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INTERVIEW Retraite complémentaire : ce qui va changer Jean-Philippe Trésarrieu est sous-directeur technique de l’IRCANTEC (Institut de Retraite Complémentaire des Agents Non Titulaires de l’Etat et des Collectivités Publiques) auquel sont affiliés les praticiens hospitaliers. Il nous a expliqué en quoi les nouveaux textes modifient la donne en matière de retraite complémentaire. M. Ce texte a été relu et amendé par M.Trésarrieu. 20 PHAR : Quels sont les principaux changements apportés par l’arrêté qui vient de paraître ? LE VOCABULAIRE DE LA RETRAITE J-P Trésarrieu : L’arrêté du 26 décembre 2003 est - L’IRCANTEC est à la fois un régime réglementaire obligatoire et une caisse de retraite. Ce régime complémentaire par points fonctionne selon le principe de la répartition et regroupe les cadres et les non-cadres de tout le secteur public, soit environ 1,5 million de retraités et 2,45 millions d’actifs cotisants (chiffres 2002). une transposition de la loi sur la retraite qui a été votée le 21 août dernier *. Un décret pourrait venir le compléter dans les prochains mois.A ce jour, le taux de rendement (15 %) n’est pas modifié. En d’autres termes, l’arrêté maintient les paramètres d’équilibre financier du régime. Désormais, les règles de son fonctionnement sont relativement comparables à celles des salariés du secteur privé : - Il faudra désormais cotiser 160 trimestres au lieu de 150 pour obtenir une pension à taux plein avant 65 ans ; - Le salaire de référence et la valeur du point de retraite seront indexés sur l’évolution prévisionnelle des prix, hors tabac et non plus sur l’indice de l’augmentation des salaires de la fonction publique ; - Cumul emploi – retraite. Les bénéficiaires des retraites pourront continuer à percevoir ces avantages et reprendre une activité sous réserve que le revenu procuré par cette nouvelle activité, ajouté au total des pensions perçues n’excède pas le dernier revenu d’activité avant départ en retraite ; - Egalité hommes – femmes : égalité totale des conditions de réversion sur l’intégralité de la carrière pour les décès intervenus après le 31 décembre 2003 ; - Les personnes qui s’arrêteront de travailler entre 60 et 65 ans auront une retraite minorée * Vous pouvez lire le texte de l’arrêté sur : http://admi.net/jo/20031230/FPPA0300169A.html COMPLÉMENTAIRE - Le salaire de référence est le prix d’achat du point de retraite. Il s’élevait à 2,640 euros en 2003. Cela signifie qu’il fallait 2,640 euros de cotisations pour obtenir un point de retraite. - Le point de retraite est une unité de compte dont la valeur varie chaque semestre. Du 01/07/03 au 31/12/03, il valait 0,40301 euros. Aussi, le montant annuel de la retraite complémentaire se calcule en multipliant le nombre de points obtenus par la valeur du point. - Le taux de rendement est le rapport : valeur du point de retraite/salaire de référence. Il est actuellement de 15 %. - L’assiette de cotisation correspond à la rémunération globale brute. Elle comprend les indemnités attachées à la fonction ou l’emploi ; elle exclut les indemnités journalières en cas de maladie et les indemnités représentatives de frais. - Le taux théorique de cotisation sert uniquement à calculer les points de retraite. - Le taux d’appel permet de calculer les cotisations versées par l’employeur et le salarié à l’IRCANTEC. INTERVIEW de 4 % si elles s’arrêtent de travailler à 64 ans, de 8 % à 63 ans, de 12 % à 62 ans, de 17 % à 61 ans et de 22 % à 60 ans. PHAR : Actuellement, quel montant de retraite complémentaire perçoit un praticien hospitalier prenant sa retraite à 65 ans et ayant acquis 70 000 points IRCANTEC ? J-P Trésarrieu : Pour ceux qui s’arrêtent de travailler à 65 ans, la nouvelle loi ne modifie pas le montant de la retraite.Ainsi, la valeur du point entre le 1er juillet et le 31 décembre 2003 était de 0,40301 €, le plafond annuel de la Sécurité Sociale étant de 29 184 €.Le calcul s’effectue de la façon suivante : Nombre de points pour la tranche A en 2003 : 29 184 € x 4,50 % 0,40301 Nombre de points pour la tranche B : (Salaire annuel – 29 184 € ) x 14 % 0,40301 Si le total des points acquis est de 70 000, le montant annuel de la retraite complémentaire sera : 7 0 000 x 0,40301 = 28 210 €, soit 2 350,83 € par mois. UN RÉGIME QUI CONCERNE ENVIRON 4 MILLIONS DE PERSONNES, SOIT DES CENTAINES DE PROFESSIONS DIFFÉRENTES PHAR : Pourquoi le Conseil d’administration ne comptet-il pas de syndicats représentatifs des médecins hospitaliers ? J-P Trésarrieu : Le Conseil d’administration de l’IRCANTEC est composé de 15 représentants de l’Etat et 15 représentants des affiliés, actifs et retraités. Ces derniers sont désignés par les organisations syndicales. Dans ce cadre,vous me demandez si les administrateurs du régime, pour ce qui est des représentants des particuliers doi- vent être des représentants des professions. Cette option n’a pu être retenue car l’IRCANTEC représente un nombre considérable de professions. Et si l’on choisit un autre critère, il pourrait être envisagé de procéder à des élections. Cela signifie qu’il faudrait pouvoir joindre tous les affiliés, y compris, par exemple, des personnes qui ont été, à un moment donné, moniteurs de colonies de vacances pour une collectivité territoriale ! Ce serait non seulement difficile et coûteux à organiser, mais de plus, cela ne pourrait pas aboutir à un résultat satisfaisant. En fait, la concertation avec les syndicats relève de la compétence des ministères de tutelle. Ces derniers ont été consultés dans le cadre d’une part d’un conseil d’administration exceptionnel et d’autre part d’échanges bilatéraux entre le président de l’IRCANTEC et les ministères de tutelle.Aussi,s’il n’y a pas eu de contact direct avec la profession médicale, les intérêts des médecins ont cependant été préservés par cette consultation préalable à la consultation officielle. LE POINT DE VUE « CORPORATISTE » NE PEUT ÊTRE ENTENDU PHAR : Au-delà de cette consultation préalable, comment les praticiens hospitaliers peuvent-ils faire entendre leur voix ? La nouvelle loi d’août dernier sur la retraite prévoit un droit à une information plus performante aux futurs retraités et elle demande que les affiliés puissent mieux connaître leurs droits.Aujourd’hui, Ils peuvent être informés soit par le biais de notre revue qui s’adresse aux retraités mais qui devrait élargir sa diffusion aux actifs, soit par notre site internet ou par le courrier qu’il est possible d’adresser au président de l’IRCANTEC, ou aux services de la Caisse des Dépôts. Certains praticiens souhaiteraient constituer un régime par spécialité médicale. Force est de constater qu’il serait difficile d’assurer son équilibre financier à long terme. Chaque praticien devrait mettre en regard le montant et la durée de ses cotisations, dans le cadre d’un placement financier, avec le montant correspondant de sa retraite, tenant compte de J-P Trésarrieu : 21 INTERVIEW son espérance de vie. Il s’apercevrait que le rendement au global est plutôt satisfaisant,même en comparaison avec les autres organismes de retraite. Cependant, il est clair qu’en valeur absolue, chacun obtient la retraite complémentaire correspondant au prélèvement obligatoire que le législateur a considéré comme le taux maximum acceptable. PHAR : Quelles solutions préconisez-vous pour intégrer le temps passé en garde avant 1996 et celui passé en astreinte ? J-P Trésarrieu : Cette question,qui relève avant tout de la compétence des ministères de tutelle et pose le problème de l’assiette de cotisation. CHANGER DE CAISSE DE RETRAITE ? PHAR : Pouvez-vous nous expliquer ce que fut le règlement financier du dossier des retraites de France Télécom ? Quel jugement a été rendu par la Cour d’Appel de Paris ? Quel impact financier pour l’IRCANTEC ? J-P Trésarrieu : Un problème spécifique a été sou- levé par France Télécom dans la mesure où cet établissement a été privatisé.En effet,les salariés, de ce fait, ne relevaient plus de l’IRCANTEC, qui ne s’adresse qu’aux salariés d’établissements publics financés par l’Etat, mais de l’ARRCO ou de l’AGIRC,organismes de retraite complémentaire des salariés du secteur privé.Dans le cas de France Télécom,on a simplement opéré un transfert de flux financier de l’ARRCO et de l’AGIRC vers l’IRCANTEC pour assurer le financement des retraites complémentaires des salariés. Mais ce cas particulier a incité certains médecins à se demander s’il n’était pas possible, pour les praticiens hospitaliers, de changer d’organisme de retraite complémentaire, voire de créer leur propre régime de retraite. Cependant, pour qu’un tel changement soit possible, il faudrait changer la réglementation. Et aujourd’hui, ceci parait difficile. PHAR : Selon un récent rapport de la Cour des Comptes, les perspectives financières semblent s’assombrir à partir de 2010, avec des déficits d’exploitation considérables. Quelles mesures comptez-vous prendre pour garantir les prestations ? En fait, ce sont les ministères de tutelle qui sont responsables de l’équilibre financier du régime. Dans ce cadre, il parait souhaitable que les syndicats médicaux fassent entendre leur voix, en tant que catégorie de cotisant, sur les modalités pour préserver l’équilibre du régime à long terme plutôt que de se placer dans une démarche professionnelle spécifique. Là encore certains affiliés à l’IRCANTEC se demandent si l’avenir serait plus favorable à l’ARRCO et à l’AGIRC. La question ne se pose pas car, en tout état de cause, les transferts des droits se feraient en considération des droits accumulés. Par ailleurs, le taux de rendement de l’ARRCO est plus faible que celui de l’IRCANTEC. J-P Trésarrieu : Propos recueillis par le Dr Gérard Gertner La revue PHAR publie le texte de soutien au Dr Frédéric Chaussoy et invite les praticiens qui le souhaitent à signer l’appel sur le site : htt://www.appel-chaussoy.fr.st APPEL AUX MÉDECINS EN SOUTIEN AU DOCTEUR CHAUSSOY 22 Notre travail quotidien est une remise en question permanente. Gérer l’imprévu dans l’anticipation est indispensable à nos spécialités. La technicité de la médecine a permis ces dernières années de véritables progrès diagnostiques et thérapeutiques et particulièrement dans les disciplines médico-techniques. Nous sommes confrontés quotidiennement à l’injustice de la fin trop précoce d’une vie, nous laissant en proie au doute et nous ramenant à nos propres interrogations. Dans la discussion, dans le questionnement entre médecins et équipe soignante, des options sont prises. Elles sont argumentées, réfléchies et mûries à partir des échanges que nos équipes entretiennent avec le patient ou sa famille. L’expérience montre cependant que l’entourage familial peine souvent à faire un choix même si elle dispose de la totalité des informations pour le faire. La culpabilité d’interrompre activement une réanimation ne doit pas être assumée par la famille d’un patient dans le contexte pénal actuel. Si le vécu personnel de chacun, face à la mort, doit être respecté sans préjugé, il doit être partie prenante dans l’accompagnement des proches, il peut être même nécessaire d’assumer une décision quand la famille ne le peut pas. Ne nous méprenons pas, notre mission est avant tout celle de soigner en refusant la souffrance sous toutes ses formes. Il existe cependant des limites à notre exercice. Notre confrère le Dr Frédéric CHAUSSOY avec l’ensemble de son équipe, a été confronté à ce choix. Face à une situation sans issue, face à la souffrance d’une famille, le Dr CHAUSSOY a décidé de ne pas poursuivre les soins et de donner activement la mort dans une situation où chacun de nous aurait pu agir de la même façon. Nous, soussignés, sommes solidaires du Dr CHAUSSOY dans sa prise de décision comme dans sa déclaration publique à la presse.