6.7. Rôles, types et performance des conseils d`administration

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6.7. Rôles, types et performance des conseils d`administration
6.7. Rôles, types et performance des conseils d‘administration
La formation «Etre administrateur de PME», organisée par Solvay Entrepreneurs,
reprend à la rentrée. Parmi les thèmes développés: la bonne gouvemance ou l'art
d'harmoniser les rôles des acteurs clés de l'entreprise: actionnaires, administrateurs,
managers et autres parties prenantes. Marc Deschamps, président d'!nvestructure et
d'Exego, nous en dit plus.
Jacqueline Remits
LA GOUVERNANCE D'ENTREPRISE est à la
base de la gouvernance publique. Né au 15e
siècle, 'gouvernance' est un mot de vieux
français dérivé du latin 'gubernator', le
général. Ce terme, latent du 16e au 20e
siècles, est réveillé, dans les années 80, par
les Anglais et les Américains, sous
l'expression de corporate governance, la
gouvernance
d'entreprise.
«Cette
déclinaison de la gouvernance a en commun
avec les autres gouvernances, deux piliers
fondamentaux: l'éthique et la logique,
explique Marc Deschamps. En entreprise,
ces deux piliers sont cependant insuffisants
pour dégager une dynamique gagnante. Il
convient donc de concevoir un véritable
'système de gouvernance' qui favorise
l'expression de l'éthique et de la logique ...
Mais aussi de cette vertu essentielle - et
rare - le courage.»
-
Les rôles de chaque acteur
Le 'système de gouvernance' est constitué
de quatre composantes essentielles: les
acteurs, les structures, les procédures et les
informations de gouvernance. S'ajoutent
quatre 'déterminants de la gouvernance'
propres chacun des quatre acteurs. La
combinaison de l'ensemble va créer la
bonne gouvernance de l'entreprise.
-
-
Quatre acteurs: les actionnaires, les
administrateurs, les managers et les
autres parties prenantes de l'entreprise
(personnel,
fournisseurs,
clients,
concurrents, pouvoirs publics, associations
patronales
ou
syndicales,
sociétales,
centres
de
recherche
universitaires ou autres).
A
chacun
sa
structure.
Les
actionnaires se retrouvent en assemblée
générale, les administrateurs en conseil
d'administration,
les
managers
en
comité de direction et les autres parties
IHK-Infos 11/12-2009
prenantes se manifestent dans des
conseils consultatifs. Le plus connu en
Belgique est le conseil d'entreprise
qu'une loi de 1948 oblige de réunir
lorsque le personnel dépasse 50 ou 100
personnes, selon les cas.
Les procédures. Elles accompagnent la
réunion de ces organes et favorisent
l'efficacité dans la réunion d'un conseil,
d'une assemblée ou d'un comité. Cela
passe par la convocation, l'ordre du jour,
la documentation, la préparation de la
réunion. D'autres procédures règlent le
bon déroulement des échanges comme
le règlement d'ordre intérieur pour un
conseil d'administration.
Enfin, des procédures règlent l'après
réunion, liées au procèsverbal, mais
aussi à la gestion des relations entre
acteurs hors réunions .
Les informations. Elles se répartissent
en quatre catégories: deux se rapportent
aux acteurs et deux autres aux organes.
Les premières sont les documents de
gouvernance,
textes
généraux
ou
spécifiques. «Si une entreprise décide de
se doter d'un code de gouvernance, ce
texte lui est propre. Par contre, le code
de gouvernance pour les entreprises
non-cotées, le code Buysse, constitue un
texte général applicable à toute PME.»
Quant aux structures, elles sont alimentées
en
information
par
des
dossiers
(d'assemblée générale, de conseil, de
comité
de
direction
et
de
conseil
consultatif). Leurs PV sont enregistrés dans
des livres légaux: le livre des procèsverbaux des assemblées générales, des
procès-verbaux des conseils d'administration
et le livre d'inventaire, par exemple.
A défaut de plus de formalisme, la
responsabilité de la gestion de la bonne
gouvernance repose sur les épaules du
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président du conseil d'administration. Dès
que la taille de l'entreprise est suffisante, il
va s'appuyer sur le secrétaire du conseil
d'administration qui est parfois aussi le
secrétaire général de l'entreprise. Ne
faudrait-il pas une sorte de 'comité de
gouvernance' pour gérer la gouvernance
elle-même? «Cela mérite réflexion ... »,
répond Marc Deschamps.
-
la bonne gouvernance accompagnée et
formalisée.»
La gouvernance optimisée. Le top du
top. «A partir de la gouvernance
formalisée, on va progressivement
s'attaquer à l'optimisation d'une série
d'aspects du système.»
Vers la performance
Les différents types de gouvernance.
Un système de gouvernance est composé
des composantes et des déterminants, mais
la gouvernance se développe par étape.
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-
Gouvernance légale. Au début, le
jeune entrepreneur se contente de faire
ce que la loi impose. Dans une société
anonyme, par exemple, il faut créer un
conseil d'administration. Le conseil
d'entreprise, par contre, ne devra être
constitué
que
lorsque
la
société
comptera une centaine de personnes.
Gouvernance
spontanée.
Comme
Monsieur Jourdain faisait de la prose, les
entreprises
font
de
la
bonne
gouvernance sans le savoir. Une
question de logique et d'éthique.
Gouvernance accompagnée. Elle peut
se faire par l'introduction d'un ou
plusieurs administrateurs externes, ni
actionnaires, ni managers. Elle peut
aussi se manifester dans l'accompagnement par des spécialistes qui vont aider
à mieux structurer la gouvernance de
l'entreprise. «A ce stade, la gouvernance
commence à rapporter parce qu'elle crée
de la valeur à l'entreprise en faisant
l'économie de dépenses ... et de
conflits.»
"Le 'système de gouvernance' est
constitué de quatre composantes
essentielles: les acteurs,
les structures, les procédures et les
informations de gouvernance."
-
Gouvernance formalisée. A la veille
d'une
cession
d'entreprise,
une
gouvernance formelle va donner plus de
valeur à l'entreprise: l'acquéreur sait
qu'il
devient
propriétaire
d'une
entreprise 'bien en ordre'. «Des études
ont montré que, en général, une
gouvernance formalisée donne une surcote de 15 à 25 % à l'entreprise. Cela
vaut donc de la peine d'investir dans de
IHK-Infos 11/12-2009
L'entreprise qui se crée a déjà intérêt à
introduire les semences de vertu, mais
certainement pas de mettre en place des
outils complexes. «Le code Buysse 2
recommande aux entreprises de ne pas
instaurer un conseil d'administration trop
vite quand elles n'y sont pas obligées par la
loi, mais d'abord un 'conseil d'avis', sorte de
caisse de 'raisonnance' (pas résonance), afin
que le dirigeant ait un sparing partner de
réflexion, souligne Marc Deschamps. Quand
la taille de l'entreprise le justifiera, le patron
aura alors intérêt à mettre en place un
conseil d'administration.» Souvent, les
membres des conseils d'avis deviendront les
membres du conseil d'administration, celuici deviendra performant dès le départ.
A travers la bonne gouvernance, la
performance de l'entreprise peut être dopée
par deux autres apports:
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Des outils. Ils peuvent être utilisés pour
supporter la bonne gouvernance. «Par
exemple, la technique du check-up
permet de découvrir en une demijournée où l'on en est en terme de
gouvernance.
Le
scanning
d'un
portefeuille d'entreprises est également
possible. Le scoring vise à identifier les
pistes d'améliorations concrètes.»
Des services. Ils vont aider à gérer la
gouvernance.
«Les
premiers
sont
développés au sein de l'entreprise. Ainsi,
la présidence du conseil est en première
ligne. Ensuite, on voit apparaître le
secrétaire du conseil d'administration et,
parfois
même,
un
assistant
de
gouvernance.»
Le chef d'orchestre et ses musiciens
La gouvernance d'entreprise peut être
définie comme «l'art d'harmoniser le rôle et
les responsabilités de chacun des quatre
acteurs clés de l'entreprise»:
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Les actionnaires: ont le devoir de
chercher à optimiser la rentabilité de
leur investissement, financier ou autre
(promotion de l'action de la famille à
travers 1 ' entreprise), ou encore
sociétal (quand l'Etat est l'actionnaire
principal).
Les administrateurs: ont en charge la
pérelliÙté de la personne morale: veiller
à ce qu'elle soit prise en compte et ait
un chemin de vie. «Pour une entreprise,
le chemin de vie est sa stratégie.»
Le manager: est chargé d'optimiser la
profitabilité de l'entreprise. «Doté de
ressources
stratégiques
(financières,
humaines, commerciales ... ) et d'une
stratégie arrêtée par son CA, il doit
générer le meilleur résultat.»
Les parties prenantes: partagent avec
l'entreprise la responsabilité d'optimiser
l'efficacité de leurs relations réciproques.
«Comment avoir la relation la plus
efficace
entre
l'entreprise
et
son
personnel? Et ses fournisseurs? Ses
clients? Ses concurrents? Les pouvoirs
IHK-Infos 11/12-2009
publics?
Les
associations
professionnelles? Sociétales? .. »
Pour jouer cette partition en harmonie, le
président du conseil d'administration joue le
rôle du chef d'orchestre et va diriger harmonieusement
tous
ces
artistes.
Marc Deschamps conclut par un conseil
pratique aux patrons de PME: «Dans votre
rôle de manager, en comité de direction,
laissez tomber la cravate. Dans celui
d'administrateur,
en
conseil
d'administration, portez une cravate f1ashy. Avant
de jouer le rôle de l'actionnaire, en
assemblée générale, passez donc par Mons,
quelques nœuds papillon y sont toujours en
réserve», plaisante cet Athois.
Ingénieur civil en mathématique appliquée,
licencié en droit et en économie et master
en
management
de
l'Université
de
Standford,
Marc
Deschamps
est
un
spécialiste de la finance isla" miste et un
expert en gouvernance, doublé d'un fin
pédagogue.
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