Le banc du Geyser
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Le banc du Geyser
Le banc du Geyser Texte : Serge Fankhauser Photos : Phill, Laurent et Serge Il y a huit mois, nous avions commencé à préparer ce voyage vers l’aventure, 19 novembre 2005 nous y voici, là où il y a des carangues ignobilis qui n’ont jamais vu de popper ! Croisière vers l’aventure Cela fait maintenant 4 jours que Philippe, Laurent et moimême scrutons une petite partie de l’immense lagon de Mayotte. Juste le temps de se préparer au grand jour, roder notre tresse et se chauffer les bras. Mayotte est un territoire d’outre mer français qui se situe dans le canal du Mozambique (entre Madagascar et le continent africain). Une petite île de 375km² avec une multitude de collines munies d’une végétation très dense. Tout autour de l’île, une double barrière de corail forme un des plus grands lagons du monde avec une superficie de 1500km². La barrière extérieure dont le platier atteint 1 La préparation est importante, mieux vaut de ne rien oublier. jusqu’à 1,5km de largeur est distante entre 3 et 15km de la côte. Dans peu de temps, nous allons nous aventurer vers le banc de la Zélée puis au banc du Geyser, là où l’on trouve des carangues qui n’ont jamais vu de popper. Le départ se fait du port de Mamouzou, la capitale de Mayotte. Il est maintenant 15h00 et nous voyons approcher un voilier d’une douzaine de mètres. C’est bien Edouard notre skipper qui a bien voulu partager cette excursion avec nous. Il y a un peu de matériel à charger. Les moteurs utilisés sont de type 2 temps, il faut donc prévoir quelques nourrices de réserve. Des six packs d’eau potable, un peu de nourriture, les glacières et bien entendu le punch et les bières. Tous les bras s’y mettent ainsi nous pouvons rapidement mettre les voiles en direction de la passe. Juste avant de quitter le lagon, Paco qui nous accompagne afin de nous montrer les meilleurs postes du Geyser, nous rejoint avec une barque Yamaha. Deux cordes assureront le remorquage de la barque et une autre son moteur. Nous faisons péter les cannettes de bières et ceux qui ne craignent pas le mal de mer entament le punch. Il y a un vent de face et en sortant de la passe la houle du large se fait ressentir. Pas question de remonter le vent en zigzaguant, il faut respecter le temps de croisière. Nous laissons tout de même la grande voile et le diesel nous pousse à travers les vagues. Il commence à faire nuit et c’est l’heure de se mettre à table. Le temps de fumer un bon cigare, la majorité de l’équipage est déjà couché, sauf un qui s’est fait un nouveau copain, un seau qu’il ne quittera pas de la nuit, la preuve que la fidélité existe. C’est à mon tour de me trouver un coin de repos. Pas facile avec ce moteur qui fait un boucan d’enfer en faisant vibrer les placards. De belles carpes rouges n’hésiteront pas à monter sur un popper. Les vagues s’écrasent sur l’avant du voilier faisant passer de l’eau par-dessus. Avec les hublots fermés, la chaleur commence à se faire ressentir. La meilleure place est celle du skipper qui dort dans le cockpit que je rejoins de temps en temps afin de prendre une bouffée d’air frais en admirant les étoiles filantes. Une matinée très calme A sept heures du matin, tout l’équipage est réveillé et nous longeons déjà le banc de la Zélée qui n’émerge pas et demande donc une mer plus 2 Petite île au sable blanc recouverte par marée haute. calme pour être exploré dans la mesure du possible. Nous prenons le petit déjeuner mais l’excitation est telle que nous mangerons pas grand chose. Il nous a fallu attendre deux longues heures de plus pour enfin voir la petite île de sable blanc sortie de nulle part qui émerge à 75 milles nautiques au large de Mayotte. Nous ancrons sous la protection de la barrière et commençons à préparer le matériel pendant que Paco prépare la barque. On prend le cap vers les beaux tombants avec l’aide d’un GPS car c’est un atoll qui demanderait plusieurs jours de pêche pour une exploration complète. La protection du récif contre les vagues se minimise et la houle se fait sentir. Après un tel voyage, ce ne sont pas ces vagues qui vont nous priver de notre matinée de pêche. Un beau mérou qui sera soigneusement remis à l’eau. Le moteur est arrêté et j’entends déjà siffler des poppers propulsés de tous les cotés. Assez rapidement en effectuant un lancer parallèle au tombant, la chance me sourit et je vais pouvoir relâcher une carangue ignobilis d’une quinzaine de kilos. Malgré de nombreuses tentatives, nous ne prendrons qu’une carange au popper en ce début de matinée. Coup de dents au Jig Vu le nombre de touches au leurre de surface, Paco nous propose de jigger un moment sur ces beaux tombants. Il faut dire que si on ne dérive pas le long du récif, on passe de 30m 3 à 160m en un rien de temps. C’est malheureusement le cas et nous faisons des dérives de 5 minutes. Du coté des touches, nous avons préalablement desserré un peu le frein de manière à éviter de se retrouver à plat-ventre lors d’un départ mais final-ement avec le nombre de touches que nous avons, ce n’est pas si dangereux pour nos bras. Je me retrouve avec un hameçon « assist » arra-ché, alors je monte un plus gros jig et j’ai enfin une touche correcte, boum … boum … ferrage de toutes mes forces et puis plus rien. En vérifiant le jig, je constate les empreintes d’un thon à dents de chien d’un poids non négligeable entre l’hameçon de la tête et de la queue du jig. Le succès manque et Paco nous incite à monter nos cannes de traîne au cas où des wahoos serait présents. En 1 heure et demie de traîne nous n’avions que 3 touches dont un petit thon à dents de chien que je préparerai lors de notre retour au bateau mère et que nous consommerons en sushi. Le jig est bien marqué par les dents du thon à dents de chien. Certes qu’avec le vent qui souffle toujours, la température est bien supportable mais la fatigue d’une nuit demi-blanche se fait ressentir. Une pause d’une heure ne se refuse pas devant tous ces poissons qui nous rigolent au nez ! Sauvés par le coup du soir Il est 15h00 et le plein d’essence est déjà fait. Nous bondissons dans la barque et filons de l’autre coté sur un tombant nettement plus doux. L’intensité du vent étant réduite, la pêche est nettement plus facile et agréable. Le courant à tendance à nous ramener vers le récif et c’est là en lançant dans les rouleaux que les choses sérieuses tant attendues commencent. C’est maintenance à chaque dérive que nous nous trouvons attelés à des carangues igniobilis et bleues de tailles correctes. Il faut lancer sur le plateau, c’est là où il y a entre 5 et 10m de fond qu’elles se tiennent. Paco nous fera une démonstration comment ramener une carangue en moins d’une minute en lui faisant comprendre qui est le maître de la situation. Le soleil va se coucher dans quelques minutes et il est bientôt temps de rentrer au bateau mère. Nous ne verrons pas de chasses ni de poissons fourrage cependant nous enregistrons une quinzaine de touches dont une dizaine de poissons relâchés. En nous dirigeant vers le voilier, nous contemplons un magnifique coucher du soleil par une mer presque lisse et les derniers centimètres du soleil couchant nous offrent le spectacle d’un mini flash du « rayon vert ». 4 Lieu ideal pour pêcher du premier au dernier rayon de soleil. Palangrotte de nuit Les carangues bleues sont abondantes, on peut les voir tourner autour de l’embarcation. Edouard nous attend avec impatience pour nous montrer ce qu’ils ont pêchés en attendant. Avec le reste du petit thon à dents de chien, ils ont capturé quelques petits vifs et l’un d’entre eux a permis de mettre au sec un beau barracuda d’une vingtaine de kilos. Les hameçons que nous pensions inutiles et surtout trop gros avaient portés leur fruit. Il parait qu’à peine trempé le vif dans l’eau, c’est parti comme une fusée. Il fait déjà nuit et j’ai envie de faire un plongeon de deux secondes qui ne m’a pas été accordé par le skipper en raison des requins qui pourraient attendre leur dîner. Alors qu’on nous sert le dîner, d’autres se précipitent pour pêcher des vifs afin de disposer un maximum de cannes munies de barbaques tous genres. C’est un véritable virus, moimême je n’ai pas résisté à tremper un petit vif qui n’a pas fait long feu. Pendant toute la soirée nous entendrons la musique des moulinets provoquée par les nombreux départs. Nous ne ramènerons rien au bateau à cause du manque de fil d’acier ou d’appâts arrachés mais à chaque départ, la montée d’adrénaline se fait ressentir. Il est temps de se mettre au lit, la matinée va être rude tenant compte de l’heure à laquelle il faudra se lever. Le réveil du matin Il y a du mouvement sur le pont, je jette un coup d’œil à l’arrière où sont couchés mes compagnons de voyage. Ils dorment profondément malgré Paco qui nous appelle au petit déjeuner. Voyant le manque d’effet de ses paroles, il donne la parole à la cloche qui est fixée dans la cabine. Lentement nous sortons de nos trous de marmottes avec un air d’avoir poppé toute la nuit. Juste le temps d’embarquer quelques litres d’eau, redescendre nos cannes et nous nous dépêchons dans la région où nous avions effectué le coup du soir. Nous ne sommes pas trop enchantés à cause du vent qui s’est de nouveau intensifié. Les carangues sont toujours présentes, on en touche une de temps en temps. À cause du faible tombant de ce côté, le jig ne donne aucun résultat. Sur le chemin de retour vers le tombant, nous croisons Dim et Edouard qui traînent avec le voilier le long du récif mais sans vraiment de succès. Bien qu’ils aient eu des touches, comme souvenir, il ne leur reste que les empreintes de dents sur les poissons nageurs. De retour à ras le récif, en insistant dans les rouleaux, une belle carpe rouge vient s’emparer du popper à Laurent avant qu’un L’attention doit être particulière afin d’écarter tout risque d’abîmer la colonne vertébrale du poisson Un groupe de globicephales 5 beau nuage plus que sombre qu’autre chose avance dans notre direction. Fuyant l’orage pour se mettre à l’abri dans le voilier, nous apercevons de grands ailerons à 1km du récif. Prudemment nous approchons d’un groupe de globicéphales qui plongent aussitôt que nous atteignons une distance suffisante pour prendre des clichés. Il est temps de s’abriter et à peine arrivés, il pleut des cordes. Certains courent dans la cabine, d’autres comme Phill et moi se savonnent et apprécient la douche. Il y a de quoi désaler les bateaux et le matériel. Carangues bleues et igniobilis sont mélangés et elles attaquent sans hésiter ! Une après-midi à se faire démonter les bras Nous sommes de retour sur le plateau et devant la frénésie de ces poissons nous sommes contraints à faire des petites pauses, le temps de filmer un peu. Ceux qui pêchent avec des poppers à actions lentes sont contraints de changer par manque de touches. Au niveau pêche c’est plus régulier, nous sommes attelés à trois sans qu’il y ait de chasse ou de poissons fourrage. Mon appareil photo chauffe et je n’économise pas la mémoire. Les carangues bleues tournent autour du bateau et quelques ingniobilis les copient. Ce serait le moment idéal pour pêcher avec des poppers qui ont mauvaise réputation afin de prouver le contraire. Un test vient d’ailleurs démontrer que même la nouvelle génération d’hameçons avec leur anne-aux brisés d’origine des Sur-face Bull de fait pas long avant de faire redresser. Alors que nous allions nous repositionner, le moteur démarré, je me hâte de ramener mon popper qu’un barracuda vient se jeter dessus à ras du bateau. Ce genre de comportement se répétera durant l’après-midi. A plusieurs reprises, il m’a fallu mettre la main sur le frein afin 6 de stopper les carangues les plus déchaînées. En cette journée nous comptabilisons environs 50 touches au popper et 25 poissons relâchés. Certes ce n’est pas exceptionnel pour ce genre de poste où l’on peut tenir plus de 100 poissons par jour mais l’avantage c’est qu’on est jamais déçu, même quant c’est calme au niveau de l’activité de poisson fourrage et de ses prédateurs. La fin de la journée s’annonce et nous remarquons que la grande voile est déjà hissée, c’est le signe qu’il faut rentrer et lever le camp. Le retour Il faut tout ranger et rincer un minimum avant la nuit. La barque est doublement réassurée et tout ce qui traîne sur le pont est rattaché avec des cordes. Les derniers poissons que nous remmenons sont nettoyés et rangés dans la glacière sous les bouteilles d’eau congelés. Le vent étant totalement affaibli, du moins pour ce genre de voilier, le touc touc touc se fera entendre. La séance n’est pas terminée, c’est l’heure du repas, un peu moins fatigant pour nos articulations. Dommage que la barque nous empêche de traîner des leurres derrière le voilier. Sur un si long trajet d’environs 18 heures, on pourrait avoir de belles surprises. A l’aube nous apercevons la côte de Mayotte par une mer plutôt calme et nous savourons ces derniers instants pendant le petit déjeuner. Une fois dans le lagon, on s’arrête un instant afin de débarquer Paco qui nous suivra avec la barque et fera la navette pour le déchargement. Sur les quais nous prendrons un dernier verre par une chaleur étouffante qui se fait ressentir par le manque d’air, ce qu’on était bien en mer … Préparation du voyage et équipement Voyage Il y a huit mois, on avait commencé à planifier ce voyage. La compagnie aérienne Air Austral nous a entièrement satisfaite. A Mayotte même, une voiture de location est indispensable, le tarif n’est pas excessif mais la direction assistée est absente. On logeait dans un petit hôtel à Combani « le Provençal » qui propose des chambres propres et confortables. Equipement Pour le lancer, chacun avait un ensemble Shimano Aspire 285 XXH / Stella 10000 FA. Les moulinets sont munis de 300m de tresse 65lbs Berkley Spiderwire. Une vingtaine de poppers, majoritairement des Yo-Zuri Surface bull mais d’autres modèles comme l’Orion Magic, Big mouth de popping master et le Yo-Zuri Surface cruiser ont séduit de beaux poissons. Le stick-bait d’Orion faisait partie des leurres atout. Personnellement je pêche principalement avec le Surface Bull qui me permet d’économiser un peu mes forces. C’est un popper qui se lance facilement à de grandes distances. Comme il fait moins de gerbes 7 Les doublés ou triplés ne sont pas rares dans ces lieux d’eau, il se ramène avec des efforts moindres. Il est cependant moins efficace par moments où il faut des actions lentes. Tous nos poppers sont munis de tripes Owner ST66 allant de 3/0 à 5/0 attachés par des anneaux brisés de 200lbs à 250lbs. Les bas de lignes sont en fluorocarbone 150lbs et acier 125lbs d’une longueur d’environ 75cm, on n’avait pas re-marqué de différences concernant le nombres d’attaques. Les jigs Williamson Benthos et Abyss utilisés pèsent entre 200g et 400g, ils sont armés jusqu’au dents ! Quelques poulpes et poissons nageurs Rapala, Yo-Zuri, Manns font partie de l’inventaire. Les cannes de traîne Powerstick 50lbs avec leur moulinets Penn Senator 4/0 sont munis de nylon 45lbs. Des cordelettes avec mousquetons pour assurer les cannes et un baudrier confortable sont indispensables. Pour sauvegarder nos doigts, nous avions une paire de gants et un rou- leau de sparadrap. Comme matériel de rechange, on n’avait qu’une canne et un moulinet à disposition. Heureusement qu’il n’y avait qu’un anneau de canne abîmé. On peut facilement éviter la casse de canne en disant « je lance » trois secondes avant d’effectuer son lancer. Les freins étaient réglés à 8kg, par mauvais temps cela permet d’éviter de passer au jus et on épargnera la casse du système d’anti-retour du moulinet. 8