livre 103 OK:Mise en page 1 - Sainte
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LYON SAINT-PAUL LES MISSIONS LA SOLITUDE LA VERPILLIERE 103 som mai re REFE REN CE RE FLEXI ONS 08 ÉLOGE DE LA LOINTEUR RENAUD CAMUS 12 LES ÉTUDES SCOLAIRES ONT-ELLES UNE ÂME ? XAVIER DUFOUR 20 POUR UNE CULTURE SCOLAIRE GUY COQ LES YEUX FERTI LES 28 L’ÉNIGME DU TRIPTYQUE DE LA TOUR-DU-PIN JEAN-LUC GAUCHON RE FLEXI ONS COL LEGE 48 CINÉ CLUB AMADEUS 58 TRAVAUX D’ÉLÈVES LES VALEURS DES JEUNES DE 15 À 24 ANS 74 RÉQUISITOIRE CONTRE L’INDIFFÉRENCE IN MEMO RIAM 94 EN MÉMOIRE D’UN BÂTISSEUR LE PÈRE PERROT XAVIER DUFOUR 76 ÉCHANGES LES ÉTATS-UNIS L’ALLEMAGNE 82 VOYAGE PÉDAGOGIQUE 87 10E ANNIVERSAIRE JUMELAGE AVEC LE LIBAN NOU VEL LES 104 LYON 110 LA VERPILLIÈRE 117 CARNET Les exigences paradoxales de la vie démocratique conduisent parfois à des impasses ou des enfers. Le consommateur exige de son épicier, le patient de son médecin, le citoyen de l’Etat, des services de meilleure qualité, plus rapides, moins chers, générant davantage de plaisirs. Pourtant la complexité que cela engendre paralyse bien souvent notre société, nous rendant incapables de décider du fait d’un excès de précaution, ou rendant les moins argentés ou les moins éduqués incapables d’accéder aux produits issus de ces avancées techniques. En fait de plaisirs nous obtenons angoisses ou frustrations. Transposée dans l’éducation, l’exigence aveugle fait naître un même paradoxe : on veut que l’élève apprenne plus en moins de temps et plus efficacement, que les parents soient sans faille sous peine de sanction juridique ou financière, que les professeurs s’en tiennent à l’essentiel, ne se laissent pas aller à des digressions... On en arrive paradoxalement pour y parvenir à diminuer l’exigence intellectuelle, à oublier la soif spirituelle pour être intraitable sur les procédures à acquérir. Pour éviter l’horrible élitisme, on s’interdit la recherche de l’excellence et on privilégie les techniques d’apprentissage, plus rassurantes dans l’immédiat, mais sans fécondité véritable pour cette vie ou après. Pourtant le désir d’être le meilleur, de choisir le meilleur, est un désir fondamental, même s’il peut être dévoyé quand il conduit à privilégier ceux qui ont des facilités aux dépens de ceux qui ont plus de peine ; et de ce point de vue le collège unique a ceci de préjudiciable qu’il ne trace qu’une unique voie EDI TO d’excellence. Mais à ne pas prendre le risque de la question, à ne pas savoir prendre son temps dans les méandres d’une digression, à se rassurer avec des techniques scolaires, à vouloir des familles sans faille, la relation pédagogique se dessèche et ce sont les plus forts qui s’en sortent. La parabole des talents nous apprend une autre hiérarchie : non entre ceux qui ont reçu un talent et ceux qui en ont reçu dix, mais entre ceux qui font ou non fructifier leurs talents. L’enfant à qui on n’aura pas demandé en proportion des richesses qui sont en lui connaîtra « des pleurs et des grincements de dents », et pas dans l’au-delà. Nous serons donc maristes et fidèles à ce que nous transmettent les pères si nous savons aider à éclore au cœur de chacun le désir de se donner entièrement, que si nous osons demander à chacun d’être fidèle à la merveille qu’il est profondément (psaume 138). Cela ne va pas sans passion, ni sans patience. Dans les deux cas un lot de souffrance. Mais avant d'être une espérance pour l'avenir, la vie éternelle est, pour le présent, une exigence, disait le cardinal de Lubac MARC BOUCHACOURT ÉLOGE DE LA LOINTEUR LES ÉTUDES SCOLAIRES L’ÉNIGME DU TRIPTYQUE DE LA TOUR-DU-PIN ré flex ions ÉLOGE DE LA lointeur Sous ce titre Lyon Mariste propose à votre réflexion un texte ayant trait à la conduite scolaire. MARC DU SAUNE : Mais dans une situation où il s’agit d’amener à la culture et à la connaissance beaucoup d’élèves qui par leurs origines y sont souvent très étrangers, est-ce que vous ne craignez pas que cette espèce de distance, de distanciation, que vous recommandez chez les professeurs – je sais que vous détestez qu’on dise profs, et plus encore peut-être, enseignants – n’accroisse encore le sentiment, chez les élèves dont je parlais, qu’ils sont étrangers à la culture, qu’elle ne les concerne pas, qu’elle n’est pas faite pour eux, qu’elle est décidément trop éloignée ? Ou bien, pour poser ma question autrement, ne peut-on pas envisager que ces profs auxquels vous semblez reprocher un certain relâchement de langage, de tenue vestimentaire et d’attitude sociale, adoptent ces partis que vous réprouvez justement pour aller au-devant de leurs élèves, pour abréger la distance qu’il y a entre eux et la culture, entre eux et la connaissance ? RENAUD CAMUS : Oh, je veux bien leur reconnaître ces bonnes intentions, si vous voulez, même si je suis convaincu qu’elles sont fourvoyées. Je suis convaincu que c’est une erreur de vouloir toujours rapprocher l’enseignement de l’enseigné. Ce n’est pas du même qu’il faut prodiguer à l’élève. Le même, il en aura toujours assez. C’est le lointain qu’il faut lui apprendre à aimer, le dissemblable, le non-coïncidant : le mot qu’il ne comprend pas RÉFÉ REN CE dans une phrase, la phrase qu’il ne comprend pas dans un texte, le nom qu’il ne connaît pas dans une liste, le geste que lui n’aurait pas fait dans une situation donnée, l’idée qui ne lui serait pas venue, la tournure syntaxique ou stylistique que jamais ne lui aurait dictée la simple expression de lui-même. On apprenait récemment, sans surprise, mais sans gaieté, que les lycéens réclament à présent des journaux qui leur ressemblent davantage, des journaux mieux vulgarisés, des journaux qui ne leur apprennent, en somme, que ce qu’ils savent déjà ; ou du moins qui ne lâchent pas un instant le bras de leur ignorance, pour mieux la guider. Mais si la connaissance doit éternellement s’aligner sur l’ignorance, ne pas la lâcher d’une semelle, elle a tôt fait de se confondre avec elle, de se réduire à elle. Je crois que, pour rester vivante, la connaissance exige toujours de ceux qui aspirent à elle un saut dans l’inconnu, au contraire, un lâchage mesuré de soimême, une acceptation heureuse du dépaysement. Et puis il y a les dictionnaires, que diable, les encyclopédies, Internet, la curiosité, les questions, la recherche, les voyages, le temps ! Si l’on prétend interdire les mots que tout le monde ne connaît pas, il y aura de moins en moins de mots, le vocabulaire se réduira comme peau de chagrin, ainsi qu’on l’a vu faire déjà à la syntaxe, qui dispose toujours de moins en moins de formes, de moins de temps, de moins de mode, alors que les modes grammaticaux sont des modes de la présence et de la perception, des façons d’être au monde et de l’appréhender. L’art est lointain, voilà ce qu’est l’art : la culture est autre chose, la littérature ne nous parle pas de nous, ou bien, si elle nous parle de nous, c’est par un détour à travers autre chose, l’autre, un autre qui est la forme, les formes, la distance, l’écart 10 avec soi-même. Pardonnez-moi de citer une fois de plus la phrase d’Adorno que je trouve si juste et si belle, et que je plaçais en exergue d’un chapitre d’Esthétique de la solitude 1, il y a déjà quinze ans de cela : « L’étrangeté au monde est un aspect de l’art : celui qui perçoit l’art autrement que comme étranger au monde ne le perçoit pas du tout. » 2 On dit toujours des grandes liturgies religieuses, ou bien des fastes du pouvoir, surtout du pouvoir monarchique, qu’ils sont du théâtre, des mises en scène de théâtre, des emprunts aux arts de la scène. Mais c’est le contraire qui est vrai : c’est le théâtre qui est un emprunt aux rites d’échange avec les dieux, même si cet échange est fictif, et même s’il n’est en rien un échange. C’est l’art qui imite, non pas tant la nature que les protocoles inhérents à tout pouvoir dès lors qu’il n’est pas la force pure ; et d’abord inhérents au pouvoir sur soi-même, sur les événements, sur la peur, sur l’horreur, sur l’injustice, sur les émotions trop fortes. C’est la culture, c’est l’enseignement, c’est l’éducation qui figurent en chacun de leurs modes, en chacune de leurs inflexions, la sortie de soi, le décollement d’avec le moi, l’insoumission au destin passif, l’inasservissement à la fatalité, que celle-ci soit psychologique, économique, intellectuelle ou sociale. M. DU S. : En somme, vous recommandez un enseignement aussi formalisé, solennel, pompeux, distant, que la tragédie classique, ou que l’administration de la justice dans ces palais que vous aimez tant... 1 Renaud Camus, Esthétique de la solitude, P.O.L, 1990 Theodor Adorno, Aesthetische Theorie, Suhrkamp Verlag, Francfort-sur-le-Main, 1970. Traduction française, Théorie esthétique, Klincksieck, 1974 2 11 R. C. : Non. Je n’irai pas jusque là. Mais je crois en effet qu’il faut y mettre des formes, pour enseigner. Des formes tempérées par la gentillesse, bien sûr, par la patience, la compréhension, l’attention particulière ; mais des formes, oui, des formes spatiales sinon architecturales, du rituel, de la non-coïncidence avec soi-même, j’en reviens toujours à cela, et que ce soit pour les élèves aussi bien que pour les professeurs. Vous savez que j’aime à parler de la lontanànza de l’art, ce que je suis tenté de traduire par sa lointeur, ou sa lontanité, je ne sais pas : ces deux néologismes me plaisent autant l’un que l’autre. Les professeurs doivent être des maîtres de lointeur, pas de proximité. Leur mission n’est pas de rendre le monde plus petit, mais plus grand RENAUD CAMUS, ENTRETIEN AVEC MARC DU SAUNE La dictature de la petite bourgeoisie, éd. Privat, 2005 LES ÉTUDES SCOLAIRES ONT-ELLES UNE Libres réflexions sur un aphorisme Le père Perrot n’aimait pas les longues déclarations : la concision, voire l’ellipse, étaient la marque propre de cet homme pudique et rude. Il n’a laissé aucun traité de pédagogie, préférant accomplir une œuvre éducative et la confier vivante à ses successeurs. Il laisse pourtant à la postérité quelques aphorismes, ciselés jusqu’à l’épure, riches et suggestifs, un peu à l’image des oeuvres architecturales qu’il conçut de conserve avec Georges Adilon. C’est l’une de ces paroles glanées dans les éditoriaux de Lyon-Mariste que je voudrais interroger ici : de l’enseignement elle évoque la visée et les sources profondes ; dans le brouhaha des réformes qui se bousculent et se neutralisent, ce propos nous ramène à l’essentiel de l’acte éducatif. « A la culture de la réponse et de la banalisation, soucieuse de sécurité, substituer celle de l'interrogation et de l'admiration, motrice de la vie spirituelle. L'aspect parcellaire des disciplines quant à leur objet propre dans la culture ne peut cacher le fait que chacune porte la visée globale de l'interrogation humaine. » Ce propos très dense place l’activité intellectuelle, donc l’ensemble de la culture scolaire et universitaire, entre deux pôles unifiant, l’un du côté de la source de la vie intellectuelle, l’autre du côté de sa finalité ultime. 13 ÂME ? du père Perrot La source de l’interrogation humaine Quelle est la source du savoir, le moteur secret de toute culture, sinon « l’interrogation et l’admiration » comme l’avaient souligné les Grecs ? Il n’y aurait aucun progrès de la connaissance sans un émerveillement gratuit et une générosité de l’esprit. Einstein le disait à sa façon: « La plus belle et la plus profonde émotion que nous puissions expérimenter est la sensation mystique. C'est la semence de toute science véritable ». A cette disposition à l’émerveillement correspond dans l’ordre moral la vertu d’humilité : le réel que la culture explore et enrichit apparaît toujours plus vaste que ce que saisit l’esprit humain. En avançant dans la contemplation de l’être, l’esprit est saisi par son caractère inépuisable. Ainsi Newton avouait-il à la fin de sa vie : « Il me semble que je n’ai jamais été qu’un enfant jouant sur une plage, m’amusant à trouver ici ou là un galet plus lisse ou un coquillage plus beau que d’ordinaire, tandis que, totalement inconnu, s’étendait devant moi le grand océan de la vérité... » On est loin de la vision positiviste selon laquelle seules les procédures purement descriptives de la science, c’est-à-dire l’organisation des faits en lois générales, ont valeur de connaissance. Dans cette perspective, le seul critère de vérité consiste dans l’efficacité des prédictions. Il convient de s’y arrêter un instant puisque si le positivisme est largement remis en cause chez les scientifiques, il n’en a pas moins contribué à la représentation dominante de la connaissance dans la société. 14 On sait que le positivisme et son durcissement scientiste n’ont produit aucune découverte notoire. Peu de grands noms de la science moderne se reconnurent dans la vision d’Auguste Comte et les prédictions de celui-ci furent largement infirmées (ainsi lorsqu’il refusait la théorie atomique qu’il jugeait trop métaphysique !). Pire encore, ce que le positivisme a produit dans le grand public fut bien le contraire du but recherché, à savoir l’effacement de la science, réduite à une somme de techniques sans âme, hors du champ de la culture. C’est sans doute dans les sciences humaines que le positivisme eut le plus d’impact. Jusqu’à influer sur la naissance de la psychanalyse qui lui est pourtant si étrangère dans son principe (interpréter une maladie non par des causes organiques mais par le rapport du malade à lui-même, c’est-à-dire selon des considérations de sens plutôt que de mécanismes). On lit ainsi sous la plume de Freud que « dès lors qu’un homme s’interroge sur le sens et la valeur de sa vie, il est malade » 1. Une telle déclaration résume parfaitement la misère d’une culture qui renonce à l’interrogation sur le sens. Or, ce renoncement est à l’œuvre dans les programmes scolaires, contribuant efficacement au dessèchement des esprits. Ainsi l’enseignement des Lettres fortement influencé par la linguistique dans les programmes de français. On a voulu privilégier l’analyse formelle, structurelle des textes, au détriment de leur sens. Pouvait-on davantage dégoûter les élèves de la lecture ? Car à quoi bon lire, s’il s’agit d’inventorier les figures de style, plutôt que d’enrichir, d’affiner le sens de l’expérience humaine ? Le propre des grands auteurs n’est-il pas de nous révéler à nous-mêmes, de sorte que « les chefs-d’œuvre nous lisent plutôt que nous ne les lisons » ? On pourrait situer à ce niveau l’impact de l’inculture religieuse chez les maîtres comme chez les élèves. Comment a-ton pu penser libérer les esprits en les sevrant des grandes 1 Freud, Lettre à Marie Bonaparte, Briefe, 1873-1939, Frankfurt am Main, 1960. 15 interrogations spirituelles portées par les religions ? Qui ne voit par exemple la supériorité intellectuelle, artistique, philosophique que confère l’éducation juive à ses enfants ? Comment ne pas comprendre que la rumination des textes bibliques ou du Talmud, la confrontation critique des interprétations, acquises dès le plus jeune âge, constituent la meilleure formation à la sagacité intellectuelle ? Or en serait-il de même si les questions religieuses ne concernaient pas le sens de la destinée humaine ? La source de la culture, c’est l’inquiétude du sens, le saisissement d’un esprit face à sa propre énigme, entre l’angoisse et l’émerveillement. L’horizon de la culture La deuxième partie de la citation du père Perrot nous ouvre à l’horizon du savoir. Quelle est la finalité des discipline scolaires, sinon « la visée globale de l’interrogation humaine », c’est-à-dire la Vérité, ultime, intégrale, comme promesse de sens ? Car tout enseignement qui se résoudrait au caractère partiel de ses résultats ne pourrait que désespérer l’intelligence, qui vise toujours au-delà des savoirs particuliers. Dans une lettre à son ami Bredin, le grand Ampère confiait : « Je ne trouve que des vérités, enseigne-moi la Vérité ». Car les disciplines particulières n’ont d’autre valeur que d’aiguiser le désir de la vérité, du bien, du beau... « L’homme ne vit pas seulement de pain... » dit l’Evangile et Dostoïevski ajoute que « seule la beauté lui est indispensable ». On sait combien on tarit le désir de vérité d’un élève en ne lui proposant que des savoirs « procéduraux », des recettes, etc. Il faut donc lutter contre une approche utilitariste des études scolaires et les fausses pédagogies de la « motivation » pour lesquelles c’est lorsqu’un enfant comprend l’« intérêt » d’une discipline qu’il en trouve le goût. Laissons cette logique de Caisse d’Epargne aux rusés et préférons la logique de la vie qui toujours donne raison au généreux plutôt qu’au calculateur. Plus une connaissance est gratuite, plus elle s’avère féconde. 16 Ainsi, l’enseignant doit-il porter le souci de la relativité de sa discipline, c’est-à-dire être capable de la situer par rapport aux autres modes de connaissance, plutôt que de s’enfermer dans un discours autosuffisant. Relativité de son objet d’abord : chaque discipline, chaque savoir explore l’être sous un certain rapport. La physique étudie le monde matériel sous l’angle du mécanisme, la mathématique sous l’angle de la relation, la philosophie sous l’angle de l’être, la poésie sous l’angle sensible, symbolique... Relativité de sa méthode ensuite : la méthode des sciences humaines n’est pas la méthode expérimentale des sciences naturelles, etc. Relativité de son niveau de « vérité » enfin, c’est-à-dire de son degré d’adéquation au réel, de sa pénétration du réel. La « vérité historique » n’est pas la vérité des sciences de la nature, la vérité des sciences expérimentales n’est pas la vérité des mathématiques... Ainsi, par delà la variété des approches spécifiques, c’est l’unité du réel qui est visée. S’il faut distinguer les plans, il convient de ne pas les opposer, et de veiller à les articuler. Par exemple, l’homme de la philosophie, de la biologie, de la sociologie, de la psychologie, des sciences humaines... est bien le même homme. Oublier l’unité de cet objet, l’homme en l’occurrence, c’est le sacrifier à ses réductions : n’est-ce pas la tendance lourde des sciences humaines que de ne voir en l’homme seulement le rouage économique, l’atome social, le sujet de conflits psychiques, etc. De même, la nature étudiée par les sciences naturelles, la philosophie, la théologie, est-elle une et même nature, diversement appréhendée. Un professeur de biologie étudiant les théories darwiniennes de l’évolution ne devrait donc pas être surpris que ses élèves lui posent des questions situées sur d’autres plans : philosophique, voire religieux, puisque c’est bien du même monde, par-delà la variété des approches. C’est bien à l’enseignant d’apprendre à distinguer les différents plans, puis de suggérer comment on peut les articuler : « distinguer pour unir ». Mieux, par delà la pluralité des objets (le monde, l’homme, Dieu...), la connaissance vise la totalité du réel. L’esprit n’est à 17 demeure que quand il se meut dans l’absolu comme un Descartes l’avait si profondément saisi. De ce point de vue, le seul objet propre de l’intelligence est le vrai inconditionné, l’Un ou Dieu, selon la métaphysique à laquelle on se réfère. Souligner la relativité des disciplines, ce n’est certes pas les disqualifier, mais au contraire les ouvrir à plus large qu’elles, à la totalité du réel. Ainsi l’enseignant de telle matière est-il vraiment un éveilleur s’il prépare l’esprit d’un élève à accueillir plus grand que sa seule discipline. Un regard chrétien sur les disciplines profanes 2 Puisque nous sommes dans une école « à vocation chrétienne » comme l’aimait à dire le père Perrot, je me demanderais pour terminer ce que pourrait être une perspective chrétienne sur l’instruction profane. Tout d‘abord, il est de bonne théologie de souligner l’autonomie relative des disciplines et de leurs méthodes. La science, l’art, la culture, sont, pour une part en tout cas, indépendantes d’une option philosophique ou métaphysique particulière. C’est même cette émancipation de la science, de l’art... qui en a permis la fécondité et l’essor au XVIIe siècle. C’est lorsqu’ils ont oublié cette marge d’autonomie que les théologiens ont mis en péril le difficile équilibre entre foi et raison qui constitue l’un des piliers de la culture occidentale. Car la Bible n’a pas compétence dans l’ordre des sciences naturelles, elle vise une tout autre profondeur, le sens même de l’homme, de sa présence au monde, de son lien à l’Absolu. 2 Ces derniers propos prolongent le cadre strict de la citation du père Perrot et s’inspirent par ailleurs d’une conférence de Jean-Noël Dumont intitulée « Des connaissances profanes à la connaissance de Dieu », publiée dans Xavier Dufour, Enseigner, une œuvre spirituelle, textes de référence sur l’éducation, Parole et Silence, 2005. 18 Cependant, il faudra s’interroger jusqu’à quel point les diverses approches du réel sont indépendantes les unes des autres ; la science peut-elle se passer d’une philosophie de la nature ? L’étude de la littérature ne renvoie-t-elle pas à une anthropolgie implicite ? Une fois cette autonomie relative des disciplines évaluée, le chrétien pourra s’interroger sur le juste usage qu’il doit faire des vérités naturelles dévoilées par les disciplines. Car il est de bonne théologie aussi de s’efforcer de sanctifier tout le labeur humain, particulièrement la culture profane. Paradoxalement (le christianisme est par nature paradoxal), cet usage doit être pensé selon deux directions contradictoires, jusqu’à faire apparaître une tension constitutive du mouvement de la connaissance. D’un côté, il faut s’émerveiller sur ce dont l’esprit humain est capable, son pouvoir de pénétration du réel, le génie créatif de l’art et des civilisations. L’esprit sera ainsi conduit à ce saisissement de gratitude devant le don que constituent le monde et ses objets, mais plus encore devant le don de l’esprit humain lui-même, assez vaste pour contenir l’univers. « Pensée fait la grandeur de l’homme » 3 remarque Pascal et le savant Louis De Broglie en écho souligne que « le plus mystérieux est qu’un peu de science soit possible ». Passant des objets les plus singuliers aux plus généraux, des impressions éphémères aux principes universel, l’esprit s’élève par son propre mouvement aux « questions éternelles » dont parle Dostoïevski. Mais en même temps, il faut constater l’inachèvement de tout savoir naturel, et d’une certaine façon sa vanité. A quoi bon consacrer sa vie à connaître les mystères de la création, si les fondements derniers nos échappent sans cesse ? « J’ai mis tout mon cœur à comprendre la sagesse et le savoir, la sottise et la folie et j’ai compris que tout cela aussi est recherche de vent » 4 dit 3 4 Brunschvicg, 346 Ecclésiaste 1, 17 19 l’Ecclésiaste. Pire encore, que peut valoir une connaissance qui, aussi bien intentionnée soit-elle, ne cesse d’ouvrir des chemins aux pires barbaries ? L’épreuve moderne du mal, d’Auschwitz au Goulag, est la pierre de touche de tout rationalisme. Dans son obsession d’autonomie, la raison raisonnante tourne vite au délire idéologique. Face à ce naufrage, l’esprit est inéluctablement conduit à une crise. Mais cette crise peut être salutaire, qui conduit la raison au seuil d’une conversion, de l’intelligence discursive à l’intelligence du cœur, de « l’ordre de l’esprit à celui de la charité ». Ainsi Pascal, dédaignant les mathématiques où il excellait, répond-il aux invitations de Pierre de Fermat : « pour la géométrie je ne ferai pas un pas de plus. »5 Serait-ce que la philosophie est seule digne d’estime ? « Se moquer de la philosophie, c’est vraiment philosopher » rétorque Pascal, ramenant celle-ci à sa vérité dernière : révéler au savoir son propre néant : « La dernière démarche de la raison est de reconnaître qu'il y a une infinité de choses qui la surpassent ; elle n'est que faible, si elle ne va pas jusqu'à connaître cela. » 6 Aussi la vraie tâche d’une vie n’est-elle pas la connaissance, mais la charité, c’est-à-dire la réconciliation de la vérité et de l’amour. « Il faut que l’amour procède de la vérité pour que la connaissance fructifie en amour » 7 écrivait Maritain. Toute connaissance doit concourir à ce but, sous peine de sombrer dans l’orgueil et le désespoir. Combien d’intelligences vives, pénétrantes, se sont-elles enlisées dans les sables du cynisme et de la désillusion, faute de n’avoir pu accéder à cette « intelligence du cœur » qui est bien le cœur de l’intelligence ? Ce que le grand Bossuet avait jadis résumé en une formule définitive : « Malheur à la science qui ne se tourne pas à aimer. » XAVIER DUFOUR Œuvres complètes, Lafuma, Seuil, 1963, p. 282 Brunschvicg, 267 7 De l’esprit d’oraison, Parole et Silence, reéd. 1998, p.17 5 6 Pour une CULTURE Extrait d’une conférence prononcée Dans la construction de la culture, l’école a une fonction limitée mais nécessaire. Elle est travaillée par la querelle récurrente sur la distinction entre éducation, enseignement, instruction. Vouloir limiter la fonction de l’école à l’enseignement ou à l’instruction, c’est oublier que l’un et l’autre se produisent toujours à l’intérieur d’un processus de culture ou d’éducation. Mais quelle part de culture revient à l’école, dans la mesure où elle ne saurait être le seul lieu culturel ? Dans la société moderne, certains aspects essentiels de l’héritage culturel ne peuvent être transmis autrement que par la médiation de l’institution scolaire. La raison en est que beaucoup de transmissions spontanées ne se font plus, parce que les formes culturelles et sociales sont différenciées et également parce que celles-ci supposent des modalités, de la durée et d’autres conditions sociales que l’école est le seul média à pouvoir réaliser. Même si la technologie est un aspect de la culture générale, le but de l’école n’est pas et n’a jamais été de former directement à un métier. La culture générale a pour but de préparer notamment à l’initiative sociale, culturelle et économique. Contrairement à une idée répandue, l’unique finalité de l’école n’est pas l’individu ; institution médiatrice, l’école est bipolaire, elle a pour finalité aussi bien l’individu que la société. Le choix de l’un des pôles à l’exclusion de l’autre le détruit lui-même et déstructure la finalité de l’école. Une version plus complète de ce texte a été publiée dans la revue La Pensée en 2009 ; il reprend divers paragraphes du chap. 2 « Sens d’une culture générale à l’école» de l’ouvrage Eloge de la culture scolaire publié par Guy COQ aux éditions Le Félin en 2003. Du même auteur, et plus récent : Dix propositions pour une école juste, DDB, 2005 1 21 SCOLAIRE le 16 novembre 2009 à La Solitude 1 Culture scolaire et repères d’un monde commun A travers la scolarisation, une société s’efforce de transmettre aux jeunes le meilleur de la culture héritée, ou encore ce qui a tellement compté dans la durée de cette société que cela l’identifie ou tient le rôle d’élément quasi fondateur. L’école n’est pas seule à intervenir sur ce plan, mais la durée de son action, son poids institutionnel la dotent d’une importance décisive. Du coup, la culture scolaire fait partie des procédures d’élaboration et de reconstruction permanente de la mémoire commune, de l’identité sociale, à travers la réinterprétation du passé. Il y a donc urgence à réexaminer ce qui fait l’essentiel de la culture scolaire. Il y a certes les savoirs. Mais l’élucidation des points de repère communs, la reprise et la reconstruction d’une mémoire commune, les relations à réinventer avec des œuvres et des monuments, des événements qui ont donné sens à une certaine forme d’humanité sont là des aspects également décisifs de la culture scolaire. Par le travail sur la mémoire qui lui appartient, l’école arrache l’enfant à la myopie de l’actualité immédiate et construit en lui la capacité du futur, c’est-à-dire du vrai temps qui appartient à la jeunesse. Devenir citoyen, les discours dominants l’oublient, c’est devenir capable de se représenter comme acteur possible d’une histoire collective. La culture scolaire doit aussi se préoccuper de redécouvrir les valeurs communes. Dans une société démocratique, celles-ci ne sont jamais unanimes. Mais là où 22 s’éclipse la notion même de valeurs communes, les actions ne se réfèrent plus qu’à des critères arbitraires et en dernier ressort à la force, voire à l’arbitrage de la violence. Or, à travers cette culture scolaire s’élabore le sens du vivre ensemble. Ce dernier souci était clairement présent dans la grande tradition de l’école républicaine, cette tradition qui suscite le mépris de certains beaux esprits auxquels on peut surtout reprocher de détruire sans remplacer et de créer ainsi un vide redoutable du sens du vivre ensemble. Cette fonction de la mémoire est prise en charge par l’enseignement historique, lequel ne se résume pas à une initiation scientifique. Elle traverse la plupart des disciplines. La culture scolaire n’est pas pour autant et uniquement un conservatoire culturel, un lieu de patrimoine. Son œuvre n’est pas simplement de répéter, de révérer, de reproduire des éléments de la culture passée ; mais plutôt d’ouvrir la conscience actuelle et parcellaire de l’homme d’aujourd’hui à la vision du devenir, afin de le rendre capable d’avenir. A des êtres spontanément plongés dans l’immédiateté d’une vie sociale vouée à l’apparent éparpillement des jours, la culture scolaire est censée apporter la distance du regard capable de réflexion. Voilà pourquoi il importe que l’espace scolaire soit libéré des injonctions de l’actualité. Les composantes d’une culture scolaire Dans cet héritage culturel, il y a des œuvres, notamment littéraires. On ne prônera pas l’admiration de commande ou le ressassement plein d’ennui qui composa parfois toute la mémoire de la littérature à l’école. Cependant, l’école a un rôle décisif dans la constitution d’un espace culturel et social commun ; certains récits, des textes, des poèmes et des fables apprises en commun dès l’enfance ont une fonction symbolique non négligeable dans la formation de l’appartenance à un même monde humain. De plus, fréquenter un certain nombre d’œuvres majeures, c’est, au sens fort du mot, faire ses humanités. Ces textes et ces œuvres, 23 où d’autres êtres ont su mener le plus loin possible leur quête d’humanité, initient l’enfant à l’acte de conquérir sa propre humanité. Sans influences assumées, il n’y a point d’autonomie culturelle. Les plus grands créateurs sont souvent tissés des fils d’influences profondes. L’idée d’opposer liberté et influence met en péril la possibilité même d’une culture. Comme nourriture de l’esprit, l’influence, loin d’être un conditionnement qui aliène de soi, lui donne une force de rebondissement vers sa propre originalité. La vraie liberté n’est pas l’ennemie de tout lien, n’est pas systématiquement dé-liaison , selon la belle formule de Martin Buber 2. L’école se trouve chargée d’assurer au plus grand nombre, non seulement la maîtrise d’opérations essentielles à l’exercice de l’intelligence, mais ce qui s’appelle une culture générale. Cette culture générale doit être pensée avant les grandes spécialisations et en vue de les préparer. Sans elle, l’école perdrait l’idée de sa finalité culturelle. Cette culture générale correspond à ce qui est nécessaire à tous, sans qu’on puisse en faire un bagage censément garanti par un diplôme. La culture scientifique et la raison Quelle culture scientifique à l’école ? Une part importante de la culture de la raison peut être acquise dans les sciences. Pardelà la maîtrise des résultats, des sciences faites, la culture scientifique devrait donner le sens des limites du pouvoir des théories, et enseigner ainsi la résistance au dogmatisme. Par le sens de l’expérimentation, elle éduquerait la raison à rechercher l’épreuve des faits, sans pour autant s’illusionner sur leur évidence. De plus, on devrait attendre de la fréquentation des démarches scientifiques, de la méditation sur la portée des résultats, des 2 Martin Buber, La relation, âme de l’éducation ?, Parole et Silence, 2002. 24 leçons précieuses sur la vie de la raison. Car si toute méthodologie scientifique procure une image de la rationalité, la découverte scientifique est liée à des conditions culturelles qui dépassent la maîtrise des démarches déjà formalisées. Même si demeure la radicale différence de l’art et de la science, la découverte n’est pas sans quelques ressemblances avec la création. Enfin, la capacité humaine de raison ne s’épuise pas dans la somme des méthodes élaborées par les sciences. La culture scolaire est une éducation de la raison et cela ne se limite pas à initier l’élève aux recherches scientifiques. La quête du sens est aussi, pour une part, affaire de rationalité. Croyances et valeurs ne sont pas totalement étrangères aux démarches rationnelles, et il n’y a pas un simple rapport d’exclusion entre sens et raison. Certes, la quête du sens requiert des modes de pensée impliquant la sensibilité, l’imagination, des actes d’évaluation, bref elle recourt à des formes symboliques et à des actes de pensée fondés sur des options de l’ordre d’une foi. Une culture scientifique renouvelée, dans une culture générale plus consciente de sa généralité, reconnaîtrait que la rationalité ne saurait être identifiée dans une forme définitive. Culture générale : l’universel et le particulier La culture générale devrait inclure la diversité des dimensions de la culture d’une société. Cet impératif de n’exclure aucune dimension justifie l’idée qu’une culture scolaire bien construite passe par la pluralité des disciplines scolaires. Cellesci ne méritent pas l’opprobre dont les accablent trop d’écrits sur l’école. Elles nous arrivent d’une tradition culturelle de l’école qui n’est pas sans valeur et qui s’identifie largement à l’enseignement secondaire. Nul ne peut échapper à l’exigence de valoriser sa culture. Reconnaître la dignité des autres cultures est une exigence, mais 25 en même temps, il m’est impossible d’être enraciné dans une culture si je juge que tout se vaut, que tout est arbitraire et contingent. Par conséquent, l’accès au sens de l’altérité dans la diversité des cultures est une épreuve. Je suis conduit, dans le domaine culturel aussi, à poser que l’accueil de l’autre, la capacité de le reconnaître comme tel supposent de ne pas se haïr soi-même. De plus, le respect de l’autre culture ne saurait aller jusqu’à approuver n’importe quel traitement infligé à l’humain simplement parce qu’on doit valoriser toute différence. Les tris dans les héritages La culture scolaire trie, soit, mais quels critères faire intervenir dans ce choix ? Dans le choix des évènements dignes d’être en bonne place dans la mémoire, le critère de la marque sur le devenir commun est fiable. En ce qui concerne les œuvres, on peut se référer à certaines qualités, et notamment à leur capacité constatée de pouvoir être un apport à la formation d’une nouvelle humanité. Le critère peut paraître subjectif, cependant il y a des œuvres qui en plus de ou à travers leurs qualités esthétiques aident à poser la question de l’être même de l’homme. Ainsi, la fréquentation d’œuvres de longue mémoire me met en contact avec des cheminements grâce auxquels d’autres humanités se sont construites. Si j’accède à l’expression la plus forte de l’humanité de l’autre, à d’autres humanités, parfois anciennes, cela peut m’initier à la construction en moi-même de l’humanité la meilleure. Mais on est ici au-delà d’une pratique du modèle, comme si l’imitation suffisait. De même, cette fréquentation des œuvres de l’héritage n’est en rien le culte du patrimoine. Cette mémoire est créatrice, et la relation est vive. La grande question serait de restaurer l’idée même de culture générale. On le sait, cette notion est pratiquement abandonnée dans l’école, signe d’un temps peu propice à la culture. La langue commune parle des « contenus », elle les sépare des méthodes, 26 parce qu’il y aurait des spécialistes des méthodes dégagées de tout contenu. La logomachie sur les « référentiels » qui tend à imposer sa dictature dans les institutions de formation des maîtres s’inspire de cette idéologie anti-culturelle. Car lorsque la rupture est consommée entre contenus et méthodes, ce qui disparaît, c’est la notion de culture, liée à des pratiques. La vogue interdisciplinaire ou transdisciplinaire s’accompagna d’un recul dans la rigueur intellectuelle. Cette réflexion vise à oser repenser l’institution et la culture scolaire 3. L’aveuglement sur la société démocratique a conduit dans la seconde moitié du XXe siècle à un grave déséquilibre dans les impulsions politiques. Ceux qui disent : le collège unique a des problèmes parce qu’il n’est pas encore suffisamment unique oublient que ce « plus » impliquerait un pouvoir bureaucratique de l’institution et de ses dirigeants que la société de liberté ne voudra pas accepter ! Leur utopie a un coût politique insupportable. En pratique, d’ores et déjà un certain style imprimé aux politiques de démocratisation s’est traduit par un recul de l’égalité dans l’école, un recul de la participation de l’école au progrès de la justice sociale. Tel est le bilan d’un égalitarisme pervertissant la logique égalitaire elle-même. La conséquence s’impose : il est temps d’assumer clairement une profonde réorientation des politiques éducatives, dans le sens d’une recherche de la justice scolaire, grâce à un équilibrage des deux logiques, égalitaire et élitaire. Sur les circonstances de la destruction de la culture générale, on se reportera à deux livres récents : Nathalie Bulle, L’Ecole et son double, Hermann, 2009 ; Marie-Claire Blais, Marcel Gauchet, Dominique Ottavi, Conditions de l’éducation, Stock, 2008. 3 27 En effet, la démocratie développe dans la société des processus qui menacent à terme la survie de la démocratie ellemême, telle la désinstitutionalisation de l’école. L’école souffre d’une tendance lourde de la société actuelle à privilégier le présent, l’instantanéité, à traiter toute prise en compte de la durée comme inutile et négative. Or il n’y a pas de culture véritable sans valorisation d’une culture héritée. Ces remarques devraient conduire, à rebours des politiques d’éducation, prises dans le piège des réductions budgétaires illégitimes, à retrouver les essentielles finalités de l’école : travailler à ce que la nouvelle génération ait les bases culturelles dont elle aura besoin pour accroître la qualité de la civilisation et non pour la détruire GUY COQ 4 4 Agrégé de philosophie, ancien professeur associé à l’IUFM de Versailles, auteur de plusieurs ouvrages sur l’éducation et la laïcité, président de l’association des Amis d’Emmanuel Mounier, membre de la rédaction d’Esprit. L’ÉNIGME DU TRIPTYQUE DE LA TOUR-DU-PIN LES YEUX FERTI LES Le triptyque, panneaux fermés : à gauche, le Christ devant Pilate, à droite, saint Jérôme 31 Et voici un homme nommé Joseph, membre du Conseil, homme droit et juste. Celui-là n’avait pas donné son assentiment au dessein ni à l’acte des autres. Il était d’Arimathie, ville juive, et il attendait le Royaume de Dieu. Il alla trouver Pilate et réclama le corps de Jésus. Il le descendit, le roula dans un linceul et le mit dans une tombe taillée dans le roc, où personne n’avait encore été placé. C’était le jour de la Préparation, et le jour commençait à poindre. EVANGILE SELON SAINT JEAN, 23 V. 30-32 Une surprise attend le curieux qui pénètre dans l’église néogothique de La Tour-du-Pin : un imposant tableau du XVIe siècle formé de trois panneaux de bois peints. Ce triptyque étonne d’abord par sa monumentalité : les trois panneaux ouverts dépassent 3,6 m de longueur, pour une hauteur d’environ 1,7 m. L’œuvre interpelle aussi par sa rareté dans le contexte régional : elle est datée sur le cadre de 1541-1542 et peu d’églises du NordIsère ont conservé des peintures aussi anciennes. Nous allons tout d’abord décrire ce triptyque, puis nous essaierons d’émettre quelques hypothèses sur sa provenance et sa fonction. Les trois panneaux sont peints sur les deux faces, définissant ainsi six scènes. Le panneau central est surmonté d’une corniche. L’encadrement est décoré de grotesques, c’est-à-dire de structures architecturales fantaisistes ou de figures extravagantes disposées verticalement. Le mot « grotesque » provient en fait du mot « grotte », et on écrivait d’ailleurs à l’origine « grottesque ». En effet, à la Renaissance, se manifeste un grand intérêt pour l’Antiquité qui amène la redécouverte à Rome du palais de l’empereur Néron, la Maison dorée. Néron était quelque peu dérangé et fit donc décorer son palais de ces formes extravagantes 32 qui plurent beaucoup lorsqu’on les redécouvrit. Comme cette Maison dorée avait été retrouvée sous le niveau du sol, lors de fouilles, on crut qu’elle avait été réalisée dans des grottes, d’où le terme de « grottesques ». Ce nom est ensuite devenu un adjectif, synonyme de « bizarre ». Ces grotesques cachent la date de l’œuvre. Parmi les six scènes représentées, quatre sont des épisodes de la Passion du Christ. La première dans l’ordre chronologique est visible à gauche du spectateur lorsque le triptyque est fermé. On y voit Ponce Pilate désigner Jésus devant un arc en plein cintre ; le gouverneur prononce certainement les mots Ecce homo (Voici l’homme), en demandant aux Juifs s’ils veulent vraiment le faire crucifier. La scène est surmontée d’un oculus, terme latin signifiant « œil », et assurément cette fenêtre circulaire symbolise l’œil de Dieu qui assiste à la condamnation de son fils. Tout oppose le Christ et Pilate : l’un est presque nu et entravé, l’autre porte les vêtements correspondant à sa charge. Mais si on y regarde de plus près, on constate que ces vêtements sont représentés en grisaille et que le Christ porte une auréole réalisée à la feuille d’or ; de plus, le sceptre de Pilate est un simple bâton alors que Jésus tient une véritable tige portant des feuilles. Tout porte à croire que la royauté de Pilate est illusoire et stérile : c’est bien le Christ qui est le véritable roi des Juifs. Les trois autres scènes sont visibles une fois le triptyque ouvert : le Portement de croix, la Déposition et la Lamentation. Elles ne se succèdent pas dans un ordre chronologique : l’artiste a réservé le panneau central, le plus grand, à la Lamentation. L’ensemble des trois scènes est unifié par le paysage comprenant la ville de Jérusalem, et par leurs protagonistes : le Christ, bien sûr, mais aussi : Marie sa mère ; son disciple préféré, le jeune saint Jean, représenté imberbe et vêtu de rouge ; Marie Madeleine, prostituée repentie reconnaissable par son vase empli du parfum dont elle avait oint les pieds du Christ qu’elle avait ensuite essuyés avec ses longs cheveux − geste qu’elle réitère sur le cadavre de Jésus. 33 On remarque, notamment dans le Portement de croix, que le peintre a eu le souci d’actualiser l’architecture des fortifications et les vêtements des personnages qui n’ont évidemment rien à voir avec ceux du Ier siècle de notre ère. Cela ne nous surprend pas, mais comment réagirions-nous aujourd’hui si on représentait le Christ emmené par des C.R.S. ?! D’autres personnages apparaissent sur certaines des scènes. Ainsi le Portement de croix fait intervenir, sur la droite, un homme qui pourrait être Simon de Cyrène, réquisitionné afin d’aider Jésus à porter sa croix. La composition du panneau central est calée latéralement par deux personnages plus âgés : à gauche, Joseph d’Arimathie qui a offert un tombeau, que l’on voit derrière lui, pour y inhumer Jésus ; à droite, Nicodème qui apporta des aromates pour embaumer le corps. Marie est aussi accompagnée de deux autres femmes, toutes appelées Marie d’ailleurs, ce qui engendra une certaine confusion, y compris avec une quatrième Marie, Marie-Madeleine dont nous venons de parler ! On considère que ce sont deux sœurs de la mère de Jésus, Marie Salomé et Marie Clopas. Elles sont bien connues des provençaux puisque le village des Saintes-Mariesde-la-Mer, où selon la légende elles débarquèrent, leur doit son nom. La Déposition de croix est une citation d’une gravure de Marcantonio Raimondi 1, d’après un dessin perdu de son maître Raphaël. Ce procédé est assez courant et la gravure permettait aux idées des grands maîtres de circuler et d’irriguer d’autres œuvres. Le Maître de La 1 Tour-du-Pin a resserré la 34 composition, mais celle-ci reste fondée sur la superposition d’un triangle et rectangle, ce qui donne une impression de lourdeur et de pesanteur bien en accord avec le sujet représenté : il est très difficile de déclouer et de descendre un cadavre de crucifié. La composition du panneau central s’appuie elle aussi sur des figures géométriques mais est un peu plus complexe. Le montant vertical de la croix est l’axe de symétrie de la scène, en particulier pour les personnages de Joseph d’Arimathie et de Nicodème d’une part, et d’autre part pour les inclinaisons des têtes des quatre personnages qui se lamentent au pied de la croix. Cet axe correspond à la hauteur d’un triangle équilatéral dont la base est la largeur inférieure du panneau et le sommet le haut de la croix où est fixé l’écriteau avec l’inscription ironique I.N.R.I. (Jésus le Nazaréen Roi des Juifs). Cette inscription rappelle le prétexte qui fut utilisé par les grands prêtres du Temple afin de condamner Jésus ; le véritable motif est certainement que Jésus commençait à « déranger » trop violemment ces prêtres dans leurs privilèges, comme le montra l’épisode où il chassa violemment les marchands du Temple. Le cercle inscrit dans ce triangle enferme les familiers de Jésus, perdus dans leur douleur infinie, ainsi que les instruments de la Passion (tenailles, marteau, clous, couronne d’épines) qui forment une tragique nature morte au premier plan. Le geste émouvant de Marie qui retient de sa main gauche le bras gauche inerte de son fils est judicieusement souligné par sa position au centre du cercle. Enfin, le grand triangle résulte de l’imbrication de quatre petits triangles identiques ; deux arcs de cercle, centrés sur les sommets de la base du triangle, cantonnent à l’extérieur de celui-ci les figures de Nicodème et Joseph d’Arimathie. Les saintes femmes et Jean ne songent qu’à pleurer leur disparu alors que pour Nicodème et Joseph d’Arimathie, la tristesse le dispute à la nécessité d’inhumer rapidement le corps car le soleil se couche et le Sabbat va bientôt commencer, pendant lequel il ne sera plus possible de manipuler le cadavre. Ce double mouvement contradictoire des uns et des autres est indiqué aussi 35 36 par le fait que le cadavre est déjà dans son linceul, mais que l’on continue à se lamenter sur lui. Nous avons donc affaire à un artiste fort attentif aux coutumes juives, et d’autres détails viennent le confirmer. Nicodème et Joseph d’Arimathie portent sur l’épaule le talith, châle de prière simplement orné de quelques bandes sombres (et normalement de franges, invisibles ici). Dans le Portement de croix, un homme souffle dans un shofar, un instrument à vent fait d’une corne de bélier, qui sert notamment à annoncer la fin du jeûne, le jour du Yom Kippour (ou Grand Pardon). On remarque aussi les turbans et autres chapeaux de formes curieuses et de couleurs vives qui évoquent les couvre-chefs (Judenhut) que les Juifs étaient souvent obligés de porter. Un cinquième panneau, à droite de celui qui contemple le triptyque fermé, représente saint Jérôme, qui vécut à la fin du IVe et au début du Ve siècle. Dans sa Légende dorée, qui fut un bestseller à partir du XIIIe siècle, le dominicain italien Jacques de Voragine compile un certain nombre de récits de vies de saints plus anciens ; voici ce qu’il nous apprend concernant Jérôme : Dès sa jeunesse, Jérôme vint à Rome, et s’y instruisit pleinement dans les lettres grecques, latines et hébraïques. Mais la simplicité du langage dans les livres des prophètes l’offusqua si fort qu’il ne voulut plus lire que Cicéron et Platon. Or, vers le milieu du Carême, il fut pris d’une fièvre subite qui faillit le tuer. Et comme déjà l’on préparait ses funérailles, il se vit conduit devant le tribunal de Dieu. Interrogé sur sa condition, il répondit qu’il était chrétien. Le Juge rétorqua : «Tu mens, tu n’es pas chrétien, mais cicéronien !» Après quoi, il le condamna à être battu. Il revint à lui, dans son lit ; et il vit qu’il était tout en larmes, et les épaules encore bleues des coups reçus par lui au tribunal céleste. Aussi mit-il depuis lors autant de zèle à lire les livres sacrés qu’il en avait mis auparavant à lire les livres profanes. A l’âge de vingt-neuf ans, Jérôme fut créé cardinal. Il se fit ermite au désert où il s’infligea diverses pénitences pendant quatre 37 ans, puis il s’installa dans un monastère. Un soir, pendant qu’il était assis avec ses frères pour écouter la lecture sainte, voici qu’un lion entra en boitant dans le monastère. Aussitôt, tous les frères s’enfuirent ; seul Jérôme alla au-devant de lui comme au devant d’un hôte et, le lion lui ayant montré sa patte blessée, il appela des frères et leur ordonna de laver sa plaie et d’en prendre soin. Le lion, guéri, habita parmi les frères comme un animal domestique. Sur quoi, Jérôme, comprenant que ce lion leur avait été envoyé plus encore pour leur utilité que pour la guérison de sa patte, prit conseil avec ses frères et ordonna au lion de conduire au pâturage et de garder un âne qu’ils avaient et qui leur servait à porter du bois. Et ainsi fut fait. Le lion se comportait en berger parfait, toujours prêt à protéger l’âne, et ne manquant jamais de le ramener au monastère à l’heure des repas. Un jour, comme le lion s’était endormi, des marchands avec des chameaux, qui passaient par là, virent un âne seul et s’empressèrent de le voler. Quand le lion, éveillé, s’aperçut de l’absence de son compagnon, il le chercha partout en rugissant ; puis, n’ayant pu le retrouver, il revint tristement à la porte du monastère et, par honte, n’osa pas entrer. Or les frères, voyant qu’il arrivait en retard et sans l’âne, supposèrent que, forcé par la faim, il l’avait mangé. Ils refusèrent donc de lui donner sa ration et lui dirent : «Va chercher le reste de l’âne et fais-en ton dîner !» Cependant, comme ils hésitaient à croire qu’il se fût rendu coupable d’un tel acte, ils allèrent au pâturage en quête de quelque indice ; n’ayant rien trouvé, ils revinrent raconter la chose à Jérôme. Alors, de l’avis de celui-ci, ils confièrent au lion le travail de l’âne, et l’employèrent à porter leur bois, tâche dont la bête s’acquittait avec une patience exemplaire. Mais un jour, sa tâche achevée, le voilà qui se met à courir à travers les champs, et voilà qu’il aperçoit de loin des marchands avec des chameaux et un âne s’avançant à leur tête pour les guider, selon l’usage du pays. Aussitôt le lion, se jetant sur la caravane avec un rugissement terrible, força les marchands à prendre la fuite. Le lion ramena l’âne au monastère, et fut bientôt suivi des marchands venus demander pardon pour leur vol. 38 Le titre Légende dorée ne doit pas prêter à confusion : quoique certains aspects du texte nous paraissent aujourd’hui effectivement légendaires ou symboliques (ainsi, le lion domestiqué pourrait évoquer la victoire de Jérôme sur les hérétiques), ce titre dérive du latin legere signifiant lire, et désigne en fait des récits qui étaient à considérer comme authentiques, une « parole d’or ». Certains éléments sont effectivement exacts : ainsi, Jérôme est l’auteur de la Vulgate, première traduction de la Bible en langue « vulgaire », à savoir en latin. On retrouve ici Jérôme en train de se mortifier avec une pierre, le lion à ses pieds, ses vêtements de cardinal déposés (en réalité, cette dignité ecclésiastique n’existait pas encore à l’époque de Jérôme), le monastère à l’arrière-plan avec l’épisode de l’âne. Le crâne évoque le Golgotha, « lieu du crâne », 39 où le Christ fut crucifié. Les éléments liés à la vie terrestre sont peints en grisaille, dans une zone inférieure délimitée par une oblique : le crâne, les vêtements ecclésiastiques, le lion et le livre dont on peut donc penser qu’il s’agit d’un des ouvrages païens que Jérôme aimait lire et non de sa traduction de la Bible. Dans la partie supérieure du panneau sont représentés par contre les éléments évocateurs d’une transcendance : le crucifix, le monastère, le ciel. Reste à examiner le revers du panneau central, peint à la détrempe, alors que les autres scènes sont peintes à l’huile. On y voit (ci-dessus) un transi, c’est-à-dire un cadavre en décomposition, enveloppé dans un linceul, prononcer ces mots inscrits sur un phylactère : O IESU FILI DAVID MISERE NOBIS. (O Jésus fils de David, prends pitié de nous). Ce cadavre est mis en parallèle avec celui du Christ qui se situe de l’autre côté du panneau central. Ainsi se trouve exprimé l’espoir de ressusciter, comme Jésus. Cette figure macabre, sorte de vanité ou de memento mori (souviens-toi que tu vas mourir ), est courante à cette époque où la Mort est une réalité prégnante. On a même suggéré qu’ici aussi le Maître de La Tour-du-Pin avait représenté sa propre fin, mais cela ne semble pas compatible avec le NOBIS (nous) du phylactère. 40 Mais justement, ce Maître de La Tour-du-Pin, qui peut-il être ? Une tradition locale suggère qu’il s’agit d’un peintre, tombé malade lors de son retour d’Italie ; en remerciement des soins reçus à l’hôpital de La Tour-du-Pin, il lui aurait offert cette œuvre. Cette histoire est peut-être un peu trop belle pour être vraie, d’autant qu’un tel triptyque ne peut être l’œuvre d’un homme seul : la préparation des menuiseries, des couleurs... a certainement nécessité tout un atelier. Néanmoins, l’historien d’art Jan Siesling en a fait la matière d’un court et très beau roman, Le Maître de La Tour-du-Pin, en y mêlant une histoire d’amour. Il est peu probable qu’il s’agisse d’une commande privée car aucun donateur n’est représenté. La richesse des matériaux employés est en tout cas éloquente : la feuille d’or pour les auréoles, le bleu outremer pour le manteau de la Vierge... Ce bleu est ainsi dénommé car, contrairement à l’azurite d’Allemagne plus économique, il vient d’outre les mers, plus précisément d’Inde, et est fabriqué à partir du lapis-lazuli. Cette richesse et la présence de saint Jérôme suggèrent une commande par des membres du clergé, par exemple pour une chapelle ou un couvent dédié à ce saint. Or il y eut justement un couvent Saint-Jérôme des Récollets (des Franciscains réformés) à La Tour-du-Pin, mais il ne fut fondé qu’en 1620... Des noms de peintres furent même cités, des élèves de Dürer tels que George Pencz ou Jacob Binck, mais il est peu probable qu’il s’agisse d’un tel maître car, quoique très doué, notre peintre mystérieux n’est pas exempt de tout reproche : ainsi, il utilise visiblement des cartons identiques pour différents visages, il a quelques difficultés dans la représentation de certaines figures en mouvement (voyez l’homme à droite du Portement de Croix : le peintre veut nous montrer qu’à la fois il aide le Christ et avance, mais il nous semble finalement qu’il effectue un pas de danse). Il doit donc s’agir d’un « petit maître » de réputation locale, mais de quelle région ? Cet artiste semble avoir regardé de près l’art italien de son époque, y compris la tendance au maniérisme toute récente 41 2 comme le montre la comparaison avec la Déposition de Pontormo 2. Mais le caractère mobile (et non fixe) des panneaux, la présence de grisailles au dos de deux d’entre eux, l’étagement des figures du Portement de Croix, certains détails vestimentaires (les brocarts) amènent à penser qu’il vit au nord des Alpes. Il n’a toutefois pas vraiment le goût du détail propre aux Flamands (les quelques figures minuscules dans les arrière-plans ne sont pas très convaincantes) et ses architectures semblent tout à fait « françaises » (voyez ainsi le monastère de Jérôme). Ce peintre ne serait donc ni flamand, ni d’origine germanique. 42 3 4 Or on peut admirer, dans la co-cathédrale Notre-Dame de Bourgen-Bresse, deux volets d’un triptyque incomplet offert par un notable local et représentant un Portement de Croix 3 et une Mise au Tombeau 4. On y constate de nombreuses similitudes avec notre triptyque : les architectures, les armes des soldats, le tombeau creusé dans le roc. Dans les deux œuvres, l’artiste a le souci d’impliquer le spectateur que regardent en retour plusieurs des personnages peints. C’est le cas de l’homme à droite du Portement de Croix de Bourg, qui a la même démarche curieuse que son camarade de La Tour-du-Pin, mais ici l’artiste a en partie contourné la difficulté en cachant ses pieds ! Le peintre de Bourg s’inspire lui aussi pour sa Mise au Tombeau d’un dessin perdu de Raphaël, connu notamment par une gravure d’Enea Vico, qui inspira un autre triptyque, lui aussi décoré de grotesques et aujourd’hui visible dans l’ancienne apothicairerie de Châtillon-sur-Chalaronne. Mais il ne peut s’empêcher de rajouter un talith sur l’épaule de Nicodème, détail absent de la gravure et qui le trahit peut-être... Le maître de Bourg reprend aussi pour le Portement de Croix une célèbre gravure de Martin Schongauer. Nous pencherions donc pour une origine bressane ou bourguignonne de l’œuvre de La Tourdu-Pin. Reste à savoir quelle a pu être le rôle liturgique de ce triptyque. Nous avons du mal à croire qu’il ait pu être destiné à un hôpital. En effet, il n’offre guère de vision consolante pour les malades. 43 Le triptyque de l’ancienne pharmacie de Châtillon-surChalaronne présente, lui, la résurrection du Christ et un Noli me tangere (apparition du Ressuscité à Marie-Madeleine). Que l’on pense au célèbre polyptyque d’Issenheim où Matthias Grünewald ne se contente pas de dépeindre les atroces souffrances du Christ mais nous réconforte en présentant aussi sa Résurrection glorieuse, ou au retable des hospices de Beaune. L’œuvre anticipe en tout cas les directives de la Contre-Réforme qui seront de plus en plus explicites à partir du Conseil de Trente (1545-1563). En effet, un tel retable est destiné à être placé derrière l’autel (retro tabula signifie en latin : derrière la table d’autel). Pour les calvinistes, la communion n’a qu’une valeur symbolique de commémoration du sacrifice du Christ alors que, pour les catholiques, c’est bien le corps même du Sauveur qui est offert sur l’autel, ce corps meurtri représenté au centre du triptyque. L’œuvre vise aussi à impliquer le spectateur, à susciter l’émotion, et nous sommes là dans le droit fil des consignes qui seront données aux artistes afin d’abandonner un style par trop froid et abstrait, ou au contraire excessivement maniériste. Mais on peut aller plus loin encore dans l’interprétation du rôle de ce retable en remarquant la place essentielle qui y est réservée au linceul du Christ. Sans doute est-ce là une preuve du rayonnement de la fameuse relique de Chambéry. En effet, un peu plus loin sur la route de l’Italie, à Chambéry, se trouvait une relique que l’on tenait pour le véritable suaire du Christ. Ce tissu, qui conserve l’empreinte grandeur nature d’un corps humain, était conservé par les ducs de Savoie depuis 1502 dans la SainteChapelle de leur château. François Ier,en 1516, venant se recueillir devant ce suaire, passera à La Tour-du-Pin ; sa mère Louise de Savoie note ainsi dans son journal : « Le 28 de may 1516, environ cinq heures après midi, mon fils partit de Lyon, pour aller à pié au saint Suaire à Chambery. Le septième jour de juin 1516, ma fille Claude, à la Tour-Dupin, en Dauphiné, commença à sentir en son ventre le premier mouvement de ma fille Charlotte. » En 1532, un incendie ravage la chapelle du château de 44 Chambéry ; on réussit à en sortir in extremis le suaire, mais il est endommagé par l’argent fondu de la châsse qui le renfermait et doit être réparé par les Clarisses de la ville. Certains croient même que la relique a brûlé ; ainsi Rabelais écrit dans l’épisode des guerres picrocholines de Gargantua : « Les uns se vouaient à Saint Jacques, les autres au saint suaire de Chambéry, mais il brûla trois mois après, si bien qu’on n’en put sauver un seul brin. » Quant à Calvin, il ironise dans son Traité des reliques sur l’authenticité du linceul : « Il y a une demi-douzaine de villes, pour le moins, qui se vantent d’avoir le suaire de la sépulture tout entier : comme Nice, celui qui a été transporté là de Chambéry. [...] Il est facile à voir que ce sont peintures faites de main d’homme [...] comment le monde a été si niais, de se laisser ainsi éblouir les yeux, pour ne voir point une chose tant évidente. [...] Quand un suaire a été brûlé, il s’en est toujours trouvé un nouveau le lendemain. On disait bien que c’était cétui-là même qui avait été auparavant, lequel s’était par miracle sauvé du feu ; mais la peinture était si fraîche que le mentir n’y valait rien, s’il y eût eu des yeux pour regarder. » A partir de 1535, la Savoie est occupée par François Ier et le suaire est transporté notamment à Nice, comme l’indique Calvin. On peut encore voir dans cette ville un tableau de Gaspard Baldouino (1660) réalisé pour la confrérie du Saint-Suaire de la cité. Ainsi, paradoxalement, cette œuvre que Calvin accuse d’être une simple peinture a elle-même inspiré de nombreux retables, tels ceux de Nice et La Tour-du-Pin ! En 1561, le suaire revient à Chambéry mais le duc de Savoie, qui cherche à se « recentrer » sur ses possessions italiennes, voudrait bien l’emporter dans sa nouvelle capitale, Turin. Afin de contourner les réticences des habitants de Chambéry envers ce transfert, le duc Emmanuel-Philibert profita du pèlerinage à pied entrepris vers Chambéry par l’évêque de Milan, saint Charles Borromée, et prétexta vouloir lui épargner la fatigue d’une si longue marche en transportant la relique à Turin, où elle se trouve encore. Une ostension y a d’ailleurs été organisée tout récemment, début 2010. 45 L’un des panneaux de Bourg-enBresse − où le suaire de Turin fut exposé et où exista, comme à Nice, une confrérie du Saint-Suaire − fait allusion à une autre image acheiropoïète, c’est-à-dire non faite de main d’homme : le voile avec lequel Véronique essuya le visage du Christ lors de sa montée au Calvaire et où son image resta imprimée. En fait, le nom de Véronique est lui-même symbolique et dérive de vera icon, la « vraie image ». « Heureux ceux qui croient sans avoir vu », s’exclamait Jésus, et pourtant, quelle idée fascinante de pouvoir contempler le visage du Christ dont les évangiles ne nous disent rien de l’apparence physique ! Ainsi, les Maîtres de la Tour-du-Pin et de Bourg-enBresse, qui n’en font peut être qu’un, tout en rappelant à la mémoire du fidèle les souffrances de son Sauveur, évoquent des reliques célèbres, supports sensibles de sa dévotion. En cela, ils se posent en dignes successeurs du patron des peintres, saint Luc, à la fois auteur supposé d’un évangile et d’un portrait du Christ JEAN-LUC GAUCHON Informations pratiques : le triptyque (ainsi qu’un triptyque contemporain réalisé par Arcabas) est visible en permanence dans l’église de La Tour-du-Pin ; pour en voir tous les panneaux, contacter le Syndicat d’Initiative (04 74 97 14 87). Illustrations et remerciements. Photos du triptyque de La Tour-du-Pin d’après : R. Mollard, Les triptyques de La Tour-du-Pin. Photos du retable restauré de Bourg-enBresse aimablement communiquées par Catherine Penez, Conservatrice des antiquités et objets d'art de l'Ain. Photos par l’auteur des gravures de Raimondi et Vico d’après The Illustrated Bartsch. Reproductions effectuées par Sainte-Marie Lyon avec l'autorisation du Centre Français d'exploitation du droit de Copie (CFC - 20, rue des Grands Augustins - 75006 PARIS). Merci à la paroisse de Bourg-en-Bresse ; à Marie Bardisa, conservatrice des Monuments Historiques de Rhône-Alpes ; à F. Elsig, professeur à l’Université de Genève ; à ARCOA et B. Duclos-Damour, restaurateurs du triptyque ; au père R. Soldo. AMADEUS VALEURS DES JEUNES RÉQUISITOIRE CONTRE L’INDIFFÉRENCE JUMELAGE . collè ge AMADEUS Drame de Milos Forman (1984), projeté aux élèves de première, terminale et classes préparatoires de Lyon, le 4 décembre « Sire, je suis un homme vulgaire, dit Mozart à Joseph II, mais je peux vous assurer que ma musique n’est pas vulgaire ». Un des aspects d’Amadeus qui frappa le plus les spectateurs du film à sa sortie en salle était le contraste, souligné à plaisir par Milos Forman et le scénariste Peter Schaffer, entre la subtilité de la musique de Mozart et, d’autre part, la trivialité du personnage. De là, il serait tentant de voir dans cette oeuvre une audacieuse remise en question du lieu commun de l’esthétique romantique selon lequel l’œuvre reflèterait les caractéristiques morales et psychologiques de son auteur. Sans doute n’est-ce pas l’un des moindres mérites du film que de remettre en question ce poncif. Cependant, tout en évitant cet écueil, le paquebot hollywoodien échoue peut-être pesamment sur un autre : tout laisse à entendre dans ce film, par des procédés qui n’ont rien de subtil, que la création d’œuvres d’art dignes de passer à la postérité n’est réservée qu’à quelques génies. Non seulement un certain « ingenium » serait indispensable pour produire du beau, mais, qui plus est, cette aptitude serait le lot de quelques prédestinés, les rares élus de Dieu : le nom « Amadeus » ne veut-il pas dire pas « l’aimé de Dieu » ? Cette théorie esthétique de « l’exceptionnalité du génie » est-elle le sens ultime du film de Forman ? Ce serait oublier qu’elle est la philosophie de Salieri, c’est-à-dire la pensée d’un vieillard parvenu aux limites de la folie et dévoré par une jalousie passionnelle. Pour tirer de l’œuvre de Forman une leçon philosophique et esthétique, il convient donc d’analyser préalablement le point de vue sous lequel est présenté le portrait de Mozart, point de vue d’un rival à CINÉ CLUB la fois admiratif et envieux. Mais comme le génie de l’artiste ne peut être connu qu’à travers son œuvre, il faut en tout premier lieu analyser de quelle manière nous est présentée dans ce film sa musique : car le génie du compositeur se manifeste mieux dans son œuvre que dans sa biographie. Un film au service de la musique de Mozart Il existe plusieurs emplois possibles de la musique dans un film. En certains cas, que nous appellerons emplois illustratifs de la musique, celle-ci est elle-même un élément de l’histoire. C’est le cas lorsque nous entendons une musique que les personnages du film sont supposés entendre, par exemple lorsqu’ils assistent à un concert. Dans d’autre cas, la musique est une musique d’accompagnement ou une musique expressive : les personnages du film ne sont pas supposés l’entendre et son rôle est d’accompagner l’action en en soulignant certains traits de manière expressive : une scène triste est accompagnée d’une musique triste, une scène gaie sera accompagnée d’une musique gaie, etc. En ce cas, la musique souligne certains effets de la réalisation, voire parfois suffit à les créer. A côté de ces deux usages traditionnels, Forman et Schaffer ont produit quelques innovations. La première originalité du film consiste à inventer un troisième emploi de la musique que nous pourrions appeler 50 musique d’introspection ou musique subjective : cette musique, entendue par le spectateur, est celle que Mozart joue dans sa tête lorsqu’il compose ou celle que lit mentalement Salieri lorsqu’il déchiffre. Particulièrement remarquables sont les trois séquences où Salieri se penche sur les partitions de son rival, car elles correspondent à des moments clés de l’évolution du personnage et donnent l’occasion de faire entendre une critique musicale qui éclaire sur la spécificité de l’œuvre de Mozart. Parfaitement intégrées au récit, ces trois séquences initient le spectateur aux subtilités de l’analyse musicale et confèrent au film de remarquables qualités pédagogiques. La seconde originalité du film consiste à faire de la musique l’élément moteur de l’intrigue, (comme l’avait fait Kubrick dans une perspective esthétique différente toutefois). Pour éviter de se cantonner aux usage illustratif ou expressif de la musique, Forman et Schaffer imaginèrent d’intégrer la musique au film en allant non pas du scénario à la musique mais de la musique au scénario. Ils commencèrent par sélectionner les musiques de Mozart qu’ils souhaitaient mettre en image, puis élaborèrent la scénarisation des séquences. Il en résulte que l’image mobile du cinématographe avance au rythme exact de la musique, comme c’est le cas dès le générique où la succession des plans est en phase avec la succession des thèmes de la symphonie n°25. Jouant sur les divers emplois possibles de la musique, la réalisation les combine au montage de façon à créer divers effets dramatiques. Par exemple, dans un registre comique, nous voyons les exercices d’échauffement vocal de la cantatrice dont Salieri est secrètement épris devenir les vocalises virtuoses de l’Enlèvement au sérail. Plus loin, ce seront les jacasseries de la belle-mère de Mozart qui se transformeront en l’air de la Reine de la Nuit. De même, à plusieurs reprises, tel thème musical est employé dans un premier temps comme musique expressive, puis comme musique subjective ou illustrative. Dans un registre tragique, le célèbre accord en ré mineur qui annonce dans Don Giovanni 51 l’entrée en scène du spectre du Commandeur, ponctue le film. Rappelons que la tonalité de ré mineur a toujours chez Mozart un caractère funèbre et tragique : elle exprime l’angoisse face à la mort et à l’imminence du jugement dernier. Nous entendons donc l’accord du Commandeur une première fois au tout premier plan du film, placé d’emblée sous une tonalité tragique. Puis nous le réentendons, employé cette fois de façon subjective, lorsque Léopold Mozart venu rendre visite à son fils apparaît en haut des escaliers : Wolfgang semble en effet entendre cet accord dans sa tête. Nous retrouvons bien sûr cet accord utilisé de manière illustrative au cours de la représentation de Don Giovanni et de la parodie de celle-ci. Enfin, le même accord se retrouve lorsque Salieri, déguisé en spectre, vient commander à Mozart la messe du Requiem. L’usage de la musique souligne ici l’angoisse de Mozart face à l’image d’un vengeur surnaturel évoquant son père. Mais l’intégration de la musique au récit, ou plutôt l’intégration du récit à la musique, atteint des sommets dans la séquence où Mozart mourant dicte à Salieri le « Confutatis » du Requiem. C’est le clou du spectacle, soigneusement préparé par les séquences précédentes. Nous assistons à une dictée musicale, exercice dont il est difficile de rendre attrayante la représentation cinématographique. En même temps que se dicte la musique nous entendons, une partie après l’autre, l’œuvre en train de se créer. Mais bientôt Mozart ne dicte plus la musique, il la marmonne dans un souffle. Salieri doit deviner la dictée imaginaire de Mozart, finissant par transcrire une musique qu’il ne pourrait entendre en réalité. Ce n’est plus de la dictée musicale, c’est de la télépathie ! Peu importe ici la vraisemblance ! Ou, plutôt, disons que le film a créé ses propres critères de vraisemblance en imposant la musique subjective comme une sorte d’évidence... 52 Le portrait de Mozart par Salieri et la mystique de la jalousie. Tout au long du film, Mozart nous est décrit du point de vue de Salieri. Le récit est un long flash back introduit, entrecoupé et conclu par la fausse confession, sans repentir ni absolution, que livre le musicien italien au prêtre venu le réconforter. Le rôle de cette confession est de rendre possible le récit à la première personne d’un meurtre psychologique commis à l’encontre de Mozart. Le sujet du film n’est donc pas à proprement parler la vie de Mozart, mais le récit de l’évolution des sentiments de Salieri à son égard. Or ces sentiments sont l’envie et la jalousie. L’envie est la haine de l’autre inspirée par un sentiment d’infériorité. La jalousie, elle, consiste dans le refus qu’un être aimé privilégie ou semble privilégier un tiers : ici Salieri est jaloux de ce que Dieu semble lui préférer Mozart. La progression du film est scandée par divers épisodes qui relatent la naissance d’un complexe de jalousie et d’envie, puis les conséquences homicides de la haine qui en résulte. L’action n’est donc que l’occasion de rendre raison de cette évolution psychologique. Salieri passe de l’admiration à l’envie puis à une jalousie mystique. Tout d’abord, la première rencontre, au palais du princeévêque, insiste sur le contraste entre la vulgarité du personnage de Mozart, surpris en plein ébat sexuel, et la finesse de son génie. Il en résulte un sentiment de mépris pour le personnage, sentiment indissociable d’une admiration réelle pour le musicien. La seconde rencontre se produit au palais de l’empereur où Salieri intercède en faveur de Mozart : il rend hommage au jeune compositeur, avant de se sentir humilié par sa virtuosité. Ici apparaît l’envie, résultant d’un sentiment d’infériorité non acceptée dans le cadre d’une comparaison des talents. Puis, apparaît la jalousie, dans la scène de L’Enlèvement au sérail, lorsque Salieri découvre que Mozart a possédé la femme qu’il aimait platoniquement. A partir de ce moment, le compositeur italien commence à entraver la carrière 53 de son rival en lui faisant retirer le poste de maître de musique de la fille de l’empereur. Mais le moment décisif est celui où Salieri prend connaissance des partitions de Mozart : il fait la découverte du génie à l’état pur, révélé par la capacité de composer d’un seul jet et sans ratures. Convaincu de « l’injustice » de Dieu, qui distribuerait ses faveurs indépendamment de tout mérite, il commet l’acte sacrilège de brûler un crucifix pour manifester sa rébellion spirituelle. La jalousie de Salieri rejoint ici celle de Caïn en ce qu’il ne supporte pas de voir son créateur favoriser un autre que soi. On est donc passé progressivement du mépris qu’éprouvait un dévot pour un vaurien à une haine satanique de Dieu lui-même, haine fondée sur un double sentiment d’envie et de jalousie mystique. Le portrait spirituel de Salieri rend crédible cette évolution du personnage de la figure du dévot trop scrupuleux au tueur satanique. Car, d’emblée, il est apparu comme un mystique ambigu : sa vocation musicale est née avec la mort accidentelle de son père interprétée, de manière sacrilège, comme un miracle obtenu en échange d’une promesse de chasteté. Le désir de la mort du père, aisé à analyser d’un point de vue psychanalytique, apparaît comme un trait de caractère commun à Salieri et Mozart, ce qui permet au premier de découvrir le point faible du second et d’organiser ce que Schaffer appelle son « assassinat psychologique ». Le récit de cet assassinat, d’un genre bien particulier, occupe toute la seconde moitié du film. Ce meurtre repose sur l’addition de deux procédés : tout d’abord Salieri organise une cabale qui ruine Mozart en privant ses opéras de leur audience. Puis vient la mise en œuvre de la tentative d’usurpation du Requiem. En reprenant le costume porté par Leopold au bal costumé, en s’identifiant également au spectre du Commandeur, enfin en contraignant le compositeur à s’épuiser à la tâche, Salieri réveille et entretient en Amadeus un complexe de culpabilité qui le mène à la mort. En terme psychanalytique, Mozart meurt rongé par un Surmoi dont Salieri s’est approprié la teneur symbolique. 54 Mais malgré ce « meurtre psychologique », les sentiments de Salieri demeurent continuellement frappés d’ambivalence. Jusqu’à la mort de Mozart, sa haine reste mélangée d’une admiration où peuvent affleurer des vestiges de bienveillance. Certes le compositeur italien provoque l’échec des opéras de Mozart mais il assiste à toutes les représentations, les commente avec ravissement et prend soin de donner à son rival des conseils de courtisans qui pourraient le sauver. Car son envie s’accompagne ici d’une sincère admiration qu’il ne peut entièrement contenir, quand par exemple il sursaute en apprenant que Wolfgang a jeté au feu la partition de Figaro. Le véritable objet de la haine de Salieri est donc moins Mozart lui-même que Dieu à qui il reproche de s’être montré injuste. Il est dans la position de Caïn ou du frère aîné du fils prodigue. Ce qui rend Amadeus haïssable à Salieri, c’est la faveur que Dieu lui a faite. C’est d’ailleurs ce que signifie le titre du film qui en mettant en avant le deuxième prénom de Wolfgang Mozart rappelle en quoi il suscite la jalousie de Salieri : Mozart est « Amadeus », c’est-à-dire l’aimé de Dieu. L’énigme à laquelle se heurte Salieri est donc celle que rencontre tout théologien de la grâce d’inspiration janséniste ou calviniste : pourquoi Dieu accordet-il sa faveur indépendamment des mérites ? Son incapacité à y trouver une réponse satisfaisante le pousse à une révolte prométhéenne. Faut-il prendre au sérieux l’esthétique du génie sous-jacente à Amadeus ? Le conflit mystique entre Salieri et Dieu est lui-même occasionné par une théorie esthétique implicite : la théorie du génie. Si Salieri peut reprocher à Dieu le succès de Mozart, c’est en vertu de la conviction que le « génie » est la cause ultime de l’excellence de l’œuvre. La notion de génie est caractérisée ici par plusieurs traits : l’aisance, la grâce, la créativité... et la révolte contre l’ordre établi. Les séquences où Mozart est accueilli à la 55 cour sont l’occasion de montrer les clivages entre diverses conceptions de l’art. Ce qui est souligné alors est le contraste culturel entre des artistes bien établis et un artiste neuf, en marge des institutions. A vrai dire, le thème du génie incompris, en rébellion face à la société de son temps, est bel et bien un lieu commun de l’esthétique romantique. Cependant, ce film ne se contente pas de reprendre cette théorie. Il l’infléchit en profondeur en nous mettant en garde contre l’idée que l’art serait la simple transposition d’un vécu émotionnel. Car Amadeus souligne à merveille l’écart considérable existant entre la personnalité de l’artiste et la perfection de son œuvre. L’idéologie à laquelle il s’oppose est celle qui voudrait qu’une musique subtile et gracieuse émane d’un homme au caractère subtil et gracieux. Malheureusement, Forman s’est contenté de substituer au cliché romantique un autre cliché : le cliché du poète maudit, voire du trublion dadaïste. Il ne serait plus nécessaire d’être un homme d’une vertu morale exceptionnelle pour faire des oeuvres d’art exceptionnellement belles, mais il faudrait être un rebelle d’exception. Aussi serait-ce une erreur de notre part de prendre Amadeus pour une démonstration convaincante du propos philosophique du cinéaste. Point n’est besoin d’être un homme d’exception pour faire de belles œuvres. C’est d’ailleurs sur ce point que Forman a commis quelques fautes de goût à force d’insister sur la prétendue médiocrité de Salieri. Par exemple, on a peine à croire qu’un compositeur professionnel ait besoin de pianoter péniblement pour composer une marche aussi simple que celle que Salieri dédie à Mozart à l’occasion de sa première réception au Palais. L’idée convenue selon laquelle l’œuvre d’art devrait attester la génialité de son auteur fait dénigrer injustement des œuvres estimables et repose sur du vent. D’ailleurs, si vraiment il fallait être un génie pour produire une œuvre de quelque mérite, on pourrait avoir quelques doutes au sujet de Forman au vu de son Valmont, par exemple, qui est un authentique navet. 56 Il est donc une erreur dont Amadeus peut nous délivrer à juste titre : celle qui consiste à chercher dans la personnalité de l’artiste le secret de l’excellence de ses œuvres, c’est-à-dire à voir dans l’œuvre d’art l’expression d’une intériorité préexistant à l’œuvre. En vérité, le secret de l’excellence de l’œuvre est à chercher dans l’œuvre elle-même : si une musique est belle, c’est parce qu’elle est bien composée, pas parce que son auteur se sentait coupable de la mort de son père ou s’angoissait à l’idée de sa mort prochaine. Retenons la leçon de Proust dans son Contre Sainte-Beuve : l’œuvre d’art ne s’explique pas par la biographie de son auteur. Car comme le notait Popper au sujet de la musique, elle n’a pas pour fonction essentielle d’exprimer les émotions de celui qui l’a produite mais d’en créer chez celui qui l’écoute 1. On comprend dès lors pourquoi Milos Forman et Peter Schaffer ont pu dire que le personnage principal du film n’était ni Salieri ni Mozart mais la musique de Mozart. En effet, de l’homme Mozart nous ne savons que ce que Salieri en perçoit. Le personnage principal du film est donc bien cette musique parce qu’elle n’est pas l’accessoire qui enjolive le récit mais l’âme même du film. Elle est la pierre précieuse à laquelle les images servent d’écrin. Et il faut reconnaître qu’en habiles artisans, Forman et Schaffer ont magnifiquement mis en valeur les chefs d’œuvre qui les ont inspirés FRÉDÉRIC CROUSLÉ 1 D’après Karl Popper, dans la Quête inachevée, il existe deux conceptions radicalement différentes de la création musicale. Pour une tradition que Popper qualifie d’expressionniste, inaugurée par Beethoven, l’œuvre musicale est une traduction des états d’âme de son auteur. Pour une tradition plus ancienne, que Popper appelle la « musique objective », le rôle de la musique n’est pas d’imiter les transports de l’âme de l’artiste mais de créer dans l’âme de l’auditeur des sentiments sui generis induits par la musique elle-même. Le génie de l’artiste ne réside pas en ce qu’il possède une sensibilité exacerbée, mais en ce qu’il maîtrise à la perfection toutes les ressources de son art pour émouvoir autrui. Dès lors, le musicien n’utilise pas la musique comme l’occasion de s’épancher, il est au service d’une œuvre qui impose son caractère émotionnel et sa logique propres. C’est pourquoi, premier spectateur de son œuvre, il explore les ressources propres à son art en alternant essais, erreurs et rectifications, sous le contrôle d’un goût bien formé. Cette dernière conception du travail de l’artiste démystifie quelque peu la conception romantique du génie, et relativise le rôle de l’inspiration au profit de la science musicale, de la maîtrise technique et de la formation du goût. LES VALEURS DES JEUNES DE 15 À 24 ANS Nous sommes la classe de BTS CI 2. Au sein de notre cours de culture générale, nous devons effectuer une étude afin de préparer au mieux notre épreuve de BTS. Identification 1 / Vous sentez-vous plus : Français(e) Citoyen(ne) du Monde Européen(ne) Aucun des trois 2 / Vous sentez-vous fièr(e) d’être français(e) et soutenez-vous votre pays lorsqu’il s’agit : De sport De la mode De l’histoire et du patrimoine De gastronomie Autres : 3 / Selon vous, les composantes de l’identité nationale sont en priorité : La contribution à l’histoire de France Le droit de vote Les couleurs tricolores La connaissance de la Marseillaise Respecter les lois et la Constitution françaises Dans le cadre de l’étude du thème imposé « Génération(s) », les élèves de BTS CI2 ont d’abord réalisé un questionnaire qu’ils ont diffusé auprès des classes de première, terminale et de BTS CI1. Ils remercient d’ailleurs élèves et professeurs qui les ont accueillis à cette occasion. Ils ont ensuite réalisé une note de synthèse pour exploiter les données récupérées MARIE-PIERRE MATRAY TRA VAUX EN QUE TE 4 / D’où tirez-vous vos valeurs ? Famille Ecole Amis Activités sportives Télévision/internet Autres : Définition 5 / Comment définissez-vous une valeur ? Ensemble d’idées réunissant des individus Quelque chose d’essentiel à la construction de soi Ensemble d’idées partagées selon le groupe social Classement 6 / Classez ces valeurs selon l’importance que vous leur accordez. Mettez un chiffre de 1 à 8 : 1 étant le plus important. Egalité Fraternité Liberté Patrie Travail Argent Famille 7 / Pensez-vous que votre épanouissement personnel passera par votre : Réussite professionnelle Réussite sociale Réussite familiale 60 Famille 8) Jusqu’où s’étend le cercle familial d’après vous ? Famille nucléaire (parents & fratrie) Famille nucléaire, cousins, oncles, tantes, grands-parents, & neveux/nièces ... + cousins éloignés & belle famille …+ membres issus d’une recomposition familiale 9 / Quelle importance donnez-vous à votre famille ? Entourez de 1 (-) à 5 (+) 12345 10 / Qu’attendez-vous de votre famille ? Appui financier Moteur de vie Soutien affectif 11 / Quelle part les grands-parents et leur histoire ont-ils dans votre vie ? Peu importante Importante Très importante 12 / Comment vous voyez-vous dans dix ans ? Deux réponses possibles (statut/enfant) Célibataire Marié Divorcé Avec enfant(s) Sans enfant(s) 13 / Parmi cette liste, quelle valeur souhaitez-vous transmettre à vos enfants ? Partage Respect Franchise Tolérance Générosité Travail Liberté Dévouement 14 / Que pensez-vous de la tendance « divorce et famille recomposée » de la société actuelle ? Ça me choque Cela fait partie de l’évolution de la société C’est une bonne chose 61 15 / Quels sont vos modèles de vie ? Votre mère/votre père/les deux Les personnes qui ont consacré leur vie à apporter de la joie aux autres : Sœur Emmanuelle, Mère Teresa... Les personnes qui, parties de rien, sont devenues de grands acteurs dans la politique, dans les affaires ou autres, et ce, uniquement grâce à eux-mêmes : B.Obama... Les artistes incompris qui ont consacré leur vie à leur art : Baudelaire, Rimbaud... Travail 16 / Pour vous, que représente l’école ? Un lieu où vous retrouvez vos amis Un lieu où vous vous formez et assimilez des connaissances qui vous serviront dans votre vie professionnelle 17 / Selon vous, le travail est-il toujours une valeur essentielle dans la société actuelle ? Oui Non 18 / Comment vous voyez-vous dans dix ans ? Deux réponses possibles (une par rapport à l’activité/une par rapport au pays). Dans les études Dans la vie professionnelle Homme/femme au foyer Sans activité En France A l’étranger 19/ Travailler, c’est pour vous un moyen : De gagner sa vie De s’épanouir De faire des rencontres D’avoir de l’importance dans la société 20 / Est-ce que votre vie professionnelle vous semble plus importante que votre vie privée ? Oui Non 62 Argent 21 / Par quel moyen gagnez-vous de l’argent ? Emploi Cadeaux Par le biais des parents (argent de poche) 22 / Comment utilisez-vous cet argent ? J’économise Je dépense tout Je dépense raisonnablement Vie sociale 23 / Le regard des autres vous a-t-il déjà amené à remettre en cause vos valeurs ? Oui En quelle occasion ? Non 24 / Selon vous, la solidarité est-elle toujours une valeur de notre société ? Oui Non 19 / Quelle façon de travailler vous correspond le plus ? En autonomie En groupe Religion 20 / La religion tient-elle une place dans votre vie ? Oui Non Si oui, est-elle : Partie intégrante (pratique régulière) Croyance (pratique occasionnelle) Appartenance générationnelle (valeurs familiales) 21 / Représente-t-elle pour vous une valeur dans notre société actuelle ? Oui Non 63 Valeur morale 22 / Pensez-vous que les valeurs fondamentales générales (famille, respect, travail, solidarité…) sont toujours aussi primordiales dans la société actuelle ? Oui Non 23 / Pour quelle cause vous battriez-vous aujourd’hui ? Les Droits de l’Homme L’environnement La politique Autres : 24 / Avez-vous l’impression que les valeurs de votre génération sont suffisamment représentées dans les décisions de notre pays ? Oui Non 25 / Parmi ces choix, quelle(s) valeur(s) a/ont disparu au sein de notre société contemporaine, selon vous ? Respect intergénérationnel Le travail Les valeurs de la République La tolérance L’hospitalité La politesse 26 / Considérez-vous la liberté comme : Une valeur acquise Une valeur à laquelle il faut continuer à œuvrer 27 / Le respect : entourez la/les réponse(s) Adaptez-vous votre comportement en fonction de l’âge des personnes vous entourant ? Oui Non Les us et coutumes, ainsi que les règles de politesse, vous semblent-ils justifiés ? Oui Non Vous arrive-t-il d’être irrespectueux envers ceux qui détiennent l’autorité (parents, professeurs...) ? Oui Non 64 Vous arrive-t-il de mentir à vos proches ? Oui Fréquemment Occasionnellement Non Avez-vous déjà volé ? Nous vous rappelons l’anonymat de ce questionnaire. Jamais Une ou deux fois De temps en temps Souvent Accepteriez-vous de faire quelque chose d’interdit/d’illégal en échange d’une somme d’argent ? Oui Non Mettez-vous parfois vos principes et valeurs morales de côté dans le but de satisfaire vos envies ? Oui Non Portez-vous de l’attention au respect de l’environnement ? Oui. Non Si oui, comment ? Economie des énergies (eau, électricité...) Recyclage des déchets (tri sélectif...) Association de protection de l’environnement (Greenpeace...) Achat de produits issus de l’agriculture bio ou du commerce équitable 28 / La fraternité : entourez la réponse Allez-vous spontanément vers les gens qui auraient besoin d’aide ? Oui Non Vous préoccupez-vous de la santé et du bien être de votre entourage ? Oui Non 65 Avez-vous consciencieusement rempli ce questionnaire destiné à aider les élèves de BTS ? Oui Non 29 / Pratiquez-vous une activité en rapport avec vos valeurs ? Scoutisme Syndicat Association sportive Association de solidarité Autres : 30 / Qui peut, pour vous, véhiculer les valeurs qui vous tiennent à cœur ? Homme politique Célébrité Membre de la famille Ecrivain/Philosophe 31 / Parmi les personnalités suivantes, cochez celle qui correspond le plus à vos valeurs. Barack Obama Dalaï Lama Le Pape Sœur Emmanuelle Bill Gates 32 / Ce questionnaire vous a-t-il aidé à faire le point sur vos valeurs ? Oui Non Toute la classe de BTS CI 2 vous remercie d’avoir consacré quelques minutes pour répondre à ce questionnaire de manière la plus honnête possible. LES VALEURS DES JEUNES DE 15 À 24 ANS Suite au dépouillement des questionnaires, nous avons réalisé une note de synthèse. Pour plus de précisions, nous avons étudié les réponses selon l’âge, le sexe et le type d’études des jeunes. Quelques grandes tendances se dessinent, certaines sont en accord avec la société du 20e siècle tandis que de nouvelles tendances liées à l’évolution de la société du 21e siècle se développent. Pour 57% des filles et 50% des garçons, les valeurs représentent quelque chose d’essentiel à la construction de soi. Elles déterminent l’être humain et sa façon d’agir. Chaque personne adopte des valeurs qui proviennent, le plus souvent en héritage, de la famille, de la société et de l’environnement. A travers cette enquête, nous avons voulu connaître les valeurs des jeunes dans notre société actuelle et voir si elles avaient évolué. Globalement, nous avons pu constater un retour des valeurs qui prédominaient au début du 20e siècle : famille, travail et patrie. Les valeurs de la République semblent occuper la deuxième place dans l’esprit des jeunes. Seule la liberté est toujours très fortement mise en avant. L’égalité ne semble pas être l’une de leurs premières préoccupations. Par ailleurs, de nouveaux courants, liés à l’évolution de la société, au progrès et à la mondialisation apparaissent. A noter que sur certains points les opinions des filles et des garçons divergent assez fortement. TRA VAUX SYN THE SE Les filles sont très attachées à la famille. Leurs valeurs proviennent de celle-ci pour la totalité des filles. Seuls 61% des garçons estiment qu’ils tirent leurs valeurs de leur famille (et 17% de leurs amis). Cette valeur arrive en tête du classement pour 71% des filles. Les garçons ne sont que 39% à placer cette valeur en première position. 71% des filles considèrent d’ailleurs que leurs grandsparents et leur histoire sont très importants, contre seulement 17% des garçons. La famille représente un soutien affectif pour 71% des filles et pour 44% des garçons. Pour l’autre moitié des garçons, la famille représente un moteur de vie. Elle n’est donc pas du tout considérée comme un appui financier. Les garçons aussi sont donc attachés à la valeur famille, en effet 83% d’entre eux se voient en couple dans 10 ans (dont 80% mariés). 86% des filles se voient en couple mais seulement la moitié se voit mariée. A noter que les filles sont moins nombreuses à vouloir des enfants dans 10 ans que les garçons (43% contre 57%). Pour plus de ¾ des jeunes, la famille se compose uniquement des parents et cousins proches (et non des membres rapportés). Pour 39% des garçons, les deux parents représentent un modèle de vie et pour 28%, ce sont les gens partis de rien qui sont arrivés à réaliser de grandes choses qui représentent un modèle de vie. Les parents sont le modèle de vie de 86% des filles ! Le respect ressort comme la valeur principale que les jeunes souhaitent transmettre à leurs enfants. La franchise, la générosité et le travail arrivent bien ensuite. L’ÉVOLUTION DES VALEURS TRADITIONNELLES 68 La famille signifiait autrefois insertion dans une lignée. Aujourd’hui, les individus veulent construire une famille à travers leurs relations et efforts de communication dans un couple égalitaire, dialoguant et stable où le respect domine et où ils peuvent s’épanouir personnellement. Le palmarès des valeurs Les garçons croient plus en la valeur travail (72% d’entre eux contre 57% pour les filles, considèrent que c’est toujours une valeur essentielle dans notre société actuelle). Dans 10 ans, 100% des filles se voient dans la vie professionnelle contre 89% des garçons. Ils aspirent à des études longues. Les filles se voient d’ailleurs en grande majorité à l’étranger contrairement aux garçons (71% contre 56%). 67% des garçons préfèrent travailler en groupe contre 43% des filles. Pour 86% des filles et 67% des garçons, le travail permet en premier de gagner sa vie. Pour 17% d’entre eux, le travail permet de s’épanouir. Pour quasi la totalité des jeunes, leur vie familiale est plus importante que leur vie professionnelle. Le travail, dont la forme a bien évolué ces dernières décennies, reste une chose indispensable à laquelle les jeunes aspirent. Mais certains pensent qu’il a perdu sa valeur fondamentale. Par ailleurs, les jeunes savent que réussite professionnelle peut rimer aujourd’hui avec mobilité internationale. En ce qui concerne le rapport à l’argent, 1/3 des garçons travaillent et le reste tire ses ressources d’argent de poche et cadeaux. Seulement 14% des filles travaillent. De plus, les garçons économisent davantage (40%) que les filles qui sont 86% à dépenser raisonnablement. Seule la moitié des garçons dépense raisonnablement. Les plus âgés sont ceux qui travaillent et qui économisent le plus. Ils ont plus conscience de la vie en autonomie et de la gestion de leurs propres ressources. Pour 40% des garçons et 43% des filles, la religion tient une place dans leur vie. 60% des garçons et seulement 14% des filles pensent que la religion est une valeur dans notre société actuelle. 69 Ce recul de la présence de la religion dans la conscience des jeunes contribue à une affirmation de l’autonomie individuelle. Pour plus des 2/3 des jeunes, les valeurs fondamentales sont toujours aussi primordiales dans notre société. Les jeunes se battraient aujourd’hui pour l’égalité, les valeurs de la France en général ou encore les Droits de l’Homme. Pour 95% des garçons et pour 71% des filles, la liberté est une valeur pour laquelle il faut continuer à œuvrer et qui n’est pas du tout acquise. 43% des filles estiment que l’hospitalité a disparu tandis que pour 28% des garçons, c’est la politesse qui a disparu et pour 28% les valeurs républicaines. De ce fait, la totalité des filles et 78% des garçons considèrent que les règles de bienséance, de politesse et les codes conventionnels sont justifiés. Les jeunes ont compris que, même dans notre pays riche et développé, les valeurs ne sont pas acquises. De plus, évolution des valeurs ne doit pas vouloir dire disparition de certaines. Enfin, dans une société qui semble être de plus en plus individualiste, la solidarité reste importante dans l’esprit des jeunes puisqu’une grande majorité d’entre eux va vers ceux qui ont besoin d’aide et se préoccupe des plus faibles. 86% des filles considèrent que la solidarité est toujours une valeur dans notre société actuelle contre 45% des garçons. Les jeunes sont, de plus, assez engagés dans des activités en relation avec leurs valeurs telles que le scoutisme, un club sportif ou autres. 70 L’APPARITION DE NOUVELLES VALEURS Aujourd’hui, soutenir la France prend de nombreuses significations différentes. 50% des garçons soutiennent la France quand il s’agit d’un évènement sportif. Et pour 44% d’entre eux, soutenir la France, c’est soutenir son histoire et son patrimoine. Les filles sont une majorité à soutenir la mode française dans le monde. Pour d’autres encore, soutenir la France, c’est promouvoir sa grande gastronomie. Les jeunes sont patriotiques pour tout ce qui touche la France. Ils ne défendent plus un territoire mais toutes les multiples facettes qui constituent la France. D’ailleurs, malgré la mondialisation et la création de l’Union Européenne, les filles se sentent françaises à 100% et seulement 11% des garçons se sentent européens. Pour 33% des garçons, la France se caractérise par ses lois et pour 28% d’entre eux par le droit de vote. Quant aux filles, la France se caractérise par le droit de vote, ses lois et la nationalité française. On constate alors que les jeunes sont conscients de vivre dans un pays démocratique et libre. On a vu que la famille constitue un repère très important particulièrement pour les filles mais la réussite familiale ne constitue pas la première réussite pour celles-ci (29% en première place). Contrairement à la moitié des garçons pour qui la réussite principale correspond à celle de la famille. Seulement 28% d’entre eux considèrent que la principale réussite est la réussite professionnelle. Les filles accordent beaucoup d’importance à l’activité professionnelle. En deuxième place (après le fait de gagner sa vie). Pour elles, le travail permet d’avoir de l’importance dans la société tandis que, pour les garçons, il permet de s’épanouir et de faire des rencontres. On voit bien ici l’évolution de la société : avant, les femmes se réalisaient à travers la famille mais aujourd’hui, elles veulent de plus en plus s’affirmer à travers leur situation professionnelle. Elles font de longues études, sont de plus en plus diplômées, occupent des postes hautement 71 qualifiés et demandent l’égalité (salariale, de représentation...) avec les hommes. Elles se réalisent à travers leur situation professionnelle. Beaucoup privilégient, au moins au départ, leur situation professionnelle (on remarque d’ailleurs que l’âge du premier enfant recule assez fortement). Pour presque les ¾ des jeunes, la tendance « divorce et famille recomposée » fait partie de l’évolution normale de la société. Le quart restant se dit « choqué » par ce mouvement qui prend de l’ampleur. Les anciennes générations répondraient sans doute le contraire. Etant nés dans une société où la moitié des couples divorce, les ¾ des jeunes voient cela comme une évolution normale de la société. Les jeunes aspirent à plusieurs expériences pour trouver enfin une relation stable. Ils veulent affirmer leur autonomie et leur capacité d’orienter leur action sans être contrôlés et contraints et ils veulent être heureux. Nous avons voulu tester jusqu’où les jeunes respectaient leurs valeurs. Les filles avouent être occasionnellement irrespectueuses envers des personnes plus âgées. 71% d’entre elles avouent mentir, accepteraient de faire quelque chose d’illégal en échange d’une somme d’argent ou d’écarter leurs valeurs pour satisfaire leurs envies de façon occasionnelle. Quant aux garçons, 67% d’entre eux sont occasionnellement irrespectueux et 22% ne le sont jamais. La moitié ne ment jamais (33% ment de façon occasionnelle). Plus de la moitié ne mettrait pas ses valeurs de côté pour satisfaire ses envies (39% le ferait de façon occasionnelle) et 17% d’entre eux accepteraient de faire quelque chose d’illégal en échange d’une somme d’argent (et 22% le feraient occasionnellement). Les jeunes sont attachés aux valeurs mais dans notre société, de plus en plus de jeunes n’hésiteraient pas à oublier leurs valeurs pour satisfaire leurs envies. Ce n’est plus le respect des valeurs qui stoppera leurs actions. Seuls les lois, les interdits stricts et les règles leur forment un cadre de vie. 72 A la question « Pour quelle cause vous battriez-vous aujourd’hui ? », 43% des filles et 39% des garçons répondent pour l’environnement. 100% des filles et 94% des garçons pensent à faire des économies d’énergie et à la protection de l’environnement. Pour une grande partie d’entre eux, cela se traduit par le recyclage. Cette notion est récente et prend une place prédominante dans notre société actuelle. La préservation de notre environnement devient une valeur pour les jeunes aujourd’hui. Conclusion Presque les ¾ des jeunes considèrent que le regard des autres ne modifie pas leurs valeurs. Les jeunes sont aujourd’hui de plus en plus autonomes, ils veulent s’affirmer en tant qu’individus uniques et libres de choisir leur vie et d’orienter leurs actions sans être contrôlés et contraints. Les jeunes sont attachés aux valeurs qu’ils ont reçues en héritage mais elles ne constituent plus des barrières à respecter. Certaines sont aujourd’hui délaissées et d’autres font leur apparition. Parmi une liste de « célébrités » proposée, 43% des filles ont pour modèle sœur Emmanuelle, 28% des garçons Barak Obama, 11% Bill Gates et 17% Nicolas Sarkozy ! Enin, pour conclure, 17% des garçons estiment que leurs valeurs sont véhiculées par un homme politique. Or 71% des filles et 78% des garçons affirment que les valeurs de leur génération ne sont pas suffisamment représentées dans la politique. Ils considèrent alors que leurs valeurs ont évolué et que cette progression doit être prise en compte dans la gestion du pays LA CLASSE DE BTS CI 2, LA VERPILLIÈRE RÉQUISITOIRE CONTRE L’INDIFFÉRENCE Devoir de français rédigé dans le cadre d’un entraînement à l’écrit d’invention. Mesdames et Messieurs, Mon réquisitoire sera prononcé aujourd’hui devant vous afin de dénoncer un mal dangereux, pernicieux, qui frappe l’homme et peut l’anéantir. Par sa nature même et parce qu’il veut se détacher de toute chose, il se fait discret pour mieux ronger l’individu. Il engendre solitude, malaise, et mépris d’autrui. Ce mal, c’est l’indifférence. L’indifférence est le refus, voire l’incapacité de reconnaître la différence. C’est le rejet de ce qui ne rentre pas dans le cadre prédéfini par la société actuelle. De fait, c’est le déni de l’Autre comme être singulier, unique, original. Or l’indifférence est un des traits de notre société. L’homme moderne est conforté dans l’idée que tout est relatif et ce, quelle que soit la gravité d’une situation. Les images de l’horreur que nous percevons chaque jour, appuyées par le système de « matraquage » adopté par les médias, nous paraissent banales car l’homme d’aujourd’hui, celui de la nouvelle génération, est formaté à la banalisation du trivial, du choquant, pour ne porter intérêt, in fine, qu’à l’anecdotique, au superficiel et au médiocre. Il existe deux formes d’indifférence. Le mépris : « Je ne me soucie pas de l’autre », et la lâcheté : « Je ne veux pas savoir ». Cette forme d’indifférence est la plus grave, la plus triste, et elle montre à quel point l’homme peut être lâche dans l’unique but de se protéger. Car savoir est une arme efficace contre la monstruosité. Que serionsnous en effet aujourd’hui si nous ne connaissions pas les horreurs de la Shoah et autres génocides ? A l’image des négationnistes qui TRA VAUX osent prétendre que ces crimes n’ont jamais été commis, nous avons tous dans nos dénis nos petites lâchetés du quotidien. Nous fermons les yeux pour mieux rester dans notre bulle dorée où l’existence est plus facile. Nous refusons d’accepter la vérité telle qu’elle est, à savoir que non, nous ne sommes pas tous égaux face à la mort, face aux guerres, à la vie. Au lieu de reconnaître notre chance, nous la considérons comme acquise de droit : elle nous appartient, et pourquoi devrions-nous la partager ? Ceux qui n’ont pas la même fortune n’ont-ils pas voulu ou mérité leur sort ? Alors vient le mépris de l’autre, le mépris et donc la bêtise. L’homme devient individualiste, écrase l’autre sans se soucier de ce qu’il ressent ou de ce qu’il pense. Dangereuse indifférence ! Pour Racine, l’indifférence est l’« insensibilité ». Pour Corneille, elle est l’ « absence d’intérêt et d’amour ». Etre indifférent, c’est donc ne voir que sa propre vérité, quand la différence est un enjeu essentiel pour permettre à l’homme de percevoir la complexité du monde qui l’entoure. Alors, comme Emile Zola, je me lève et j’accuse l’indifférence de faire des hommes des monstres sans compassion, des lâches et des imbéciles LUCIE MOLLIER, SECONDE 3 LYON LES ÉTATS-UNIS Parmi les échanges internationaux mis en place par le lycée Sainte- Marie, il est intéressant de faire le point sur une destination anglophone : les Etats-Unis. Il y a aussi un échange avec St-Clement Danes à Chorleywood en Angleterre et avec Assumption College à Kilmore en Australie. Nos échanges reposent sur le principe de la réciprocité entre les familles françaises et américaines, et entre les lycées, de manière que les élèves aient une expérience concrète de la vie quotidienne aux Etats-Unis : ainsi, chacun est logé dans une famille et suit son correspondant, au lycée aussi bien que dans ses loisirs. Les lycées organisent aussi des sorties pour les élèves afin de leur faire découvrir le patrimoine local. Au cours des années et quelle que soit la destination, l’accueil que nous recevons dans le lycée et dans les familles est toujours exceptionnel. De manière très typique cette année, les élèves auraient volontiers aimé que le volcan islandais continue à émettre des particules empêchant tout retour des Etats-Unis ! Nos élèves sont souvent invités à revenir dès l’été suivant, et si bien sûr tous les liens tissés ne sont pas durables, il n’est pas rare de voir les jeunes continuer à échanger avec leur correspondant par la suite. Notre souci d’organisateur est de trouver des échanges pérennes mais souvent nos homologues ne peuvent organiser un échange que tous les deux ans : en effet, pour des raisons évidentes, il y a plus de Français qui veulent développer leur maîtrise de l’anglais que d’Américains désireux d’apprendre le français. De plus, les élèves américains sont très actifs et font partie de beaucoup d’équipes sportives, d’orchestre, etc. et doivent faire des choix. De plus, dans la plupart de nos lycées partenaires, les échanges reposent sur une seule personne, ce qui est très lourd. Nous avons la chance à Sainte- Marie d’avoir une solide équipe ! ÉCHAN GES Tout cela n’est possible que grâce au soutien sans faille de l’établissement, au travail remarquable d’une équipe de parents sous la responsabilité de Mme Shireen Vernay, et de l’enthousiasme et du dévouement de collègues qui préparent et accompagnent ces voyages. La joie des élèves lors des séjours, leur émotion au moment de quitter leurs nouveaux amis américains, les liens amicaux qui se tissent dans l’équipe et avec les parents qui nous confient leurs enfants sont la récompense de tous les efforts et suscitent le dynamisme pour recommencer l’année suivante. A l’heure où Mme Vernay nous annonce que d’autres obligations l’amènent à laisser la responsabilité des Échanges Internationaux, qu’elle soit vivement remerciée pour tout le travail accompli, sa compétence et sa disponibilité depuis qu’elle a accepté cette charge. Que ces quelques lignes suscitent des vocations chez vous, les parents, afin que dès septembre, la commission des Échanges se renforce pour de nouvelles expériences enrichissantes ! Vous ne partirez pas de zéro pour tout construire : une équipe vous attend ! .....HENRI BRENDERS « Merci beaucoup pour ce magnifique voyage passé ! Je n’en garde que des souvenirs inoubliables ! Je pense d'ailleurs que je retournerai à Atlanta après le bac de français l'année prochaine ! Merci encore pour le voyage qui aurait été inenvisageable sans votre présence. » UN ÉLÈVE DE 2 6, LYON NDE « Je n’ai jamais eu autant d’enthousiasme un an avant notre voyage en France. Vos élèves ont vraiment eu un impact très positif. » MARY GOODWIN, PROFESSEUR DE FRANÇAIS, TOLEDO, OHIO 78 Nos lycées partenaires : Southview et Northview Toledo, Ohio 6e année (10-15 élèves), dont des séjours prolongés (« immersion » de deux mois) Cistercian Preparatory School, Dallas, Texas 2e année d’échange (10 élèves en juillet) Irish Cathedral, Indianapolis, Indiana Marist School, Atlanta, Georgia 3e année d’échange (9 élèves) Nouveau cette année : Glenbrook, Chicago, Illinois 1re année d’échange (11 élèves) Wellesley High School, Wellesley, (Boston), Massachusetts 1er échange en 2009 (17 élèves). Le prochain, déjà prometteur, en 2011 Episcopal School of Acadiana, Lafayette, Louisiane 4 élèves en 2008 Peter Chanel School, Cleveland, Ohio, pour seulement deux élèves L’ALLEMAGNE Berlin Cet échange en est à sa 29e année et l’année prochaine on fêtera en grandes pompes les 30 ans de partenariat entre le Canisius Kolleg et Chevreul-L’Externat. Cette année, les Berlinois sont venus du 5 au 15 octobre 2009. Ils étaient accompagnés par M. Walter Moser et par Mme Susan Wildermuth. Nous rentrons à peine de Berlin où nous avons séjourné du 22 avril au 3 mai. Werne Ce deuxième échange concerne surtout les élèves de 4e et de 3e. Les Allemands sont venus du 10 au 20 mars 2010 et les Lyonnais étaient à Werne du 22 avril au 1er mai. C’est Mme Pommier qui est le professeur référent de cet échange. Bochum Nous avons aussi un échange avec la Hildergardis Schule de Bochum : les Français ont séjourné du 3 au 11 mai et les Allemands étaient à Lyon du 26 mai au 4 juin. C’est Mme DubostGaulot qui est responsable de cet échange. Outre ces trois échanges, il existe deux voyages qui sont organisés chaque année en Forêt Noire : celui des 4e LV2 de Mme Dubost et celui des 6e organisé cette année par Mmes Perret et Ravistre. Alors que celui des 4e a lieu traditionnellement la semaine qui précède les vacances de Noël, celui des 6e aura lieu cette année en fin d’année scolaire, du lundi 31 mai au jeudi 3 juin. Tous les élèves germanistes de la division, soit 63 élèves, seront encadrés par six professeurs. Outre ces échanges et voyages, rappelons qu’il existe aussi pour les élèves intéressés de 2nde la possibilité de faire un échange de longue durée, appelé « programme Brigitte Sauzay », de 12 80 semaines, encadré et soutenu par l’OFAJ (Office franco-allemand pour la Jeunesse). Les élèves partent en mai en Allemagne dans la famille de leur correspondant, sont scolarisés dans l’école de leur correspondant et reçoivent à leur tour leur ami allemand pendant le 1er trimestre de l’année de 1re. Cette formule permet une vraie immersion linguistique et constitue une aventure humaine formidable. Chaque année, elle tente une dizaine de nos élèves. Il est nécessaire de se faire connaître avant la fin de l’année scolaire en cours auprès de son professeur actuel de 3e pour poser sa candidature, car les démarches et la constitution du dossier prennent un certain temps JOËLLE RAVISTRE 21 élèves de Chevreul et de l’Externat et leurs accompagnatrices, Isabelle Blondeau, professeur de lettres à Chevreul et Joëlle Ravistre, professeur d’allemand, pendant le séjour des Français à Berlin. VOYAGE PÉDAGOGIQUE Pour la troisième année consécutive, les élèves de première S1 de Lyon sont partis en voyage de classe, du 6 au 8 avril 2010, avec leurs trois professeurs de sciences : R. Domenach, S. Hertz, J. Rouressol. 84 Trois jours, riches de découvertes et d’échanges ; deux nuits, assurément trop courtes... Des sciences à la nature... En plein accord avec les programmes de la filière S, un tel voyage est d’abord scientifique. Cette année, pas de ballade dans les Ocres du Roussillon, pas de déambulation dans les laboratoires ou les serres OGM de l’INRA, mais une matinée dans la Forêt de Saoû (Drôme). Contemplation du plus haut synclinal d’Europe – pour les explications, voir TP du vendredi matin –, rencontre avec un responsable de l’ONF à moustache, alliant compétence scientifique, amour de la nature et attention aux personnes, et découverte concrète d’un projet de développement durable très ambitieux. Visite à Cruas (Ardèche, vallée du Rhône) d’une immense serre de culture hors sol : fleurs en pot et variétés anciennes de légumes poussent sous contrôle de l’informatique et de quelques frelons en patrouille, dans une chaleur assurée par l’eau recrachée de la centrale nucléaire voisine. De drôles de pieds de tomates pour un drôle de pied de nez à la « bio fashion »... De l’art sacré... au fil de l’histoire Dans le prolongement du cours de culture religieuse, c’est à un voyage dans le temps et dans l’espace qu’invitait le programme : art byzantin (musique, peinture, architecture), art roman provençal et art gothique (Avignon). Visite de l’Atelier Saint-Jean-Damascène, fondé par un couple orthodoxe d’origine ukrainienne et installé à Saint-Jean-en-Royans (Drôme) depuis 1976. Lieu de formation à l’art traditionnel de l’icône, de la fresque et de la mosaïque, lieu de ressourcement spirituel par la beauté et le silence. La visite commentée de l’abbatiale romane de Cruas (Vallée du Rhône, Ardèche)... et de la basilique Sainte-Anne de Bonlieu- 85 sur-Roubion (Drôme) où nous étions hébergés, accueillis par une petite mais très vive communauté de Prémontrés, en provenance non de Frigolet (où nous avions séjourné les deux premières années) mais de la normande abbaye de Mondaye. Le révérend prieur avait tout d’un père Gaucher, mais son élixir à lui doit avoir un fort goût de pomme ! La visite commentée d’un chef d’œuvre de l’école d’Avignon : le Couronnement de la Vierge d’Enguerrand Quarton (Cf. tome 5 des Chemins de la Foi) au Musée Pierre de Luxembourg de Villeneuve-lès-Avignon. Un passage express par le Musée Calvet d’Avignon, pour admirer deux tableaux. D’une nature morte, on fait une leçon de chose... En bref, une histoire de mouche aux allures d’abeille et à la taille de guêpe, posée sur un citron pas pressé du tout d’en finir, qu’on dirait un cédrat ou une mandarine. Quelle vanité ! De cultures religieuses si proches et si exotiques... L’immersion dans le monde byzantin s’approfondit, après le visite de l’Atelier Saint-Jean Damascène, en découvrant le monastère orthodoxe Saint-Antoine-le-Grand, caché depuis 1978 au fond d’une combe près de Saint-Laurent-en-Royans (Drôme) et dépendant directement du célèbre monastère athonite Simonos Petras. En prime, après l’accueil très chaleureux d’un moine, la célébration des vêpres au milieu d’icônes, de fresques éclatantes, de dorures, d’encens, de feuilles de lauriers et de chants orientaux (en français). Beaucoup d’émotions pour les élèves. Comme chaque année, nous avions rendez-vous avec la communauté hébraïque d’Avignon. Accueil ému par un des responsables de la Synagogue, évoquant l’histoire tourmentée des « Juifs du Pape ». Avant de quitter nos kippas, nous avons écouté ensemble la Parole, faisant nôtre la prière du psalmiste, le chant des exilés : « Au bord des fleuves de Babylone, nous étions assis 86 et nous pleurions, nous souvenant de Sion... » (Ps. 136/137) Trois jours, deux nuits... trop court assurément ! La preuve ? On a dû s’arrêter sur l’autoroute pour faire enfin une partie de foot ! Et encore, deux visites avaient dû être annulées, pour cause de GPS et de col fermé. La gratitude inonde bien sûr notre aventure. Merci à tous les élèves pour leur joie et leur amitié, aux parents et à la direction de Sainte-Marie pour leur confiance, à tous les intervenants pour le partage de leurs passions, au père Stephan Lange, notre aumônier, qui chaque année et malgré un emploi du temps surchargé, a réussi à nous rejoindre, et enfin un très grand merci à l’initiateur de ce projet, Jacky Rouressol ... SÉBASTIEN HERTZ, POUR LA CLASSE DE 1RE S1 JUME LAGE 10E ANNIVERSAIRE Sainte-Marie La Verpillière Collège des pères antonins de Baabda 13 lycéens et trois membres de la direction du collège de Baabda ont été accueillis du 8 au 18 avril par leurs correspondants français qui seront à leur tour reçus au Liban l’année prochaine dans le cadre de notre jumelage. Deux semaines de rencontres, d’échanges, d’accueil simple, joyeux et attentionné. Difficile de relater tous ces moments ; en voici les grandes lignes. 88 Vendredi 9 avril : journée dans l’établissement. Durant la matinée les correspondants sont accueillis chaleureusement par les professeurs de différentes classes du collège et du lycée. Après un partage de l’eucharistie, le groupe du jumelage a animé par des danses et des chants les récréations du primaire. Enfin M. Patrick Margier, maire de La Verpillière, a voulu honorer nos hôtes par une réception de bienvenue. 89 Samedi 10 avril : journée familiale organisée à Annecy, visite de la ville, repas partagé au bord du lac, promenade à vélo. Puis retour à La Verpillière pour une grand-messe en rite maronite animée par la chorale de la paroisse Notre-Dame du Liban et le Chœur du monastère Saint-Antoine de Chaponost où nous avons eu la joie de retrouver anciens élèves et familles du jumelage précédent. A l’issue de l’eucharistie, buffet libanais offert par les paroissiens ! 90 Lundi 12 avril : voyage à Paris et visite des principaux sites de la ville. En fin de journée, Mme Benoit, chef de l’établissement Bury-Rosaire, que nous remercions encore, nous attend avec les familles d’accueil. Chaque élève et son correspondant sont reçus par un parent d’élève de l’école, ce qui a permis un nouvel échange avec d’autres jeunes d’établissements maristes. Mardi 13 avril : visite de l’école avant de repartir à la découverte de la capitale. Mercredi 14 avril : en dépit des grèves, voyage à Nîmes, puis Arles et Toulon où nous attendent cette fois les familles du lycée Fénelon, autre établissement mariste. Un très grand merci à Mmes Marill et Saint-Jacques pour l’organisation. Jeudi 15 avril : musée de la marine ; après midi, plage et jeux. Vendredi 16 avril : à l’invitation du père supérieur Maroun Abi Nader, familles, élèves et correspondants se retrouvent au monastère Saint-Antoine à Chaponost pour partager temps de prière et repas libanais. Moment très chaleureux ! Puis, à la maison de retraite de La Verpillière, animation de chants et danses avec les résidents, lesquels reçoivent chacun un cadeau du Liban. Cette action s’inscrit dans le cadre du jumelage comme pour l’orphelinat de Ghédrass que soutiennent les jeunes Français. Fin de la journée chez la famille Debord que nous remercions pour ce temps festif. Samedi 17 avril : jeu de piste dans Lyon magnifiquement orchestré par Didier Tourette et dégustation des meilleurs plats lyonnais dans un bouchon comptoir. Dimanche 18 avril : fin du programme mais pas du séjour, en raison de l’incompétence des organisateurs qui n’avaient pas prévu la fermeture des aéroports ! Le séjour, en effet, s’est poursuivi jusqu’au jeudi 22 avril au monastère Saint-Antoine où les jeunes libanais ont été accueillis avec le soutien extraordinaire des familles. 91 Maintenant il ne nous reste plus qu’à attendre avril 2011 pour le séjour des élèves de La Verpillière au Liban. En attendant, le père Wissam, directeur adjoint du collège de Baabda, souhaite élargir la collaboration entre professeurs et propose un échange pédagogique, à élaborer. Un comité du jumelage représentant l’ensemble de l’établissement est également invité par la direction du collège de Baabda à l’occasion du séjour de nos élèves. Enfin va-t-on pouvoir résister à la pression des familles qui demandent l’organisation d’un échange entre les parents d’élèves des deux établissements ? Les propositions sont très diverses et ouvertes à toutes et à tous. Une réunion d’informations s’est tenue le 27 mai ; au programme : montage vidéo, témoignages des participants, assemblée générale de l’association « Les Mains ouvertes », et verre de l’amitié franco-libanaise BRIGITTE NEYRAND, XAVIER LAFAY, EMMANUEL JUHANT UN BÂTISSEUR LYON LA VERPILLIÈRE CARNET nou . vel les EN MÉMOIRE D’UN BÂTISSEUR LE PÈRE PERROT Chaque personne humaine est unique et mystérieuse, rebelle aux catégories dans lesquelles on voudrait l’enclore. Nos vies se croisent un instant – quelques années – s’effleurent à peine, avant de se disperser dans l’oubli ou l’incompréhension. Qui saura dire la vérité d’un être quand celle-ci semble se dérober sans cesse au regard rétrospectif ? Le père Perrot, plus encore que d’autres, déroutait les jugements. Homme secret, inclassable, il s’est une vie durant donné à une œuvre qui lui survit et en dehors de laquelle rien de ce qu’il fut n’est vraiment compréhensible. Il s’est effacé derrière cette œuvre, au risque des malentendus, dédaignant de la justifier par des discours, allergique aux honneurs et aux coteries. Né le 9 septembre 1927, Marc Perrot étudie chez les Maristes de Toulon jusqu’en première, puis en « mathélem » à SainteGeneviève. Admis en classes préparatoires, il préfère contre l’avis de ses parents rentrer à 17 ans chez les Pères Maristes. Il prononce ses premiers voeux à 18 ans, étudie la philosophie à Sainte-Foyles-Lyon, effectue son service militaire au Maroc. A Lyon, il étudie les mathématiques à l’Université, poursuit sa théologie à SainteFoy, est ordonné prêtre et complète sa formation théologique à Rome (1952-1953). Plus tard, il enseigne les mathématiques à l’Université catholique de Lyon (1960-1966) où son franc-parler et sa largeur de vue ne passent pas inaperçus. A la rentrée 1966, il prend la direction de l’externat Sainte-Marie, remplaçant le père Peillon qui restera son proche collaborateur. Jusqu’à l’âge de 65 ans, il enseigne les mathématiques en terminale C, débordant les programmes officiels, passionné par l’approche structuraliste des « mathématiques modernes ». En 1999, au terme de 34 années de direction, il confie le relais à un ancien élève, Marc Gaucherand. IN MEMO RIAM 96 Un bâtisseur Le père Perrot était un bâtisseur. Sa fidélité à l’esprit de la congrégation mariste, celui d’une présence attentive et discrète auprès des jeunes à l’image de la Vierge Marie, n’a jamais tourné à la dévotion formelle, pas plus qu’elle ne s’est fourvoyée dans les utopies pédagogiques à la mode. L’urgence était de créer des lieux d’éducation adaptés à leur temps, qui soient des lieux de vie et de croissance, aussi bien pour les enseignants, les membres du personnel que pour les élèves. C’est dans cet esprit qu’il sut fédérer les générosités de plusieurs générations d’enseignants et développer une aventure humaine unique à bien des égards. Lorsqu’il devient directeur, Sainte-Marie compte 1051 élèves. Dix ans plus tard, 1773. Cette même année une annexe est créée à La Verpillière ; les Pères Maristes y prennent la succession des Sœurs du Sacré-Cœur de Picpus qui dirigeaient une école primaire. Le père Perrot y ajoute une 6e et une seconde. L'annexe compte alors 292 élèves. En 1978, tous les niveaux sont assurés et La Verpillière compte 617 élèves (contre 1878 pour le collège de Lyon). En 1999, lorsqu’il quitte la direction, Sainte-Marie totalise 3600 élèves tous sites confondus ! Moins par esprit de prestige que pour encourager des professeurs de bon niveau à rester dans l’établissement (l’Externat comptait déjà un nombre important d’agrégés), le père Perrot ouvre des classes préparatoires : Préparatoires commerciales HEC en 1988, Hypokhâgne en 1989. En quelques années, ces classes vont obtenir des résultats remarquables. Mais le souci de l’exigence passe tout autant par la volonté d’accompagner des élèves moins doués ; ce sera la valorisation de la filière comptable (G2), puis l’ouverture du BTS de comptabilité-gestion à Lyon (1988) et du BTS de Commerce international à La Verpillière (1990). Dans cet esprit, le père Perrot veut que la qualité de l’éducation mariste profite à des milieux moins favorisés que celui de la bourgeoisie de 97 centre-ville lyonnais ; après avoir ouvert La Verpillière dans le contexte de la ville nouvelle de l’Isle d’Abeau, il s’efforce de créer un troisième site dans une ZEP de l’est-lyonnais (Charvieu Chavagneux), sans jamais y parvenir. Sa longue amitié avec l'architecte peintre Georges Adilon est à la source d’une œuvre architecturale de grande ampleur, dans une réflexion commune articulant éducation et création contemporaine. Aujourd’hui, des centaines d’architectes, d’étudiants ou d’amateurs viennent explorer les richesses de cette création à la fois sobre et voluptueuse, dans la conjonction complexe d’un matériau résolument pauvre (béton brut) et de formes raffinées (arrondis, angles variés, fenêtres toutes différentes, travail des grilles...). Il s’agissait en effet de penser une architecture au service de l’éducation en conciliant deux dimensions en apparence contradictoires de l’esprit de la congrégation mariste : - la discrétion des moyens : l’éducation n’est pas affaire d’apparence, mais travail sur l’invisible, dans un humble accompagnement des personnes au quotidien. C’est ce que traduit la prépondérance des murs nus, la blancheur des classes, la rusticité du matériau... Enseigner, « faire-signe », ce n’est pas ajouter au vacarme ambiant, mais plutôt prendre de la distance, faire retraite, pour mieux saisir ensuite la complexité du monde. - la gratuité des formes : chaque jeune est unique et aucune formule pédagogique ne saurait l’enfermer. Fuir l’utilitarisme, le fonctionnalisme dans l’architecture, c’est ménager des espaces où le regard peut vagabonder, se laisser surprendre, des lieux inutiles au détour de la courbe d’un bâtiment... 98 Un éveilleur A un établissement en croissance permanente, le père Perrot a toujours voulu conserver le caractère d’une « maison ». Selon lui, « un espace éducatif ne peut être qu'un espace d'amour ». C’est dire qu’une école ne réalise pleinement sa mission que lorsqu’elle est un lieu habité, non seulement par une communauté religieuse, mais encore par des laïcs capables de se dévouer quotidiennement dans tous les secteurs éducatifs : préfets de division, éducateurs, professeurs engagés dans toutes sortes de services. Générosité dans l’éducation : le père Perrot a souvent critiqué l’idée de « projet pédagogique », préférant promouvoir un « style éducatif » où l’on ne cherche pas à sacrifier au conformisme des « résultats » ou de l’image sociale, mais encourager la créativité des élèves et des enseignants : par l’éducation artistique, l’approfondissement spirituel... autant que par la simplicité des rapports humains. Quand on pense à toutes les œuvres émanant de SainteMarie depuis 40 ans, on comprend qu’il avait le génie de susciter ces générosités. Impossible de citer toutes celles qu’il a rendues possibles ou consolidées: les Petits Chanteurs de Lyon, le Centre Kierkegaard dans les années 80 puis le Collège Supérieur (1999), les activités théâtrales et les colonies d’été, la publication des manuels de culture religieuse Les Chemins de la foi, la qualité de la revue Lyon-Mariste, les voyages à Rome et Florence, jusqu’aux activités proposées aux parents d’élèves : conférences, recollections, ciné-club, etc. Mais au-delà de ces réalisations visibles, combien d’enseignants, d’élèves, de membres du personnel, gardent le souvenir d’une parole, d’un encouragement qui, émanant de cet homme réservé, les avait encouragés dans un moment difficile ! Le jour même de ses obsèques, un inspecteur général, qui fut enseignant à Sainte-Marie, lui rendit un hommage public en disant comment la confiance que le père Perrot lui 99 accorda au moment où, jeune professeur, il cherchait sa voie, fut déterminante pour toute sa carrière. Après sa retraite, tout entier dévoué à la fondation Puylata qu’il avait créée pour porter la fécondité de l’établissement, le père Perrot épaula de nouvelles initiatives parfois inattendues : le Cours Marc-Perrot de Dakar (créé par un ami musulman Karim Diallo, fasciné par sa personnalité éducative), le jumelage avec l’école Sainte-Christine de Kinshasa animé par la Communauté du Chemin Neuf, les colonies « Le temps des Vacances » lancées par Jean-Armand et Florence Baronne... sans compter le développement du Collège Supérieur, ainsi que le discret soutien apporté à des établissements lyonnais en difficulté. Un homme libre Ses impatiences, son absence totale de sens diplomatique, étaient proverbiales. Il pouvait d’une remarque lapidaire clore un débat ou manifester les limites d’une position. Nombreux sont ceux qui, surtout à l’extérieur de l’établissement, en ont pâti. Ces rudesses (dont il était largement inconscient) lui valurent souvent la réputation d’ « électron libre » au sein de l’enseignement catholique. Elles traduisaient un sens passionné de la liberté, notamment dans l'éducation. Ainsi faut-il comprendre son long combat pour la liberté scolaire. Visionnaire, il avait compris qu’une école de qualité ne peut vivre que dans l’autonomie de ses moyens et la cohérence de sa direction. Il a fait du libre recrutement des enseignants un combat difficile, dénonçant à l’avance une dérive bureaucratique de l’enseignement catholique, tenté d’imiter les travers de l’enseignement public. Il avait ainsi à cœur d’accueillir des enseignants du public qui trouvaient dans la maison un second souffle avant de repartir parfois sur leurs premières terres. 100 Car l’esprit de parti lui était insupportable, et cela fondait ce qu’il faut bien appeler son anticléricalisme. Anticléricalisme souvent de bon aloi : « Il faut aimer l’Eglise comme une mère, non comme un parti » répétait-il si justement. Il refusait un christianisme formel, estampillé par l’Institution comme un statut acquis définitivement. « Nous ne sommes pas un établissement chrétien, disait-il, mais un établissement à vocation chrétienne ». Est-ce pour cela qu’à son contact, nombre d’enseignants éloignés de l’Eglise ont pu cheminer vers la foi ? Il est vrai que son christianisme avait quelque chose de protestant : méfiance instinctive de toute forme de médiation, humaine ou ecclésiale, absence de sens liturgique, intérêt limité pour les questions théologiques toujours suspectes de dogmatisme... Sa spiritualité était celle d’un homme d’action au sens où, chez lui, l’action était méditée jusqu’en ses sources profondes et dans le mystère de sa fécondité invisible. Son sens politique très aiguisé voyait loin ; mais il était tout entier centré sur la promotion des personnes, de leur richesse propre, contre l’étau des directives officielles. Car l’action déborde toujours ce que l’on peut programmer ; on ne comprend le sens d’une action que dans le mouvement vivant de cette action, lequel jaillit des personnes concrètes qui l’incarnent. La liberté était pour lui la condition de l’espérance. Quand des professeurs étaient déçus par un jeune, il leur rappelait que « l'espérance sur les êtres est plus vraie que la lucidité » et que « la patience qui sous-tend cette espérance est toujours féconde». Lui-même incarnait cette confiance en accueillant largement dans son école toutes sortes de personnes en recherche d’insertion. Pour le meilleur et pour le pire, car rappelait-il : « Il vaut mieux pécher par excès plutôt que par manque d’espérance ». 101 Un spirituel L’espérance était bien pour lui vertu théologale, au sens où sa source est surnaturelle. Cet homme d’engagement et de décision était profondément convaincu que Dieu seul accorde la fécondité des œuvres humaines : « Toute fécondité véritable est grâce, vient de Dieu. Accepter cette humilité permet de ne pas avoir de hâte ni d'impatience, d'essayer d'être dans la paix. » Sur ce sens de l’espérance, il fondait une vision bien particulière de l’éducation, loin de tout volontarisme, de toute recherche du prestige des résultats ou des classements. Travailler à la croissance d’un jeune, c’est entrer dans une forme de renoncement : accepter que l’enfant prenne lentement la mesure d’une exigence, surmonter la volonté de mainmise ou de séduction qui guette l’enseignant, renoncer au désir de reconnaissance pour les efforts consentis... Qui accepte ce dépouillement dans la relation éducative pourra vivre cette mission dans la joie : « L'espérance est une vertu, c'est-à-dire une force qui s'exerce dans le quotidien, un état de confiance, une mise positive sur les événements, une perception humble, parce que sans illusion sur nos limites et respectueuse des délais, d'une réalité spirituelle qui s'accomplit mystérieusement chaque jour. [...] Cette reconnaissance que nous ne sommes pas seuls principes actifs de l'histoire, que le sens se dévoile plus qu'il ne se conquiert, introduit une légèreté – comme des enfants – un détachement – vous êtes des travailleurs inutiles –, une sérénité joyeuse – les lys des champs et les oiseaux du ciel –. C'est bien aujourd'hui que s'éclaire le regard de celui qui espère, aujourd'hui qu'est renouvelée sa joie. » Spirituel aussi dans l’ordre de la culture et de l’instruction, le père Perrot avait à cœur que les enseignants ne cessent de se cultiver, non par le souci immédiat d’une compétence directement opératoire, mais bien plus profondément parce qu’il savait qu’un enseignant, pour éveiller au goût de la vérité, doit lui-même se présenter comme un chercheur de vérité. Il en va ici du sens de la 102 culture scolaire dont il répétait qu’elle devait viser bien plus loin que la compétence mesurable dans telle ou telle discipline. Le sens des humanités, c’est d’introduire un jeune à l’ensemble de l’interrogation humaine, cette inquiétude du sens qui est à l’œuvre au cœur de toute culture digne de ce nom : « A la culture de la réponse et de la banalisation, soucieuse de sécurité, substituer celle de l'interrogation et de l'admiration, motrice de la vie spirituelle. L'aspect parcellaire des disciplines quant à leur objet propre dans la culture ne peut cacher le fait que chacune porte la visée globale de l'interrogation humaine. » D’où une haute conception de la vocation enseignante, comme médiation de l’invisible : « Le professeur et l'éducateur ne sont pas à la source du mystère de la vie intellectuelle et spirituelle, ils n'en sont que les médiateurs. » Le secret d’un être Les dernières années de sa vie furent douloureuses : en quelques mois, sous l’emprise de la maladie de Parkinson, il perdit l’autonomie à laquelle il était tellement attaché ; une fracture du col du fémur lui valut une série d’hospitalisations à la suite desquelles il ne put retrouver l’usage de ses jambes, tandis qu’à la maladie de Parkinson s’ajoutait le cancer. Il eut beaucoup de peine à accepter cette déchéance, malgré le dévouement des pères maristes et de plusieurs personnes résidant dans l’école. Dans ses derniers mois, il ne pouvait plus qu’écouter la radio. Sur RCF, il fut bouleversé de découvrir les chants de Taizé dans leur lancinante ferveur. Une dernière opération révéla l’ampleur de son mal. Il mourut quelques jours après, à la clinique des Charmettes, le lundi 6 juillet 2009. Je pus me rendre à son chevet. Revoyant pour la dernière fois ce visage si émacié, mais enfin apaisé, je sus que cet homme rude et pudique avait trouvé le port auquel il aspirait. Je repensai alors à tout ce qu’il avait semé dans ma vie et dans 103 celle de mes proches. Et je compris que l’essentiel n’est pas l’oubli ou l’incompréhension qui recouvrent notre destinée, mais la fécondité invisible d’une existence offerte qui poursuit dans le silence son œuvre de vie. « Le secret d’un être n’est pas ce qu’il cache, mais tout ce qui dans sa vie est accompli dans le silence pour que son expression soit moins contestable : c’est le sol nourricier de la vérité de ses discours. Il est nécessaire que bien des choses soient offertes dans le silence pour que les mots n’en soient que la surabondance. Le secret d’un être peut ainsi n’être aucunement ce qu’il refuse de livrer, mais ce qu’il accepte de perdre devant les hommes, sa vie la plus profonde et la plus renoncée, la condition de sa présence » 1 XAVIER DUFOUR, ANCIEN ÉLÈVE DU PÈRE PERROT, PROFESSEUR 1 Toutes les citations sont du père Perrot, consignées dans le premier des trois volumes de Paideia, ouvrages de photographie sur l’architecture de Sainte-Marie. 104 A.P.E.L. - Association familiale 16 janvier-20 mars Réunion des parents correspondants du lycée 2 février-4 mai Moment d’échange proposé par l’A.P.E.L. à la bibliothèque du primaire, suivis de la réunion des parents correspondants 1er juillet Bourse aux livres du primaire Animation spirituelle Le jeudi, tous les quinze jours, préparation à la Première communion : groupes animés par trois séminaristes et des lycéens de Saint-Paul, sous la responsabilité de B. Mauchard 6 janvier Dans le cadre de la préparation à la Première communion, enseignement pour les parents par le père Richard, travail en groupes avec les enfants, puis temps de prière à la chapelle 8 janvier Remise du livre « Ta parole est un trésor » aux élèves de 9e 23-24 janvier 2e week end spirituel pour les élèves de seconde à Montagnieu 25-27 janvier Retraite des TS4 au Foyer Marie-Jean en Ardèche 6 février Pèlerinage proposé aux pères de familles de Sainte-Marie depuis La Verpillière jusqu’à la Communauté des Sœurs des Maternités Catholiques à Bourgoin 13-14 mars Retraite des confirmands 13 mars Retraite de Profession de foi pour les garçons de 3e 17-20 mars Pèlerinage à Lourdes proposé aux élèves de 5e 20 mars Rassemblement diocésain des 4e/3e à Sainte-Marie 23 mars Méditation sur la Passion 25 mars Opération « bol de riz » au profit du projet Kinshasa 27 mars Retraite de Profession de foi pour les filles de 3e 1er avril Célébration du Jeudi Saint LYON 2 avril Office de la Passion. Pour les classes de 7e, Chemin de croix organisé par le diocèse, de la cathédrale à Fourvière 5 mai Retraite au Chatelard pour les enfants préparant la Première communion 8 mai Première communion à l’église Saint-Paul 22 mai Célébration de la Confirmation 22-26 mai Pèlerinage d’élèves de 3e à Assise 29-30 mai Pèlerinage d’élèves de 6e à La Salette 31 mai-5 juin Pèlerinage à Lourdes au service des malades pour les élèves de seconde 12 juin Profession de foi des élèves de 3e 21 juin Messe de fin d’année pour les catéchistes du primaire ; célébration de la « Fête-Dieu » pour les 8e, le 22 pour les 9e, le 24 pour les 7e 24 juin Messe de fin d’année pour les élèves de 4e/3e 25 juin Messe de fin d’année pour les élèves de 5e Conférences, interventions, réunions 14 janvier Réunion d’information sur l’orientation en fin de 3e 19 janvier Réunion d’information sur l’orientation pour les parents des élèves de seconde 21 janvier Dialogue interreligieux entre le cardinal Philippe Barbarin et Chris Martin, pasteur de l’église anglicane de Lyon 4 mars Réunion d’information sur le choix des langues et options en fin de 5e 8 mars Cycle des conférences de La Solitude : « Approche et évolution de la notion de patrimoine en Amérique, Europe et Asie » par Didier Repellin, architecte en chef des Monuments historiques 106 24 mars Formation sur le thème de la vie affective et sexuelle pour les élèves de première 29 mars Conférence-débat : « La question des drogues » au théâtre de La Solitude 8 avril Réunion d’information pour l’entrée en 6e 28 avril Formation aux premiers secours pour tout le personnel éducatif du primaire 31 mai Conférence-débat sur la drogue et les addictions par le Dr Rigal pour la division des secondes Etablissement 15 janvier Soirée des talents 20 janvier Conseil de maison : « Diversité des disciplines mais unité du savoir » 6 février Journée « portes ouvertes » pour les classes supérieures de Lyon 7 mars Matinée « portes ouvertes » pour le primaire 10 mars Conseil de maison : « Qualité des propos entre élèves, professeurs et parents » 17 mars Évaluation des TPE des élèves de première 28 avril Conseil de maison : « Emplois du temps et rythme de vie » 15 mai Matinée « portes ouvertes » pour les futurs élèves de seconde, nouveaux à Sainte-Marie 5 juin Fête de l’établissement Sorties, visites, voyages 18-22 janvier Classe de neige à Bessans pour les 8e 1 et les 7e 1 28 janvier Sortie à l’opéra de Lyon pour les 9e 1 et 9e 2 : le Carnaval des animaux, Ma mère l’Oye et Babar 107 12 février Sortie à l’opéra pour les 7e 4 : La danse à petits pas 2 mars Sortie à l’opéra pour les 8e 2 : Les quatre saisons 6-8 avril Voyage des 1res S1 : vallée du Rhône, Cruas, Drôme, Avignon avec R. Domenach, S. Hertz et J. Rouressol 8 avril Sortie à Rochebaron pour les 8e 1 et 8e 2 : visite d’un château fort, ateliers calligraphie et enluminures 9 avril Visite du musée des Beaux-Arts pour la classe de 7e 4 11-12 mai Voyage à Vulcania pour les classes de 7e 3 et 7e 4 25 mai Sortie géologie des classes de 1res S2, S3, S4 dans le massif de l’Oisans avec M. Seytier, O. Bertrand, S. Galli, E. Beaumont, L. Perreyon 27 mai Sortie à l’auditorium pour la classe de CP : Pierre et le loup 9-10 juin Voyage des 1res L à Marseille : découverte de la ville, antique, romane et contemporaine ; visite d’îles et de calanques avec B. Cazeaux et P. Fortin Théâtre, ciné-club Pour les élèves de première, terminale, classe préparatoire, parents, professeurs, anciens et amis : 4-5 janvier Le rêve de Cassandre de Woody Allen 4-5 mars Sur les quais d’Elia Kazan 30 avril Baptême de René Féret Pour les élèves de 2nde 1er mars Un homme pour l’éternité de Fred Zinnemann 8 juin Le cameraman de Buster Keaton ; Charlot soldat de Charlie Chaplin Pour les élèves de 3e 4-5 janvier Mon oncle de Jacques Tati 26-27 avril African queen de John Huston 108 Pour les élèves de 4e 18-19 janvier L’homme qui voulut être roi de John Huston 6-9 avril Une femme disparaît d’Alfred Hitchcock 11 mai Le mariage de Mickey, pièce de B. Heitz jouée par les élèves de 9e1 Dans le cadre de l’option théâtre : 20-21 mai Montage de pièces de Wajdi Mouawad, auteur libanais contemporain, qui travaille à Montréal, avec les terminales 21-28 mai Noces de sang de F. Garcia Lorca, avec les premières 16-17 juin L’avare de Molière, masqué, en commedia dell’arte, avec les secondes Chorale, concerts 31 janvier Prise d’aube de huit nouveaux Petits Chanteurs 14 mars Enregistrement de la Messe en symphonie, partition anonyme du XVIe retrouvée au Puy-en-Velay 21 mars Concert à la cathédrale par la Schola : Stabat mater de Pergolèse 28 mars Concert à la chapelle de la Trinité par la Maîtrise : Funeral Sentences de Purcell, Miserere d’Allegri, Messe Nelson de Haydn 31 mars-4 avril Animation des offices de la semaine sainte et célébration de Pâques à la cathédrale Saint-Jean 10-14 avril Camp musical de la Schola à Samoëns 29 avril Concert à la maison de retraite Sainte-Camille par les classes musicales de 7e, sous la direction de D. Faricier 5 mai Soirée musicale 28 mai Concert de la Maîtrise à l’église de l’Annonciation : œuvres de Britten, J. Rutter et Bernstein 109 17 juin Concert à la résidence Morlot par les classes musicales de 7e, sous la direction de D. Faricier 22 juin Concert de fin d’année des classes musicales du primaire au théâtre de La Solitude 24 juin Concert de la Saint-Jean à la cathédrale par les trois chœurs 8 juillet-3 août Série de concerts au Japon par la Maîtrise Activités sportives 19-21 mai Au championnat de France de badminton à Beauvais par équipe, Sainte-Marie-Lyon termine 5e en Benjamins et Minimes ; en individuel, S. Balas (1re) termine 5e 9 juin Fête de l’A.S. : rencontres sportives sur le site de La Verpillière 21-25 juin Tournoi de badminton pour les classes de 9e, 8e et 7e, organisé par D. Lavigne 110 A.P.E.L. - Association familiale 20 mars Réunion des parents correspondants du primaire 27 avril Réunion des parents correspondants de 4e /3e 30 avril Réunion des parents correspondants de 2nde / 1re 6 mai Réunion des parents correspondants de 6e / 5e 26 juin Bourse aux livres pour les classes du primaire Animation spirituelle 15 janvier « Café théo » pour les lycéens 16 janvier Temps fort de catéchèse proposé aux familles de CE1 et CE2, CM1 et CM2 19 janvier Commission pastorale de La Verpillière 26 janvier Réunion du groupe « Maristes en éducation » 27-29 janvier Rencontre annuelle des Animateurs en Pastorale Scolaire et des responsables de catéchèse et d’aumônerie des établissements maristes de France à La Verpillière sur le thème : « La vie sacramentelle dans nos établissements scolaires, l’accompagnement des jeunes, avant, pendant et après. » 5 février Soirée malgache : repas typique, animations, musique dans le cadre du Projet Madagascar 6 février Marche des pères de famille, de Sainte-Marie de La Verpillière jusqu’à la clinique des Petites Sœurs des Maternités Catholiques à Bourgoin 8-9 février Réunions des parents des élèves du primaire et du collège préparant la Première communion 9 mars Réunion du groupe « Maristes en éducation » 12 mars « Café théo » pour les lycéens LA VERPIL LIERE 13 mars Temps fort de catéchèse proposé aux familles de CE1 et CE2, CM1 et CM2 20-21 mars Retraite des confirmands à Mazille 26 mars Soirée Madagascar 26-28 mars Session inter établissements maristes à La Neylière ; Assemblée générale de l’association « Maristes en éducation » 1er-2 avril Célébrations de la semaine sainte 5 mai Rencontre avec le vicaire général de Grenoble pour les élèves confirmands de SainteMarie et ceux de la paroisse 11 mai Réunion du groupe « Maristes en éducation » 12-16 mai Pèlerinage des élèves de 3e sur le chemin de Compostelle 18 mai Sortie catéchèse à La Neylière pour les élèves de CM1 : « A la découverte des missionnaires maristes » ; commission pastorale de La Verpillière 22 mai Confirmation d’élèves du lycée à l’église de Saint-QuentinFallavier 25 mai Sortie catéchèse à Châtillonsur-Chalaronne pour les élèves de CM2 : « Sur les traces de saint Vincent de Paul » 27 mai Sortie de catéchèse à Fourvière pour les élèves de CE2 28 mai « Café théo » pour les lycéens ; retraite des enfants du primaire préparant la Première communion 29-30 mai Première communion d’élèves du primaire 5 juin Profession de foi des élèves du collège 9 juin Retraite des élèves du collège préparant la Première communion 12 juin Célébration de la Première communion 112 15 juin Rencontre de l’équipe pastorale avec les adjoints en pastorale des diocèses de Lyon et de Grenoble 20 juin Baptême des jeunes à Sainte-Marie 22 juin Commission pastorale pour l’ensemble de l’établissement à Lyon 29 juin Fête de l’éveil à la foi et de la catéchèse du primaire 4 juillet Sortie « Maristes en éducation » juillet Voyage à Madagascar pour des lycéens et des étudiants de BTS Conférences, interventions, réunions 22-30 janvier Réunions d’information sur les procédures d’orientation pour les parents des élèves de terminale 30 janvier Réunion d’information sur l’orientation en fin de 3e pour les élèves concernés et leurs parents 1er février Dans le cadre de l’information sur les orientations en fin de 3e, interventions auprès des élèves de la division de représentants de lycées techniques et professionnels : Mmes Morat (La Mache) et Houx-Plantier (Boisard) ; MM. Charpin (Jehanne de France), Fournier (Paul Claudel), Jenselme (Don Bosco) 13 mars Forum des métiers pour les élèves de première et terminale 11-18 mars Intervention du Centre Jean Bergeret sur « Les conduites à risque chez l’adolescent » en classes de seconde : rencontre avec divers membres de l’établissement (préfet, professeurs, éducateurs, infirmière, représentante des parents) pour une présentation de l’intervention, assurée par Mme Nedjadi, psychologue clinicienne ; puis intervention auprès des élèves qui ont eu à s’exprimer à partir de photographies. Un bilan a suivi, une semaine après. 113 20 mars Réunion d’information sur l’orientation pour les parents des élèves de seconde 23 mars Réunion sur le choix des langues et du latin en 4e pour les parents des élèves de cinquième 29 avril Réunion sur le choix des langues en 6e pour les parents des élèves de CM2 Echanges internationaux 7-19 février Séjour des Français à Heusenstamm, Allemagne 2-11 mars Accueil des correspondants anglais d’Ingatestone 3-18 avril Accueil des correspondants australiens de Bacchus Marsh 25 juin-25 juillet Séjour de vingt et un Français en Australie, encadrés par J. Duboin et J.-P. Miolle 16-30 octobre Séjour des Allemands en France 1er-9 novembre Séjour des Français en Angleterre Etablissement 20 janvier Conseil de maison : « Diversité des disciplines mais unité du savoir » 8-19 février Stages en entreprise pour les élèves de première STG 8 février-5 mars Stages en entreprise pour les élèves de BTS 2e année 6 mars Journée « portes ouvertes » 10 mars Conseil de maison : « Qualité des propos entre élèves, professeurs et parents » 15-18 mars Cross Madagascar pour les élèves du collège, du lycée et de BTS 17 mars Epreuves des TPE pour les élèves de première 114 10 avril Dans le cadre du jumelage avec le collège de Baabda, Liban, récital en l’église de La Verpillière, donné par la chorale de la paroisse Notre-Dame du Liban (Lyon 8e) et le chœur du couvent Saint-Antoine (Chaponost) 13 avril À l’ ESTRI à Lyon, examen de Cambridge (first) 28 avril Conseil de maison : « Les emplois du temps, le rythme de vie » 18-28 mai Exposition de peintures, photographies et sculptures de professeurs et d’élèves à la bibliothèque 27 mai Assemblée générale de l’association du jumelage avec le Liban 12 juin Fête de l’établissement Sorties, visites, voyages 15-17 janvier Voyage des 1res L et TL à Paris avec P. Berthelot, P.E. Chavelet, D. Perceveaux et N. Pic 23 janvier Sortie de ski à Arêche-Beaufort pour les élèves de 6e/5e sous la conduite de Thomas Clerc-Renaud 27-30 avril Sorties géologie des classes de 5e 2, 5e 5, 5e 1 et 5e 3 aux grottes de La Balme sous la conduite de Bénédicte Applagnat et Françoise Delorme ; le 18 mai pour les classes de 5e 4 et 5e 6 29 avril Sortie des latinistes de 4e 5, 3e 4 et 3e 6 à Lyon : visite des théâtres antiques et de l’exposition « Post mortem » au musée gallo-romain avec M.P. Matray et D. Perceveaux 29 avril Sortie découverte des CE1 A et B à Saint-Chef : maisons en pisé et fresques romanes 6-10 mai Concours « Ciceron » à Arpino pour Maëva Bonfanti (TL) et Nicolas Tardy (TS1) accompagnés de Mmes Berthelot, David-Ferré et M. Perceveaux 115 11-15 mai Voyage à Venise pour les classes de 5e 5, 5e 6 et quelques élèves de 5e 3 sous la responsabilité de Françoise Delorme, accompagnée d’Elodie Ramora, Franck Laillaut, Jean-Pierre Miolle et Thomas Clerc-Renaud 3 juin Les élèves de CM1 B rencontrent à La Solitude leurs correspondants de CM1 pour découvrir ensemble le Vieux-Lyon, avec leurs professeurs Mmes Lefèbvre, Deleigue et Peignot Théâtre, ciné-club 20-21 janvier Projection de La mort aux trousses d’A. Hitchcock pour les élèves de première, terminale et BTS 8 février Représentation de C’est trop génial d’être aujourd’hui à L’Isle d’Abeau pour les élèves de maternelle et de CP 15 mars Représentation théâtrale Merlicoquet et autres contes à L’Isle d’Abeau pour les élèves de CE1 A et B 7-8 juin Spectacle de théâtre des lycéens dirigés par O. Mocellin : au programme, extraits d’Aristophane, Anouilh, Tristan Bernard, Musset et Tennessee Williams Chorale 13 janvier Concert à la maison de retraite de La Verpillière par le groupe préparatoire 21 mars Messe et concert à Condrieu par les préparatoires et Petits Chanteurs 10-17 avril Camp musical à Corrençon pour le groupe préparatoire avec T. Clerc-Renaud et N. Bottazzi 5 juin Concert des Petits Chanteurs et du Chœur mixte à L’Isled’Abeau 26 juin Concert de fin d’année du groupe préparatoire à l’église de La Verpillière 116 Activités sportives Volley-ball : sont champions du Lyonnais, catégorie Benjamins : S. Alcala, A. Mocellin, P. Ulysse (6e 2), A. Vacher (6e 3) et S. Khechaba (6e 5) Badminton : au Régional par équipe 2010 à Ambérieu-en-Bugey, Sainte-Marie-La Verpillière termine en Benjamins : 3e ; Minimes : 7e ; Cadets : 1re Judo : Championnat de France Minimes : V. Breniaux (5e 2) et L. Diard (5e 1) : 8e ; Cadets/Juniors : P.A. Favre (1re S2) : 5e en 60 kg ; P. Demonet (2e 4) : 2e en 66 kg ; P. Bouvet (2e 4) : 8e en 81 kg ; T. Montagnon (1re ES) : 3e en 90 kg. 21 mai Plus d’une centaine délèves ont participé au gymnase à un tournoi de volley-ball à l’occasion du « jubilé » d’André Candéla CAR NET Naissances Eugénie, fille de Vincent Guigard, préfet des terminales à Lyon, le 1er janvier Raphaël, fils d’Emmanuelle Gras, professeur de lettres à La Verpillière, le 28 février Tania, fille de Carole Defourneaux, professeur d’E.P.S. à La Solitude, le 19 mars Amédée, fils de Valérie Faure, professeur de français à La Verpillière, et de Jean-Claude Chrétien, ancien professeur de musique à La Verpillière, le 20 mars Laurène, fille de Rachel Perrot, professeur de S.V.T. à Saint-Paul et à La Solitude, le 19 avril Clément, fils de Gilles Le Bonhomme, professeur de S.V.T. à Lyon, le 25 mai Mariages Didier Tourrette, préfet des terminales et BTS de La Verpillière avec Valérie Prat, responsable de la catéchèse en lycée à La Verpillière, le 23 janvier Clotilde Peignot, professeur des écoles en 8e 2 à Lyon, avec Nicolas Randet, le 17 avril Agnès Deshayes, professeur des écoles à La Verpillière, avec Emmanuel Jaudel, le 17 juillet Départs Lyon Henri Brenders, professeur d’anglais à Lyon, entré en 1967 Annick Meaudre, secrétaire de direction, entrée en 1973 Marie-Christine Dubost, professeur de sciences économiques, entrée en 1975 Marie-Claude Mollard, professeur d’histoire-géographie, entrée en 1979 Marie-Lobka Cadoz, professeur de gestion, entrée en 1989 Catherine Coiffet, surveillante en classes préparatoires, entrée en 1999 Odile Nachbauch, infirmière, entrée en 1999 Stephan Lange, pêtre au service de l’établissement depuis 2007, appelé à une autre mission 118 La Verpillière Bernard Moulin, professeur d’anglais, entré en 1974 André Candéla, professeur d’E.P.S., entré en 1975 Bernard Forel, professeur de mathématiques, entré en 1976 Décès Nous participons à la douleur de Alix Favre (TS1), Gautier (1re S1) et Sixtine (5e 8) à Lyon qui ont perdu leur père, le 10 janvier Thierry Martin, professeur de lettres, qui a perdu son frère, le 11 février la famille de Jean-Pierre Gay, qui fut au service de la comptabilité à Saint-Paul pendant une trentaine d’années, décédé le 19 février Anne-Laure Le Blanc, éducatrice en 4e à La Solitude, qui a perdu sa mère, Nicole, secrétaire à Sainte-Marie pendant 32 ans, le 21 février Michèle Folachier, professeur d’espagnol à Lyon, qui a perdu sa mère, le 22 février Melvin Gros (2nde 5 à La Verpillière), qui a perdu son père, le 3 mars Lucas Groléaz, élève de 2nde 1 à La Verpillière, et de ses parents, qui ont perdu Fabien, ancien élève de TS1 l’an dernier, décédé accidentellement, le 15 mars Michel Rivoire, président de la Fondation des Maristes de Puylata, qui a perdu sa mère, le 27 mars Myriam Rolinet, responsable des cuisines à La Solitude, qui a perdu sa mère, le 1er avril Régis Frély, ancien professeur de physique à Lyon, qui a perdu sa fille Raphaëlle, le 2 avril Fabienne Cassagne, professeur de S.V.T. à La Solitude, qui a perdu son père, le 18 avril la famille d’Antoine Mappus, professeur d’allemand à Lyon de 1969 à 1983, décédé le 10 mai Danielle Giroud, responsable des 3es à La Verpillière, qui a perdu son père, le 15 mai Joséphine de Rohan-Chabot (TL) et Gaspard (5e 8) à Lyon, et de leurs parents, qui ont perdu Jeanne, élève de 2nde 8, le 15 mai Cyrille Guiran, responsable informatique à Lyon, qui a perdu son père, le 28 mai Crédits photos : Travaux d’arts plastiques, sous la conduite de Nathalie Charcosset : Idéogrammes, classe de 3e 1 Dentelles, classe de 5e 3 La Verpillière 120 L’Enseignement Catholique de l’Académie de Lyon en partenariat avec l’Université Catholique de Lyon, l’Institut de l’Oratoire, l’IFD de Grenoble, l’Observatoire des cultures religieuses-Fondation Fourvière et FORMIRIS Rhône-Alpes-Auvergne propose aux enseignants 3e UNIVERSITE D’ETE ENSEIGNEMENT ET RELIGION 3 JOURNÉES DE FORMATION À LYON LES 7, 8 ET 9 JUILLET 2010 Lycée Sainte-Marie 4 montée Saint-Barthélemy 69005 Lyon Professeurs d’enseignement religieux de Sainte-Marie Dans le cadre de la formation des professeurs dispensant un cours d’enseignement religieux, nous vous proposons cette année de profiter de la richesse du programme de la 3e université d’été Enseignement et religions : • vous aurez la possibilité de rencontrer des collègues d’autres établissements, • vous profiterez d’une diversité d’approches : inter religieuse et culturelle, • vous pourrez écouter des formateurs de qualité, du mercredi 7 juillet 9h au vendredi 9 juillet 17h. 2 e TRIMESTRE 2010 SAINTE-MARIE LYON 4 MONTÉE SAINT-BARTHÉLEMY 69005 LYON TÉL. 04 78 28 38 34 www.sainte-marie-lyon.fr DIRECTEUR DE PUBLICATION Michel Lavialle CONCEPTION Créatifs du Monde / Agence Mordicus IMPRESSION Dugas IPC