Extrait d’une conférence prononcée
Dans la construction de la culture, l’école a une fonction
limitée mais nécessaire. Elle est travaillée par la querelle
récurrente sur la distinction entre éducation, enseignement,
instruction. Vouloir limiter la fonction de l’école à l’enseignement
ou à l’instruction, c’est oublier que l’un et l’autre se produisent
toujours à l’intérieur d’un processus de culture ou d’éducation.
Mais quelle part de culture revient à l’école, dans la mesure où
elle ne saurait être le seul lieu culturel ? Dans la société moderne,
certains aspects essentiels de l’héritage culturel ne peuvent être
transmis autrement que par la médiation de l’institution scolaire.
La raison en est que beaucoup de transmissions spontanées ne se
font plus, parce que les formes culturelles et sociales sont
différenciées et également parce que celles-ci supposent des
modalités, de la durée et d’autres conditions sociales que l’école est
le seul média à pouvoir réaliser. Même si la technologie est un
aspect de la culture générale, le but de l’école n’est pas et n’a
jamais été de former directement à un métier. La culture générale
a pour but de préparer notamment à l’initiative sociale, culturelle
et économique. Contrairement à une idée répandue, l’unique
finalité de l’école n’est pas l’individu ; institution médiatrice,
l’école est bipolaire, elle a pour finalité aussi bien l’individu que
la société. Le choix de l’un des pôles à l’exclusion de l’autre le
détruit lui-même et déstructure la finalité de l’école.
Une version plus complète de ce texte a été publiée dans la revue La Pensée en
2009 ; il reprend divers paragraphes du chap. 2 « Sens d’une culture générale à
l’école» de l’ouvrage Eloge de la culture scolaire publié par Guy COQ aux éditions
Le Félin en 2003. Du même auteur, et plus récent : Dix propositions pour une école
juste, DDB, 2005
1
21
SCOLAIRE
le 16 novembre 2009 à La Solitude 1
Culture scolaire et repères
d’un monde commun
A travers la scolarisation, une société s’efforce de transmettre
aux jeunes le meilleur de la culture héritée, ou encore ce qui a
tellement compté dans la durée de cette société que cela l’identifie
ou tient le rôle d’élément quasi fondateur. L’école n’est pas seule
à intervenir sur ce plan, mais la durée de son action, son poids
institutionnel la dotent d’une importance décisive. Du coup, la
culture scolaire fait partie des procédures d’élaboration et de
reconstruction permanente de la mémoire commune, de l’identité
sociale, à travers la réinterprétation du passé.
Il y a donc urgence à réexaminer ce qui fait l’essentiel de la
culture scolaire. Il y a certes les savoirs. Mais l’élucidation des
points de repère communs, la reprise et la reconstruction d’une
mémoire commune, les relations à réinventer avec des œuvres et
des monuments, des événements qui ont donné sens à une certaine
forme d’humanité sont là des aspects également décisifs de la
culture scolaire. Par le travail sur la mémoire qui lui appartient,
l’école arrache l’enfant à la myopie de l’actualité immédiate et
construit en lui la capacité du futur, c’est-à-dire du vrai temps qui
appartient à la jeunesse.
Devenir citoyen, les discours dominants l’oublient, c’est
devenir capable de se représenter comme acteur possible d’une
histoire collective. La culture scolaire doit aussi se préoccuper
de redécouvrir les valeurs communes. Dans une société
démocratique, celles-ci ne sont jamais unanimes. Mais là où
22
s’éclipse la notion même de valeurs communes, les actions ne se
réfèrent plus qu’à des critères arbitraires et en dernier ressort à la
force, voire à l’arbitrage de la violence. Or, à travers cette culture
scolaire s’élabore le sens du vivre ensemble. Ce dernier souci était
clairement présent dans la grande tradition de l’école républicaine,
cette tradition qui suscite le mépris de certains beaux esprits
auxquels on peut surtout reprocher de détruire sans remplacer et
de créer ainsi un vide redoutable du sens du vivre ensemble.
Cette fonction de la mémoire est prise en charge par
l’enseignement historique, lequel ne se résume pas à une initiation
scientifique. Elle traverse la plupart des disciplines. La culture
scolaire n’est pas pour autant et uniquement un conservatoire
culturel, un lieu de patrimoine. Son œuvre n’est pas simplement
de répéter, de révérer, de reproduire des éléments de la culture
passée ; mais plutôt d’ouvrir la conscience actuelle et parcellaire
de l’homme d’aujourd’hui à la vision du devenir, afin de le rendre
capable d’avenir. A des êtres spontanément plongés dans
l’immédiateté d’une vie sociale vouée à l’apparent éparpillement
des jours, la culture scolaire est censée apporter la distance du
regard capable de réflexion. Voilà pourquoi il importe que l’espace
scolaire soit libéré des injonctions de l’actualité.
Les composantes d’une culture scolaire
Dans cet héritage culturel, il y a des œuvres, notamment
littéraires. On ne prônera pas l’admiration de commande ou le
ressassement plein d’ennui qui composa parfois toute la mémoire
de la littérature à l’école. Cependant, l’école a un rôle décisif dans
la constitution d’un espace culturel et social commun ; certains
récits, des textes, des poèmes et des fables apprises en commun
dès l’enfance ont une fonction symbolique non négligeable dans
la formation de l’appartenance à un même monde humain. De
plus, fréquenter un certain nombre d’œuvres majeures, c’est, au
sens fort du mot, faire ses humanités. Ces textes et ces œuvres,
23
où d’autres êtres ont su mener le plus loin possible leur quête
d’humanité, initient l’enfant à l’acte de conquérir sa propre
humanité.
Sans influences assumées, il n’y a point d’autonomie
culturelle. Les plus grands créateurs sont souvent tissés des fils
d’influences profondes. L’idée d’opposer liberté et influence met en
péril la possibilité même d’une culture. Comme nourriture de
l’esprit, l’influence, loin d’être un conditionnement qui aliène de
soi, lui donne une force de rebondissement vers sa propre
originalité. La vraie liberté n’est pas l’ennemie de tout lien, n’est
pas systématiquement dé-liaison , selon la belle formule de Martin
Buber 2.
L’école se trouve chargée d’assurer au plus grand nombre,
non seulement la maîtrise d’opérations essentielles à l’exercice de
l’intelligence, mais ce qui s’appelle une culture générale. Cette
culture générale doit être pensée avant les grandes spécialisations
et en vue de les préparer. Sans elle, l’école perdrait l’idée de sa
finalité culturelle. Cette culture générale correspond à ce qui est
nécessaire à tous, sans qu’on puisse en faire un bagage censément
garanti par un diplôme.
La culture scientifique et la raison
Quelle culture scientifique à l’école ? Une part importante de
la culture de la raison peut être acquise dans les sciences. Pardelà la maîtrise des résultats, des sciences faites, la culture
scientifique devrait donner le sens des limites du pouvoir des
théories, et enseigner ainsi la résistance au dogmatisme. Par le
sens de l’expérimentation, elle éduquerait la raison à rechercher
l’épreuve des faits, sans pour autant s’illusionner sur leur évidence.
De plus, on devrait attendre de la fréquentation des démarches
scientifiques, de la méditation sur la portée des résultats, des
2
Martin Buber, La relation, âme de l’éducation ?, Parole et Silence, 2002.
24
leçons précieuses sur la vie de la raison. Car si toute méthodologie
scientifique procure une image de la rationalité, la découverte
scientifique est liée à des conditions culturelles qui dépassent la
maîtrise des démarches déjà formalisées. Même si demeure la
radicale différence de l’art et de la science, la découverte n’est pas
sans quelques ressemblances avec la création. Enfin, la capacité
humaine de raison ne s’épuise pas dans la somme des méthodes
élaborées par les sciences.
La culture scolaire est une éducation de la raison et cela ne
se limite pas à initier l’élève aux recherches scientifiques. La quête
du sens est aussi, pour une part, affaire de rationalité. Croyances
et valeurs ne sont pas totalement étrangères aux démarches
rationnelles, et il n’y a pas un simple rapport d’exclusion entre sens
et raison. Certes, la quête du sens requiert des modes de pensée
impliquant la sensibilité, l’imagination, des actes d’évaluation, bref
elle recourt à des formes symboliques et à des actes de pensée
fondés sur des options de l’ordre d’une foi. Une culture scientifique
renouvelée, dans une culture générale plus consciente de sa
généralité, reconnaîtrait que la rationalité ne saurait être identifiée
dans une forme définitive.
Culture générale : l’universel
et le particulier
La culture générale devrait inclure la diversité des
dimensions de la culture d’une société. Cet impératif de n’exclure
aucune dimension justifie l’idée qu’une culture scolaire bien
construite passe par la pluralité des disciplines scolaires. Cellesci ne méritent pas l’opprobre dont les accablent trop d’écrits sur
l’école. Elles nous arrivent d’une tradition culturelle de l’école qui
n’est pas sans valeur et qui s’identifie largement à l’enseignement
secondaire.
Nul ne peut échapper à l’exigence de valoriser sa culture.
Reconnaître la dignité des autres cultures est une exigence, mais
25
en même temps, il m’est impossible d’être enraciné dans une
culture si je juge que tout se vaut, que tout est arbitraire et
contingent. Par conséquent, l’accès au sens de l’altérité dans la
diversité des cultures est une épreuve. Je suis conduit, dans le
domaine culturel aussi, à poser que l’accueil de l’autre, la capacité
de le reconnaître comme tel supposent de ne pas se haïr soi-même.
De plus, le respect de l’autre culture ne saurait aller jusqu’à
approuver n’importe quel traitement infligé à l’humain simplement
parce qu’on doit valoriser toute différence.
Les tris dans les héritages
La culture scolaire trie, soit, mais quels critères faire
intervenir dans ce choix ? Dans le choix des évènements dignes
d’être en bonne place dans la mémoire, le critère de la marque sur
le devenir commun est fiable. En ce qui concerne les œuvres, on
peut se référer à certaines qualités, et notamment à leur capacité
constatée de pouvoir être un apport à la formation d’une nouvelle
humanité. Le critère peut paraître subjectif, cependant il y a des
œuvres qui en plus de ou à travers leurs qualités esthétiques aident
à poser la question de l’être même de l’homme. Ainsi, la
fréquentation d’œuvres de longue mémoire me met en contact avec
des cheminements grâce auxquels d’autres humanités se sont
construites. Si j’accède à l’expression la plus forte de l’humanité de
l’autre, à d’autres humanités, parfois anciennes, cela peut m’initier
à la construction en moi-même de l’humanité la meilleure. Mais on
est ici au-delà d’une pratique du modèle, comme si l’imitation
suffisait. De même, cette fréquentation des œuvres de l’héritage
n’est en rien le culte du patrimoine. Cette mémoire est créatrice,
et la relation est vive.
La grande question serait de restaurer l’idée même de culture
générale. On le sait, cette notion est pratiquement abandonnée
dans l’école, signe d’un temps peu propice à la culture. La langue
commune parle des « contenus », elle les sépare des méthodes,
26
parce qu’il y aurait des spécialistes des méthodes dégagées de tout
contenu. La logomachie sur les « référentiels » qui tend à imposer
sa dictature dans les institutions de formation des maîtres s’inspire
de cette idéologie anti-culturelle. Car lorsque la rupture est
consommée entre contenus et méthodes, ce qui disparaît, c’est la
notion de culture, liée à des pratiques. La vogue interdisciplinaire
ou transdisciplinaire s’accompagna d’un recul dans la rigueur
intellectuelle.
Cette réflexion vise à oser repenser l’institution et la culture
scolaire 3. L’aveuglement sur la société démocratique a conduit
dans la seconde moitié du XXe siècle à un grave déséquilibre
dans les impulsions politiques. Ceux qui disent : le collège unique
a des problèmes parce qu’il n’est pas encore suffisamment unique
oublient que ce « plus » impliquerait un pouvoir bureaucratique de
l’institution et de ses dirigeants que la société de liberté ne voudra
pas accepter ! Leur utopie a un coût politique insupportable. En
pratique, d’ores et déjà un certain style imprimé aux politiques
de démocratisation s’est traduit par un recul de l’égalité dans
l’école, un recul de la participation de l’école au progrès de la
justice sociale. Tel est le bilan d’un égalitarisme pervertissant la
logique égalitaire elle-même. La conséquence s’impose : il est
temps d’assumer clairement une profonde réorientation des
politiques éducatives, dans le sens d’une recherche de la justice
scolaire, grâce à un équilibrage des deux logiques, égalitaire et
élitaire.
Sur les circonstances de la destruction de la culture générale, on se reportera
à deux livres récents : Nathalie Bulle, L’Ecole et son double, Hermann, 2009 ;
Marie-Claire Blais, Marcel Gauchet, Dominique Ottavi, Conditions de l’éducation,
Stock, 2008.
3
27
En effet, la démocratie développe dans la société des
processus qui menacent à terme la survie de la démocratie ellemême, telle la désinstitutionalisation de l’école. L’école souffre
d’une tendance lourde de la société actuelle à privilégier le
présent, l’instantanéité, à traiter toute prise en compte de la
durée comme inutile et négative. Or il n’y a pas de culture
véritable sans valorisation d’une culture héritée. Ces remarques
devraient conduire, à rebours des politiques d’éducation, prises
dans le piège des réductions budgétaires illégitimes, à retrouver
les essentielles finalités de l’école : travailler à ce que la
nouvelle génération ait les bases culturelles dont elle aura
besoin pour accroître la qualité de la civilisation et non pour la
détruire GUY COQ 4
4 Agrégé de philosophie, ancien professeur associé à l’IUFM de Versailles, auteur
de plusieurs ouvrages sur l’éducation et la laïcité, président de l’association des Amis
d’Emmanuel Mounier, membre de la rédaction d’Esprit.
L’ÉNIGME
DU TRIPTYQUE
DE LA TOUR-DU-PIN
LES
YEUX
FERTI
LES
Le triptyque, panneaux fermés :
à gauche, le Christ devant Pilate,
à droite, saint Jérôme
31
Et voici un homme nommé Joseph, membre
du Conseil, homme droit et juste. Celui-là n’avait
pas donné son assentiment au dessein ni à l’acte
des autres. Il était d’Arimathie, ville juive, et
il attendait le Royaume de Dieu. Il alla trouver Pilate
et réclama le corps de Jésus.
Il le descendit, le roula dans un linceul et le mit
dans une tombe taillée dans le roc, où personne
n’avait encore été placé. C’était le jour de
la Préparation, et le jour commençait à poindre.
EVANGILE SELON SAINT JEAN, 23 V. 30-32
Une surprise attend le curieux qui pénètre dans l’église néogothique de La Tour-du-Pin : un imposant tableau du XVIe siècle
formé de trois panneaux de bois peints. Ce triptyque étonne
d’abord par sa monumentalité : les trois panneaux ouverts
dépassent 3,6 m de longueur, pour une hauteur d’environ 1,7 m.
L’œuvre interpelle aussi par sa rareté dans le contexte régional :
elle est datée sur le cadre de 1541-1542 et peu d’églises du NordIsère ont conservé des peintures aussi anciennes. Nous allons tout
d’abord décrire ce triptyque, puis nous essaierons d’émettre
quelques hypothèses sur sa provenance et sa fonction.
Les trois panneaux sont peints sur les deux faces, définissant
ainsi six scènes. Le panneau central est surmonté d’une corniche.
L’encadrement est décoré de grotesques, c’est-à-dire de structures
architecturales fantaisistes ou de figures extravagantes disposées
verticalement. Le mot « grotesque » provient en fait du mot
« grotte », et on écrivait d’ailleurs à l’origine « grottesque ». En
effet, à la Renaissance, se manifeste un grand intérêt pour
l’Antiquité qui amène la redécouverte à Rome du palais de
l’empereur Néron, la Maison dorée. Néron était quelque peu
dérangé et fit donc décorer son palais de ces formes extravagantes
32
qui plurent beaucoup lorsqu’on les redécouvrit. Comme cette
Maison dorée avait été retrouvée sous le niveau du sol, lors de
fouilles, on crut qu’elle avait été réalisée dans des grottes, d’où le
terme de « grottesques ». Ce nom est ensuite devenu un adjectif,
synonyme de « bizarre ». Ces grotesques cachent la date de l’œuvre.
Parmi les six scènes représentées, quatre sont des épisodes de
la Passion du Christ. La première dans l’ordre chronologique est
visible à gauche du spectateur lorsque le triptyque est fermé. On
y voit Ponce Pilate désigner Jésus devant un arc en plein cintre ;
le gouverneur prononce certainement les mots Ecce homo (Voici
l’homme), en demandant aux Juifs s’ils veulent vraiment le faire
crucifier. La scène est surmontée d’un oculus, terme latin signifiant
« œil », et assurément cette fenêtre circulaire symbolise l’œil de
Dieu qui assiste à la condamnation de son fils. Tout oppose le
Christ et Pilate : l’un est presque nu et entravé, l’autre porte les
vêtements correspondant à sa charge. Mais si on y regarde de plus
près, on constate que ces vêtements sont représentés en grisaille
et que le Christ porte une auréole réalisée à la feuille d’or ; de plus,
le sceptre de Pilate est un simple bâton alors que Jésus tient une
véritable tige portant des feuilles. Tout porte à croire que la royauté
de Pilate est illusoire et stérile : c’est bien le Christ qui est le
véritable roi des Juifs.
Les trois autres scènes sont visibles une fois le triptyque
ouvert : le Portement de croix, la Déposition et la Lamentation.
Elles ne se succèdent pas dans un ordre chronologique : l’artiste a
réservé le panneau central, le plus grand, à la Lamentation.
L’ensemble des trois scènes est unifié par le paysage comprenant
la ville de Jérusalem, et par leurs protagonistes : le Christ, bien
sûr, mais aussi : Marie sa mère ; son disciple préféré, le jeune saint
Jean, représenté imberbe et vêtu de rouge ; Marie Madeleine,
prostituée repentie reconnaissable par son vase empli du parfum
dont elle avait oint les pieds du Christ qu’elle avait ensuite essuyés
avec ses longs cheveux − geste qu’elle réitère sur le cadavre de
Jésus.
33
On remarque, notamment dans le Portement de croix, que le
peintre a eu le souci d’actualiser l’architecture des fortifications et
les vêtements des personnages qui n’ont évidemment rien à voir
avec ceux du Ier siècle de notre ère. Cela ne nous surprend pas,
mais comment réagirions-nous aujourd’hui si on représentait le
Christ emmené par des C.R.S. ?!
D’autres personnages apparaissent sur certaines des scènes.
Ainsi le Portement de croix fait intervenir, sur la droite, un homme
qui pourrait être Simon de Cyrène, réquisitionné afin d’aider Jésus
à porter sa croix. La composition du panneau central est calée
latéralement par deux personnages plus âgés : à gauche, Joseph
d’Arimathie qui a offert un tombeau, que l’on voit derrière lui, pour
y inhumer Jésus ; à droite, Nicodème qui apporta des aromates
pour embaumer le corps. Marie est aussi accompagnée de deux
autres femmes, toutes appelées Marie d’ailleurs, ce qui engendra
une certaine confusion, y compris avec une quatrième Marie,
Marie-Madeleine dont nous venons de parler ! On considère que
ce sont deux sœurs de la mère de Jésus, Marie Salomé et Marie
Clopas. Elles sont bien connues des provençaux puisque le
village des Saintes-Mariesde-la-Mer, où selon la légende
elles débarquèrent, leur doit
son nom.
La Déposition de croix
est une citation d’une gravure
de Marcantonio Raimondi 1,
d’après un dessin perdu de
son maître Raphaël. Ce
procédé est assez courant et
la gravure permettait aux
idées des grands maîtres de
circuler et d’irriguer d’autres
œuvres. Le Maître de La
1
Tour-du-Pin a resserré la
34
composition, mais celle-ci reste fondée sur la superposition d’un
triangle et rectangle, ce qui donne une impression de lourdeur et
de pesanteur bien en accord avec le sujet représenté : il est très
difficile de déclouer et de descendre un cadavre de crucifié.
La composition du panneau central s’appuie elle aussi sur
des figures géométriques mais est un peu plus complexe. Le
montant vertical de la croix est l’axe de symétrie de la scène, en
particulier pour les personnages de Joseph d’Arimathie et de
Nicodème d’une part, et d’autre part pour les inclinaisons des têtes
des quatre personnages qui se lamentent au pied de la croix. Cet
axe correspond à la hauteur d’un triangle équilatéral dont la base
est la largeur inférieure du panneau et le sommet le haut de la croix
où est fixé l’écriteau avec l’inscription ironique I.N.R.I. (Jésus le
Nazaréen Roi des Juifs). Cette inscription rappelle le prétexte qui
fut utilisé par les grands prêtres du Temple afin de condamner
Jésus ; le véritable motif est certainement que Jésus commençait
à « déranger » trop violemment ces prêtres dans leurs privilèges,
comme le montra l’épisode où il chassa violemment les marchands
du Temple. Le cercle inscrit dans ce triangle enferme les familiers
de Jésus, perdus dans leur douleur infinie, ainsi que les
instruments de la Passion (tenailles, marteau, clous, couronne
d’épines) qui forment une tragique nature morte au premier plan.
Le geste émouvant de Marie qui retient de sa main gauche le bras
gauche inerte de son fils est judicieusement souligné par sa
position au centre du cercle. Enfin, le grand triangle résulte de
l’imbrication de quatre petits triangles identiques ; deux arcs de
cercle, centrés sur les sommets de la base du triangle, cantonnent
à l’extérieur de celui-ci les figures de Nicodème et Joseph
d’Arimathie. Les saintes femmes et Jean ne songent qu’à pleurer
leur disparu alors que pour Nicodème et Joseph d’Arimathie, la
tristesse le dispute à la nécessité d’inhumer rapidement le corps
car le soleil se couche et le Sabbat va bientôt commencer, pendant
lequel il ne sera plus possible de manipuler le cadavre. Ce double
mouvement contradictoire des uns et des autres est indiqué aussi
35
36
par le fait que le cadavre est déjà dans son linceul, mais que l’on
continue à se lamenter sur lui.
Nous avons donc affaire à un artiste fort attentif aux coutumes
juives, et d’autres détails viennent le confirmer. Nicodème et
Joseph d’Arimathie portent sur l’épaule le talith, châle de prière
simplement orné de quelques bandes sombres (et normalement de
franges, invisibles ici). Dans le Portement de croix, un homme
souffle dans un shofar, un instrument à vent fait d’une corne de
bélier, qui sert notamment à annoncer la fin du jeûne, le jour du
Yom Kippour (ou Grand Pardon). On remarque aussi les turbans et
autres chapeaux de formes curieuses et de couleurs vives qui
évoquent les couvre-chefs (Judenhut) que les Juifs étaient souvent
obligés de porter.
Un cinquième panneau, à droite de celui qui contemple le
triptyque fermé, représente saint Jérôme, qui vécut à la fin du IVe
et au début du Ve siècle. Dans sa Légende dorée, qui fut un bestseller à partir du XIIIe siècle, le dominicain italien Jacques de
Voragine compile un certain nombre de récits de vies de saints
plus anciens ; voici ce qu’il nous apprend concernant Jérôme : Dès
sa jeunesse, Jérôme vint à Rome, et s’y instruisit pleinement dans les
lettres grecques, latines et hébraïques. Mais la simplicité du langage
dans les livres des prophètes l’offusqua si fort qu’il ne voulut plus lire
que Cicéron et Platon. Or, vers le milieu du Carême, il fut pris d’une
fièvre subite qui faillit le tuer. Et comme déjà l’on préparait ses
funérailles, il se vit conduit devant le tribunal de Dieu. Interrogé sur
sa condition, il répondit qu’il était chrétien. Le Juge rétorqua : «Tu
mens, tu n’es pas chrétien, mais cicéronien !» Après quoi, il le
condamna à être battu. Il revint à lui, dans son lit ; et il vit qu’il
était tout en larmes, et les épaules encore bleues des coups reçus par
lui au tribunal céleste. Aussi mit-il depuis lors autant de zèle à lire
les livres sacrés qu’il en avait mis auparavant à lire les livres
profanes. A l’âge de vingt-neuf ans, Jérôme fut créé cardinal. Il se
fit ermite au désert où il s’infligea diverses pénitences pendant quatre
37
ans, puis il s’installa dans un monastère. Un soir, pendant qu’il était
assis avec ses frères pour écouter la lecture sainte, voici qu’un lion
entra en boitant dans le monastère. Aussitôt, tous les frères
s’enfuirent ; seul Jérôme alla au-devant de lui comme au devant
d’un hôte et, le lion lui ayant montré sa patte blessée, il appela des
frères et leur ordonna de laver sa plaie et d’en prendre soin. Le lion,
guéri, habita parmi les frères comme un animal domestique. Sur
quoi, Jérôme, comprenant que ce lion leur avait été envoyé plus
encore pour leur utilité que pour la guérison de sa patte, prit conseil
avec ses frères et ordonna au lion de conduire au pâturage et de
garder un âne qu’ils avaient et qui leur servait à porter du bois. Et
ainsi fut fait. Le lion se comportait en berger parfait, toujours prêt à
protéger l’âne, et ne manquant jamais de le ramener au monastère
à l’heure des repas. Un jour, comme le lion s’était endormi, des
marchands avec des chameaux, qui passaient par là, virent un âne
seul et s’empressèrent de le voler. Quand le lion, éveillé, s’aperçut de
l’absence de son compagnon, il le chercha partout en rugissant ;
puis, n’ayant pu le retrouver, il revint tristement à la porte du
monastère et, par honte, n’osa pas entrer. Or les frères, voyant qu’il
arrivait en retard et sans l’âne, supposèrent que, forcé par la faim,
il l’avait mangé. Ils refusèrent donc de lui donner sa ration et lui
dirent : «Va chercher le reste de l’âne et fais-en ton dîner !»
Cependant, comme ils hésitaient à croire qu’il se fût rendu coupable
d’un tel acte, ils allèrent au pâturage en quête de quelque indice ;
n’ayant rien trouvé, ils revinrent raconter la chose à Jérôme. Alors,
de l’avis de celui-ci, ils confièrent au lion le travail de l’âne, et
l’employèrent à porter leur bois, tâche dont la bête s’acquittait avec
une patience exemplaire. Mais un jour, sa tâche achevée, le voilà qui
se met à courir à travers les champs, et voilà qu’il aperçoit de loin des
marchands avec des chameaux et un âne s’avançant à leur tête pour
les guider, selon l’usage du pays. Aussitôt le lion, se jetant sur la
caravane avec un rugissement terrible, força les marchands à
prendre la fuite. Le lion ramena l’âne au monastère, et fut bientôt
suivi des marchands venus demander pardon pour leur vol.
38
Le titre Légende dorée ne doit pas prêter à confusion : quoique
certains aspects du texte nous paraissent aujourd’hui effectivement
légendaires ou symboliques (ainsi, le lion domestiqué pourrait
évoquer la victoire de Jérôme sur les hérétiques), ce titre dérive
du latin legere signifiant lire, et désigne en fait des récits qui étaient
à considérer comme authentiques, une « parole d’or ». Certains
éléments sont effectivement exacts : ainsi, Jérôme est l’auteur de
la Vulgate, première traduction de la Bible en langue « vulgaire »,
à savoir en latin. On retrouve ici Jérôme en train de se mortifier
avec une pierre, le lion à ses pieds, ses vêtements de cardinal
déposés (en réalité, cette dignité ecclésiastique n’existait pas
encore à l’époque de Jérôme), le monastère à l’arrière-plan avec
l’épisode de l’âne. Le crâne évoque le Golgotha, « lieu du crâne »,
39
où le Christ fut crucifié. Les éléments liés à la vie terrestre sont
peints en grisaille, dans une zone inférieure délimitée par une
oblique : le crâne, les vêtements ecclésiastiques, le lion et le livre
dont on peut donc penser qu’il s’agit d’un des ouvrages païens
que Jérôme aimait lire et non de sa traduction de la Bible. Dans
la partie supérieure du panneau sont représentés par contre
les éléments évocateurs d’une transcendance : le crucifix, le
monastère, le ciel.
Reste à examiner le revers du panneau central, peint à la
détrempe, alors que les autres scènes sont peintes à l’huile. On y
voit (ci-dessus) un transi, c’est-à-dire un cadavre en décomposition,
enveloppé dans un linceul, prononcer ces mots inscrits sur un
phylactère : O IESU FILI DAVID MISERE NOBIS. (O Jésus fils
de David, prends pitié de nous). Ce cadavre est mis en parallèle
avec celui du Christ qui se situe de l’autre côté du panneau central.
Ainsi se trouve exprimé l’espoir de ressusciter, comme Jésus. Cette
figure macabre, sorte de vanité ou de memento mori (souviens-toi
que tu vas mourir ), est courante à cette époque où la Mort est une
réalité prégnante. On a même suggéré qu’ici aussi le Maître de La
Tour-du-Pin avait représenté sa propre fin, mais cela ne semble
pas compatible avec le NOBIS (nous) du phylactère.
40
Mais justement, ce Maître de La Tour-du-Pin, qui peut-il
être ? Une tradition locale suggère qu’il s’agit d’un peintre, tombé
malade lors de son retour d’Italie ; en remerciement des soins reçus
à l’hôpital de La Tour-du-Pin, il lui aurait offert cette œuvre. Cette
histoire est peut-être un peu trop belle pour être vraie, d’autant
qu’un tel triptyque ne peut être l’œuvre d’un homme seul : la
préparation des menuiseries, des couleurs... a certainement
nécessité tout un atelier. Néanmoins, l’historien d’art Jan Siesling
en a fait la matière d’un court et très beau roman, Le Maître de La
Tour-du-Pin, en y mêlant une histoire d’amour.
Il est peu probable qu’il s’agisse d’une commande privée car
aucun donateur n’est représenté. La richesse des matériaux
employés est en tout cas éloquente : la feuille d’or pour les
auréoles, le bleu outremer pour le manteau de la Vierge... Ce bleu
est ainsi dénommé car, contrairement à l’azurite d’Allemagne plus
économique, il vient d’outre les mers, plus précisément d’Inde, et
est fabriqué à partir du lapis-lazuli. Cette richesse et la présence
de saint Jérôme suggèrent une commande par des membres du
clergé, par exemple pour une chapelle ou un couvent dédié à ce
saint. Or il y eut justement un couvent Saint-Jérôme des Récollets
(des Franciscains réformés) à La Tour-du-Pin, mais il ne fut fondé
qu’en 1620...
Des noms de peintres furent même cités, des élèves de Dürer
tels que George Pencz ou Jacob Binck, mais il est peu probable
qu’il s’agisse d’un tel maître car, quoique très doué, notre peintre
mystérieux n’est pas exempt de tout reproche : ainsi, il utilise
visiblement des cartons identiques pour différents visages, il a
quelques difficultés dans la représentation de certaines figures en
mouvement (voyez l’homme à droite du Portement de Croix : le
peintre veut nous montrer qu’à la fois il aide le Christ et avance,
mais il nous semble finalement qu’il effectue un pas de danse). Il
doit donc s’agir d’un « petit maître » de réputation locale, mais de
quelle région ? Cet artiste semble avoir regardé de près l’art italien
de son époque, y compris la tendance au maniérisme toute récente
41
2
comme le montre la comparaison avec la Déposition de Pontormo 2.
Mais le caractère mobile (et non fixe) des panneaux, la présence de
grisailles au dos de deux d’entre eux, l’étagement des figures du
Portement de Croix, certains détails vestimentaires (les brocarts)
amènent à penser qu’il vit au nord des Alpes. Il n’a toutefois pas
vraiment le goût du détail propre aux Flamands (les quelques
figures minuscules dans les arrière-plans ne sont pas très
convaincantes) et ses architectures semblent tout à fait
« françaises » (voyez ainsi le monastère de Jérôme). Ce peintre
ne serait donc ni flamand, ni d’origine germanique.
42
3
4
Or on peut admirer, dans la co-cathédrale Notre-Dame de Bourgen-Bresse, deux volets d’un triptyque incomplet offert par un
notable local et représentant un Portement de Croix 3 et une Mise
au Tombeau 4. On y constate de nombreuses similitudes avec notre
triptyque : les architectures, les armes des soldats, le tombeau
creusé dans le roc. Dans les deux œuvres, l’artiste a le souci
d’impliquer le spectateur que regardent en retour plusieurs des
personnages peints. C’est le cas de l’homme à droite du Portement
de Croix de Bourg, qui a la même démarche curieuse que son
camarade de La Tour-du-Pin, mais ici l’artiste a en partie contourné
la difficulté en cachant ses pieds ! Le peintre de Bourg s’inspire lui
aussi pour sa Mise au Tombeau d’un dessin perdu de Raphaël,
connu notamment par une gravure d’Enea Vico, qui inspira un
autre triptyque, lui aussi décoré de grotesques et aujourd’hui
visible dans l’ancienne apothicairerie de Châtillon-sur-Chalaronne.
Mais il ne peut s’empêcher de rajouter un talith sur l’épaule de
Nicodème, détail absent de la gravure et qui le trahit peut-être...
Le maître de Bourg reprend aussi pour le Portement de Croix une
célèbre gravure de Martin Schongauer. Nous pencherions donc
pour une origine bressane ou bourguignonne de l’œuvre de La Tourdu-Pin.
Reste à savoir quelle a pu être le rôle liturgique de ce triptyque.
Nous avons du mal à croire qu’il ait pu être destiné à un hôpital. En
effet, il n’offre guère de vision consolante pour les malades.
43
Le triptyque de l’ancienne pharmacie de Châtillon-surChalaronne présente, lui, la résurrection du Christ et un Noli me
tangere (apparition du Ressuscité à Marie-Madeleine). Que l’on
pense au célèbre polyptyque d’Issenheim où Matthias Grünewald ne
se contente pas de dépeindre les atroces souffrances du Christ mais
nous réconforte en présentant aussi sa Résurrection glorieuse, ou
au retable des hospices de Beaune. L’œuvre anticipe en tout cas les
directives de la Contre-Réforme qui seront de plus en plus explicites
à partir du Conseil de Trente (1545-1563). En effet, un tel retable
est destiné à être placé derrière l’autel (retro tabula signifie en
latin : derrière la table d’autel). Pour les calvinistes, la communion
n’a qu’une valeur symbolique de commémoration du sacrifice du
Christ alors que, pour les catholiques, c’est bien le corps même du
Sauveur qui est offert sur l’autel, ce corps meurtri représenté au
centre du triptyque. L’œuvre vise aussi à impliquer le spectateur, à
susciter l’émotion, et nous sommes là dans le droit fil des consignes
qui seront données aux artistes afin d’abandonner un style par trop
froid et abstrait, ou au contraire excessivement maniériste.
Mais on peut aller plus loin encore dans l’interprétation du
rôle de ce retable en remarquant la place essentielle qui y est
réservée au linceul du Christ. Sans doute est-ce là une preuve du
rayonnement de la fameuse relique de Chambéry. En effet, un peu
plus loin sur la route de l’Italie, à Chambéry, se trouvait une relique
que l’on tenait pour le véritable suaire du Christ. Ce tissu, qui
conserve l’empreinte grandeur nature d’un corps humain, était
conservé par les ducs de Savoie depuis 1502 dans la SainteChapelle de leur château. François Ier,en 1516, venant se recueillir
devant ce suaire, passera à La Tour-du-Pin ; sa mère Louise de
Savoie note ainsi dans son journal : « Le 28 de may 1516, environ
cinq heures après midi, mon fils partit de Lyon, pour aller à pié au
saint Suaire à Chambery. Le septième jour de juin 1516, ma fille
Claude, à la Tour-Dupin, en Dauphiné, commença à sentir en son
ventre le premier mouvement de ma fille Charlotte. »
En 1532, un incendie ravage la chapelle du château de
44
Chambéry ; on réussit à en sortir in extremis le suaire, mais il est
endommagé par l’argent fondu de la châsse qui le renfermait et
doit être réparé par les Clarisses de la ville. Certains croient même
que la relique a brûlé ; ainsi Rabelais écrit dans l’épisode des
guerres picrocholines de Gargantua : « Les uns se vouaient à Saint
Jacques, les autres au saint suaire de Chambéry, mais il brûla trois
mois après, si bien qu’on n’en put sauver un seul brin. »
Quant à Calvin, il ironise dans son Traité des reliques sur
l’authenticité du linceul : « Il y a une demi-douzaine de villes,
pour le moins, qui se vantent d’avoir le suaire de la sépulture tout
entier : comme Nice, celui qui a été transporté là de Chambéry. [...]
Il est facile à voir que ce sont peintures faites de main d’homme [...]
comment le monde a été si niais, de se laisser ainsi éblouir les yeux,
pour ne voir point une chose tant évidente. [...] Quand un suaire a
été brûlé, il s’en est toujours trouvé un nouveau le lendemain. On
disait bien que c’était cétui-là même qui avait été auparavant, lequel
s’était par miracle sauvé du feu ; mais la peinture était si fraîche que
le mentir n’y valait rien, s’il y eût eu des yeux pour regarder. »
A partir de 1535, la Savoie est occupée par François Ier et le
suaire est transporté notamment à Nice, comme l’indique Calvin.
On peut encore voir dans cette ville un tableau de Gaspard
Baldouino (1660) réalisé pour la confrérie du Saint-Suaire de la
cité. Ainsi, paradoxalement, cette œuvre que Calvin accuse d’être
une simple peinture a elle-même inspiré de nombreux retables,
tels ceux de Nice et La Tour-du-Pin !
En 1561, le suaire revient à Chambéry mais le duc de Savoie,
qui cherche à se « recentrer » sur ses possessions italiennes, voudrait
bien l’emporter dans sa nouvelle capitale, Turin. Afin de contourner
les réticences des habitants de Chambéry envers ce transfert, le duc
Emmanuel-Philibert profita du pèlerinage à pied entrepris vers
Chambéry par l’évêque de Milan, saint Charles Borromée, et prétexta
vouloir lui épargner la fatigue d’une si longue marche en transportant
la relique à Turin, où elle se trouve encore. Une ostension y a
d’ailleurs été organisée tout récemment, début 2010.
45
L’un des panneaux de Bourg-enBresse − où le suaire de Turin fut
exposé et où exista, comme à Nice,
une confrérie du Saint-Suaire −
fait allusion à une autre image
acheiropoïète, c’est-à-dire non faite
de main d’homme : le voile avec
lequel Véronique essuya le visage
du Christ lors de sa montée au
Calvaire et où son image resta
imprimée. En fait, le nom de
Véronique est lui-même symbolique
et dérive de vera icon, la « vraie image ». « Heureux ceux qui
croient sans avoir vu », s’exclamait Jésus, et pourtant, quelle idée
fascinante de pouvoir contempler le visage du Christ dont les
évangiles ne nous disent rien de l’apparence physique !
Ainsi, les Maîtres de la Tour-du-Pin et de Bourg-enBresse, qui n’en font peut être qu’un, tout en rappelant à la
mémoire du fidèle les souffrances de son Sauveur, évoquent des
reliques célèbres, supports sensibles de sa dévotion. En cela,
ils se posent en dignes successeurs du patron des peintres, saint
Luc, à la fois auteur supposé d’un évangile et d’un portrait du
Christ JEAN-LUC GAUCHON
Informations pratiques : le triptyque (ainsi qu’un triptyque contemporain réalisé par
Arcabas) est visible en permanence dans l’église de La Tour-du-Pin ; pour en voir tous
les panneaux, contacter le Syndicat d’Initiative (04 74 97 14 87).
Illustrations et remerciements. Photos du triptyque de La Tour-du-Pin d’après : R.
Mollard, Les triptyques de La Tour-du-Pin. Photos du retable restauré de Bourg-enBresse aimablement communiquées par Catherine Penez, Conservatrice des antiquités
et objets d'art de l'Ain. Photos par l’auteur des gravures de Raimondi et Vico d’après The
Illustrated Bartsch. Reproductions effectuées par Sainte-Marie Lyon avec l'autorisation
du Centre Français d'exploitation du droit de Copie (CFC - 20, rue des Grands Augustins
- 75006 PARIS). Merci à la paroisse de Bourg-en-Bresse ; à Marie Bardisa, conservatrice
des Monuments Historiques de Rhône-Alpes ; à F. Elsig, professeur à l’Université de
Genève ; à ARCOA et B. Duclos-Damour, restaurateurs du triptyque ; au père R. Soldo.
AMADEUS
VALEURS DES JEUNES
RÉQUISITOIRE CONTRE
L’INDIFFÉRENCE
JUMELAGE
.
collè
ge
AMADEUS
Drame de Milos Forman (1984), projeté aux élèves
de première, terminale et classes préparatoires
de Lyon, le 4 décembre
« Sire, je suis un homme vulgaire, dit Mozart à Joseph II, mais
je peux vous assurer que ma musique n’est pas vulgaire ». Un des
aspects d’Amadeus qui frappa le plus les spectateurs du film à sa
sortie en salle était le contraste, souligné à plaisir par Milos Forman
et le scénariste Peter Schaffer, entre la subtilité de la musique de
Mozart et, d’autre part, la trivialité du personnage. De là, il serait
tentant de voir dans cette oeuvre une audacieuse remise en
question du lieu commun de l’esthétique romantique selon lequel
l’œuvre reflèterait les caractéristiques morales et psychologiques
de son auteur. Sans doute n’est-ce pas l’un des moindres mérites
du film que de remettre en question ce poncif. Cependant, tout en
évitant cet écueil, le paquebot hollywoodien échoue peut-être
pesamment sur un autre : tout laisse à entendre dans ce film, par
des procédés qui n’ont rien de subtil, que la création d’œuvres d’art
dignes de passer à la postérité n’est réservée qu’à quelques génies.
Non seulement un certain « ingenium » serait indispensable
pour produire du beau, mais, qui plus est, cette aptitude serait
le lot de quelques prédestinés, les rares élus de Dieu : le nom
« Amadeus » ne veut-il pas dire pas « l’aimé de Dieu » ? Cette
théorie esthétique de « l’exceptionnalité du génie » est-elle le sens
ultime du film de Forman ? Ce serait oublier qu’elle est la
philosophie de Salieri, c’est-à-dire la pensée d’un vieillard parvenu
aux limites de la folie et dévoré par une jalousie passionnelle. Pour
tirer de l’œuvre de Forman une leçon philosophique et esthétique,
il convient donc d’analyser préalablement le point de vue sous
lequel est présenté le portrait de Mozart, point de vue d’un rival à
CINÉ
CLUB
la fois admiratif et envieux. Mais comme le génie de l’artiste ne
peut être connu qu’à travers son œuvre, il faut en tout premier lieu
analyser de quelle manière nous est présentée dans ce film sa
musique : car le génie du compositeur se manifeste mieux dans
son œuvre que dans sa biographie.
Un film au service de la musique
de Mozart
Il existe plusieurs emplois possibles de la musique dans
un film. En certains cas, que nous appellerons emplois
illustratifs de la musique, celle-ci est elle-même un élément de
l’histoire. C’est le cas lorsque nous entendons une musique que
les personnages du film sont supposés entendre, par exemple
lorsqu’ils assistent à un concert. Dans d’autre cas, la musique est
une musique d’accompagnement ou une musique expressive :
les personnages du film ne sont pas supposés l’entendre et son
rôle est d’accompagner l’action en en soulignant certains traits
de manière expressive : une scène triste est accompagnée d’une
musique triste, une scène gaie sera accompagnée d’une musique
gaie, etc. En ce cas, la musique souligne certains effets de la
réalisation, voire parfois suffit à les créer.
A côté de ces deux usages traditionnels, Forman et Schaffer
ont produit quelques innovations.
La première originalité du film consiste à inventer un
troisième emploi de la musique que nous pourrions appeler
50
musique d’introspection ou musique subjective : cette musique,
entendue par le spectateur, est celle que Mozart joue dans sa tête
lorsqu’il compose ou celle que lit mentalement Salieri lorsqu’il
déchiffre. Particulièrement remarquables sont les trois séquences
où Salieri se penche sur les partitions de son rival, car elles
correspondent à des moments clés de l’évolution du personnage et
donnent l’occasion de faire entendre une critique musicale qui
éclaire sur la spécificité de l’œuvre de Mozart. Parfaitement
intégrées au récit, ces trois séquences initient le spectateur aux
subtilités de l’analyse musicale et confèrent au film de
remarquables qualités pédagogiques.
La seconde originalité du film consiste à faire de la musique
l’élément moteur de l’intrigue, (comme l’avait fait Kubrick dans
une perspective esthétique différente toutefois). Pour éviter de se
cantonner aux usage illustratif ou expressif de la musique, Forman
et Schaffer imaginèrent d’intégrer la musique au film en allant non
pas du scénario à la musique mais de la musique au scénario. Ils
commencèrent par sélectionner les musiques de Mozart qu’ils
souhaitaient mettre en image, puis élaborèrent la scénarisation des
séquences. Il en résulte que l’image mobile du cinématographe
avance au rythme exact de la musique, comme c’est le cas dès le
générique où la succession des plans est en phase avec la
succession des thèmes de la symphonie n°25.
Jouant sur les divers emplois possibles de la musique, la
réalisation les combine au montage de façon à créer divers effets
dramatiques. Par exemple, dans un registre comique, nous voyons
les exercices d’échauffement vocal de la cantatrice dont Salieri est
secrètement épris devenir les vocalises virtuoses de l’Enlèvement
au sérail. Plus loin, ce seront les jacasseries de la belle-mère de
Mozart qui se transformeront en l’air de la Reine de la Nuit. De
même, à plusieurs reprises, tel thème musical est employé dans
un premier temps comme musique expressive, puis comme
musique subjective ou illustrative. Dans un registre tragique, le
célèbre accord en ré mineur qui annonce dans Don Giovanni
51
l’entrée en scène du spectre du Commandeur, ponctue le film.
Rappelons que la tonalité de ré mineur a toujours chez Mozart un
caractère funèbre et tragique : elle exprime l’angoisse face à la
mort et à l’imminence du jugement dernier. Nous entendons donc
l’accord du Commandeur une première fois au tout premier plan du
film, placé d’emblée sous une tonalité tragique. Puis nous le
réentendons, employé cette fois de façon subjective, lorsque
Léopold Mozart venu rendre visite à son fils apparaît en haut des
escaliers : Wolfgang semble en effet entendre cet accord dans sa
tête. Nous retrouvons bien sûr cet accord utilisé de manière
illustrative au cours de la représentation de Don Giovanni et de la
parodie de celle-ci. Enfin, le même accord se retrouve lorsque
Salieri, déguisé en spectre, vient commander à Mozart la messe
du Requiem. L’usage de la musique souligne ici l’angoisse de
Mozart face à l’image d’un vengeur surnaturel évoquant son père.
Mais l’intégration de la musique au récit, ou plutôt
l’intégration du récit à la musique, atteint des sommets dans la
séquence où Mozart mourant dicte à Salieri le « Confutatis » du
Requiem. C’est le clou du spectacle, soigneusement préparé par
les séquences précédentes. Nous assistons à une dictée musicale,
exercice dont il est difficile de rendre attrayante la représentation
cinématographique. En même temps que se dicte la musique nous
entendons, une partie après l’autre, l’œuvre en train de se créer.
Mais bientôt Mozart ne dicte plus la musique, il la marmonne dans
un souffle. Salieri doit deviner la dictée imaginaire de Mozart,
finissant par transcrire une musique qu’il ne pourrait entendre en
réalité. Ce n’est plus de la dictée musicale, c’est de la télépathie !
Peu importe ici la vraisemblance ! Ou, plutôt, disons que le film a
créé ses propres critères de vraisemblance en imposant la musique
subjective comme une sorte d’évidence...
52
Le portrait de Mozart par Salieri
et la mystique de la jalousie.
Tout au long du film, Mozart nous est décrit du point de vue de
Salieri. Le récit est un long flash back introduit, entrecoupé et
conclu par la fausse confession, sans repentir ni absolution, que livre
le musicien italien au prêtre venu le réconforter. Le rôle de cette
confession est de rendre possible le récit à la première personne d’un
meurtre psychologique commis à l’encontre de Mozart. Le sujet du
film n’est donc pas à proprement parler la vie de Mozart, mais le
récit de l’évolution des sentiments de Salieri à son égard.
Or ces sentiments sont l’envie et la jalousie. L’envie est la
haine de l’autre inspirée par un sentiment d’infériorité. La jalousie,
elle, consiste dans le refus qu’un être aimé privilégie ou semble
privilégier un tiers : ici Salieri est jaloux de ce que Dieu semble lui
préférer Mozart. La progression du film est scandée par divers
épisodes qui relatent la naissance d’un complexe de jalousie et
d’envie, puis les conséquences homicides de la haine qui en
résulte. L’action n’est donc que l’occasion de rendre raison de cette
évolution psychologique.
Salieri passe de l’admiration à l’envie puis à une jalousie
mystique. Tout d’abord, la première rencontre, au palais du princeévêque, insiste sur le contraste entre la vulgarité du personnage
de Mozart, surpris en plein ébat sexuel, et la finesse de son génie.
Il en résulte un sentiment de mépris pour le personnage, sentiment
indissociable d’une admiration réelle pour le musicien. La seconde
rencontre se produit au palais de l’empereur où Salieri intercède
en faveur de Mozart : il rend hommage au jeune compositeur, avant
de se sentir humilié par sa virtuosité. Ici apparaît l’envie, résultant
d’un sentiment d’infériorité non acceptée dans le cadre d’une
comparaison des talents. Puis, apparaît la jalousie, dans la scène
de L’Enlèvement au sérail, lorsque Salieri découvre que Mozart a
possédé la femme qu’il aimait platoniquement. A partir de ce
moment, le compositeur italien commence à entraver la carrière
53
de son rival en lui faisant retirer le poste de maître de musique de
la fille de l’empereur. Mais le moment décisif est celui où Salieri
prend connaissance des partitions de Mozart : il fait la découverte
du génie à l’état pur, révélé par la capacité de composer d’un seul
jet et sans ratures. Convaincu de « l’injustice » de Dieu, qui
distribuerait ses faveurs indépendamment de tout mérite, il
commet l’acte sacrilège de brûler un crucifix pour manifester sa
rébellion spirituelle. La jalousie de Salieri rejoint ici celle de Caïn
en ce qu’il ne supporte pas de voir son créateur favoriser un autre
que soi.
On est donc passé progressivement du mépris qu’éprouvait
un dévot pour un vaurien à une haine satanique de Dieu lui-même,
haine fondée sur un double sentiment d’envie et de jalousie
mystique. Le portrait spirituel de Salieri rend crédible cette
évolution du personnage de la figure du dévot trop scrupuleux au
tueur satanique. Car, d’emblée, il est apparu comme un mystique
ambigu : sa vocation musicale est née avec la mort accidentelle de
son père interprétée, de manière sacrilège, comme un miracle
obtenu en échange d’une promesse de chasteté.
Le désir de la mort du père, aisé à analyser d’un point de vue
psychanalytique, apparaît comme un trait de caractère commun à
Salieri et Mozart, ce qui permet au premier de découvrir le point
faible du second et d’organiser ce que Schaffer appelle son
« assassinat psychologique ». Le récit de cet assassinat, d’un genre
bien particulier, occupe toute la seconde moitié du film. Ce meurtre
repose sur l’addition de deux procédés : tout d’abord Salieri
organise une cabale qui ruine Mozart en privant ses opéras de leur
audience. Puis vient la mise en œuvre de la tentative d’usurpation
du Requiem. En reprenant le costume porté par Leopold au bal
costumé, en s’identifiant également au spectre du Commandeur,
enfin en contraignant le compositeur à s’épuiser à la tâche, Salieri
réveille et entretient en Amadeus un complexe de culpabilité qui
le mène à la mort. En terme psychanalytique, Mozart meurt rongé
par un Surmoi dont Salieri s’est approprié la teneur symbolique.
54
Mais malgré ce « meurtre psychologique », les sentiments de
Salieri demeurent continuellement frappés d’ambivalence. Jusqu’à
la mort de Mozart, sa haine reste mélangée d’une admiration où
peuvent affleurer des vestiges de bienveillance. Certes le
compositeur italien provoque l’échec des opéras de Mozart mais il
assiste à toutes les représentations, les commente avec ravissement
et prend soin de donner à son rival des conseils de courtisans qui
pourraient le sauver. Car son envie s’accompagne ici d’une sincère
admiration qu’il ne peut entièrement contenir, quand par exemple
il sursaute en apprenant que Wolfgang a jeté au feu la partition de
Figaro. Le véritable objet de la haine de Salieri est donc moins
Mozart lui-même que Dieu à qui il reproche de s’être montré
injuste. Il est dans la position de Caïn ou du frère aîné du fils
prodigue. Ce qui rend Amadeus haïssable à Salieri, c’est la faveur
que Dieu lui a faite. C’est d’ailleurs ce que signifie le titre du film
qui en mettant en avant le deuxième prénom de Wolfgang Mozart
rappelle en quoi il suscite la jalousie de Salieri : Mozart est « Amadeus », c’est-à-dire l’aimé de Dieu. L’énigme à laquelle se heurte
Salieri est donc celle que rencontre tout théologien de la grâce
d’inspiration janséniste ou calviniste : pourquoi Dieu accordet-il sa faveur indépendamment des mérites ? Son incapacité à
y trouver une réponse satisfaisante le pousse à une révolte
prométhéenne.
Faut-il prendre au sérieux l’esthétique
du génie sous-jacente à Amadeus ?
Le conflit mystique entre Salieri et Dieu est lui-même
occasionné par une théorie esthétique implicite : la théorie du
génie. Si Salieri peut reprocher à Dieu le succès de Mozart, c’est
en vertu de la conviction que le « génie » est la cause ultime de
l’excellence de l’œuvre. La notion de génie est caractérisée ici par
plusieurs traits : l’aisance, la grâce, la créativité... et la révolte
contre l’ordre établi. Les séquences où Mozart est accueilli à la
55
cour sont l’occasion de montrer les clivages entre diverses
conceptions de l’art. Ce qui est souligné alors est le contraste
culturel entre des artistes bien établis et un artiste neuf, en marge
des institutions.
A vrai dire, le thème du génie incompris, en rébellion face à
la société de son temps, est bel et bien un lieu commun de
l’esthétique romantique. Cependant, ce film ne se contente pas de
reprendre cette théorie. Il l’infléchit en profondeur en nous mettant
en garde contre l’idée que l’art serait la simple transposition
d’un vécu émotionnel. Car Amadeus souligne à merveille l’écart
considérable existant entre la personnalité de l’artiste et la
perfection de son œuvre. L’idéologie à laquelle il s’oppose est celle
qui voudrait qu’une musique subtile et gracieuse émane d’un
homme au caractère subtil et gracieux. Malheureusement, Forman
s’est contenté de substituer au cliché romantique un autre cliché :
le cliché du poète maudit, voire du trublion dadaïste. Il ne serait
plus nécessaire d’être un homme d’une vertu morale exceptionnelle
pour faire des oeuvres d’art exceptionnellement belles, mais il
faudrait être un rebelle d’exception.
Aussi serait-ce une erreur de notre part de prendre Amadeus
pour une démonstration convaincante du propos philosophique du
cinéaste. Point n’est besoin d’être un homme d’exception pour faire
de belles œuvres. C’est d’ailleurs sur ce point que Forman a
commis quelques fautes de goût à force d’insister sur la prétendue
médiocrité de Salieri. Par exemple, on a peine à croire qu’un
compositeur professionnel ait besoin de pianoter péniblement pour
composer une marche aussi simple que celle que Salieri dédie à
Mozart à l’occasion de sa première réception au Palais. L’idée
convenue selon laquelle l’œuvre d’art devrait attester la génialité
de son auteur fait dénigrer injustement des œuvres estimables et
repose sur du vent. D’ailleurs, si vraiment il fallait être un génie
pour produire une œuvre de quelque mérite, on pourrait avoir
quelques doutes au sujet de Forman au vu de son Valmont, par
exemple, qui est un authentique navet.
56
Il est donc une erreur dont Amadeus peut nous délivrer à juste
titre : celle qui consiste à chercher dans la personnalité de l’artiste
le secret de l’excellence de ses œuvres, c’est-à-dire à voir dans
l’œuvre d’art l’expression d’une intériorité préexistant à l’œuvre. En
vérité, le secret de l’excellence de l’œuvre est à chercher dans
l’œuvre elle-même : si une musique est belle, c’est parce qu’elle
est bien composée, pas parce que son auteur se sentait coupable
de la mort de son père ou s’angoissait à l’idée de sa mort prochaine.
Retenons la leçon de Proust dans son Contre Sainte-Beuve : l’œuvre
d’art ne s’explique pas par la biographie de son auteur. Car comme
le notait Popper au sujet de la musique, elle n’a pas pour fonction
essentielle d’exprimer les émotions de celui qui l’a produite mais
d’en créer chez celui qui l’écoute 1. On comprend dès lors pourquoi
Milos Forman et Peter Schaffer ont pu dire que le personnage
principal du film n’était ni Salieri ni Mozart mais la musique de
Mozart. En effet, de l’homme Mozart nous ne savons que ce que
Salieri en perçoit. Le personnage principal du film est donc bien
cette musique parce qu’elle n’est pas l’accessoire qui enjolive le
récit mais l’âme même du film. Elle est la pierre précieuse à
laquelle les images servent d’écrin. Et il faut reconnaître qu’en
habiles artisans, Forman et Schaffer ont magnifiquement mis en
valeur les chefs d’œuvre qui les ont inspirés FRÉDÉRIC CROUSLÉ
1
D’après Karl Popper, dans la Quête inachevée, il existe deux conceptions radicalement
différentes de la création musicale. Pour une tradition que Popper qualifie
d’expressionniste, inaugurée par Beethoven, l’œuvre musicale est une traduction des
états d’âme de son auteur. Pour une tradition plus ancienne, que Popper appelle la
« musique objective », le rôle de la musique n’est pas d’imiter les transports de l’âme
de l’artiste mais de créer dans l’âme de l’auditeur des sentiments sui generis induits par
la musique elle-même. Le génie de l’artiste ne réside pas en ce qu’il possède une
sensibilité exacerbée, mais en ce qu’il maîtrise à la perfection toutes les ressources de
son art pour émouvoir autrui. Dès lors, le musicien n’utilise pas la musique comme
l’occasion de s’épancher, il est au service d’une œuvre qui impose son caractère
émotionnel et sa logique propres. C’est pourquoi, premier spectateur de son œuvre, il
explore les ressources propres à son art en alternant essais, erreurs et rectifications,
sous le contrôle d’un goût bien formé. Cette dernière conception du travail de l’artiste
démystifie quelque peu la conception romantique du génie, et relativise le rôle de
l’inspiration au profit de la science musicale, de la maîtrise technique et de la formation
du goût.
LES
VALEURS
DES JEUNES
DE 15 À 24 ANS
Nous sommes la classe de BTS CI 2. Au sein de notre cours de
culture générale, nous devons effectuer une étude afin de
préparer au mieux notre épreuve de BTS.
Identification
1 / Vous sentez-vous plus :
Français(e)
Citoyen(ne) du Monde
Européen(ne)
Aucun des trois
2 / Vous sentez-vous fièr(e) d’être français(e) et soutenez-vous
votre pays lorsqu’il s’agit :
De sport
De la mode
De l’histoire et du patrimoine
De gastronomie
Autres :
3 / Selon vous, les composantes de l’identité nationale sont
en priorité :
La contribution à l’histoire de France
Le droit de vote
Les couleurs tricolores
La connaissance de la Marseillaise
Respecter les lois et la Constitution françaises
Dans le cadre de l’étude du thème imposé
« Génération(s) », les élèves de BTS CI2 ont
d’abord réalisé un questionnaire qu’ils ont
diffusé auprès des classes de première,
terminale et de BTS CI1. Ils remercient
d’ailleurs élèves et professeurs qui les ont
accueillis à cette occasion. Ils ont ensuite
réalisé une note de synthèse pour exploiter les
données récupérées MARIE-PIERRE MATRAY
TRA
VAUX
EN
QUE
TE
4 / D’où tirez-vous vos valeurs ?
Famille
Ecole
Amis
Activités sportives
Télévision/internet
Autres :
Définition
5 / Comment définissez-vous une valeur ?
Ensemble d’idées réunissant des individus
Quelque chose d’essentiel à la construction de soi
Ensemble d’idées partagées selon le groupe social
Classement
6 / Classez ces valeurs selon l’importance que vous leur
accordez. Mettez un chiffre de 1 à 8 : 1 étant le plus important.
Egalité Fraternité Liberté Patrie
Travail Argent
Famille
7 / Pensez-vous que votre épanouissement personnel
passera par votre :
Réussite professionnelle Réussite sociale
Réussite familiale
60
Famille
8) Jusqu’où s’étend le cercle familial d’après vous ?
Famille nucléaire (parents & fratrie)
Famille nucléaire, cousins, oncles, tantes, grands-parents,
& neveux/nièces
... + cousins éloignés & belle famille
…+ membres issus d’une recomposition familiale
9 / Quelle importance donnez-vous à votre famille ? Entourez
de 1 (-) à 5 (+)
12345
10 / Qu’attendez-vous de votre famille ?
Appui financier Moteur de vie Soutien affectif
11 / Quelle part les grands-parents et leur histoire ont-ils
dans votre vie ?
Peu importante
Importante
Très importante
12 / Comment vous voyez-vous dans dix ans ? Deux réponses
possibles (statut/enfant)
Célibataire
Marié
Divorcé
Avec enfant(s)
Sans enfant(s)
13 / Parmi cette liste, quelle valeur souhaitez-vous
transmettre à vos enfants ?
Partage
Respect
Franchise
Tolérance
Générosité
Travail
Liberté
Dévouement
14 / Que pensez-vous de la tendance « divorce et famille
recomposée » de la société actuelle ?
Ça me choque
Cela fait partie de l’évolution de la société
C’est une bonne chose
61
15 / Quels sont vos modèles de vie ?
Votre mère/votre père/les deux
Les personnes qui ont consacré leur vie à apporter de
la joie aux autres : Sœur Emmanuelle, Mère Teresa...
Les personnes qui, parties de rien, sont devenues de
grands acteurs dans la politique, dans les affaires ou
autres, et ce, uniquement grâce à eux-mêmes : B.Obama...
Les artistes incompris qui ont consacré leur vie à leur art :
Baudelaire, Rimbaud...
Travail
16 / Pour vous, que représente l’école ?
Un lieu où vous retrouvez vos amis
Un lieu où vous vous formez et assimilez
des connaissances qui vous serviront dans votre vie
professionnelle
17 / Selon vous, le travail est-il toujours une valeur
essentielle dans la société actuelle ?
Oui
Non
18 / Comment vous voyez-vous dans dix ans ?
Deux réponses possibles (une par rapport à l’activité/une par
rapport au pays).
Dans les études
Dans la vie professionnelle
Homme/femme au foyer Sans activité
En France
A l’étranger
19/ Travailler, c’est pour vous un moyen :
De gagner sa vie
De s’épanouir
De faire des rencontres D’avoir de l’importance
dans la société
20 / Est-ce que votre vie professionnelle vous semble plus
importante que votre vie privée ?
Oui
Non
62
Argent
21 / Par quel moyen gagnez-vous de l’argent ?
Emploi
Cadeaux
Par le biais des parents (argent de poche)
22 / Comment utilisez-vous cet argent ?
J’économise
Je dépense tout
Je dépense raisonnablement
Vie sociale
23 / Le regard des autres vous a-t-il déjà amené à remettre
en cause vos valeurs ?
Oui
En quelle occasion ?
Non
24 / Selon vous, la solidarité est-elle toujours une valeur de
notre société ?
Oui
Non
19 / Quelle façon de travailler vous correspond le plus ?
En autonomie
En groupe
Religion
20 / La religion tient-elle une place dans votre vie ?
Oui
Non
Si oui, est-elle :
Partie intégrante (pratique régulière)
Croyance (pratique occasionnelle)
Appartenance générationnelle (valeurs familiales)
21 / Représente-t-elle pour vous une valeur
dans notre société actuelle ?
Oui
Non
63
Valeur morale
22 / Pensez-vous que les valeurs fondamentales générales
(famille, respect, travail, solidarité…) sont toujours aussi
primordiales dans la société actuelle ?
Oui
Non
23 / Pour quelle cause vous battriez-vous aujourd’hui ?
Les Droits de l’Homme
L’environnement
La politique
Autres :
24 / Avez-vous l’impression que les valeurs de votre
génération sont suffisamment représentées dans les décisions
de notre pays ?
Oui
Non
25 / Parmi ces choix, quelle(s) valeur(s) a/ont disparu au
sein de notre société contemporaine, selon vous ?
Respect intergénérationnel
Le travail
Les valeurs de la République
La tolérance
L’hospitalité
La politesse
26 / Considérez-vous la liberté comme :
Une valeur acquise
Une valeur à laquelle il faut continuer à œuvrer
27 / Le respect : entourez la/les réponse(s)
Adaptez-vous votre comportement en fonction de l’âge
des personnes vous entourant ?
Oui
Non
Les us et coutumes, ainsi que les règles de politesse,
vous semblent-ils justifiés ?
Oui
Non
Vous arrive-t-il d’être irrespectueux envers ceux qui
détiennent l’autorité (parents, professeurs...) ?
Oui
Non
64
Vous arrive-t-il de mentir à vos proches ?
Oui
Fréquemment
Occasionnellement
Non
Avez-vous déjà volé ?
Nous vous rappelons l’anonymat de ce questionnaire.
Jamais
Une ou deux fois
De temps en temps
Souvent
Accepteriez-vous de faire quelque chose d’interdit/d’illégal
en échange d’une somme d’argent ?
Oui
Non
Mettez-vous parfois vos principes et valeurs morales de côté
dans le but de satisfaire vos envies ?
Oui
Non
Portez-vous de l’attention au respect de l’environnement ?
Oui.
Non
Si oui, comment ?
Economie des énergies (eau, électricité...)
Recyclage des déchets (tri sélectif...)
Association de protection de l’environnement
(Greenpeace...)
Achat de produits issus de l’agriculture bio
ou du commerce équitable
28 / La fraternité : entourez la réponse
Allez-vous spontanément vers les gens qui auraient
besoin d’aide ?
Oui
Non
Vous préoccupez-vous de la santé et du bien être
de votre entourage ?
Oui
Non
65
Avez-vous consciencieusement rempli ce questionnaire
destiné à aider les élèves de BTS ?
Oui
Non
29 / Pratiquez-vous une activité en rapport avec vos valeurs ?
Scoutisme
Syndicat
Association sportive
Association de solidarité
Autres :
30 / Qui peut, pour vous, véhiculer les valeurs qui vous
tiennent à cœur ?
Homme politique
Célébrité
Membre de la famille
Ecrivain/Philosophe
31 / Parmi les personnalités suivantes, cochez celle
qui correspond le plus à vos valeurs.
Barack Obama
Dalaï Lama
Le Pape
Sœur Emmanuelle
Bill Gates
32 / Ce questionnaire vous a-t-il aidé à faire le point
sur vos valeurs ?
Oui
Non
Toute la classe de BTS CI 2 vous remercie d’avoir consacré quelques
minutes pour répondre à ce questionnaire de manière la plus
honnête possible.
LES
VALEURS
DES JEUNES
DE 15 À 24 ANS
Suite au dépouillement des questionnaires, nous avons
réalisé une note de synthèse. Pour plus de précisions, nous
avons étudié les réponses selon l’âge, le sexe et le type d’études
des jeunes. Quelques grandes tendances se dessinent, certaines
sont en accord avec la société du 20e siècle tandis que de
nouvelles tendances liées à l’évolution de la société du 21e siècle
se développent.
Pour 57% des filles et 50% des garçons, les valeurs
représentent quelque chose d’essentiel à la construction de soi.
Elles déterminent l’être humain et sa façon d’agir. Chaque
personne adopte des valeurs qui proviennent, le plus souvent
en héritage, de la famille, de la société et de l’environnement. A
travers cette enquête, nous avons voulu connaître les valeurs
des jeunes dans notre société actuelle et voir si elles avaient
évolué. Globalement, nous avons pu constater un retour des
valeurs qui prédominaient au début du 20e siècle : famille,
travail et patrie. Les valeurs de la République semblent occuper
la deuxième place dans l’esprit des jeunes. Seule la liberté est
toujours très fortement mise en avant. L’égalité ne semble pas
être l’une de leurs premières préoccupations. Par ailleurs, de
nouveaux courants, liés à l’évolution de la société, au progrès et
à la mondialisation apparaissent. A noter que sur certains points
les opinions des filles et des garçons divergent assez fortement.
TRA
VAUX
SYN
THE
SE
Les filles sont très attachées à la
famille. Leurs valeurs proviennent de
celle-ci pour la totalité des filles. Seuls
61% des garçons estiment qu’ils tirent
leurs valeurs de leur famille (et 17% de
leurs amis). Cette valeur arrive en tête du
classement pour 71% des filles. Les
garçons ne sont que 39% à placer cette valeur en première
position. 71% des filles considèrent d’ailleurs que leurs grandsparents et leur histoire sont très importants, contre seulement 17%
des garçons. La famille représente un soutien affectif pour 71%
des filles et pour 44% des garçons. Pour l’autre moitié des garçons,
la famille représente un moteur de vie. Elle n’est donc pas du tout
considérée comme un appui financier.
Les garçons aussi sont donc attachés à la valeur famille, en
effet 83% d’entre eux se voient en couple dans 10 ans (dont 80%
mariés). 86% des filles se voient en couple mais seulement la moitié
se voit mariée. A noter que les filles sont moins nombreuses à
vouloir des enfants dans 10 ans que les garçons (43% contre 57%).
Pour plus de ¾ des jeunes, la famille se compose uniquement des
parents et cousins proches (et non des membres rapportés).
Pour 39% des garçons, les deux parents représentent un
modèle de vie et pour 28%, ce sont les gens partis de rien qui sont
arrivés à réaliser de grandes choses qui représentent un modèle
de vie. Les parents sont le modèle de vie de 86% des filles ! Le
respect ressort comme la valeur principale que les jeunes
souhaitent transmettre à leurs enfants. La franchise, la générosité
et le travail arrivent bien ensuite.
L’ÉVOLUTION
DES VALEURS
TRADITIONNELLES
68
La famille signifiait autrefois insertion dans une lignée.
Aujourd’hui, les individus veulent construire une famille à travers
leurs relations et efforts de communication dans un couple
égalitaire, dialoguant et stable où le respect domine et où ils
peuvent s’épanouir personnellement.
Le palmarès des valeurs
Les garçons croient plus en la valeur travail (72% d’entre eux
contre 57% pour les filles, considèrent que c’est toujours une
valeur essentielle dans notre société actuelle). Dans 10 ans, 100%
des filles se voient dans la vie professionnelle contre 89% des
garçons. Ils aspirent à des études longues. Les filles se voient
d’ailleurs en grande majorité à l’étranger contrairement aux
garçons (71% contre 56%). 67% des garçons préfèrent travailler en
groupe contre 43% des filles. Pour 86% des filles et 67% des
garçons, le travail permet en premier de gagner sa vie. Pour 17%
d’entre eux, le travail permet de s’épanouir. Pour quasi la totalité des
jeunes, leur vie familiale est plus importante que leur vie
professionnelle. Le travail, dont la forme a bien évolué ces dernières
décennies, reste une chose indispensable à laquelle les jeunes
aspirent. Mais certains pensent qu’il a perdu sa valeur
fondamentale. Par ailleurs, les jeunes savent que réussite
professionnelle peut rimer aujourd’hui avec mobilité internationale.
En ce qui concerne le rapport à l’argent, 1/3 des garçons
travaillent et le reste tire ses ressources d’argent de poche et
cadeaux. Seulement 14% des filles travaillent. De plus, les garçons
économisent davantage (40%) que les filles qui sont 86% à
dépenser raisonnablement. Seule la moitié des garçons dépense
raisonnablement. Les plus âgés sont ceux qui travaillent et qui
économisent le plus. Ils ont plus conscience de la vie en autonomie
et de la gestion de leurs propres ressources.
Pour 40% des garçons et 43% des filles, la religion tient une
place dans leur vie. 60% des garçons et seulement 14% des filles
pensent que la religion est une valeur dans notre société actuelle.
69
Ce recul de la présence de la religion dans la conscience des
jeunes contribue à une affirmation de l’autonomie individuelle.
Pour plus des 2/3 des jeunes, les valeurs fondamentales sont
toujours aussi primordiales dans notre société. Les jeunes se
battraient aujourd’hui pour l’égalité, les valeurs de la France en
général ou encore les Droits de l’Homme. Pour 95% des garçons
et pour 71% des filles, la liberté est une valeur pour laquelle il
faut continuer à œuvrer et qui n’est pas du tout acquise. 43% des
filles estiment que l’hospitalité a disparu tandis que pour 28% des
garçons, c’est la politesse qui a disparu et pour 28% les valeurs
républicaines. De ce fait, la totalité des filles et 78% des garçons
considèrent que les règles de bienséance, de politesse et les codes
conventionnels sont justifiés. Les jeunes ont compris que, même
dans notre pays riche et développé, les valeurs ne sont pas
acquises. De plus, évolution des valeurs ne doit pas vouloir dire
disparition de certaines.
Enfin, dans une société qui semble être de plus en plus
individualiste, la solidarité reste importante dans l’esprit des
jeunes puisqu’une grande majorité d’entre eux va vers ceux qui
ont besoin d’aide et se préoccupe des plus faibles. 86% des filles
considèrent que la solidarité est toujours une valeur dans notre
société actuelle contre 45% des garçons. Les jeunes sont, de plus,
assez engagés dans des activités en relation avec leurs valeurs
telles que le scoutisme, un club sportif ou autres.
70
L’APPARITION
DE
NOUVELLES
VALEURS
Aujourd’hui, soutenir la France
prend de nombreuses significations
différentes. 50% des garçons soutiennent
la France quand il s’agit d’un évènement
sportif. Et pour 44% d’entre eux, soutenir
la France, c’est soutenir son histoire et son patrimoine. Les filles
sont une majorité à soutenir la mode française dans le monde. Pour
d’autres encore, soutenir la France, c’est promouvoir sa grande
gastronomie. Les jeunes sont patriotiques pour tout ce qui touche
la France. Ils ne défendent plus un territoire mais toutes les
multiples facettes qui constituent la France.
D’ailleurs, malgré la mondialisation et la création de l’Union
Européenne, les filles se sentent françaises à 100% et seulement
11% des garçons se sentent européens. Pour 33% des garçons, la
France se caractérise par ses lois et pour 28% d’entre eux par le
droit de vote. Quant aux filles, la France se caractérise par le droit
de vote, ses lois et la nationalité française. On constate alors que
les jeunes sont conscients de vivre dans un pays démocratique et
libre.
On a vu que la famille constitue un repère très important
particulièrement pour les filles mais la réussite familiale ne
constitue pas la première réussite pour celles-ci (29% en première
place). Contrairement à la moitié des garçons pour qui la réussite
principale correspond à celle de la famille. Seulement 28% d’entre
eux considèrent que la principale réussite est la réussite
professionnelle. Les filles accordent beaucoup d’importance à
l’activité professionnelle. En deuxième place (après le fait de
gagner sa vie). Pour elles, le travail permet d’avoir de l’importance
dans la société tandis que, pour les garçons, il permet de
s’épanouir et de faire des rencontres. On voit bien ici l’évolution
de la société : avant, les femmes se réalisaient à travers la famille
mais aujourd’hui, elles veulent de plus en plus s’affirmer à travers
leur situation professionnelle. Elles font de longues études, sont
de plus en plus diplômées, occupent des postes hautement
71
qualifiés et demandent l’égalité (salariale, de représentation...) avec
les hommes. Elles se réalisent à travers leur situation
professionnelle. Beaucoup privilégient, au moins au départ, leur
situation professionnelle (on remarque d’ailleurs que l’âge du
premier enfant recule assez fortement).
Pour presque les ¾ des jeunes, la tendance « divorce et
famille recomposée » fait partie de l’évolution normale de la
société. Le quart restant se dit « choqué » par ce mouvement qui
prend de l’ampleur. Les anciennes générations répondraient sans
doute le contraire. Etant nés dans une société où la moitié des
couples divorce, les ¾ des jeunes voient cela comme une évolution
normale de la société. Les jeunes aspirent à plusieurs expériences
pour trouver enfin une relation stable. Ils veulent affirmer leur
autonomie et leur capacité d’orienter leur action sans être contrôlés
et contraints et ils veulent être heureux.
Nous avons voulu tester jusqu’où les jeunes respectaient
leurs valeurs. Les filles avouent être occasionnellement
irrespectueuses envers des personnes plus âgées. 71% d’entre
elles avouent mentir, accepteraient de faire quelque chose
d’illégal en échange d’une somme d’argent ou d’écarter leurs
valeurs pour satisfaire leurs envies de façon occasionnelle.
Quant aux garçons, 67% d’entre eux sont occasionnellement
irrespectueux et 22% ne le sont jamais. La moitié ne ment
jamais (33% ment de façon occasionnelle). Plus de la moitié ne
mettrait pas ses valeurs de côté pour satisfaire ses envies (39%
le ferait de façon occasionnelle) et 17% d’entre eux accepteraient
de faire quelque chose d’illégal en échange d’une somme
d’argent (et 22% le feraient occasionnellement). Les jeunes sont
attachés aux valeurs mais dans notre société, de plus en plus de
jeunes n’hésiteraient pas à oublier leurs valeurs pour satisfaire
leurs envies. Ce n’est plus le respect des valeurs qui stoppera leurs
actions. Seuls les lois, les interdits stricts et les règles leur forment
un cadre de vie.
72
A la question « Pour quelle cause vous battriez-vous
aujourd’hui ? », 43% des filles et 39% des garçons répondent
pour l’environnement. 100% des filles et 94% des garçons
pensent à faire des économies d’énergie et à la protection de
l’environnement. Pour une grande partie d’entre eux, cela se
traduit par le recyclage. Cette notion est récente et prend une
place prédominante dans notre société actuelle. La préservation
de notre environnement devient une valeur pour les jeunes
aujourd’hui.
Conclusion
Presque les ¾ des jeunes considèrent que le regard des autres
ne modifie pas leurs valeurs. Les jeunes sont aujourd’hui de plus
en plus autonomes, ils veulent s’affirmer en tant qu’individus
uniques et libres de choisir leur vie et d’orienter leurs actions sans
être contrôlés et contraints. Les jeunes sont attachés aux valeurs
qu’ils ont reçues en héritage mais elles ne constituent plus des
barrières à respecter. Certaines sont aujourd’hui délaissées et
d’autres font leur apparition.
Parmi une liste de « célébrités » proposée, 43% des filles ont
pour modèle sœur Emmanuelle, 28% des garçons Barak Obama,
11% Bill Gates et 17% Nicolas Sarkozy ! Enin, pour conclure,
17% des garçons estiment que leurs valeurs sont véhiculées par un
homme politique. Or 71% des filles et 78% des garçons affirment
que les valeurs de leur génération ne sont pas suffisamment
représentées dans la politique. Ils considèrent alors que leurs
valeurs ont évolué et que cette progression doit être prise en
compte dans la gestion du pays
LA CLASSE DE BTS CI 2,
LA VERPILLIÈRE
RÉQUISITOIRE
CONTRE
L’INDIFFÉRENCE
Devoir de français rédigé dans le cadre
d’un entraînement à l’écrit d’invention.
Mesdames et Messieurs,
Mon réquisitoire sera prononcé aujourd’hui devant vous afin de
dénoncer un mal dangereux, pernicieux, qui frappe l’homme et peut
l’anéantir. Par sa nature même et parce qu’il veut se détacher de
toute chose, il se fait discret pour mieux ronger l’individu. Il engendre
solitude, malaise, et mépris d’autrui. Ce mal, c’est l’indifférence.
L’indifférence est le refus, voire l’incapacité de reconnaître la
différence. C’est le rejet de ce qui ne rentre pas dans le cadre
prédéfini par la société actuelle. De fait, c’est le déni de l’Autre
comme être singulier, unique, original. Or l’indifférence est un des
traits de notre société. L’homme moderne est conforté dans l’idée que
tout est relatif et ce, quelle que soit la gravité d’une situation. Les
images de l’horreur que nous percevons chaque jour, appuyées par
le système de « matraquage » adopté par les médias, nous paraissent
banales car l’homme d’aujourd’hui, celui de la nouvelle génération,
est formaté à la banalisation du trivial, du choquant, pour ne porter
intérêt, in fine, qu’à l’anecdotique, au superficiel et au médiocre.
Il existe deux formes d’indifférence. Le mépris : « Je ne me
soucie pas de l’autre », et la lâcheté : « Je ne veux pas savoir ». Cette
forme d’indifférence est la plus grave, la plus triste, et elle montre à
quel point l’homme peut être lâche dans l’unique but de se protéger.
Car savoir est une arme efficace contre la monstruosité. Que serionsnous en effet aujourd’hui si nous ne connaissions pas les horreurs
de la Shoah et autres génocides ? A l’image des négationnistes qui
TRA
VAUX
osent prétendre que ces crimes n’ont jamais été commis, nous avons
tous dans nos dénis nos petites lâchetés du quotidien. Nous fermons
les yeux pour mieux rester dans notre bulle dorée où l’existence est
plus facile. Nous refusons d’accepter la vérité telle qu’elle est, à
savoir que non, nous ne sommes pas tous égaux face à la mort, face
aux guerres, à la vie. Au lieu de reconnaître notre chance, nous la
considérons comme acquise de droit : elle nous appartient, et
pourquoi devrions-nous la partager ? Ceux qui n’ont pas la même
fortune n’ont-ils pas voulu ou mérité leur sort ? Alors vient le mépris
de l’autre, le mépris et donc la bêtise. L’homme devient
individualiste, écrase l’autre sans se soucier de ce qu’il ressent ou
de ce qu’il pense. Dangereuse indifférence !
Pour Racine, l’indifférence est l’« insensibilité ». Pour
Corneille, elle est l’ « absence d’intérêt et d’amour ». Etre indifférent,
c’est donc ne voir que sa propre vérité, quand la différence est un
enjeu essentiel pour permettre à l’homme de percevoir la complexité
du monde qui l’entoure.
Alors, comme Emile Zola, je me lève et j’accuse l’indifférence
de faire des hommes des monstres sans compassion, des lâches et des
imbéciles LUCIE MOLLIER, SECONDE 3 LYON
LES ÉTATS-UNIS
Parmi les échanges internationaux mis en place par le lycée
Sainte- Marie, il est intéressant de faire le point sur une destination
anglophone : les Etats-Unis. Il y a aussi un échange avec
St-Clement Danes à Chorleywood en Angleterre et avec Assumption
College à Kilmore en Australie.
Nos échanges reposent sur le principe de la réciprocité entre
les familles françaises et américaines, et entre les lycées, de
manière que les élèves aient une expérience concrète de la vie
quotidienne aux Etats-Unis : ainsi, chacun est logé dans une
famille et suit son correspondant, au lycée aussi bien que dans ses
loisirs. Les lycées organisent aussi des sorties pour les élèves afin
de leur faire découvrir le patrimoine local.
Au cours des années et quelle que soit la destination, l’accueil
que nous recevons dans le lycée et dans les familles est toujours
exceptionnel. De manière très typique cette année, les élèves
auraient volontiers aimé que le volcan islandais continue à émettre
des particules empêchant tout retour des Etats-Unis ! Nos élèves
sont souvent invités à revenir dès l’été suivant, et si bien sûr tous
les liens tissés ne sont pas durables, il n’est pas rare de voir les
jeunes continuer à échanger avec leur correspondant par la suite.
Notre souci d’organisateur est de trouver des échanges
pérennes mais souvent nos homologues ne peuvent organiser un
échange que tous les deux ans : en effet, pour des raisons
évidentes, il y a plus de Français qui veulent développer leur
maîtrise de l’anglais que d’Américains désireux d’apprendre le
français. De plus, les élèves américains sont très actifs et font partie
de beaucoup d’équipes sportives, d’orchestre, etc. et doivent faire
des choix. De plus, dans la plupart de nos lycées partenaires, les
échanges reposent sur une seule personne, ce qui est très lourd.
Nous avons la chance à Sainte- Marie d’avoir une solide équipe !
ÉCHAN
GES
Tout cela n’est possible que grâce au soutien sans faille de
l’établissement, au travail remarquable d’une équipe de parents
sous la responsabilité de Mme Shireen Vernay, et de l’enthousiasme
et du dévouement de collègues qui préparent et accompagnent ces
voyages.
La joie des élèves lors des séjours, leur émotion au moment de
quitter leurs nouveaux amis américains, les liens amicaux qui se
tissent dans l’équipe et avec les parents qui nous confient leurs
enfants sont la récompense de tous les efforts et suscitent le
dynamisme pour recommencer l’année suivante.
A l’heure où Mme Vernay nous annonce que d’autres
obligations l’amènent à laisser la responsabilité des Échanges
Internationaux, qu’elle soit vivement remerciée pour tout le travail
accompli, sa compétence et sa disponibilité depuis qu’elle a
accepté cette charge.
Que ces quelques lignes suscitent des vocations chez vous, les
parents, afin que dès septembre, la commission des Échanges se
renforce pour de nouvelles expériences enrichissantes ! Vous ne
partirez pas de zéro pour tout construire : une équipe vous attend !
.....HENRI BRENDERS
« Merci beaucoup pour ce magnifique voyage passé ! Je n’en
garde que des souvenirs inoubliables ! Je pense d'ailleurs que je
retournerai à Atlanta après le bac de français l'année prochaine !
Merci encore pour le voyage qui aurait été inenvisageable sans votre
présence. » UN ÉLÈVE DE 2 6, LYON
NDE
« Je n’ai jamais eu autant d’enthousiasme un an avant notre
voyage en France. Vos élèves ont vraiment eu un impact très positif. »
MARY GOODWIN, PROFESSEUR DE FRANÇAIS, TOLEDO, OHIO
78
Nos lycées partenaires :
Southview et Northview Toledo, Ohio
6e année (10-15 élèves), dont des séjours prolongés
(« immersion » de deux mois)
Cistercian Preparatory School, Dallas, Texas
2e année d’échange (10 élèves en juillet)
Irish Cathedral, Indianapolis, Indiana Marist School,
Atlanta, Georgia
3e année d’échange (9 élèves)
Nouveau cette année : Glenbrook, Chicago, Illinois
1re année d’échange (11 élèves)
Wellesley High School, Wellesley, (Boston), Massachusetts
1er échange en 2009 (17 élèves).
Le prochain, déjà prometteur, en 2011
Episcopal School of Acadiana, Lafayette, Louisiane
4 élèves en 2008
Peter Chanel School, Cleveland, Ohio,
pour seulement deux élèves
L’ALLEMAGNE
Berlin
Cet échange en est à sa 29e année et l’année prochaine on
fêtera en grandes pompes les 30 ans de partenariat entre le
Canisius Kolleg et Chevreul-L’Externat. Cette année, les Berlinois
sont venus du 5 au 15 octobre 2009. Ils étaient accompagnés par
M. Walter Moser et par Mme Susan Wildermuth. Nous rentrons à
peine de Berlin où nous avons séjourné du 22 avril au 3 mai.
Werne
Ce deuxième échange concerne surtout les élèves de 4e et de 3e.
Les Allemands sont venus du 10 au 20 mars 2010 et les Lyonnais
étaient à Werne du 22 avril au 1er mai. C’est Mme Pommier qui est
le professeur référent de cet échange.
Bochum
Nous avons aussi un échange avec la Hildergardis Schule de
Bochum : les Français ont séjourné du 3 au 11 mai et les
Allemands étaient à Lyon du 26 mai au 4 juin. C’est Mme DubostGaulot qui est responsable de cet échange.
Outre ces trois échanges, il existe deux voyages qui sont
organisés chaque année en Forêt Noire : celui des 4e LV2 de Mme
Dubost et celui des 6e organisé cette année par Mmes Perret et
Ravistre. Alors que celui des 4e a lieu traditionnellement la
semaine qui précède les vacances de Noël, celui des 6e aura lieu
cette année en fin d’année scolaire, du lundi 31 mai au jeudi 3
juin. Tous les élèves germanistes de la division, soit 63 élèves,
seront encadrés par six professeurs.
Outre ces échanges et voyages, rappelons qu’il existe aussi
pour les élèves intéressés de 2nde la possibilité de faire un échange
de longue durée, appelé « programme Brigitte Sauzay », de 12
80
semaines, encadré et soutenu par l’OFAJ (Office franco-allemand
pour la Jeunesse). Les élèves partent en mai en Allemagne dans la
famille de leur correspondant, sont scolarisés dans l’école de leur
correspondant et reçoivent à leur tour leur ami allemand pendant
le 1er trimestre de l’année de 1re. Cette formule permet une vraie
immersion linguistique et constitue une aventure humaine
formidable. Chaque année, elle tente une dizaine de nos élèves. Il
est nécessaire de se faire connaître avant la fin de l’année scolaire
en cours auprès de son professeur actuel de 3e pour poser sa
candidature, car les démarches et la constitution du dossier
prennent un certain temps JOËLLE RAVISTRE
21 élèves de Chevreul et de l’Externat et leurs accompagnatrices,
Isabelle Blondeau, professeur de lettres à Chevreul et Joëlle Ravistre, professeur
d’allemand, pendant le séjour des Français à Berlin.
VOYAGE
PÉDAGOGIQUE
Pour la troisième année consécutive, les élèves
de première S1 de Lyon sont partis en voyage
de classe, du 6 au 8 avril 2010, avec leurs trois
professeurs de sciences : R. Domenach, S. Hertz,
J. Rouressol.
84
Trois jours, riches de découvertes et d’échanges ;
deux nuits, assurément trop courtes...
Des sciences à la nature...
En plein accord avec les programmes de la filière S, un tel
voyage est d’abord scientifique.
Cette année, pas de ballade dans les Ocres du Roussillon, pas de
déambulation dans les laboratoires ou les serres OGM de l’INRA,
mais une matinée dans la Forêt de Saoû (Drôme). Contemplation
du plus haut synclinal d’Europe – pour les explications, voir TP du
vendredi matin –, rencontre avec un responsable de l’ONF à
moustache, alliant compétence scientifique, amour de la nature et
attention aux personnes, et découverte concrète d’un projet de
développement durable très ambitieux.
Visite à Cruas (Ardèche, vallée du Rhône) d’une immense serre
de culture hors sol : fleurs en pot et variétés anciennes de légumes
poussent sous contrôle de l’informatique et de quelques frelons en
patrouille, dans une chaleur assurée par l’eau recrachée de la
centrale nucléaire voisine. De drôles de pieds de tomates pour un
drôle de pied de nez à la « bio fashion »...
De l’art sacré... au fil de l’histoire
Dans le prolongement du cours de culture religieuse, c’est à
un voyage dans le temps et dans l’espace qu’invitait le programme :
art byzantin (musique, peinture, architecture), art roman provençal
et art gothique (Avignon).
Visite de l’Atelier Saint-Jean-Damascène, fondé par un couple
orthodoxe d’origine ukrainienne et installé à Saint-Jean-en-Royans
(Drôme) depuis 1976. Lieu de formation à l’art traditionnel de
l’icône, de la fresque et de la mosaïque, lieu de ressourcement
spirituel par la beauté et le silence.
La visite commentée de l’abbatiale romane de Cruas (Vallée
du Rhône, Ardèche)... et de la basilique Sainte-Anne de Bonlieu-
85
sur-Roubion (Drôme) où nous étions hébergés, accueillis par une
petite mais très vive communauté de Prémontrés, en provenance
non de Frigolet (où nous avions séjourné les deux premières
années) mais de la normande abbaye de Mondaye. Le révérend
prieur avait tout d’un père Gaucher, mais son élixir à lui doit avoir
un fort goût de pomme !
La visite commentée d’un chef d’œuvre de l’école d’Avignon :
le Couronnement de la Vierge d’Enguerrand Quarton (Cf. tome 5
des Chemins de la Foi) au Musée Pierre de Luxembourg de
Villeneuve-lès-Avignon.
Un passage express par le Musée Calvet d’Avignon, pour
admirer deux tableaux. D’une nature morte, on fait une leçon de
chose... En bref, une histoire de mouche aux allures d’abeille et à
la taille de guêpe, posée sur un citron pas pressé du tout d’en finir,
qu’on dirait un cédrat ou une mandarine. Quelle vanité !
De cultures religieuses si proches
et si exotiques...
L’immersion dans le monde byzantin s’approfondit, après le
visite de l’Atelier Saint-Jean Damascène, en découvrant le
monastère orthodoxe Saint-Antoine-le-Grand, caché depuis 1978
au fond d’une combe près de Saint-Laurent-en-Royans (Drôme) et
dépendant directement du célèbre monastère athonite Simonos
Petras. En prime, après l’accueil très chaleureux d’un moine, la
célébration des vêpres au milieu d’icônes, de fresques éclatantes,
de dorures, d’encens, de feuilles de lauriers et de chants orientaux
(en français). Beaucoup d’émotions pour les élèves.
Comme chaque année, nous avions rendez-vous avec la
communauté hébraïque d’Avignon. Accueil ému par un des
responsables de la Synagogue, évoquant l’histoire tourmentée des
« Juifs du Pape ». Avant de quitter nos kippas, nous avons écouté
ensemble la Parole, faisant nôtre la prière du psalmiste, le chant
des exilés : « Au bord des fleuves de Babylone, nous étions assis
86
et nous pleurions, nous souvenant de Sion... » (Ps. 136/137)
Trois jours, deux nuits... trop court assurément !
La preuve ? On a dû s’arrêter sur l’autoroute pour faire enfin une
partie de foot !
Et encore, deux visites avaient dû être annulées, pour cause de
GPS et de col fermé.
La gratitude inonde bien sûr notre aventure.
Merci à tous les élèves pour leur joie et leur amitié, aux
parents et à la direction de Sainte-Marie pour leur confiance, à
tous les intervenants pour le partage de leurs passions, au père
Stephan Lange, notre aumônier, qui chaque année et malgré un
emploi du temps surchargé, a réussi à nous rejoindre, et enfin un
très grand merci à l’initiateur de ce projet, Jacky Rouressol ...
SÉBASTIEN HERTZ, POUR LA CLASSE DE 1RE S1
JUME
LAGE
10E ANNIVERSAIRE
Sainte-Marie La Verpillière
Collège des pères antonins de Baabda
13 lycéens et trois membres de la direction du collège de
Baabda ont été accueillis du 8 au 18 avril par leurs
correspondants français qui seront à leur tour reçus au Liban
l’année prochaine dans le cadre de notre jumelage.
Deux semaines de rencontres, d’échanges, d’accueil simple, joyeux
et attentionné. Difficile de relater tous ces moments ; en voici les
grandes lignes.
88
Vendredi 9 avril : journée dans l’établissement. Durant la
matinée les correspondants sont accueillis chaleureusement par
les professeurs de différentes classes du collège et du lycée. Après
un partage de l’eucharistie, le groupe du jumelage a animé par des
danses et des chants les récréations du primaire.
Enfin M. Patrick Margier, maire de La Verpillière, a voulu honorer
nos hôtes par une réception de bienvenue.
89
Samedi 10 avril : journée familiale organisée à Annecy, visite
de la ville, repas partagé au bord du lac, promenade à vélo. Puis
retour à La Verpillière pour une grand-messe en rite maronite
animée par la chorale de la paroisse Notre-Dame du Liban et le
Chœur du monastère Saint-Antoine de Chaponost où nous avons
eu la joie de retrouver anciens élèves et familles du jumelage
précédent. A l’issue de l’eucharistie, buffet libanais offert par les
paroissiens !
90
Lundi 12 avril : voyage à Paris et visite des principaux sites
de la ville. En fin de journée, Mme Benoit, chef de l’établissement
Bury-Rosaire, que nous remercions encore, nous attend avec les
familles d’accueil. Chaque élève et son correspondant sont reçus
par un parent d’élève de l’école, ce qui a permis un nouvel échange
avec d’autres jeunes d’établissements maristes.
Mardi 13 avril : visite de l’école avant de repartir à la
découverte de la capitale.
Mercredi 14 avril : en dépit des grèves, voyage à Nîmes, puis
Arles et Toulon où nous attendent cette fois les familles du lycée
Fénelon, autre établissement mariste. Un très grand merci à Mmes
Marill et Saint-Jacques pour l’organisation.
Jeudi 15 avril : musée de la marine ; après midi, plage et jeux.
Vendredi 16 avril : à l’invitation du père supérieur Maroun
Abi Nader, familles, élèves et correspondants se retrouvent au
monastère Saint-Antoine à Chaponost pour partager temps de
prière et repas libanais. Moment très chaleureux ! Puis, à la maison
de retraite de La Verpillière, animation de chants et danses avec
les résidents, lesquels reçoivent chacun un cadeau du Liban. Cette
action s’inscrit dans le cadre du jumelage comme pour l’orphelinat
de Ghédrass que soutiennent les jeunes Français. Fin de la journée
chez la famille Debord que nous remercions pour ce temps festif.
Samedi 17 avril : jeu de piste dans Lyon magnifiquement
orchestré par Didier Tourette et dégustation des meilleurs plats
lyonnais dans un bouchon comptoir.
Dimanche 18 avril : fin du programme mais pas du séjour, en
raison de l’incompétence des organisateurs qui n’avaient pas prévu
la fermeture des aéroports ! Le séjour, en effet, s’est poursuivi
jusqu’au jeudi 22 avril au monastère Saint-Antoine où les jeunes
libanais ont été accueillis avec le soutien extraordinaire des
familles.
91
Maintenant il ne nous reste plus qu’à attendre avril 2011 pour
le séjour des élèves de La Verpillière au Liban. En attendant, le
père Wissam, directeur adjoint du collège de Baabda, souhaite
élargir la collaboration entre professeurs et propose un échange
pédagogique, à élaborer.
Un comité du jumelage représentant l’ensemble de l’établissement
est également invité par la direction du collège de Baabda à
l’occasion du séjour de nos élèves.
Enfin va-t-on pouvoir résister à la pression des familles qui
demandent l’organisation d’un échange entre les parents d’élèves
des deux établissements ?
Les propositions sont très diverses et ouvertes à toutes et à
tous. Une réunion d’informations s’est tenue le 27 mai ; au
programme : montage vidéo, témoignages des participants,
assemblée générale de l’association « Les Mains ouvertes », et
verre de l’amitié franco-libanaise BRIGITTE NEYRAND, XAVIER
LAFAY, EMMANUEL JUHANT
UN BÂTISSEUR
LYON
LA VERPILLIÈRE
CARNET
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EN MÉMOIRE
D’UN BÂTISSEUR
LE PÈRE PERROT
Chaque personne humaine est unique et mystérieuse,
rebelle aux catégories dans lesquelles on voudrait l’enclore. Nos
vies se croisent un instant – quelques années – s’effleurent à
peine, avant de se disperser dans l’oubli ou l’incompréhension.
Qui saura dire la vérité d’un être quand celle-ci semble se dérober
sans cesse au regard rétrospectif ?
Le père Perrot, plus encore que d’autres, déroutait les
jugements. Homme secret, inclassable, il s’est une vie durant
donné à une œuvre qui lui survit et en dehors de laquelle rien de
ce qu’il fut n’est vraiment compréhensible. Il s’est effacé derrière
cette œuvre, au risque des malentendus, dédaignant de la justifier
par des discours, allergique aux honneurs et aux coteries.
Né le 9 septembre 1927, Marc Perrot étudie chez les Maristes
de Toulon jusqu’en première, puis en « mathélem » à SainteGeneviève. Admis en classes préparatoires, il préfère contre l’avis
de ses parents rentrer à 17 ans chez les Pères Maristes. Il prononce
ses premiers voeux à 18 ans, étudie la philosophie à Sainte-Foyles-Lyon, effectue son service militaire au Maroc. A Lyon, il étudie
les mathématiques à l’Université, poursuit sa théologie à SainteFoy, est ordonné prêtre et complète sa formation théologique à
Rome (1952-1953). Plus tard, il enseigne les mathématiques à
l’Université catholique de Lyon (1960-1966) où son franc-parler
et sa largeur de vue ne passent pas inaperçus. A la rentrée 1966,
il prend la direction de l’externat Sainte-Marie, remplaçant le père
Peillon qui restera son proche collaborateur. Jusqu’à l’âge de 65
ans, il enseigne les mathématiques en terminale C, débordant les
programmes officiels, passionné par l’approche structuraliste des
« mathématiques modernes ». En 1999, au terme de 34 années
de direction, il confie le relais à un ancien élève, Marc
Gaucherand.
IN
MEMO
RIAM
96
Un bâtisseur
Le père Perrot était un bâtisseur. Sa fidélité à l’esprit de la
congrégation mariste, celui d’une présence attentive et discrète
auprès des jeunes à l’image de la Vierge Marie, n’a jamais tourné
à la dévotion formelle, pas plus qu’elle ne s’est fourvoyée dans
les utopies pédagogiques à la mode. L’urgence était de créer des
lieux d’éducation adaptés à leur temps, qui soient des lieux de
vie et de croissance, aussi bien pour les enseignants, les
membres du personnel que pour les élèves. C’est dans cet esprit
qu’il sut fédérer les générosités de plusieurs générations
d’enseignants et développer une aventure humaine unique à
bien des égards.
Lorsqu’il devient directeur, Sainte-Marie compte 1051 élèves.
Dix ans plus tard, 1773. Cette même année une annexe est créée
à La Verpillière ; les Pères Maristes y prennent la succession des
Sœurs du Sacré-Cœur de Picpus qui dirigeaient une école
primaire. Le père Perrot y ajoute une 6e et une seconde. L'annexe
compte alors 292 élèves. En 1978, tous les niveaux sont assurés et
La Verpillière compte 617 élèves (contre 1878 pour le collège de
Lyon). En 1999, lorsqu’il quitte la direction, Sainte-Marie totalise
3600 élèves tous sites confondus !
Moins par esprit de prestige que pour encourager des
professeurs de bon niveau à rester dans l’établissement (l’Externat
comptait déjà un nombre important d’agrégés), le père Perrot ouvre
des classes préparatoires : Préparatoires commerciales HEC en
1988, Hypokhâgne en 1989. En quelques années, ces classes vont
obtenir des résultats remarquables. Mais le souci de l’exigence
passe tout autant par la volonté d’accompagner des élèves moins
doués ; ce sera la valorisation de la filière comptable (G2), puis
l’ouverture du BTS de comptabilité-gestion à Lyon (1988) et du
BTS de Commerce international à La Verpillière (1990). Dans cet
esprit, le père Perrot veut que la qualité de l’éducation mariste
profite à des milieux moins favorisés que celui de la bourgeoisie de
97
centre-ville lyonnais ; après avoir ouvert La Verpillière dans le
contexte de la ville nouvelle de l’Isle d’Abeau, il s’efforce de créer
un troisième site dans une ZEP de l’est-lyonnais (Charvieu
Chavagneux), sans jamais y parvenir.
Sa longue amitié avec l'architecte peintre Georges Adilon est
à la source d’une œuvre architecturale de grande ampleur, dans
une réflexion commune articulant éducation et création
contemporaine. Aujourd’hui, des centaines d’architectes,
d’étudiants ou d’amateurs viennent explorer les richesses de cette
création à la fois sobre et voluptueuse, dans la conjonction
complexe d’un matériau résolument pauvre (béton brut) et de
formes raffinées (arrondis, angles variés, fenêtres toutes
différentes, travail des grilles...). Il s’agissait en effet de penser
une architecture au service de l’éducation en conciliant deux
dimensions en apparence contradictoires de l’esprit de la
congrégation mariste :
- la discrétion des moyens : l’éducation n’est pas affaire
d’apparence, mais travail sur l’invisible, dans un humble
accompagnement des personnes au quotidien. C’est ce que
traduit la prépondérance des murs nus, la blancheur des classes,
la rusticité du matériau... Enseigner, « faire-signe », ce n’est pas
ajouter au vacarme ambiant, mais plutôt prendre de la distance,
faire retraite, pour mieux saisir ensuite la complexité du monde.
- la gratuité des formes : chaque jeune est unique et aucune
formule pédagogique ne saurait l’enfermer. Fuir l’utilitarisme, le
fonctionnalisme dans l’architecture, c’est ménager des espaces où
le regard peut vagabonder, se laisser surprendre, des lieux inutiles
au détour de la courbe d’un bâtiment...
98
Un éveilleur
A un établissement en croissance permanente, le père Perrot
a toujours voulu conserver le caractère d’une « maison ». Selon lui,
« un espace éducatif ne peut être qu'un espace d'amour ». C’est
dire qu’une école ne réalise pleinement sa mission que lorsqu’elle
est un lieu habité, non seulement par une communauté religieuse,
mais encore par des laïcs capables de se dévouer quotidiennement
dans tous les secteurs éducatifs : préfets de division, éducateurs,
professeurs engagés dans toutes sortes de services.
Générosité dans l’éducation : le père Perrot a souvent critiqué
l’idée de « projet pédagogique », préférant promouvoir un « style
éducatif » où l’on ne cherche pas à sacrifier au conformisme
des « résultats » ou de l’image sociale, mais encourager la
créativité des élèves et des enseignants : par l’éducation artistique,
l’approfondissement spirituel... autant que par la simplicité des
rapports humains.
Quand on pense à toutes les œuvres émanant de SainteMarie depuis 40 ans, on comprend qu’il avait le génie de susciter
ces générosités. Impossible de citer toutes celles qu’il a rendues
possibles ou consolidées: les Petits Chanteurs de Lyon, le Centre
Kierkegaard dans les années 80 puis le Collège Supérieur (1999),
les activités théâtrales et les colonies d’été, la publication des
manuels de culture religieuse Les Chemins de la foi, la qualité
de la revue Lyon-Mariste, les voyages à Rome et Florence,
jusqu’aux activités proposées aux parents d’élèves : conférences,
recollections, ciné-club, etc. Mais au-delà de ces réalisations
visibles, combien d’enseignants, d’élèves, de membres du
personnel, gardent le souvenir d’une parole, d’un encouragement
qui, émanant de cet homme réservé, les avait encouragés dans un
moment difficile ! Le jour même de ses obsèques, un inspecteur
général, qui fut enseignant à Sainte-Marie, lui rendit un hommage
public en disant comment la confiance que le père Perrot lui
99
accorda au moment où, jeune professeur, il cherchait sa voie, fut
déterminante pour toute sa carrière.
Après sa retraite, tout entier dévoué à la fondation Puylata
qu’il avait créée pour porter la fécondité de l’établissement, le
père Perrot épaula de nouvelles initiatives parfois inattendues :
le Cours Marc-Perrot de Dakar (créé par un ami musulman
Karim Diallo, fasciné par sa personnalité éducative), le jumelage
avec l’école Sainte-Christine de Kinshasa animé par la
Communauté du Chemin Neuf, les colonies « Le temps des
Vacances » lancées par Jean-Armand et Florence Baronne...
sans compter le développement du Collège Supérieur, ainsi que
le discret soutien apporté à des établissements lyonnais en
difficulté.
Un homme libre
Ses impatiences, son absence totale de sens diplomatique,
étaient proverbiales. Il pouvait d’une remarque lapidaire clore un
débat ou manifester les limites d’une position. Nombreux sont ceux
qui, surtout à l’extérieur de l’établissement, en ont pâti. Ces
rudesses (dont il était largement inconscient) lui valurent souvent
la réputation d’ « électron libre » au sein de l’enseignement
catholique. Elles traduisaient un sens passionné de la liberté,
notamment dans l'éducation. Ainsi faut-il comprendre son long
combat pour la liberté scolaire. Visionnaire, il avait compris qu’une
école de qualité ne peut vivre que dans l’autonomie de ses moyens
et la cohérence de sa direction. Il a fait du libre recrutement des
enseignants un combat difficile, dénonçant à l’avance une dérive
bureaucratique de l’enseignement catholique, tenté d’imiter les
travers de l’enseignement public. Il avait ainsi à cœur d’accueillir
des enseignants du public qui trouvaient dans la maison un second
souffle avant de repartir parfois sur leurs premières terres.
100
Car l’esprit de parti lui était insupportable, et cela fondait ce
qu’il faut bien appeler son anticléricalisme. Anticléricalisme
souvent de bon aloi : « Il faut aimer l’Eglise comme une mère,
non comme un parti » répétait-il si justement. Il refusait un
christianisme formel, estampillé par l’Institution comme un
statut acquis définitivement. « Nous ne sommes pas un
établissement chrétien, disait-il, mais un établissement à vocation
chrétienne ». Est-ce pour cela qu’à son contact, nombre
d’enseignants éloignés de l’Eglise ont pu cheminer vers la foi ? Il
est vrai que son christianisme avait quelque chose de protestant :
méfiance instinctive de toute forme de médiation, humaine ou
ecclésiale, absence de sens liturgique, intérêt limité pour les
questions théologiques toujours suspectes de dogmatisme...
Sa spiritualité était celle d’un homme d’action au sens où,
chez lui, l’action était méditée jusqu’en ses sources profondes et
dans le mystère de sa fécondité invisible. Son sens politique très
aiguisé voyait loin ; mais il était tout entier centré sur la promotion
des personnes, de leur richesse propre, contre l’étau des directives
officielles. Car l’action déborde toujours ce que l’on peut
programmer ; on ne comprend le sens d’une action que dans le
mouvement vivant de cette action, lequel jaillit des personnes
concrètes qui l’incarnent.
La liberté était pour lui la condition de l’espérance. Quand
des professeurs étaient déçus par un jeune, il leur rappelait que
« l'espérance sur les êtres est plus vraie que la lucidité » et que
« la patience qui sous-tend cette espérance est toujours féconde».
Lui-même incarnait cette confiance en accueillant largement dans
son école toutes sortes de personnes en recherche d’insertion. Pour
le meilleur et pour le pire, car rappelait-il : « Il vaut mieux pécher
par excès plutôt que par manque d’espérance ».
101
Un spirituel
L’espérance était bien pour lui vertu théologale, au sens où
sa source est surnaturelle. Cet homme d’engagement et de
décision était profondément convaincu que Dieu seul accorde
la fécondité des œuvres humaines : « Toute fécondité véritable
est grâce, vient de Dieu. Accepter cette humilité permet de ne
pas avoir de hâte ni d'impatience, d'essayer d'être dans la paix. »
Sur ce sens de l’espérance, il fondait une vision bien
particulière de l’éducation, loin de tout volontarisme, de toute
recherche du prestige des résultats ou des classements. Travailler
à la croissance d’un jeune, c’est entrer dans une forme de
renoncement : accepter que l’enfant prenne lentement la mesure
d’une exigence, surmonter la volonté de mainmise ou de séduction
qui guette l’enseignant, renoncer au désir de reconnaissance pour
les efforts consentis... Qui accepte ce dépouillement dans la relation
éducative pourra vivre cette mission dans la joie : « L'espérance
est une vertu, c'est-à-dire une force qui s'exerce dans le quotidien,
un état de confiance, une mise positive sur les événements, une
perception humble, parce que sans illusion sur nos limites et
respectueuse des délais, d'une réalité spirituelle qui s'accomplit
mystérieusement chaque jour. [...] Cette reconnaissance que
nous ne sommes pas seuls principes actifs de l'histoire, que le
sens se dévoile plus qu'il ne se conquiert, introduit une légèreté
– comme des enfants – un détachement – vous êtes des
travailleurs inutiles –, une sérénité joyeuse – les lys des champs
et les oiseaux du ciel –. C'est bien aujourd'hui que s'éclaire le
regard de celui qui espère, aujourd'hui qu'est renouvelée sa joie. »
Spirituel aussi dans l’ordre de la culture et de l’instruction, le
père Perrot avait à cœur que les enseignants ne cessent de se
cultiver, non par le souci immédiat d’une compétence directement
opératoire, mais bien plus profondément parce qu’il savait qu’un
enseignant, pour éveiller au goût de la vérité, doit lui-même se
présenter comme un chercheur de vérité. Il en va ici du sens de la
102
culture scolaire dont il répétait qu’elle devait viser bien plus loin
que la compétence mesurable dans telle ou telle discipline. Le
sens des humanités, c’est d’introduire un jeune à l’ensemble de
l’interrogation humaine, cette inquiétude du sens qui est à l’œuvre
au cœur de toute culture digne de ce nom : « A la culture de la
réponse et de la banalisation, soucieuse de sécurité, substituer
celle de l'interrogation et de l'admiration, motrice de la vie
spirituelle. L'aspect parcellaire des disciplines quant à leur objet
propre dans la culture ne peut cacher le fait que chacune porte la
visée globale de l'interrogation humaine. »
D’où une haute conception de la vocation enseignante,
comme médiation de l’invisible : « Le professeur et l'éducateur ne
sont pas à la source du mystère de la vie intellectuelle et
spirituelle, ils n'en sont que les médiateurs. »
Le secret d’un être
Les dernières années de sa vie furent douloureuses : en
quelques mois, sous l’emprise de la maladie de Parkinson, il perdit
l’autonomie à laquelle il était tellement attaché ; une fracture du col
du fémur lui valut une série d’hospitalisations à la suite desquelles
il ne put retrouver l’usage de ses jambes, tandis qu’à la maladie de
Parkinson s’ajoutait le cancer. Il eut beaucoup de peine à accepter
cette déchéance, malgré le dévouement des pères maristes et de
plusieurs personnes résidant dans l’école. Dans ses derniers mois,
il ne pouvait plus qu’écouter la radio. Sur RCF, il fut bouleversé de
découvrir les chants de Taizé dans leur lancinante ferveur. Une
dernière opération révéla l’ampleur de son mal. Il mourut quelques
jours après, à la clinique des Charmettes, le lundi 6 juillet 2009.
Je pus me rendre à son chevet. Revoyant pour la dernière
fois ce visage si émacié, mais enfin apaisé, je sus que cet homme
rude et pudique avait trouvé le port auquel il aspirait. Je
repensai alors à tout ce qu’il avait semé dans ma vie et dans
103
celle de mes proches. Et je compris que l’essentiel n’est pas
l’oubli ou l’incompréhension qui recouvrent notre destinée, mais
la fécondité invisible d’une existence offerte qui poursuit dans
le silence son œuvre de vie. « Le secret d’un être n’est pas ce
qu’il cache, mais tout ce qui dans sa vie est accompli dans le
silence pour que son expression soit moins contestable : c’est le
sol nourricier de la vérité de ses discours. Il est nécessaire que
bien des choses soient offertes dans le silence pour que les mots
n’en soient que la surabondance.
Le secret d’un être peut ainsi n’être aucunement ce qu’il refuse
de livrer, mais ce qu’il accepte de perdre devant les hommes,
sa vie la plus profonde et la plus renoncée, la condition de sa
présence » 1 XAVIER DUFOUR, ANCIEN ÉLÈVE DU PÈRE PERROT,
PROFESSEUR
1
Toutes les citations sont du père Perrot, consignées dans le premier des trois volumes
de Paideia, ouvrages de photographie sur l’architecture de Sainte-Marie.
104
A.P.E.L. - Association familiale
16 janvier-20 mars
Réunion des parents
correspondants du lycée
2 février-4 mai
Moment d’échange proposé
par l’A.P.E.L. à la bibliothèque
du primaire, suivis de la réunion
des parents correspondants
1er juillet
Bourse aux livres du primaire
Animation spirituelle
Le jeudi, tous les quinze jours,
préparation à la Première
communion : groupes animés
par trois séminaristes et des
lycéens de Saint-Paul, sous la
responsabilité de B. Mauchard
6 janvier
Dans le cadre de la préparation
à la Première communion,
enseignement pour les parents
par le père Richard, travail en
groupes avec les enfants, puis
temps de prière à la chapelle
8 janvier
Remise du livre « Ta parole est
un trésor » aux élèves de 9e
23-24 janvier
2e week end spirituel pour les
élèves de seconde à Montagnieu
25-27 janvier
Retraite des TS4 au Foyer
Marie-Jean en Ardèche
6 février
Pèlerinage proposé aux pères
de familles de Sainte-Marie
depuis La Verpillière jusqu’à
la Communauté des Sœurs
des Maternités Catholiques
à Bourgoin
13-14 mars
Retraite des confirmands
13 mars
Retraite de Profession de foi
pour les garçons de 3e
17-20 mars
Pèlerinage à Lourdes proposé
aux élèves de 5e
20 mars
Rassemblement diocésain
des 4e/3e à Sainte-Marie
23 mars
Méditation sur la Passion
25 mars
Opération « bol de riz »
au profit du projet Kinshasa
27 mars
Retraite de Profession de foi
pour les filles de 3e
1er avril
Célébration du Jeudi Saint
LYON
2 avril
Office de la Passion.
Pour les classes de 7e, Chemin
de croix organisé par le diocèse,
de la cathédrale à Fourvière
5 mai
Retraite au Chatelard pour les
enfants préparant la Première
communion
8 mai
Première communion à l’église
Saint-Paul
22 mai
Célébration de la Confirmation
22-26 mai
Pèlerinage d’élèves de 3e
à Assise
29-30 mai
Pèlerinage d’élèves de 6e
à La Salette
31 mai-5 juin
Pèlerinage à Lourdes au service
des malades pour les élèves
de seconde
12 juin
Profession de foi des élèves de 3e
21 juin
Messe de fin d’année pour
les catéchistes du primaire ;
célébration de la « Fête-Dieu »
pour les 8e, le 22 pour les 9e,
le 24 pour les 7e
24 juin
Messe de fin d’année
pour les élèves de 4e/3e
25 juin
Messe de fin d’année
pour les élèves de 5e
Conférences, interventions, réunions
14 janvier
Réunion d’information
sur l’orientation en fin de 3e
19 janvier
Réunion d’information sur
l’orientation pour les parents
des élèves de seconde
21 janvier
Dialogue interreligieux entre
le cardinal Philippe Barbarin
et Chris Martin, pasteur de
l’église anglicane de Lyon
4 mars
Réunion d’information sur
le choix des langues et options
en fin de 5e
8 mars
Cycle des conférences de
La Solitude : « Approche
et évolution de la notion de
patrimoine en Amérique,
Europe et Asie » par Didier
Repellin, architecte en chef
des Monuments historiques
106
24 mars
Formation sur le thème de
la vie affective et sexuelle
pour les élèves de première
29 mars
Conférence-débat :
« La question des drogues »
au théâtre de La Solitude
8 avril
Réunion d’information pour
l’entrée en 6e
28 avril
Formation aux premiers
secours pour tout le personnel
éducatif du primaire
31 mai
Conférence-débat sur la drogue
et les addictions par le Dr Rigal
pour la division des secondes
Etablissement
15 janvier
Soirée des talents
20 janvier
Conseil de maison : « Diversité
des disciplines mais unité du
savoir »
6 février
Journée « portes ouvertes » pour
les classes supérieures de Lyon
7 mars
Matinée « portes ouvertes »
pour le primaire
10 mars
Conseil de maison : « Qualité
des propos entre élèves,
professeurs et parents »
17 mars
Évaluation des TPE des élèves
de première
28 avril
Conseil de maison : « Emplois
du temps et rythme de vie »
15 mai
Matinée « portes ouvertes » pour
les futurs élèves de seconde,
nouveaux à Sainte-Marie
5 juin
Fête de l’établissement
Sorties, visites, voyages
18-22 janvier
Classe de neige à Bessans
pour les 8e 1 et les 7e 1
28 janvier
Sortie à l’opéra de Lyon pour
les 9e 1 et 9e 2 : le Carnaval des
animaux, Ma mère l’Oye et
Babar
107
12 février
Sortie à l’opéra pour les 7e 4 :
La danse à petits pas
2 mars
Sortie à l’opéra pour les 8e 2 :
Les quatre saisons
6-8 avril
Voyage des 1res S1 : vallée du
Rhône, Cruas, Drôme, Avignon
avec R. Domenach, S. Hertz
et J. Rouressol
8 avril
Sortie à Rochebaron pour les 8e 1
et 8e 2 : visite d’un château fort,
ateliers calligraphie et
enluminures
9 avril
Visite du musée des Beaux-Arts
pour la classe de 7e 4
11-12 mai
Voyage à Vulcania
pour les classes de 7e 3 et 7e 4
25 mai
Sortie géologie des classes
de 1res S2, S3, S4 dans le massif
de l’Oisans avec M. Seytier,
O. Bertrand, S. Galli,
E. Beaumont, L. Perreyon
27 mai
Sortie à l’auditorium pour la
classe de CP : Pierre et le loup
9-10 juin
Voyage des 1res L à Marseille :
découverte de la ville, antique,
romane et contemporaine ;
visite d’îles et de calanques
avec B. Cazeaux et P. Fortin
Théâtre, ciné-club
Pour les élèves de première,
terminale, classe
préparatoire, parents,
professeurs, anciens
et amis :
4-5 janvier
Le rêve de Cassandre
de Woody Allen
4-5 mars
Sur les quais d’Elia Kazan
30 avril
Baptême de René Féret
Pour les élèves de 2nde
1er mars
Un homme pour l’éternité
de Fred Zinnemann
8 juin
Le cameraman
de Buster Keaton ; Charlot
soldat de Charlie Chaplin
Pour les élèves de 3e
4-5 janvier
Mon oncle de Jacques Tati
26-27 avril
African queen de John Huston
108
Pour les élèves de 4e
18-19 janvier
L’homme qui voulut être roi
de John Huston
6-9 avril
Une femme disparaît
d’Alfred Hitchcock
11 mai
Le mariage de Mickey,
pièce de B. Heitz jouée
par les élèves de 9e1
Dans le cadre de l’option
théâtre :
20-21 mai
Montage de pièces de Wajdi
Mouawad, auteur libanais
contemporain, qui travaille
à Montréal, avec les terminales
21-28 mai
Noces de sang de F. Garcia
Lorca, avec les premières
16-17 juin
L’avare de Molière, masqué,
en commedia dell’arte,
avec les secondes
Chorale, concerts
31 janvier
Prise d’aube de huit nouveaux
Petits Chanteurs
14 mars
Enregistrement de la Messe
en symphonie, partition
anonyme du XVIe retrouvée
au Puy-en-Velay
21 mars
Concert à la cathédrale
par la Schola : Stabat mater
de Pergolèse
28 mars
Concert à la chapelle de
la Trinité par la Maîtrise :
Funeral Sentences de Purcell,
Miserere d’Allegri,
Messe Nelson de Haydn
31 mars-4 avril
Animation des offices de la
semaine sainte et célébration
de Pâques à la cathédrale
Saint-Jean
10-14 avril
Camp musical de la Schola
à Samoëns
29 avril
Concert à la maison de retraite
Sainte-Camille par les classes
musicales de 7e, sous la
direction de D. Faricier
5 mai
Soirée musicale
28 mai
Concert de la Maîtrise
à l’église de l’Annonciation :
œuvres de Britten, J. Rutter
et Bernstein
109
17 juin
Concert à la résidence Morlot
par les classes musicales
de 7e, sous la direction
de D. Faricier
22 juin
Concert de fin d’année des
classes musicales du primaire
au théâtre de La Solitude
24 juin
Concert de la Saint-Jean à la
cathédrale par les trois chœurs
8 juillet-3 août
Série de concerts au Japon
par la Maîtrise
Activités sportives
19-21 mai
Au championnat de France
de badminton à Beauvais par
équipe, Sainte-Marie-Lyon
termine 5e en Benjamins et
Minimes ; en individuel,
S. Balas (1re) termine 5e
9 juin
Fête de l’A.S. : rencontres
sportives sur le site de La
Verpillière
21-25 juin
Tournoi de badminton pour
les classes de 9e, 8e et 7e,
organisé par D. Lavigne
110
A.P.E.L. - Association familiale
20 mars
Réunion des parents
correspondants du primaire
27 avril
Réunion des parents
correspondants de 4e /3e
30 avril
Réunion des parents
correspondants de 2nde / 1re
6 mai
Réunion des parents
correspondants de 6e / 5e
26 juin
Bourse aux livres pour les
classes du primaire
Animation spirituelle
15 janvier
« Café théo » pour les lycéens
16 janvier
Temps fort de catéchèse proposé
aux familles de CE1 et CE2, CM1
et CM2
19 janvier
Commission pastorale de
La Verpillière
26 janvier
Réunion du groupe « Maristes
en éducation »
27-29 janvier
Rencontre annuelle des
Animateurs en Pastorale
Scolaire et des responsables
de catéchèse et d’aumônerie
des établissements maristes
de France à La Verpillière sur le
thème : « La vie sacramentelle
dans nos établissements
scolaires, l’accompagnement des
jeunes, avant, pendant et après. »
5 février
Soirée malgache : repas typique,
animations, musique dans le
cadre du Projet Madagascar
6 février
Marche des pères de famille, de
Sainte-Marie de La Verpillière
jusqu’à la clinique des Petites
Sœurs des Maternités
Catholiques à Bourgoin
8-9 février
Réunions des parents des élèves
du primaire et du collège
préparant la Première
communion
9 mars
Réunion du groupe « Maristes
en éducation »
12 mars
« Café théo » pour les lycéens
LA
VERPIL
LIERE
13 mars
Temps fort de catéchèse proposé
aux familles de CE1 et CE2, CM1
et CM2
20-21 mars
Retraite des confirmands
à Mazille
26 mars
Soirée Madagascar
26-28 mars
Session inter établissements
maristes à La Neylière ;
Assemblée générale de
l’association « Maristes
en éducation »
1er-2 avril
Célébrations de la semaine
sainte
5 mai
Rencontre avec le vicaire
général de Grenoble pour les
élèves confirmands de SainteMarie et ceux de la paroisse
11 mai
Réunion du groupe « Maristes
en éducation »
12-16 mai
Pèlerinage des élèves de 3e
sur le chemin de Compostelle
18 mai
Sortie catéchèse à La Neylière
pour les élèves de CM1 :
« A la découverte des
missionnaires maristes » ;
commission pastorale de
La Verpillière
22 mai
Confirmation d’élèves du lycée
à l’église de Saint-QuentinFallavier
25 mai
Sortie catéchèse à Châtillonsur-Chalaronne pour les élèves
de CM2 : « Sur les traces de
saint Vincent de Paul »
27 mai
Sortie de catéchèse à Fourvière
pour les élèves de CE2
28 mai
« Café théo » pour les lycéens ;
retraite des enfants du primaire
préparant la Première
communion
29-30 mai
Première communion d’élèves
du primaire
5 juin
Profession de foi des élèves
du collège
9 juin
Retraite des élèves du collège
préparant la Première
communion
12 juin
Célébration de la Première
communion
112
15 juin
Rencontre de l’équipe pastorale
avec les adjoints en pastorale
des diocèses de Lyon et de
Grenoble
20 juin
Baptême des jeunes
à Sainte-Marie
22 juin
Commission pastorale pour
l’ensemble de l’établissement
à Lyon
29 juin
Fête de l’éveil à la foi
et de la catéchèse du primaire
4 juillet
Sortie « Maristes en éducation »
juillet
Voyage à Madagascar pour des
lycéens et des étudiants de BTS
Conférences, interventions, réunions
22-30 janvier
Réunions d’information sur
les procédures d’orientation
pour les parents des élèves
de terminale
30 janvier
Réunion d’information
sur l’orientation en fin de 3e
pour les élèves concernés et
leurs parents
1er février
Dans le cadre de l’information
sur les orientations en fin de 3e,
interventions auprès des élèves
de la division de représentants
de lycées techniques et
professionnels : Mmes Morat
(La Mache) et Houx-Plantier
(Boisard) ; MM. Charpin
(Jehanne de France), Fournier
(Paul Claudel), Jenselme (Don
Bosco)
13 mars
Forum des métiers pour les
élèves de première et terminale
11-18 mars
Intervention du Centre Jean
Bergeret sur « Les conduites
à risque chez l’adolescent »
en classes de seconde :
rencontre avec divers membres
de l’établissement (préfet,
professeurs, éducateurs,
infirmière, représentante
des parents) pour une
présentation de l’intervention,
assurée par Mme Nedjadi,
psychologue clinicienne ; puis
intervention auprès des élèves
qui ont eu à s’exprimer à partir
de photographies. Un bilan a
suivi, une semaine après.
113
20 mars
Réunion d’information sur
l’orientation pour les parents
des élèves de seconde
23 mars
Réunion sur le choix
des langues et du latin en 4e
pour les parents des élèves
de cinquième
29 avril
Réunion sur le choix
des langues en 6e pour les
parents des élèves de CM2
Echanges internationaux
7-19 février
Séjour des Français
à Heusenstamm, Allemagne
2-11 mars
Accueil des correspondants
anglais d’Ingatestone
3-18 avril
Accueil des correspondants
australiens de Bacchus Marsh
25 juin-25 juillet
Séjour de vingt et un Français
en Australie, encadrés
par J. Duboin et J.-P. Miolle
16-30 octobre
Séjour des Allemands en France
1er-9 novembre
Séjour des Français en
Angleterre
Etablissement
20 janvier
Conseil de maison : « Diversité
des disciplines mais unité
du savoir »
8-19 février
Stages en entreprise
pour les élèves de première STG
8 février-5 mars
Stages en entreprise
pour les élèves de BTS 2e année
6 mars
Journée « portes ouvertes »
10 mars
Conseil de maison : « Qualité des
propos entre élèves, professeurs
et parents »
15-18 mars
Cross Madagascar pour
les élèves du collège, du lycée
et de BTS
17 mars
Epreuves des TPE pour les
élèves de première
114
10 avril
Dans le cadre du jumelage
avec le collège de Baabda,
Liban, récital en l’église de La
Verpillière, donné par la chorale
de la paroisse Notre-Dame
du Liban (Lyon 8e) et le chœur
du couvent Saint-Antoine
(Chaponost)
13 avril
À l’ ESTRI à Lyon, examen
de Cambridge (first)
28 avril
Conseil de maison :
« Les emplois du temps,
le rythme de vie »
18-28 mai
Exposition de peintures,
photographies et sculptures
de professeurs et d’élèves
à la bibliothèque
27 mai
Assemblée générale de
l’association du jumelage
avec le Liban
12 juin
Fête de l’établissement
Sorties, visites, voyages
15-17 janvier
Voyage des 1res L et TL à Paris
avec P. Berthelot, P.E. Chavelet,
D. Perceveaux et N. Pic
23 janvier
Sortie de ski à Arêche-Beaufort
pour les élèves de 6e/5e
sous la conduite de Thomas
Clerc-Renaud
27-30 avril
Sorties géologie des classes
de 5e 2, 5e 5, 5e 1 et 5e 3 aux grottes
de La Balme sous la conduite
de Bénédicte Applagnat et
Françoise Delorme ; le 18 mai
pour les classes de 5e 4 et 5e 6
29 avril
Sortie des latinistes de 4e 5,
3e 4 et 3e 6 à Lyon : visite
des théâtres antiques et
de l’exposition « Post mortem »
au musée gallo-romain avec
M.P. Matray et D. Perceveaux
29 avril
Sortie découverte des CE1 A et B
à Saint-Chef : maisons en pisé
et fresques romanes
6-10 mai
Concours « Ciceron » à Arpino
pour Maëva Bonfanti (TL)
et Nicolas Tardy (TS1)
accompagnés de Mmes Berthelot,
David-Ferré et M. Perceveaux
115
11-15 mai
Voyage à Venise pour les classes
de 5e 5, 5e 6 et quelques élèves
de 5e 3 sous la responsabilité
de Françoise Delorme,
accompagnée d’Elodie Ramora,
Franck Laillaut, Jean-Pierre
Miolle et Thomas Clerc-Renaud
3 juin
Les élèves de CM1 B
rencontrent à La Solitude
leurs correspondants de CM1
pour découvrir ensemble
le Vieux-Lyon, avec leurs
professeurs Mmes Lefèbvre,
Deleigue et Peignot
Théâtre, ciné-club
20-21 janvier
Projection de La mort
aux trousses d’A. Hitchcock
pour les élèves de première,
terminale et BTS
8 février
Représentation de C’est trop
génial d’être aujourd’hui à
L’Isle d’Abeau pour les élèves
de maternelle et de CP
15 mars
Représentation théâtrale
Merlicoquet et autres contes
à L’Isle d’Abeau pour les
élèves de CE1 A et B
7-8 juin
Spectacle de théâtre des lycéens
dirigés par O. Mocellin :
au programme, extraits
d’Aristophane, Anouilh, Tristan
Bernard, Musset et Tennessee
Williams
Chorale
13 janvier
Concert à la maison de retraite
de La Verpillière par le groupe
préparatoire
21 mars
Messe et concert à Condrieu
par les préparatoires et Petits
Chanteurs
10-17 avril
Camp musical à Corrençon
pour le groupe préparatoire
avec T. Clerc-Renaud
et N. Bottazzi
5 juin
Concert des Petits Chanteurs
et du Chœur mixte à L’Isled’Abeau
26 juin
Concert de fin d’année
du groupe préparatoire
à l’église de La Verpillière
116
Activités sportives
Volley-ball :
sont champions du Lyonnais,
catégorie Benjamins :
S. Alcala, A. Mocellin,
P. Ulysse (6e 2), A. Vacher (6e 3)
et S. Khechaba (6e 5)
Badminton :
au Régional par équipe 2010
à Ambérieu-en-Bugey,
Sainte-Marie-La Verpillière
termine en Benjamins : 3e ;
Minimes : 7e ; Cadets : 1re
Judo :
Championnat de France
Minimes : V. Breniaux (5e 2)
et L. Diard (5e 1) : 8e ;
Cadets/Juniors :
P.A. Favre (1re S2) : 5e en 60 kg ;
P. Demonet (2e 4) : 2e en 66 kg ;
P. Bouvet (2e 4) : 8e en 81 kg ;
T. Montagnon (1re ES) : 3e
en 90 kg.
21 mai
Plus d’une centaine délèves
ont participé au gymnase
à un tournoi de volley-ball
à l’occasion du « jubilé »
d’André Candéla
CAR
NET
Naissances
Eugénie, fille de Vincent
Guigard, préfet des terminales
à Lyon, le 1er janvier
Raphaël, fils d’Emmanuelle
Gras, professeur de lettres
à La Verpillière, le 28 février
Tania, fille de Carole
Defourneaux, professeur d’E.P.S.
à La Solitude, le 19 mars
Amédée, fils de Valérie Faure,
professeur de français à
La Verpillière, et de Jean-Claude
Chrétien, ancien professeur
de musique à La Verpillière,
le 20 mars
Laurène, fille de Rachel Perrot,
professeur de S.V.T. à Saint-Paul
et à La Solitude, le 19 avril
Clément, fils de Gilles
Le Bonhomme, professeur
de S.V.T. à Lyon, le 25 mai
Mariages
Didier Tourrette, préfet
des terminales et BTS de
La Verpillière avec Valérie Prat,
responsable de la catéchèse
en lycée à La Verpillière,
le 23 janvier
Clotilde Peignot, professeur
des écoles en 8e 2 à Lyon, avec
Nicolas Randet, le 17 avril
Agnès Deshayes, professeur
des écoles à La Verpillière, avec
Emmanuel Jaudel, le 17 juillet
Départs
Lyon
Henri Brenders, professeur
d’anglais à Lyon, entré en 1967
Annick Meaudre, secrétaire de
direction, entrée en 1973
Marie-Christine Dubost,
professeur de sciences
économiques, entrée en 1975
Marie-Claude Mollard,
professeur d’histoire-géographie,
entrée en 1979
Marie-Lobka Cadoz, professeur
de gestion, entrée en 1989
Catherine Coiffet, surveillante
en classes préparatoires,
entrée en 1999
Odile Nachbauch, infirmière,
entrée en 1999
Stephan Lange, pêtre au service
de l’établissement depuis 2007,
appelé à une autre mission
118
La Verpillière
Bernard Moulin, professeur
d’anglais, entré en 1974
André Candéla, professeur
d’E.P.S., entré en 1975
Bernard Forel, professeur de
mathématiques, entré en 1976
Décès
Nous participons à la douleur de
Alix Favre (TS1), Gautier (1re S1)
et Sixtine (5e 8) à Lyon qui ont
perdu leur père, le 10 janvier
Thierry Martin, professeur de
lettres, qui a perdu son frère,
le 11 février
la famille de Jean-Pierre Gay,
qui fut au service de la
comptabilité à Saint-Paul
pendant une trentaine d’années,
décédé le 19 février
Anne-Laure Le Blanc,
éducatrice en 4e à La Solitude,
qui a perdu sa mère, Nicole,
secrétaire à Sainte-Marie
pendant 32 ans, le 21 février
Michèle Folachier, professeur
d’espagnol à Lyon, qui a perdu
sa mère, le 22 février
Melvin Gros (2nde 5 à La
Verpillière), qui a perdu son
père, le 3 mars
Lucas Groléaz, élève de 2nde 1
à La Verpillière, et de ses
parents, qui ont perdu Fabien,
ancien élève de TS1
l’an dernier, décédé
accidentellement, le 15 mars
Michel Rivoire, président de
la Fondation des Maristes
de Puylata, qui a perdu sa mère,
le 27 mars
Myriam Rolinet, responsable
des cuisines à La Solitude, qui a
perdu sa mère, le 1er avril
Régis Frély, ancien professeur
de physique à Lyon, qui a perdu
sa fille Raphaëlle, le 2 avril
Fabienne Cassagne, professeur
de S.V.T. à La Solitude, qui a
perdu son père, le 18 avril
la famille d’Antoine Mappus,
professeur d’allemand à Lyon de
1969 à 1983, décédé le 10 mai
Danielle Giroud, responsable
des 3es à La Verpillière, qui a
perdu son père, le 15 mai
Joséphine de Rohan-Chabot (TL)
et Gaspard (5e 8) à Lyon,
et de leurs parents, qui ont
perdu Jeanne, élève de 2nde 8,
le 15 mai
Cyrille Guiran, responsable
informatique à Lyon, qui a perdu
son père, le 28 mai
Crédits photos : Travaux d’arts plastiques,
sous la conduite de Nathalie Charcosset :
Idéogrammes, classe de 3e 1
Dentelles, classe de 5e 3
La Verpillière
120
L’Enseignement Catholique de l’Académie de Lyon
en partenariat avec l’Université Catholique de Lyon,
l’Institut de l’Oratoire, l’IFD de Grenoble,
l’Observatoire des cultures religieuses-Fondation
Fourvière et FORMIRIS Rhône-Alpes-Auvergne
propose aux enseignants
3e UNIVERSITE D’ETE
ENSEIGNEMENT
ET RELIGION
3 JOURNÉES DE FORMATION À LYON
LES 7, 8 ET 9 JUILLET 2010
Lycée Sainte-Marie
4 montée Saint-Barthélemy
69005 Lyon
Professeurs d’enseignement religieux de Sainte-Marie
Dans le cadre de la formation des professeurs dispensant un cours
d’enseignement religieux, nous vous proposons cette année de
profiter de la richesse du programme de la 3e université d’été
Enseignement et religions :
• vous aurez la possibilité de rencontrer des collègues
d’autres établissements,
• vous profiterez d’une diversité d’approches :
inter religieuse et culturelle,
• vous pourrez écouter des formateurs de qualité,
du mercredi 7 juillet 9h au vendredi 9 juillet 17h.
2 e TRIMESTRE 2010
SAINTE-MARIE LYON
4 MONTÉE SAINT-BARTHÉLEMY
69005 LYON
TÉL. 04 78 28 38 34
www.sainte-marie-lyon.fr
DIRECTEUR DE PUBLICATION
Michel Lavialle
CONCEPTION Créatifs du Monde / Agence Mordicus
IMPRESSION Dugas IPC

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